Le retour de la dépouille du roi
LES CROISADES
(1095 – 1291)
LE RETOUR DE LA DÉPOUILLE
DE LOUIS IX
(25 août 1270-22 mai 1271)
HUITIÈME CROISADE
(1270)
« Dieu le veut ! »
Un long chemin vers la terre du Christ
Lire :
1 – Des origines à l’appel du pape Urbain II
INTRODUCTION
SOMMAIRE
Aigues-Mortes vue des remparts
ÉVÉNEMENTS ANTÉRIEURS
1270
– 13 janvier : mort d’Héthoum 1er, ancien roi d’Arménie.
– 2 juillet : Louis IX appareille pour la seconde fois d’Aigues-Mortes. Il doit rejoindre Cagliari, en Sardaigne, puis Tunis.
– 18 juillet : Saint-Louis débarque à Tunis. Alors qu’il assiège la ville, une épidémie de typhus se propage sur l’armée croisée.
– 21 juillet : la plaine de Carthage et ses puits sont aux mains des Croisés.
– 24 juillet : Carthage est prise d’assaut.
– 2 août : Jean Tristan, quatrième fils du roi de France, meurt victime de l’épidémie de dysenterie.
– 17 août : assassinat de Philippe de Montfort, seigneur de Toron et de Tyr.
– 20 août : Édouard 1er quitte Douvres pour la France. Il est suivi par 225 chevaliers et par plus d’un millier d’hommes.
– 25 août : Louis IX, atteint par le typhus, meurt devant les remparts de Tunis. Son frère Charles d’Anjou prend le commandement de la Croisade.
– 30 octobre : la Huitième Croisade lève le siège de Tunis.
– 11 novembre : l’armée croisée quitte la Tunisie pour rejoindre la Sicile.
Louis IX et son fils Jean Tristan étant morts loin de chez eux, ils seront inhumés suivant la technique funéraire du « mos Teutonicus ». Plus tard, tous deux reposeront dans l’église de l’abbaye royale de Saint-Denis.
LE RETOUR DE LA DÉPOUILLE
DE LOUIS IX
(25 août 1270-22 mai 1271)
Lire :
« IL EST EN REPOS SANS FIN »
LE DERNIER VOYAGE DU ROI
Mort sous les remparts de Tunis le 25 août 1270, le pieux souverain ne peut être inhumé en terres étrangères, hostiles et de surcroît aux mains des infidèles musulmans. Il est donc décidé de ramener les restes du défunt roi en France, auprès de ses prédécesseurs ; il y va du prestige de la dynastie des Capétiens. Un long périple commence alors, le cortège s’ébranle et s’apprête à traverser la Sicile et l’Italie. Finalement, le 22 mai 1271, au terme d’un long et pénible voyage, l’on pourra célébrer ses funérailles dans l’abbaye de Saint-Denis.
« LE MOS TEUTONICUS »
Le défunt roi repose sous sa tente, le visage paisible et souriant. Sur son lit de cendres, il semble que la mort ait détendu tout son être et tout son corps meurtri. L’effet est troublant, à tel point que l’entourage des seigneurs qui se presse autour de sa dépouille, ne peut ressentir qu’un extrême étonnement et une profonde émotion.
Mais que faire du corps de ce roi très chrétien ? On ne peut pas l’ensevelir aussi loin de son pays natal : le temps presse, c’est l’été, il fait très chaud ; une décision doit être prise dans l’urgence. La pratique de l’embaumement, dont le secret semble avoir été oublié, pousse les médecins à choisir le « Mos Teutonicus ». Le corps du monarque est dépecé, bouilli dans du vin et de l’eau salée pour séparer les chairs des os, qui seront distinctement arrangés et conservés avec précaution.
PALERME OU SAINT DENIS ?
De vives polémiques vont naître autour des restes du souverain défunt. Ses reliques deviennent l’enjeu de rivalités politiques. Charles d’Anjou souhaite que le corps de son frère soit enterré en Sicile, dans son royaume tout proche. Malgré les difficultés d’un long et pénible voyage, Philippe III le Hardi (25 ans), le fils du roi, opte pour un rapatriement sur le sol de France. Enfin, un compromis est accepté par les deux camps : le cœur et les os, jugés comme les parties les plus nobles du corps humain, seront déposés dans un reliquaire précieux et transférés dans la nécropole royale de Saint-Denis. Quant aux chairs, elles seront inhumées à Monreale, dans la plus prestigieuse cathédrale de Sicile, près de Palerme. Philippe III le Hardi prend la décision de faire rapatrier, avec le corps de son père, celui de son frère Jean Tristan, mort le 2 août. Séance tenante, les Croisés, simples soldats comme grands seigneurs, craignant de ne plus être sous la protection de leur pieux souverain, vont s’y opposer d’une seule voix.
Finalement, le 11 novembre, la flotte franque appareille et quitte le sol tunisien, en mettant le cap sur la Sicile, pour un long voyage de retour qui va durer pas moins de neuf mois. Le cortège funèbre fait escale dans le royaume de Charles d’Anjou, frère du roi défunt, avant de regagner la France par l’Italie et les Alpes.
Philippe III le Hardi, qui a pris la tête du convoi mortuaire, accompagne non seulement la dépouille de son père, mais aussi celle de son frère Jean Tristan, et celle de son épouse la reine Isabelle d’Aragon (morte des suites d’une chute de cheval le 30 janvier 1271). Font partie également du cortège funèbre les cercueils de sa sœur, la reine Isabelle de Navarre (morte en avril de maladie), de son beau-frère Thibaud (époux de cette dernière), comte de Champagne et roi de Navarre (mort le 4 décembre 1270 à Trapani), et enfin de Pierre de Villebéon, chapelain du défunt roi.
Alors que le cortège traverse le royaume de France, de la vallée de la Maurienne à Lyon, de Mâcon à Chalon, puis à Troyes, la foule se presse pieusement tout au long de son passage, pour rendre un ultime hommage à son roi défunt.
UNE QUERELLE DE HIÉRARCHIE PROTOCOLAIRE
Ce n’est que le 21 mai 1271 que Philippe III le Hardi et les survivants de la Huitième Croisade entrent dans Paris. Aussitôt, le cercueil de Louis IX est déposé à la cathédrale Notre-Dame et exposé au peuple. Les funérailles solennelles ne seront célébrées que le lendemain en la cathédrale Saint-Denis. Mais alors que la capitale se recueille, la cérémonie, qui doit se dérouler en grandes pompes, est marquée par un incident quelque peu fâcheux et considéré comme scandaleux au vu des contemporains de l’époque (préséance oblige). Peu de temps avant d’arriver à l’abbaye, le cortège funèbre se présente accompagné par des moines tenant un cierge à la main. Mais les portes de la basilique sont fermées et nul ne peut y entrer… Il faut savoir qu’à cette époque, un fort antagonisme oppose l’église temporelle et séculière aux clercs de l’abbaye de Saint-Denis.
Dès la querelle de préséance résolue, le cortège peut pénétrer dans l’abbaye où un service solennel est honoré. Près de neuf mois après son trépas, le roi est enfin inhumé sous une simple dalle de pierre.
Le dernier voyage de retour de Louis IX a été ponctué par bien des miracles ; pour le peuple, dès lors, le Capétien est devenu Saint Louis, et bien des voix s’élèvent pour demander au pape sa canonisation.
UNE CHAPELLE ÉRIGÉE EN TUNISIE !
Alors que Louis-Philippe règne sur la France, il est décidé de faire élever, en lieu et place de la mort du roi Saint Louis, une chapelle qui sera sous le contrôle de l’Église. Le 7 juillet 1830, un traité est signé avec Hussein Pacha, le bey de Tunis, pour la « cession du corps de Saint Louis ».
Bonjour Jean-Marie,
Je tenais à vous féliciter pour cet article poignant sur le retour de la dépouille du roi. Votre prose a su transmettre l’émotion et la gravité de cet événement historique. J’ai été particulièrement touché par votre analyse de la symbolique et de l’impact de cet événement sur la France d’aujourd’hui.
Je me demande si cette cérémonie de retour de la dépouille royale pourrait susciter un débat sur la place de la monarchie dans notre société actuelle. Qu’en pensez-vous ?
Merci encore pour cet article inspirant.
Bien cordialement.
Bonjour Jean-Marie,
Je tenais à te féliciter pour cet article émouvant et poignant sur le retour de la dépouille du roi. Tu as su trouver les mots justes pour exprimer l’importance de cet événement historique et faire ressentir toutes les émotions qui l’accompagnent. J’ai été particulièrement touché par la description de la cérémonie, qui a dû être un moment fort en émotion pour tous les participants.
Ton article m’a donné envie d’en savoir plus sur cette période de l’histoire et sur les traditions funéraires de la monarchie française. Je suis sûr que tes lecteurs seront également intéressés par ce sujet.
Merci pour cet excellent article, et j’espère avoir l’occasion d’échanger davantage avec toi à ce sujet.
Bien à toi,