Les guerres de Vendée – La bataille du Mans
LES GUERRES DE VENDÉE
(1793-1796)
LA BATAILLE DU MANS
(Les 12 et 13 décembre 1793)
SOMMAIRE
– Lire : Des origines à l’étincelle
– Lire : La Vendée triomphante
– Lire : L’apogée
-Lire : La chute
-Lire : Le sursaut
– Lire : L’anéantissement
CONTEXTE
La bataille du Mans, et les atrocités qui vont en découler, peut être considérée comme l’un des événements les plus tragiques de la Révolution. Les deux journées d’affrontements de la bataille mettent un terme à la « virée de Galerne ». Elles marquent aussi une étape incontestable dans la montée de la barbarie, la cruauté, et les moyens déployés par les forces républicaines pour anéantir les Vendéens. Ils seront d’une violence implacable et marqués d’une tâche de sang indélébile gravée à jamais dans les mémoires. Cet épisode est le prélude annonciateur, dix jours plus tard, du désastre de Savenay et de l’extermination de l’Armée catholique et royale.
ÉVÈNEMENTS ANTÉRIEURS
NOVEMBRE
GRANVILLE, UN POINT DE NON RETOUR !
L’épisode de la « virée de Galerne »voit les insurgés vendéens essuyer un grave échec dans leur tentative pour s’emparer de Granville. Ce port en eaux profondes devait accueillir la flotte britannique avec ses soi-disant renforts. Mais l’escadre anglaise n’arrive pas. Déstabilisée et à cours de vivres, l’armée Catholique et royale se voit contrainte de rebrousser chemin. Ses forces, composées en majorité de paysans, désirent plus que tout retourner dans leurs foyers.
Les 13 et 14 : siège de Granville.
Échec des forces royalistes, les « Blancs », commandées par Henri de La Rochejaquelein et Jean-Nicolas Stofflet, face aux troupes républicaines, les « Bleus », placées sous les ordres d’André Pacifique Peyre (1743-1796) et de François Vachot (1767-1796).
DÉCEMBRE
ANGERS, UN MINCE ESPOIR …
Sur la route des Vendéens se dresse la ville d’Angers. La décision est prise : il leur faut se rendre maîtres de la cité angevine… Cette dernière, bien organisée et fortifiée par les forces républicaines, résiste vaillamment. Les maints assauts des troupes royalistes demeurent vains ; les longues marches, les mauvaises conditions climatiques et les épidémies ont gravement affaibli les débris de cette armée Catholique et royale. Il faut renoncer à traverser la Loire, et se résigner à prendre la direction du Mans.
Le 3 : échec des « Blancs » devant Angers.
Défaite des forces royalistes commandées par les chefs vendéens Henri de La Rochejaquelein et Jean-Nicolas Stofflet, face à l’armée républicaine placée sous les ordres des généraux Louis Thévenet, dit Danican (1764-1848), Jean-Pierre Boucret (1764-1820), Michel de Beaupuy (1755-1796), et Boüin de Marigny (né en 1766, mort lors du siège de la ville, frappé par un boulet de canon).
LE MANS, L’ULTIME REFUGE…
Après avoir subi un échec lors de sa tentative pour traverser la Loire, l’armée vendéenne est, malgré tout, victorieuse le 8 lors de la bataille de la Flèche. Désorganisée, déroutée et avec sur ses arrières la cavalerie républicaine qui la talonne, elle se dirige vers Le Mans. Elle traîne avec elle des milliers de femmes, d’enfants et de blessés qui ralentissent dangereusement sa retraite. L’armée Catholique et royale, forte au départ de la « virée de Galerne » de 80 000 hommes, n’en dispose plus que de 40 000, dont 20 000 en état de combattre. Ils souffrent du froid, de la famine, et ses rangs sont décimés par la dysenterie, le typhus ou la fièvre putride. Désemparés, désorientés, ils essaient avant tout de se procurer de quoi se nourrir.
Le 10, les « Blancs », démoralisés, et ayant perdu une grande partie de leur équipement, parviennent à entrer victorieux dans Le Mans. La ville est investie, et les Vendéens peuvent se procurer des vivres et des vêtements chauds. Cependant, la maladie continue à faire des ravages, et les soldats, trop atteints, n’ont pas les forces nécessaires pour soutenir une attaque de l’ennemi. Or, l’avant-garde de François-Joseph Westermann est toute proche et se prépare à donner l’assaut.
LA BATAILLE
FORCES EN PRÉSENCE :
Pour les « Blancs » : de 15 000 à 18 000 hommes, 30 canons, et environ 20 000 non combattants (blessés, femmes et enfants).
COMMANDANTS : Henri de La Rochejaquelein, Jean-Nicolas Stofflet, Antoine-Philippe de la Trémoille, Henri Forestier (1775-1806), Bernard de Marigny, François Jean Hervé Lyrot (1732-1793), et Charles de Beaumont d’Autichamp (1770-1859).
Pour les « Bleus » : 20 000 hommes.
COMMANDANTS : François Séverin Marceau-Desgraviers, Jean-Baptiste Kléber, François-Joseph Westermann, François Muller (1764-1808), Jacques Louis François de Tilly (1749-1822), Henri-Pierre Delaage (1766-1840) et François Carpantier (1751-1813).
DÉROULEMENT
Le 12 décembre, dès le lever du soleil, les « Bleus » de l’avant-garde de François-Joseph Westermann avancent sur Le Mans. Placés sous les ordres des chefs vendéens Henri de La Rochejaquelein et Antoine-Philippe de la Trémoille, 3000 Chouans sont rapidement regroupés pour contenir l’assaut des Républicains et leur tendre un guet-apens dans un bois, non loin de la ville. La surprise est totale et la cavalerie de Westermann doit se retirer. Au même moment, les hommes de François Muller cèdent à l’affolement dès les premières cartouches tirées. Les forces républicaines sont malmenées et s’apprêtent à sonner la retraite. C’est alors que Jacques Delaistre de Tilly accourt sur le lieu de l’affrontement avec ses renforts. A leur tour, les « Blancs » cèdent à la panique, et, en pleine débâcle, ils tentent de trouver refuge à l’intérieur de la ville du Mans.
François-Séverin Marceau-Desgraviers, général en chef des soldats républicains, se présente à son tour sur le champ de bataille. Il précède Jean-Baptiste Kléber et les soldats de l’armée de Mayence qui doivent prendre part au combat ultérieurement. Marceau–Desgraviers, qui a fait regrouper ses troupes à Cérans-Foullecourte, veut attendre que son armée soit au complet avant de lancer l’attaque. Mais Westermann brûle d’impatience de porter l’estocade finale aux Vendéens et, sans plus attendre, se rue à l’assaut. Marceau se voit contraint de le suivre…
Sous la violence de l’attaque, les « Bleus » bousculent et chavirent toutes les barricades et lignes de défense placées sur leur chemin, et dans la soirée, parviennent à pénétrer dans la cité. C’est le chaos total ; les Vendéens, complètement désorientés, ne peuvent contenir la furia républicaine. Durant toute la nuit, on assistera à des combats de rue impitoyables, sanglants et d’une sauvagerie inouïe.
La Rochejaquelein, conscient que la partie est perdue et sans issue, ne pense qu’à protéger la retraite des survivants de son armée. Il va s’efforcer de rassembler quelques fuyards sur la route de Laval, la seule qui n’a pas été investie par les « Bleus ». Là, les Vendéens parviennent à installer 14 canons à la sortie de la ville ; ils peuvent ainsi protéger la fuite des soldats en déroute et tenir les « Bleus » à distance.
L’armée vendéenne charrie avec elle des milliers de blessés, de femmes, d’enfants, de prêtres et de vieillards. Tous ces malheureux seront méthodiquement massacrés par les troupes républicaines. Ces dernières, empreintes de barbarie et de soif de tuer, vont, avec le soutien de la cavalerie, harceler les restes de l’armée Catholique et royale en pleine débâcle. Nonobstant, des milliers de Vendéens, sans armes pour la plupart, sont immobilisés dans la ville, et barricadés dans des abris de fortune. Des groupuscules disséminés de soldats « Blancs » regroupés en petits nombres résistent toujours. Leur courage et leur bravoure seront vains ; ils seront tous anéantis au lever du soleil, ensevelis sous les coups portés par l’artillerie du général François Carpantier. Sans faire de détail, les canonniers ouvrent le feu et pilonnent les bâtiments abritant les francs-tireurs qui s’y cachent. Des familles entières sont ainsi écrasées sous les décombres et réduites à néant. Le combat vire ensuite au carnage. N’écoutant que la fureur destructrice qui les emporte, les « Bleus » de la République vont se livrer à un véritable massacre. Les blessés, les femmes et les enfants, rescapés de la furia, qui s’étaient abrités dans les maisons, en sont expulsés et achevés dans les rues. Le général Marceau-Desgraviers parvient à épargner quelques malheureux prisonniers, mais ne peut empêcher la boucherie. Jean-Baptiste Kléber essaiera lui aussi de s’opposer à l’hécatombe, mais en vain.
PERTES HUMAINES
Dès le lendemain de la bataille, le 14 décembre, une commission est mise sur pied pour juger et condamner à mort les vendéens rescapés du carnage. Ces deux terribles journées de massacres extrêmes se solderont par de lourdes pertes humaines.
Pour les « Blancs »
D’après différents témoignages, on estime les pertes entre 15 000 et 20 000 morts (combattants et civils), 5000 dans la ville et 10 000 sur la route de Laval. A cela il faut rajouter entre 5000 et 10 000 prisonniers qui, selon toute probabilité, seront exécutés par les vainqueurs.
On dénombre de 30 à 100 morts et de 150 à 400 blessés.
UNE MÉMOIRE VIVACE
En 2009-2010, c’est en creusant les fondations du futur espace culturel des Jacobins que neuf charniers issus de la bataille du Mans furent mis au jour. La macabre découverte a fait ressurgir un douloureux passé qui, sans pudeur, nous a dévoilé des fosses communes où reposaient les corps de 159 personnes. Les fouilles entreprises ont fait apparaître les squelettes d’hommes, de femmes et de quelques enfants enterrés précipitamment. Cette sinistre exhumation de l’Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap), a été minutieusement contrôlée : « Certaines dépouilles possédaient encore des boutons de chemise et de culotte, boucles de bottes ou de guêtres, canifs, chapelets… recouverts d’une couche de chaux vive », expliquait alors le responsable de la fouille. De telles indications archéologiques vont permettre d’apporter des précisions, voire de modifier certains témoignages d’époque. Des analyses d’ADN ont été réalisées sur les dents et les ossements. Les résultats ont permis de découvrir qu’il s’agissait en majorité d’hommes.
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