« Les Taupes de Cardiff »
« LES TAUPES DE CARDIFF »
Une nouvelle de mon livre, « des poppies et des larmes »
BATAILLE DE MESSINES
Du 7 juin au 14 juin 1917
LA GUERRE DES MINES
Le but avoué est de rompre les lignes à l’Est d’Ypres, et de chasser les Allemands de la côte belge. En détenant le littoral flamand, il espère priver l’ennemi de ses principales bases de sous-marins. Par cette offensive victorieuse, il compte saper les nerfs et le moral de l’armée allemande. Le mois d’avril 1917 est le pire pour la flotte marchande alliée ; les redoutables « U bootes », lancés en meutes, pratiquent la guerre sous-marine à outrance et causent de terribles pertes aux navires britanniques. La Grande Bretagne est privée de ses matières premières, essentielles pour sa survie ; elle se doit de réagir vite. Dans l’Aisne, l’armée du général Nivelle vient d’essuyer une terrible défaite sur le Chemin des Dames. Des mutineries éclatent parmi la troupe ; les insuffisances et les échecs du commandement ont entamé dangereusement le moral des soldats.
Soldat Stevens Barney du 1er Corps commandé par le général sir Douglas Haig.
1ère Division sous les ordres du général Samuel Lomax.
3ème brigade d’infanterie, général H.J.S Landon.
First, South Wales Borderer.
1er juin 1917, Crête de Messines-Wytschaete au sud d’Ypres. Sous-sol des Flandres entre Hill 60 et Messines.
J’étais isolé, à dix mètres sous terre (33 pieds) ; ma petite lampe électrique dessinait des contours bizarres dans l’excavation que nous auscultions avec mon camarade Peter. J’avais un grossier stéthoscope de toubib qui pendouillait autour de mon cou, et qui me servait à écouter, au travers des parois argileuses, les mouvements de l’adversaire.
Au-dessus, en surface, les tirs de notre armée redoublaient. La bataille avait commencé la veille, et le pilonnage des positions boches s’intensifiait d’heure en heure.
Ça faisait des mois que nous creusions des galeries, des mois que nous rivalisions avec l’ennemi. Le but était de le surprendre, de le devancer car lui aussi creusait, lui aussi voulait nous faire sauter. Ainsi, nous avions conçu des kilomètres de tunnel. A notre disposition s’étendait un véritable réseau de communication sous-terrain, construit de nos mains. Nous avions fouillé et extrait des tonnes de terre et de gravats, ces déblais mêmes qui servaient à ériger nos défenses. Nous, c’étaient les Gallois, les Australiens, et même des Maoris venus de leur pays lointain, pour excaver et forer sous les lignes allemandes. A ce jour, 19 mines profondes avaient été déposées sous leurs pieds sans qu’ils en aient eu connaissance.
Mais pour l’heure, il fallait préserver cet avantage. A chaque fois que nous entendions un bruit suspect, un choc métallique, un coup de pioche, des bribes de voix, nous préparions une esquive en faisant sauter leurs fourneaux avec des explosifs. En fait, notre tâche était de prévenir la construction d’une sape ennemie, et de provoquer une contre-explosion pour la détruire. C’était la seule solution pour pouvoir espérer les éloigner de nos préparatifs. Parfois, il était impossible de les déceler, car jusqu’au dernier moment ils demeuraient silencieux. Alors s’ensuivait une brutale déflagration, puis tout à coup, l’irruption soudaine d’un groupe de boches venait semer la confusion dans les étroits boyaux. Des corps à corps dramatiques se terminaient dans la douleur. Il en résultait de nombreux tués, des deux côtés. Ceux-là mêmes dont les efforts se terminaient ici, plusieurs pieds sous terre. Ils étaient venus mourir dans leurs propres tombes, celles qu’ils avaient creusées de leurs mains.
19 novembre 1916. Aberdare, Galles du sud.
Dans la famille, nous étions mineurs de père en fils, et cela depuis des générations. C’était un travail pénible, sale, et qui rendait notre condition de vie misérable. Mais nous n’avions pas le choix, et il était très difficile d’y échapper ; cette destinée était déjà toute tracée depuis notre enfance. Seuls les enfants de riches ayant suivi des études dans des grandes écoles pouvaient prétendre à gravir l’échelle sociale, et se sortir de cette situation. N’ayant pas eu cette possibilité, je commençai mon apprentissage de mineur dès l’âge de seize ans, en poussant des wagonnets remplis de charbon. Mes lendemains étaient tout tracés, aucune perceptive d’avenir ne s’offrait à moi. Il me fallait donc subir, et implorer Dieu qu’il me réservât un sort plus enviable lorsque je serais un adulte responsable, avec femme et enfants à nourrir.
Ainsi, je me destinai à une vie terne, noire, sans espérances, sans piment, avec comme seule péripétie singulière le fond de la mine. Mais le tout puissant, à force de prières, m’entendit enfin ! Et dans sa grande bienveillance, une opportunité se profila sur l’horizon sombre des puits de charbon.
Le 4 août 1914, la Grande Bretagne déclarait la guerre à l’Allemagne. Voilà une bonne façon de me débarrasser de cette pauvreté qui me collait comme une deuxième peau, ou alors, c’était à n’y rien comprendre ! Je croyais donc dur comme fer que j’allais vivre des aventures extraordinaires et surtout, avoir une vie nouvelle. L’idée de traverser le Chanel pour aller me battre en France me grisait profondément et produisait en moi une grande exaltation.
A cette époque-là, j’habitais la petite ville d’Aberdare, à seulement 30 miles au nord de la grande ville de Cardiff. Et je travaillais à Tower Colliery, près du village d’Hirwaun, une des plus anciennes houillères du pays. J’étais trop jeune lorsque les hostilités éclatèrent. Si les bureaux recruteurs n’étaient pas regardants sur l’âge, ils l’étaient d’une manière plus circonstancielle sur ma condition de mineur de fond. L’industrie du charbon était devenue vitale, car elle représentait alors le nerf de la guerre. Rapidement, la demande du précieux minerai devint croissante, si bien que, pour son extraction, toute la main d’œuvre disponible était préservée. Je dus donc attendre. Et ce n’est qu’au mois de novembre 1916 que je pus enfin m’engager, envers et contre tout. La conscription battait son plein. Les volontaires ne se pressaient plus vraiment pour aller au casse pipes, ce qui, d’une certaine manière, facilita mon enrôlement.
Portsmouth, près de Southampton, Hampshire, le 3 décembre 1916.
Le port était en effervescence ; pour la première fois de ma vie, je pouvais contempler ce qu’était un chantier de réparation de navires de guerre. Des ouvriers par centaines s’affairaient comme des petits lutins autour de carcasses métalliques. L’une d’elle attira mon attention, car elle n’avait pas une forme habituelle. C’était un cylindre peu commun ; on aurait dit un cigare. Ce n’est que bien plus tard que j’appris que c’était un sous-marin. La rade regorgeait d’embarcations de toutes espèces, et sur les quais foisonnait un trafic ahurissant de dockers et de manœuvres en tous genres. Ce petit monde s’affairait, chacun à sa besogne, tous corps de métiers confondus.
Les ports d’embarquement s’effectuent comme tels : – Southampton pour les transports de troupes. – Avonmouth pour les véhicules automobiles. – Newhaven pour le matériel. – Liverpool pour la nourriture.
Mon affectation et mon entraînement se firent au camp de Bramshott, au nord de la ville. S’ensuivit une brève visite médicale ; une simple formalité, devrais-je dire. Celle-ci était davantage comparable à un travail à la chaîne qu’à un examen attentif. Après de longues heures d’une attente éprouvante, je rejoignis enfin mon affectation. Sur place, je reçus l’équipement du fier combattant de sa gracieuse majesté, et les premiers rudiments d’une instruction militaire, somme toute assez draconienne.
1 – Une casquette à rabat, modèle 1915. 2 – Une casquette, modèle 1905/1915. 3 – Un casque, type Brodie du War Office. 4 – Une vareuse, modèle 1902. 5 – Un équipement en cuir avec deux sortes de cartouchières. 6 – Un havresac et une musette, modèle 1908/1915. 7 – Une pochette de cagoule. 8 – Une paire de cisailles, dans son étui en cuir. 9 – Une grenade Mills MKI n°5. 10 – Une gamelle d’infanterie. 11 – Un paquet de pansements. 12 – Un couteau réglementaire. 13 – Une baïonnette 1907 transformée. 14 – Un fusil Lee-Enfield Mark III, avec modification de 1916 en calibre 303. 15 – Une paire de chaussures. 16 – Une paire de bandes molletières. 17 – Un manuel de Français.
14 Janvier 1917, Southampton.
J’embarquai au petit matin sur un paquebot à vapeur, le RMS Moldavia, transformé en transport de troupes pour la circonstance. Les dés étaient jetés, une nouvelle étape de ma vie commençait.
Dire que j’étais euphorique serait un bien grand mot. L’effervescence qui régnait parmi la troupe, au moment du départ, me procura une intense émotion. L’image de ces centaines de soldats faisant leurs adieux au travers des sabords du navire avait un côté jubilatoire.
Cependant, quelque chose au fond de moi m’interpellait, et me disait que cette euphorie ne durerait peut-être pas indéfiniment…
La traversée vers Boulogne s’effectua sans dommage. Il y avait toujours l’appréhension de croiser un sous-marin ennemi, mais il n’en fut rien. L’épée de Damoclès resta, cette fois-là, dans son fourreau !
16 janvier 1914. Boulogne, France
La ville était saturée de militaires ; un foisonnement permanent de soldats alliés arpentait les rues de la cité. Les commercesétaient bondés, partout des groupes de jeunes gens s’affairaient dans les bistrots autour du zinc, buvant, chantant et fumant en bons habitués des lieux. N’ayant pas reçu de directives particulières concernant notre affectation, ni notre départ
pour le front, nous nous faufilâmes, avec deux copains, dans un de ces débits de boisson. Un parmi tant d’autres me parut plus accueillant. Des notes de musiques, échappées, et jouées à partir d’un mauvais piano sur l’air de « It’s a long way to Tipperary », attirèrent notre attention. Alors, me dis-je, pourquoi ne pas participer à la fête avec eux, et aller se taper une bonne bière ? Nous n’y restâmes qu’une petite heure, juste le temps de siroter une pinte. Puis ce fut le rassemblement.
Déjà mon avenir se précisait, mais il n’allait pas du tout être celui que je souhaitais vraiment. La suite des évènements allait malheureusement me donner raison.
« Stevens Barney, vous êtes Gallois ? Je constate sur mes fiches que vous avez travaillé à Tower Colliery comme mineur de fond ? Ça tombe bien, nous manquons cruellement de main d’œuvre dans ce corps de métier, surtout de tunneliers ! »
Il s’ensuivit un coup de tampon énergiquement administré sur mon carnet d’états de services, et je fus dirigé illico presto sur le front.
1er février 1917, Messines.
Ce ne fut donc pas une surprise pour moi d’être affecté, dès mon arrivée, dans un bataillon du Génie. J’avais quitté les obscures profondeurs des sous-sols du Pays de Galles, pour me retrouver à creuser des tunnels sous les défenses allemandes des Flandres.
Le choix fut vite pris, et c’est tout naturellement en ma qualité de mineur de fond que je fus dirigé sous terre. Je me disais que je n’avais décidemment, pas de chance, et que je ne verrais pas souvent le ciel de France. Mais là-haut, l’air était empoisonné, et il ne faisait pas bon s’y trouver. Les orages de fer et de feu s’y répandaient comme autant de pestes mortelles. Dans cet enfer, la grande faucheuse y collectionnait les âmes à la pelle !
Et bien, en guise de pelles, nous étions servis ! Depuis des mois les sapeurs avaient commencé à percer des tunnels, et des tonnes de terre avaient été déblayées. Contrairement aux idées reçues, nous ne creusions pas avec une pioche ; c’était trop bruyant.
Chaque coup pouvait être entendu par l’ennemi, qui était en permanence à l’écoute de tous nos faits et gestes. Nous pratiquions le clay kicking. De cette manière, la débauche d’énergie fournie par le sapeur était moindre. Une planche inclinée équipée d’une assise (cross) était placée entre la voûte du tunnel et la partie à excaver. Le mineur s’y adossait, et enfonçait dans l’argile une pelle (grafting tool) qu’il manipulait avec la force des jambes. Ainsi fait, il ramenait à lui tous les éboulis qui se détachaient de la paroi. Un autre homme (parfois deux si l’espace le permettait) était allongé à ses côtés et évacuait les gravats à la force des bras et des mains. Des sacs étaient alors remplis, puis empilés sur des wagonnets montés sur rails. Manœuvrés par des cordages, ces charriots étaient tractés, extirpés vers la sortie et remontés en surface. Un véritable travail de titans. Tout ce labeur se faisait en présence d’un petit canari en cage, qui était devenu en quelque sorte notre mascotte. En fait, celui-ci devait nous avertir, en cas de danger, de la présence de gaz. Si des émanations de monoxyde de carbone apparaissaient et se faisaient menaçantes, notre petit ami se hérissait, battait des ailes, ou tout simplement mourait, avant même que nous n’ayons perçu les effluves mortels ! La suite des travaux était alors suspendue momentanément, la ventilation étant devenue insuffisante. Des milliers d’oiseaux furent ainsi sacrifiés.
Le général Nivelle est battu dans l’Aisne. La bataille du Chemin des Dames se solde par une terrible défaite, et ses troupes sont exsangues. Une série de mutineries ébranle l’armée française, et entraîne la modification des plans stratégiques anglo-français pour l’année 1917. Conformément aux accords au sein de la Triple Entente, l’armée britannique déclenche l’offensive de Messines, afin de forcer l’armée allemande à se déplacer dans les Flandres, et soulager ainsi la pression sur les Français.
Cela dura des mois, jour et nuit ! Des équipes différentes se relayaient en permanence, et les mines étaient placées méthodiquement sous les défenses ennemies.
Les Australiens se montrèrent particulièrement téméraires, et participèrent au boisage des galeries les plus inaccessibles, bien souvent noyées dans plusieurs mètres d’eau. Le pompage manuel s’effectuait en surface. Des assistants se suppléaient en permanence à la fastidieuse besogne, et il était interdit d’utiliser des machines dont le ronronnement de la mécanique pouvait éveiller l’attention des boches. Il en était de même pour l’aération. Un gros ventilateur, disposé en surface et actionné par deux préposés, propulsait de l’air dans les tunnels. L’accès à notre réseau se faisait directement par la tranchée.
Un premier puits, que nous avions baptisé whitehall, nous permettait de descendre à 12 pieds sous terre. Il nous fallait alors prendre un premier tunnel (dans lequel un homme pouvait difficilement se tenir debout), sur une dizaine de yards environ (11 mètres). La fin du boyau se terminait par un rétrécissement. Elle marquait l’emplacement d’un second puits (Cardigan All), qui nous faisait descendre encore à plus de 23 pieds sous Whitehall.
Juin 1917. Crête de Messines.
Pour l’heure, j’étais à l’écoute, à presque 35 pieds sous la surface. J’avais pour assistant un tout jeune homme, un private, un petit bleu du nom de Peter Lindsay ; lui aussi était Gallois. Il prétendait avoir dix huit ans, ce qui n’était pas l’avis des membres de notre équipe. Tous pensaient qu’il en avait tout au plus dix-sept. En retrait se tenaient l’artificier, puis deux gars armés : à tout moment il pouvait se présenter un os ; il nous fallait être prêts à toute alternative. On ne pouvait plus reculer ni reporter. Les dix neuf mines avaient été disposées sous la ligne de front allemande, et nous n’espérions plus que la mise à feu. Mais quand ?
L’attente devint longue et nos nerfs furent mis à rude épreuve. Il n’était pas possible que l’ennemi n’ait eu aucun doute, ni qu’il ait pu être averti, ne serait-ce que par un prisonnier qui aurait parlé. Toutes les suppositions étaient à envisager et à prendre au sérieux.
Alors, j’auscultai minutieusement la paroi qui m’avait été assignée, comme le ferait le stéthoscope d’un toubib sur la poitrine d’un patient. Le silence était de rigueur ; tout murmure, même une profonde inspiration, était à prohiber. Mes craintes allaient être confirmées dans la minute suivante. Un léger cliquetis, malencontreusement égaré derrière l’excavation, se fit perceptible. Une forme de chuintement, semblable au frottement sourd d’un métal sur la roche, me parvint aux oreilles. J’étais tout d’un coup surpris, je n’avais rien suspecté si près du but !
Nous redoublâmes de vigilance. Les équipes d’australiens tombèrent d’accord avec nous : quelque chose se préparait. Il devenait urgent d’agir. Mais comment intervenir sans attirer l’attention ? C’est alors qu’un véritable jeu du chat et de la souris se mit en place. Après de multiples essais, nous eûmes la conviction que l’ennemi n’avait pas encore terminé sa galerie. Et nous pûmes alors évaluer le temps nécessaire pour lui permettre de parachever son forage. Ce qui nous permit à notre tour de préparer un camouflet, et de commencer le percement d’un rameau de combat. Le but était de nous rendre au plus près des Allemands. Une fois la position atteinte, nous installerions un fourneau avec sa contre-mine. Les heures qui suivirent furent insoutenables ; une vraie course contre la mort débuta. Tout le monde savait ce qu’il avait à faire ; l’excavation ainsi creusée serait bourrée d’explosifs brisants. Une fois au contact de la sape boche, les artificiers mettraient en place le système d’allumage électrique. Tout se passa pour le mieux, mais dans notre folle épopée, nous avions perdu le sens des réalités et oublié l’ennemi. Je vis alors Peter ramper vers moi. Il apportait notre canari en cage et vint le déposer près de nous. Dans notre précipitation, nous avions oublié notre mascotte. Celle-ci était toute guillerette, ce qui nous rassura.
En surface, la bataille continue son œuvre destructrice et ravage inexorablement la croûte meurtrie du no man’s land.
D’après nos calculs, nous nous trouvions à angle droit avec la galerie adverse. Après une longue écoute, nous décidâmes d’agir ; il ne fallait plus perdre de temps. Notre intention était de faire sauter une assez grande longueur de tunnel pour que l’effondrement consécutif à la déflagration puisse combler leur boyau de terre et de gravats. L’obstruction ainsi formée obligerait les boches à recommencer leur travail, et nous donnerait, par la même occasion, un temps précieux pour la riposte.
En une fraction de seconde, un souffle violent nous plaqua contre les étais. La sensation d’écrasement fut telle que nous crûmes être enterrés vivants sous les éboulis. Les sapeurs allemands avaient fait sauter leur camouflet avant le nôtre. Juste le temps de se ressaisir, de retrouver nos esprits, et déjà l’ennemi se présentait pour forcer le passage. Mais l’éboulement argileux avait, bien au contraire, colmaté le goulet ainsi formé ; et d’intrusion il n’y en eu point. Un coup pour rien, me dis-je ! Mieux encore, notre fourneau demeurait intact, prêt à être actionné. Dans les minutes qui suivirent, le réseau de galeries fut évacué. Les artificiers avaient tiré les câbles de la mise à feu ; nous étions fins prêts pour tout faire sauter. La détonation qui s’ensuivit fut étouffée, et le bruit à peine audible. Mais le boyau ennemi fut mis définitivement hors d’état de nuire. Tout était fin prêt pour l’assaut final. Nous avions participé, à notre façon, à ce combat qui s’annonçait décisif. Les 19 mines profondes de la Crête de Messines étaient intactes, et prêtes à exploser.
Nul ne se doutait de la lutte acharnée que nous menions sous leurs pieds : une toute autre guerre, toute aussi cruelle et sournoise qui, cependant, allait faire pencher la balance dans le camp des forces alliées.
La bataille de Messines est, pour les britanniques, un énorme succès. La prise du saillant allemand d’Ypres permet l’offensive principale sur Passchendaele, qui débute le 31 juillet 1917
Stevens Barney survivra à la guerre. Il sera démobilisé en février 1919. Rentré au pays, il retrouvera tout naturellement sa place dans la houillère de Tower Colliery ; il y restera jusqu’à sa retraite, en 1954. Il mourra dans son lit en 1962, à l’âge de 68 ans.
Peter Lindsay sera retrouvé noyé dans la boue, le 10 octobre 1917, lors de la bataille de Passchendaele. Il n’avait pas 17 ans.
Publié précédemment : « Du sang sur les bleuets » Éditions Volume.
Avec tous mes remerciements au service des archives de la ville d’Aix en Provence.
« Les taupes de Cardiff », une nouvelle extraite de mon livre « Des Poppies et des larmes ».
Ce livre est une fiction, toute ressemblance avec des personnes existantes ou ayant existé ne serait qu’une pure coïncidence. Seuls les événements historiques sont authentiques.
Lire dans la même collection:
A Journey to Gallipoli – L’embarquement
A journey to Gallipoli – Terminus Gaba-Tépé
Le Zeppelin « A stairway to hell ! »
Lire aussi : La carrière Wellington
« All gone but not forgotten »
Sources :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_des_mines_(1914-1918)
https://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Messines_(1917)
https://fr.wikipedia.org/wiki/Chemin_des_Dames
Photos publiques Facebook
La Grande Guerre, Éditions ALP/Marshall Cavendish, 1997/1998
14-18 Le magazine de la Grande Guerre, N°1 à 34 de 2001 à 2006
C’était la guerre des Tranchées, Tardi, Éditions Casterman
Le Chemin des Dames, Pierre Miquel, Éditions Perrin 1997
Mourir à Verdun, Pierre Miquel, Éditions Tallandier 1995
Les mutineries de 1917, documentaire TV de Pierre Miquel
Paroles de Poilus, Éditions Tallandier 1998
La première guerre mondiale, Suzanne Everett, 1983
Frères de tranchées, Marc Ferro, Éditions Perrin 2005
Tous mes remerciements au services des archives de la ville d’Aix en Provence.