L’inexorable ascension des maires du palais
LES MÉROVINGIENS
L’INEXORABLE ASCENSION
DES
MAIRES DU PALAIS
Cette famille descend des peuples Francs saliens qui se sont installés dès le Vème siècle dans les régions de Cambrai et de Tournai, en Belgique. L’Histoire de la dynastie est marquée par l’apparition d’une forte prédominance de la culture chrétienne au sein de l’aristocratie. Elle se caractérise aussi par l’implantation croissante de l’Église, et par une économie qui se développe suite à l’effondrement de l’Empire romain d’Occident. Le nom « Mérovingien » provient du roi Mérovée, ancêtre semi-mythique de Clovis (466-511). Les Mérovingiens, sous l’Ancien Régime et au XIXème siècle, sont désignés par certains légistes et historiens français comme étant la « première race » des rois francs.
DAGOBERT Ier, LE DERNIER DES GRANDS MÉROVINGIENS
Il y avait autant de maires du palais qu’il y avait de royaumes, avec un maire du palais pour le royaume de Neustrie, un autre pour le royaume d’Austrasie et un troisième pour le royaume de Bourgogne.
Tout au long de son règne, Dagobert Ier n’aura de cesse de résister à la puissance croissante de l’aristocratie. Il sera le dernier des Mérovingiens à exercer seul le pouvoir, et à bénéficier de cette disposition. Il parviendra malgré tout à maintenir partiellement l’avidité de ses adversaires.
Au cours de ses déplacements dans son royaume, surtout en Bourgogne et en Austrasie, le monarque attestera son autorité en exerçant, avec le soutien de ses conseillers (le trésorier Didier, les futurs Saint Ouen et Saint Éloi), une véritable justice.
Dagobert Ier s’évertuera aussi à transmettre à sa cour un apparat de renom, une notoriété qui sera reconnue au-delà des frontières.
Nonobstant, le roi sera en lutte permanente avec l’aristocratie. En 634, il se verra contraint de reconnaître l’indépendance de l’Austrasie, et d’y placer comme roi son fils aîné, Sigebert III.
Plus tard, ce sera la Neustrie et la Bourgogne qui obtiendront leur indépendance sous l’autorité de Clovis II, son second fils.
Le partage du royaume de Dagobert Ier ainsi acté, préfigure la division des Francs occidentaux et des Francs orientaux.
Les maires du palais représenteront une véritable lignée. A la mort de Dagobert Ier, en 639, ils seront de plus en plus présents à la tête du pouvoir.
Leur émergence se heurtera à des résistances, mais la décadente dynastie mérovingienne ne pourra empêcher l’ascension inexorable de ces nouveaux venus. Petit à petit, après de nombreuses luttes et rivalités, la puissante famille des Pippinides s’emparera du pouvoir.
Le terme de « Pippinides » désigne au sens strict les membres de la famille de Pépin de Landen en ligne agnatique, c’est-à-dire issus de ce dernier par les hommes. Cognatique : à l’inverse, dit d’un mode de descendance ou filiation qui se transmet aussi bien par les hommes que par les femmes.
Dagobert Ier cède à ses héritiers une terre minée par « les germes de la dissolution ». Dans un avenir proche, les nouveaux maîtres ne seront non plus les rois, mais les « maires du Palais », à l’exemple de Charles Martel.
Dagobert sera le dernier grand roi mérovingien. Par la suite, tous ses successeurs seront nommés « rois fainéants ».
Lire :
– Le « Bon roi Dagobert ».
– Dagobert, le dernier des grands mérovingiens.
– Dagobert le protecteur de Saint-Denis.
– Dagobert fait de Paris sa capitale.
– L’armée franque sous le règne de Dagobert.
LES ROIS FAINÉANTS
Cette appellation a été façonnée par Eginhard, biographe de Charlemagne, dans sa « Vita Karoli » (Vie de Charlemagne), écrite au IXème siècle. Eginhard disait de ces Mérovingiens qu’ils « n’avaient plus de rois que le nom », n’ayant accompli aucune réforme d’importance au cours de leurs règnes (littéralement « ayant fait néant »).
LES MAIRES DU PALAIS, ORIGINES ET FONCTIONS
Au VIème siècle, le maire du palais (major domus, ou magister palatii) est attaché à la personne du roi ou de la reine.
Il est à l’origine l’intendant du roi. C’est un serviteur chargé des affaires domestiques du palais.
Représentant des puissantes familles régionales, il commande les intendants chargés de l’exploitation du domaine royal, administre la fortune du souverain, et dirige le gouvernement intérieur du palais.
Sa fonction, qui n’est au début qu’un rôle d’administrateur du palais, va évoluer rapidement. La puissance de ces nouveaux dignitaires va s’accroître jusqu’à devenir l’égale des ministres.
Sous Clotaire II, ces ministres commanderont des armées. C’est cette fonction qu’exercera, d’abord sous Clotaire II, puis sous Dagobert Ier, Pépin Ier l’Ancien (ou Pépin de Landen).
Les maires du Palais représentent à la fois le ministre et le général d’armée. Ils sont tuteurs des rois en bas âge (on a vu cependant un maire, encore enfant, exercer cette fonction sous la garde de sa grand-mère. Ce fut Théodebald, petit-fils de Pépin de Herstal, qui fut maire du palais sous Dagobert III, en 714).
Progressivement, ce chef des serviteurs du palais royal va s’immiscer dans les affaires de l’État. Dès le VIIème siècle, il obtient des pouvoirs politiques, s’octroie le pouvoir judiciaire et dirige les fonctionnaires.
Il devient ainsi le plus proche subordonné du roi ; et rapidement entre en concurrence avec lui.
La puissance des maires du palais va devenir telle qu’ils se permettront de déposer des rois pour en mettre d’autres à leur place.
Cette usurpation de pouvoir sans limite prendra toute son ampleur en 660 avec le maire du Palais, Ebroïn (homme violent et despotique qui voulut imposer l’autorité de la Neustrie sur les autres provinces).
UNE MONARCHIE SUR LE DÉCLIN !
En 630, Dagobert Ier est à la tête des royaumes d’Austrasie, de Neustrie et de Burgondie.
En Neustrie, il place comme maire du Palais un dénommé Aega (celui-ci, pendant la minorité de Clovis II, administrera de concert le pouvoir avec la reine mère Nantilde, veuve de Dagobert Ier), qui lui assure la loyauté des seigneurs de son royaume.
En Austrasie, Pépin Ier l’Ancien (ou Pépin de Landen) occupe déjà cette fonction.
RAPPEL
La Neustrie : le Nord-Ouest de la France actuelle (sans la Bretagne). La Bourgogne : l’ancienne Burgondie, c’est-à-dire l’actuelle Bourgogne, le Nord de la vallée du Rhône et le Centre (Orléans).
L’INEXORABLE SUBSTITUTION DE LA MONARCHIE !
En 639, à la mort du roi Dagobert Ier (la même année que Pépin Ier de Landen), les cours royales vont devenir des milieux d’intrigues et d’imbroglios. Une succession de troubles va émailler le pouvoir royal (règnes courts, héritiers mineurs, problèmes de succession, luttes dynastiques) ; autant de crises qui vont affaiblir la monarchie mérovingienne, déjà bien défaillante. Un espace va se libérer au sein du pouvoir, rapidement exploité par les grands dignitaires du royaume qui verront là une occasion d’accroître leurs privilèges.
Les héritiers de Dagobert Ier, souvent très jeunes et d’une espérance de vie très courte, ne pourront régner sans le soutien des maires du palais.
Ceux-ci vont tirer profit de la situation pour renforcer leur puissance et diriger le pays à la place des souverains : ils élisent les évêques, les comtes et les ducs, signent les accords avec les royaumes limitrophes, organisent et dirigent les campagnes militaires…
D’autre part, ils vont étendre leur influence en faisant des dons, et en pratiquant des alliances matrimoniales.
Les conflits et les conquêtes terminées, les finances se sont irrémédiablement épuisées. A cette époque, les guerres demeurent les principales sources de revenus du royaume, et les soldats désœuvrés se détournent du roi pour aller vers d’autres combats.
Simultanément, on assiste alors à un enrichissement des propriétaires terriens. Indubitablement le clientélisme s’accroit : un grand nombre de sujets libres font allégeance à de riches dignitaires pour se mettre sous leur protection. Ces aristocrates disposent d’assez de moyens pour financer de véritables petites armées privées, échappant alors à tout contrôle du pouvoir royal. Ils dévoient ainsi à leur profit, la fidélité et le service militaire logiquement dus à leur souverain. La puissance d’action de cette trempe de chefs s’en trouve de ce fait accrue. Les maires du palais subtilisent aux monarques mérovingiens de plus en plus de prérogatives.
En Austrasie, par exemple, la lignée des Pippinides s’est bâtie par une adroite politique d’alliance matrimoniale, un colossal domaine foncier dans les vallées de la Meuse et de la Moselle. Les richesses d’exploitation de ce patrimoine ont servi à constituer un formidable réseau d’allégeances, et à se doter d’une armée nombreuse et bien équipée.
DES COMBATS SANGLANTS !
Les maires du palais n’ont de cesse de faire prospérer leur puissance et celle de leurs protégés placés sous leur influence.
Dagobert Ier a eu deux concubines :
– Ragnétrude (ou Ragentrude, ou encore Raintrude). Aucune source contemporaine ne mentionne de mariage entre Dagobert et Ragnétrude, aussi cette dernière ne peut pas être considérée comme reine des Francs.
On ne connaît rien de sa vie si ce n’est qu’elle est austrasienne et que le roi Dagobert Ier la rencontre en Austrasie. Il en fera sa maîtresse et elle lui donnera un fils, Sigebert III (630-656) qui sera roi d’Austrasie.
– Nantilde, ou Nantechilde (née vers 610 – 642), reine des Francs. D’abord concubine, le roi l’épouse en 633. De cette union naîtra Clovis II (roi de Neustrie et de Bourgogne, de 639 à sa mort, en 657). Ce dernier est sous la tutelle de la reine mère Nanthilde, qui assure la régence.
En 657, à la mort de Clovis II, sa jeune veuve Bathilde doit assurer la régence pour son fils aîné Clotaire III.
Le roi Dagobert Ier est conscient de la menace que représentent la montée en puissance des maires du palais. Afin de reprendre personnellement le pouvoir, il se sépare du maire d’Austrasie Pépin de Landen.
EN NEUSTRIE
Erchinoald succède à Aega son père. Puis son fils Ebroin lui succède en 675.
Ce dernier, après la mort de Clotaire III en 673, place sur le trône de Neustrie Thierry III, troisième fils de Clovis II et de Bathilde, second frère de Clotaire III. L’aristocratie, bafouée de son droit traditionnel du choix du roi, se rebelle. L’Austrasie est appelée en renfort.
En 681, le maire du palais Ebroïn est assassiné par Ermenfred. Les grands du royaume de Neustrie se réunissent et choisissent, pour succéder à Ebroin, son parent Waratto,
En 687, le maire du Palais Pépin II de Herstal (ou Pépin le Jeune), petit-fils de Pépin Ier, est vainqueur des Neustriens du maire du palais Berchaire, à la bataille de Tertry. Celui-ci est le gendre de Waratto, qui a succédé à Erchinoald.
EN AUSTRASIE
Grimoald, fils de Pépin Ier de Landen (ou Pépin l’Ancien), écarte tous ses prétendants, et place d’autorité son propre fils, Childebert l’Adopté, en lieu et place de l’héritier légitime de Sigebert III (fils de Dagobert Ier), assassiné le 1er février 656.
Cette action de force va entrainer durant six ans une révolte de l’aristocratie. Après cette période tumultueuse, Grimoald est vaincu ; le second fils de Clovis II, Childéric II, monte alors sur le trône d’Austrasie.
Une fois encore, les dignitaires de l’aristocratie franque sont irrités par l’acte odieux de Grimoald ; ils ourdissent un piège et le capturent. Ils l’amènent devant Clovis II, roi des Francs. Grimoald sera emprisonné à Paris, puis supplicié jusqu’à ce que mort s’en suive.
A l’issue de ces rivalités intestines, les deux grands royaumes francs sont désormais unifiés sous l’autorité du roi neustrien Thierry III et de ses descendants. Ils sont alors les derniers représentants de la lignée mérovingienne. Mais en réalité ce pouvoir est illusoire : il appartient désormais aux maires du palais.
UN ROYAUME DISPROPORTIONNE ET INSTABLE
Dès 687, le pouvoir est déstabilisé. Certes, les monarques mérovingiens continuent à siéger aux assemblées annuelles, à rassembler l’armée, à percevoir des dons, à gérer des plaintes de la population, et à signer des documents gouvernementaux. Mais en fait, le vrai pouvoir appartient au maire du palais Pépin II de Herstal (ou Pépin le Jeune). Celui-ci est prince des Francs, et dispose du trésor des souverains ; et c’est vers lui qu’accourent les courtisans et les dignitaires du royaume. C’est aussi lui qui prend les décisions, puis plus tard, son fils Charles Martel.
En 751, le couronnement de leur héritier Pépin III le Bref marquera le déclin et la chute de la dynastie des Mérovingiens. Une nouvelle lignée verra alors le jour, celle des Carolingiens.
Sources :
Les rois de France des Éditions Atlas (Les Mérovingiens).
https://fr.wikipedia.org/wiki/Dagobert_Ier
https://fr.wikipedia.org/wiki/Sigebert_III
https://fr.wikipedia.org/wiki/Clovis_II
https://fr.wikipedia.org/wiki/M%C3%A9rovingiens
https://fr.wikipedia.org/wiki/Clovis_Ier
https://fr.wikipedia.org/wiki/P%C3%A9pin_de_Landen
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[…] était alors maire du palais ; à la suite d’une dénonciation qui représentait Rambert décidé à lui ravir son pouvoir, […]