« Malgré moi »

« MALGRE MOI » 

Une nouvelle de mon livre, « des Poppies et des larmes »

 

BATAILLE DES FRONTIÈRES

Bataille du Grand Couronné

(Du 4 au 13 Septembre 1914)

La bataille du Grand Couronné

 

La principale offensive française, la bataille de Lorraine, débute le 14 août 1914. La 1ère armée du général Dubail avance sur Sarrebourg et la 2ème, celle du général de Castelnau, sur Morhange. En face, les 6ème et 7ème armées sont réunies sous le commandement du Kronprinz Rupprecht de Bavière. Elles ont pour ordre de stopper les Français au centre du dispositif d’attaque, afin que l’aile droite marchante allemande puisse appliquer le Plan Schliefen. 

Rupprecht de Bavière

De leur côté, conformément au Plan 17, les Français se ruent sur la frontière allemande. Leur objectif, reprendre l’Alsace et la Lorraine, deux régions perdues lors de la guerre franco-prussienne de 1870.

Après l’échec de la bataille de Lorraine le 20 août 1914, Castelnau se replie et positionne sa 2ème armée sur le Grand Couronné, à l’est de Nancy. Il vient de vaincre la 6ème armée du Kronprinz à la trouée de Charmes, du 24 au 26 août 1914.

Cet échec inattendu des troupes germaniques ébranle le moral de la 6ème armée. S’ensuivent alors quelques jours de répit, et le 4 septembre, les Allemands reprennent l’offensive. C’est le début de la bataille du grand Couronné.

Franz Becker. Patronyme français : François Boulanger. 53 RI de ligne, 2ème armée du Général de Castelnau.

Bastian Kleinshans. 3ème Corps d’armée, 6ème et 7ème armées du Kronprinz Rupprecht de Bavière.

10 Septembre, quelque part près de Pont-à-Mousson.

Nous venions de reprendre cette localité aux boches après de durs combats. Qu’en était-il sur les autres parties du front ? Il semblait que de toutes parts nos armées fuyaient. Ici, nous avions repoussé les attaques de l’ennemi sans relâche depuis le 24 août, et lui avions infligé de terribles pertes avec nos canons de 75. Assauts après assauts, le terrain conquis était minime, et les corps de milliers de soldats des deux camps jonchaient la plaine. La couleur de nos pantalons rouges prédominait dans les campagnes environnantes ; ce fut un carnage à grande échelle, et nos généraux dépensèrent sans compter !

bataille des frontières 1914

Je m’appelle François Boulanger, j’ai 28 ans, et je suis originaire de Colmar, dans la plaine d’Alsace. Mes ascendances alsaciennes seront un lourd fardeau à porter dans mes futurs rapports avec les autres soldats. Je n’ai jamais été considéré comme un Français à part entière. Bien au contraire, j’ai souvent été assimilé à un boche. J’ai régulièrement pris cette vindicte populaire en plein visage comme une insulte. Pourtant, ces contrées pour lesquelles je me bats aujourd’hui et risque ma peau à chaque seconde, ont été germanisées depuis quarante-trois ans. Bien des années sont passées, et cette rancœur perdure toujours.

Après la défaite en 1871, l’Alsace fut rattachée à l’Allemagne victorieuse. Mon grand-père, pris dans la tourmente, dut se décider rapidement. N’acceptant pas l’idée de ne plus être Français, il opta pour quitter la terre qui l’avait vu naître. Ce ne fut pas facile d’abandonner toute sa vie derrière lui, sa maison, sa famille, ses amis…

Bon nombre de ces derniers acceptèrent de changer de nationalité et de devenir Allemands. Devait-on les blâmer pour ce choix cornélien ? Ils décidèrent de demeurer sur place, sans pour autant faire allégeance aux nouvelles autorités. Puis la plaine fut germanisée. Bismarck envoya une flopée de fonctionnaires pour changer la donne ; ce qui ne fut pas facile. Des dissensions éclatèrent de part et d’autre ; les deux cultures étant trop différentes, les Alsaciens-Lorrains ne furent jamais considérés comme Allemands.

Je vivais la même chose de mon côté. Je me retrouvais, malgré moi, dans une situation inextricable. Eu égard à mes origines, cette armée ne me reconnaissait pas comme un vrai patriote ; je n’attirais sur moi que haine et suspicion.

En février 1871, les troupes prussiennes assiègent Paris. Les populations exsangues demandent la fin du supplice. Adolphe Thiers entame à Versailles des pourparlers de paix, et le 10 mai 1871, signe le traité de paix de Francfort. Ce qui entraîne l’annexion immédiate à l’Allemagne de l’Alsace et d’une partie de la Moselle, le Territoire de Belfort n’étant pas concerné. Bismarck permet aux Alsaciens-Lorrains de conserver la nationalité française s’ils évacuent la région avant le 1er octobre 1872 ; ils seront appelés « Les Optants ». Leur principale inquiétude sera de trouver où se fixer en France. Un grand nombre trouvera refuge chez des parents et amis. D’autres, dont une grosse majorité de familles juives, immigreront vers les États-Unis.

Traité de Francfort 1871

Les Alsaciens-Lorrains n’ayant pas opté dans les délais fixés seront « déchus » de la nationalité française, et prendront automatiquement, conformément aux accords, « la nationalité allemande ».

Dans la France entière, dès 1871, un grand nombre de rues, d’avenues, de boulevards, de places et de cours, sont baptisés du nom « d’Alsace-Lorraine », en mémoire des régions perdues. A Paris, place de la Concorde, la statue représentant la ville de Strasbourg est fleurie, et recouverte d’un voile noir jusqu’à l’armistice de 1918.

 

Képi du fantassin français de 1914

Équipement du fantassin français de 1914.    

Uniforme du fantassin français en 1914

– Un képi, modèle 1884, plus une cervelière.    

Képi et cervelière du fantassin français de 1914

– Une capote, modèle 1877, en drap de laine « gris de fer bleuté », le n° du régiment inscrit sur le col.    

Soldat français 1914

– Une cravate, rectangle de coton « bleu marin. »

– Un pantalon, dit garance, modèle 1867, un caleçon, et une chemise.

– Une paire de jambières, adoptée en 1912.

– Une paire de brodequins cloutés, modèle 1912.

– Un fusil, dit Lebel, modèle 1886, modifié 1893.

Fusil, Lebel, modèle 1886

– Une épée baïonnette, modèle 1886, dit Rosalie.

– Une cartouchière, modèle 1888.

– Un havresac en toile cirée, surnommé Azor ou As de carreau par le poilu.

– Une musette en toile de lin.

– Un bidon de 1 litre recouvert de drap.

– Un quart en fer de 25 cl.

 Je me battais sans relâche depuis un mois maintenant. Les boches, mieux équipés, bien renseignés sur tous nos mouvements, se trouvaient partout là où on ne les attendait pas. Ils étaient, semble-il, plus motivés que nous, et enthousiasmés par la victoire qui leur tendait les bras. Il n’y avait donc rien d’étonnant à ce que l’échec prenne pour nous une saveur désagréable, avec un fort goût de défaite. Nos généraux, d’une autre époque, appliquaient des tactiques du siècle passé, et pratiquaient « l’offensive à outrance ». Pourquoi donc nous faire charger les positions ennemies en rang serrés, baïonnettes aux canons ? Les mitrailleurs allemands, alléchés par les couleurs voyantes de nos uniformes, ne se donnaient même plus la peine de viser ; ils tiraient dans le tas. Et ce tas, c’était nous ! Nous étions bel et bien devenus des cibles vivantes. Nos rangs fondaient comme neige au soleil. Les fantassins tombèrent par centaines, méthodiquement bien alignés, allongés dans la prairie, ressemblant à des cortèges de chenilles processionnaires. Nous essuyâmes défaite sur défaite, avec des pertes énormes, et notre moral chuta au plus bas. Nous avions besoin de nous ressaisir, et vite.

Illustration de la bataille du Grand Couronné qui s’est déroulé en 1914 en Lorraine

Nous n’avions pas le temps de ramasser nos morts, le service de santé se préoccupant, en priorité, de venir en aide aux blessés. Les autres, les tués, étaient abandonnés, laissés à terre sans sépultures. Je priais pour ces malheureux, en espérant qu’ils soient bien morts, car les Allemands ne faisaient pas de prisonniers.

Alors, tant pis ! dans ce massacre à grande échelle, cette sauvagerie n’avait d’égales que la rage et la détermination que nous mettions à nous défendre. Tuons-les tous, puisqu’ils ne font pas de détail ! « Dieu reconnaîtra les siens ! »

Les régiments sont harassés par les marches forcées, et abattus par la défaite. Le massacre d’un grand nombre d’officiers tombés au combat laisse les soldats désorganisés et sans commandement. Castelnau envisage un repli de la 2èmearmée en arrière de Nancy et de Lunéville.

L’ordre de reculer, émis par nos généraux en chambre, était mal digéré par la troupe ; il révoltait les soldats et suscitait bien des questions.

Les soldats de plomb virevoltaient sur leurs cartes d’Etat-Major comme des pions sur un jeu d’échec. Ils les déplaçaient à leur guise. Du fond de leurs petits salons calfeutrés, ils se complaisaient ainsi à faire leur propre guerre. Mais les figurines de plomb, c’était nous, des hommes, faits de chair et de sang. Nous étions bien vivants, du moins pour l’instant, et nous défendions notre peau à chaque pouce de terrain. Nous retraitions, certes, mais en infligeant le maximum de pertes à l’ennemi. Les hordes teutonnes déferlaient inexorablement sous nos yeux. La vague des assaillants faillit nous submerger à plusieurs reprises. A chaque escarmouche, les corps tombaient dans un concert diabolique. Comment avait-on pu en arriver là ? Pourquoi ? Pour qui ?

Quand je pense que Jean Jaurès avait assuré qu’aucun ouvrier allemand ne tirerait sur un travailleur français ! Il avait même rajouté qu’il n’hésiterait pas à proclamer la grève générale. L’Internationale ouvrière devait, selon lui, arrêter le processus infernal de la guerre. Bien des choses avaient évolué depuis. Jaurès avait été assassiné, et la seule voix qui pouvait aller à l’encontre de ce bellicisme grandissant s’était tue à tout jamais. La ferveur patriotique avait pris le dessus, les chants guerriers furent repris en cœur ; les nationalistes avaient vaincu.

Lire : Ah ! le « Villain » monsieur !

11 Septembre 1914.

Rien ne laissait prévoir un tel cataclysme ni une telle sauvagerie ; de part et d’autre on comptait ses pertes. Comme sous l’ère napoléonienne, les régiments de cavalerie chargeaient sabre au clair et en gants blancs. Des deux côtés l’on était devenu fou, et la mitraille hachait les assaillants sans faire de détail. Ce n’était plus la guerre, mais une boucherie insupportable.

Attaques et contre-attaques se succédaient dans un rythme effréné, et les morts et les blessés s’empilaient comme des paquets de linge sale sanguinolents.

N’en pouvant plus de cet enfer, j’esquissai un léger mouvement latéral afin de me mettre à l’abri dans les ruines d’une petite maison. Le premier jour, l’offensive générale allemande avait rayé de la carte un grand nombre de villages. Impossible de me repérer, ni de donner un nom à ce hameau ; plus rien n’était debout. De nombreux soldats des deux camps gisaient au milieu des décombres en implorant de l’aide.

Soudain, je ressentis un vif claquement sec et pénétrant dans le creux de mon épaule. Je fus presque projeté en arrière sous l’impact ; c’est dire la violence du coup. Je venais de recevoir un éclat d’obus de 88. Je dus, me laisser choir sur le sol au milieu des autres corps. Comme ultime protection, j’appuyai la main fortement sur la plaie, pensant pouvoir ainsi arrêter le filet de sang qui se répandait sur ma jaquette. Je restai là, sans faire un geste, pétrifié d’horreur. La bataille se poursuivait inexorablement, sans se soucier des pertes qu’elle engendrait. Et le canon tonnait, tonnait sans fin. Les explosions arrachaient les arbres et les feuillus qui osaient résister à cette pluie de fer et de feu. Bientôt la plaine fut recouverte de cadavres. Les chevaux éventrés se traînaient lamentablement, leurs viscères éparpillés sur l’herbe rougie ; un véritable carnage. Il est difficile dans un tel moment d’expliquer une pareille violence, et ce n’est pas avec des mots que je peux rendre palpable la vision de ce tableau apocalyptique.

L’offensive française en Lorraine du 20 août 1914 est un échec. Après les défaites successives des batailles de Morhange et de Sarrebourg, les 1ère et 2ème armées doivent se replier. Les Bavarois passent à l’attaque ; leur but, s’emparer de Nancy. L’empereur Guillaume II, qui s’est déplacé en personne, y attache une importance particulière. La prise de cette ville constitue, à ses yeux, une victoire de prestige. Une première tentative des Allemands de percer la trouée de Charmes échoue. Ce qui les conduit à modifier leur tactique : au lieu de déborder Nancy par le sud, ils vont l’attaquer de front et essayer d’enfoncer les défenses du Grand Couronné.

20 août 1914 les batailles de Morhange et de Sarrebourg

A l’époque, la ville de Nancy est située très près de la frontière allemande. Afin d’éviter des complications diplomatiques, celle-ci n’a jamais été fortifiée. Ce ne sera qu’en mars 1914, que des travaux d’aménagements défensifs seront commencés.

Puis la fusillade baissa en intensité. Les rayons de soleil, si timides jusqu’à présent, commencèrent à pâlir. La fumée et la poudre avaient terni la luminosité du jour, et le soir qui tombait recouvrait d’un linceul blafard cette étrange scène.

Soldat allemand 1914

Illustration de la bataille du Grand Couronné qui s’est déroulé en 1914 en Lorraine

 Je restai là, décontenancé, ne sachant trop quoi faire. J’avais bien essayé de me traînailler, mais l’effort qu’il me fallait fournir était trop important, alors j’avais dû renoncer. J’espérais qu’un infirmier ou un brancardier vienne à mon secours, mais c’était en pure perte ; les deux armées s’étaient repliées pour panser leurs plaies.  Ce décor de souffrances appartenait désormais aux morts et aux blessés !

J’étais plongé dans le noir ; la blessure ne me faisait pas trop souffrir pour le moment. J’osai me redresser à découvert pour me repérer. J’avançai péniblement, à pas feutrés, au milieu des effondrements et des débris de toutes sortes. Un grand nombre de fenêtres, dont les panneaux étaient encore intacts, jonchaient le sol et arboraient des drôles de signes. C’étaient les formes originales d’un jeu de cartes : pique, cœur, trèfle et carreau. Face à moi, le cimetière bouleversé

laissait apparaître ses contours. Attenant, juste derrière, se dressait ce qui me sembla être l’église de ce village fantôme. Le clocher avait reçu un obus et gisait couché sur le sol. L’horloge était pulvérisée, ne laissant deviner, en son centre, qu’un semblant de cadrant. Par moments, il me paraissait entendre du bruit ; quelques craquements insolites venaient troubler cette quiétude devenue étrangement silencieuse. Je découvris enfin, sur un squelette de pancarte, le nom de ce hameau ; il s’appelait : « Limey-Remenauville ». Il se situait en plein sur la zone des combats.

Le village de Limey-Remenauville est occupé par l’armée allemande dès septembre 1914. La ligne de front le traversera pendant toute la durée du conflit, et il sera entièrement détruit. Ce n’est qu’en septembre 1918 que les troupes alliées le libéreront, lors de l’offensive franco-américaine contre le saillant de Saint-Mihiel.

Nul doute qu’à cet instant je me trouvais en secteur allemand. Tous les bruits suspects pouvaient amener le danger, et j’avais perdu mon fusil lors de l’attaque ; j’étais désarmé, désemparé, et j’avais la frousse. Mes heures, mes secondes étaient comptées. Seule ma bonne étoile pouvait encore me sauver d’une mort certaine. Mais était-ce bien le moment de croire à la providence, moi qui n’avais jamais eu de chance dans cette misérable vie ? Alors je me dis que s’il me fallait prier, je me devais de le faire dans l’église ; à l’abri des regards. Péniblement, je me traînai à l’intérieur des ruines de la petite chapelle, dont seuls deux pans des murs de la nef étaient encore debout. Le toit aux voûtes gothiques et le transept s’étaient effondrés sur la chaire du prédicateur avec toute sa charpente. La cloche était introuvable ; probablement emportée par les envahisseurs. Par la force des choses, tout ce décor était devenu muet. Je m’installai au creux d’une petite alcôve, dans l’abside, au milieu des éclats de vitraux colorés qui formaient une mosaïque sur les dalles polies. Il ne me restait plus qu’à attendre. Je m’étais assoupi depuis quelques minutes, quand s’éleva une plainte, une sorte de geignement.

« Müatter, müatter ! » Une voix faible se fit entendre. « Müatter, müatter ! ».

Dans l’obscurité, il m’était impossible de distinguer quoique ce soit. Il me sembla voir se dessiner dans le noir une forme humaine, allongée sur le sol. Sa tête reposait sur un dossier en bois, probablement un des restes calcinés du mobilier qui devait garnir ce lieu de culte il y a quelques jours encore.

« Müatter, müatter ! », répétait sans cesse cette voix.

Je compris tout de suite que l’individu qui se tenait là, à côté de moi, avait besoin d’aide. Cet homme n’avait pas le même uniforme que le mien ! c’était un ennemi ! J’avais perdu beaucoup de sang et je commençais à m’affaiblir sérieusement. Comment savoir ? Comment compter le temps qu’il me restait à vivre ? J’avais moi-même besoin de soins urgents, et je n’entrevoyais aucune issue. Après de terribles efforts, j’arrivai aux côtés du malheureux. Il avait reçu de multiples éclats d’obus dans les mollets, et ses chairs étaient en lambeaux. Mais ses jambes demeuraient intactes. Il se plaignait continuellement, et je ne pouvais pas faire grand-chose pour lui. Je fouillai à l’intérieur de sa musette pour y dégoter des pansements ; les miens étaient déjà sur ma plaie.

« Wàsser, wàsser… ». Je lui donnai à boire, et il me répondit en Alsacien : « Märsi » Et bien ça alors ! je ne me trompais pas, il parlait l’alsacien ! aucun doute, c’était bien ma langue maternelle, nous avions les mêmes origines !

–   Ich red Elsassisch » (je parle alsacien), lui dis-je.

Commença alors un dialogue insensé avec mon ennemi. Mais était-ce vraiment un boche ? Il n’avait pas les mêmes couleurs que moi, certes. Mais nous parlions tous les deux le même langage.

–  Je m’appelle Bastian et je suis de Wintzenheim, près de Mulhouse, et toi ? me dit-il.

– Moi, je m’appelle François et je suis de Munster, à côté de Colmar ; enfin mes grands-parents étaient natifs du coin. Puis, en 1872, ils optèrent pour le rattachement à la France. Et depuis, ma famille vit près de Paris.

– Ah ! Paris ! est-ce aussi beau que ce qu’on le dit ? C’est une ville qui m’a toujours fait rêver.

– C’est pour cette raison que toi et ton armée vous voulez vous en emparer ? Mais c’est mal connaître notre détermination, nous ne laisserons jamais les troupes germaniques entrer dans notre capitale !

– Je n’ai rien désiré de tout cela. J’ai été emporté dans un tourbillon enivrant d’allégresse, comme des milliers d’autres conscrits. Je n’étais pas vraiment d’accord. La propagande proclamait partout que notre pays était envahi, encerclé, et qu’on nous forç