Guerre contre les Saxons, la résistance du chef Widukind
LES CAROLINGIENS
GUERRE CONTRE LES SAXONS,
LA RÉSISTANCE DU CHEF WIDUKIND
Une partie d’entre eux (ainsi que des Angles, des Jutes et des Frisons) envahit la Grande-Bretagne dès le début du Moyen Âge. Selon la tradition anglaise, et ainsi que le rapporte Bède le Vénérable, les premiers d’entre eux auraient été dirigés par deux frères, Hengist et Horsa. Ils seraient venus vers 450, à l’instigation du roi breton Vortigern, afin de défendre l’île de Bretagne contre les « Pictes », une peuplade indigène non romanisée. L’archéologie, quant à elle, atteste la présence de mercenaires germaniques aux alentours de Londres dès les premières années du Vème siècle. Quoi qu’il en soit, l’arrivée des Saxons, et les troubles politiques relatifs au morcellement de la Bretagne romaine en de nombreux royaumes, furent suivis d’une période sombre que l’historiographie anglaise a enregistrée sous le nom de « Dark Ages » (âges sombres). Un dépeuplement massif, lié aux drames de la guerre et aux épidémies, semble également avoir favorisé la germanisation de l’ancienne province romaine au Vème siècle. Sans doute dès le VIème siècle, les Saxons constituèrent quatre royaumes au sud de l’île : l’Essex, le Sussex, le Wessex (respectivement terres saxonnes de l’Est, du Sud et de l’Ouest) ainsi que le Middlesex, plus éphémère puisqu’il fut annexé à la terre des Angles, l’Angleterre. Dans l’ensemble, les Saxons montrèrent également une résistance assez forte au Christianisme, qui gagna le royaume de Kent au début du VIIème siècle sous l’influence du missionnaire romain Paulinus. Si dès le VIIème siècle, la présence du roi Bretwaldas est attestée parmi les Anglo-Saxons de Grande-Bretagne, c’est seulement au Xème siècle qu’une dynastie saxonne (à savoir celle de Wessex) s’imposa finalement sur l’île sous le règne d’Alfred le Grand et pour une courte période, jusqu’à l’invasion normande de Guillaume le Conquérant. La langue des Saxons donna naissance au « Old English » (le vieil anglais) et se prolonge aujourd’hui encore dans le dialecte bas-saxon.
La majorité des Saxons demeure cependant sur le continent, formant encore une nation païenne au VIIIème siècle, en dépit des efforts des missionnaires anglo-saxons. Nombre de ces derniers, en effet, viennent (majoritairement de Northumbrie) sur le continent et professent leur foi en Germanie dans l’espoir de convertir leurs frères. Il s’agit notamment de Willibrord (657-738), de Boniface (680-755) et de Lébuin (mort vers 775), qui évangéliseront les Frisons.
Les Saxons sont considérés à l’époque comme des barbares et des guerriers intraitables. La Saxe est un petit pays au Nord du royaume, forestier et marécageux, ce qui peut être une des raisons pour lesquelles les Saxons lancent souvent des raids meurtriers dans les régions de la Hesse et de la Thuringe.
Au-delà du Rhin, un puissant peuple conserve encore son indépendance : les Saxons. Ils représentent un peuple germanique appartenant au rameau occidental. Ils sont mentionnés pour la première fois au IIème siècle par le grec Ptolémée sur la carte Germania Magna. Il les situe alors au sud-ouest du Jutland, ce qui correspond à peu près à l’actuel Holstein, d’où ils semblent s’être dispersés au sud et à l’ouest. Au milieu du VIIIème siècle, les Saxons sont encore préservés de l’influence romaine. Leurs voisins, au contraire, se romanisent et s’assimilent à leurs institutions et à leur culte national. Les Saxons occupaient la région actuelle de Basse-Saxe et appartenaient au groupe des Germains du nord. Quatre nations se partageaient la Saxe : les Westphales (du Rhin à la Weser), les Angrivariens (à l’est), les Nordalbingiens (au nord) et les Ostphaliens, venus du massif du Hartz.
CHRONOLOGIE DE LA GUERRE DES SAXONS
La guerre de Charlemagne contre ce peuple durera trente-trois ans. L’attaque des Angrivariens, qui transforment la basilique de Fritzlar en écurie pour leurs chevaux, en constitue l’élément déclencheur. Charles associe très rapidement politique et religion. Il fait en effet œuvre de conquête, mais aussi œuvre de missionnaire en désirant convertir les païens saxons.
En 772, après avoir pris la citadelle d’Eresburg, Charlemagne fait abattre leur idole, « Irminsul » (certainement un frêne immense recouvert de talismans). Ce lieu rassemble alors le butin des razzias saxonnes. Dès lors les Saxons négocient, promettent de ne plus envahir les marches du royaume franc, et fournissent aussi des otages.
En 774, Charlemagne étant occupé à guerroyer en Italie, les Saxons en profitent pour reprendre les hostilités. La riposte est terrible : les soldats envoyés par Charlemagne se déchaînent et laissent la Saxe exsangue mais encore insoumise.
Lire : une croisade religieuse contre les Saxons.
En 776, les Saxons promettent de se soumettre et de se convertir au christianisme.
En 782, un soulèvement général conduit par Widukind (considéré encore aujourd’hui en Allemagne comme un grand héros) conduit Charlemagne à faire exécuter 4 500 révoltés en guise de représailles.
En 784, le roi des Francs lance une nouvelle campagne mais cette fois-ci hiverne sur place ; ce qui rompt avec la tradition de l’époque, qui voulait que l’on ne se batte pas à la mauvaise saison et que l’on attende le printemps.
En 785, Widukind se soumet et se fait baptiser à Attigny.
Le premier capitulaire saxon, « Partibus Saxoniae », est édicté :
Ce capitulaire interdit sous peine de mort : – la crémation des morts. – l’enterrement sous les « tumuli » (tumulus). – les pratiques sacrificielles. – la rupture du jeûne de Carême. – l’attentat contre un ministre du culte. – l’attentat contre un objet ou un lieu de culte. – le refus du baptême. Pour appuyer le texte, une cour de justice expéditive est installée en Westphalie. Les condamnations à mort sont prononcées parfois sur simple dénonciation, que le prévenu soit présent ou non. En 797, Charlemagne instaure un nouveau capitulaire, plus clément que le précédent, le « Capitulare Saxonicum ». La peine de mort contre les païens y est abolie et commuée en amendes. Les troubles cessent progressivement vers 799.
En 793, nouvelle révolte.
En 794, nouvelle campagne de Charlemagne en Frise et en Saxe.
En 797, Charlemagne hiverne au camp de Herstel. Annexion de la Saxe au « Regnum Francorum » (royaume des Francs). Second capitulaire saxon qui introduit une égalité progressive entre Francs et Saxons.
À partir de 799, déportation massive des Saxons (en Flandre et en Brabant), remplacés par des Francs pour éviter de nouvelles révoltes.
« Charlemagne, en mêlant les Saxons et les Flamants, d’un diable en a fait deux » est devenu un adage sous Philippe IV le Bel et Philippe VI de Valois.
En 803, conclusion de la paix de Salz.
LA RÉSISTANCE DE WIDUKIND, LE GRAND CHEF SAXON
Cela fait bientôt dix ans que Charlemagne tente d’imposer son autorité au peuple de saxe. Mais face aux guerriers et à leurs chefs, son armée demeure impuissante ; il va donc intervenir lui-même à plusieurs reprises entre 779 et 782. Pourtant, malgré la répression terrible du roi des Francs et les exécutions de masse des insurgés, les résultats en Saxe se font attendre.
Après plusieurs campagnes franques, le peuple saxon semble enfin soumis, et le paganisme recule partout. De toutes parts on assiste à des serments de fidélité prêtés au grand roi des Francs, avec des remises d’otages et des baptêmes en grand nombre.
Les prêtres et les moines qui suivent la campagne de pacification des Francs évangélisent les régions conquises, et construisent partout des églises sur le territoire saxon.
UNE GUERRE LONGUE ET MEURTRIÈRE
Toutes ces conversions ne sont pas dictées par une foi religieuse indéfectible, bien au contraire : elles sont pour la plupart réalisées sous la contrainte d’être exécuté en cas de refus. Les populations sont terrorisées à la vue de la haute stature du roi Charles menant, en personne, ses troupes au combat. Si les Saxons se convertissent en masse, c’est parce qu’ils espèrent faire cesser les massacres, les destructions, et tous les pillages perpétrés par les soldats francs.
En 778, alors que le roi des Francs guerroie en Espagne, la Saxe s’insurge à nouveau. Ces guerriers indomptables ont à leur tête un chef valeureux, Widukind. C’est le seul qui, réfugié au Danemark l’année précédente, n’était pas présent lors de l’assemblée de Paderborn, au cours de laquelle les autres chefs saxons ont fait acte de soumission.
Une fois de plus, Charlemagne, dès son retour d’Espagne, doit repartir en guerre pour mater et pacifier définitivement cette contrée sauvage. Désormais, il n’est plus question de se livrer à des actions de représailles, ni même de partir en campagne ; il faut anéantir toutes velléités et conquérir la Saxe dans sa totalité.
La tâche ne sera pas facile. Elle va débuter en 779, et durera sept longues années. En ces temps farouches, les combats s’effectuent l’été. Les coupures hivernales remettent systématiquement en question les succès acquis pendant la période chaude précédente.
Pendant ce temps, les missionnaires poursuivent leur évangélisation des territoires conquis. Ils sont conduits en Wihmodie (Saxe du Nord) par l’Anglo-Saxon Willihad, et en Frise du Nord par Liudger.
Le roi Charles administre et organise les territoires conquis. En 782, au cours de l’assemblée de Lippspringe, il manœuvre adroitement en plaçant les notables saxons à la tête des comtés qu’il vient de créer.
DES REPRÉSAILLES CRUELLES ET IMPITOYABLES
Au Danemark, où il s’est réfugié, le chef saxon Widukind a reconstitué d’importantes troupes païennes, et entreprend une grande offensive. Il commence par massacrer les prêtres et les combattants francs, ainsi que tous ceux qui ont collaboré avec l’envahisseur. Les églises et les sanctuaires religieux sont détruits, et les missionnaires chrétiens Willihad et Liudger doivent s’enfuir pour sauver leur peau. Dans le même élan, les guerriers saxons incendient la forteresse de Paderborn, et pénètrent dans la marche de Westphalie et de la Hesse.
Les marches désignent à l’origine de nombreux territoires frontaliers de l’Empire carolingien (espaces limitrophes, périphériques ou frontaliers qui, jadis, tenaient lieu d’espaces tampons entre deux souverainetés). Par extension, le terme a également désigné une province frontalière, militarisée ou non. La marche est l’ancêtre du marquisat ou du margraviat.
Pour les Francs, tout est à refaire… Charlemagne ne baisse pas les bras, bien au contraire. Il réunit une armée colossale, car il veut asséner un grand coup fatal à son ennemi saxon.
Mais la tactique des Francs va s’avérer insuffisante. En 778, leurs soldats sont défaits en donnant l’assaut aux révoltés saxons retranchés dans le Süntelgebirge (un massif montagneux qui s’élève au-dessus de la vallée de la Weser).
La riposte de Charlemagne n’en sera que plus violente. Le roi en personne entreprend des représailles sanglantes.
Le souverain se montre impitoyable envers les insurgés qui sont capturés. A Verden (ville d’Allemagne située en Basse-Saxe), quatre mille cinq cents révoltés seront immédiatement décapités sur son ordre. Ces exécutions de masse serviront d’exemple, espère-t-il. En décourageant la résistance, il veut désavouer et ruiner l’influence du chef Widukind.
Mais ce peuple saxon fier et têtu fait de ses morts des martyrs. Aussi, lorsque le roi des Francs quitte la Saxe pour rentrer dans son royaume, de nouveaux soulèvements s’organisent…De nombreuse années seront encore nécessaires pour en venir complètement à bout.
LA CRUELLE DÉFAITE DE SÜNTELGEBIRGE
La bataille de Süntelgebirge est une bataille terrestre des guerres saxonnes. Elle a lieu en 782, entre les rebelles saxons dirigés par Widukind, et un détachement de forces franques dirigé par des envoyés de Charlemagne : Adalgis, Geilo et Worad, à Süntel.
La bataille se termine par une victoire des Saxons, causant la mort d’Adalgis, de Geilo, de quatre comtes (dont Worad), et de 20 autres nobles.
Au cours de la grande offensive de 782, les cavaliers francs, chargés d’un encombrant butin, pourchassent dans la montagne du Süntel les guerriers saxons qui s’enfuient. Les Francs sont empêtrés avec leurs fardeaux et ne parviennent pas à charger leurs ennemis efficacement lorsque ceux-ci leur font volte-face.
Mais ayant tenu conseil entre eux, ils craignirent de voir tous les honneurs de la victoire attribués au comte Théodoric s’il prenait avec eux part au même combat. En conséquence, ils décidèrent d’attaquer sans lui ; (…) ils marchèrent à l’ennemi, non pas comme s’ils eussent affaire à des gens préparés à les recevoir, mais comme si déjà il n’eût plus fallu que poursuivre des fuyards ».
Cette opération malheureuse fait de nombreuses victimes, parmi lesquels figurent d’éminentes personnalités proches de Charlemagne : le chambrier Adalgis, le connétable Gilon et le comte du palais Worad. Cette douloureuse défaite va décider le roi des Francs à prendre dorénavant, et en personne, la direction de l’armée.
SARCOPHAGES CAROLINGIENS
– Lire : La Chapelle Notre-Dame de la Gayole
En 1964, à Cornillon-Confoux (Bouches du Rhône), en creusant un nouvel accès au cimetière, neuf sarcophages d’une nécropole paléochrétienne (Vème, VIIème siècle) furent mis au jour, ainsi que dix-huit autres en 1971.
Lire : Cornillon-Confoux
Sources :
Les rois de France des Éditions Atlas (Les Carolingiens).
Photos publiques Facebook
https://fr.wikipedia.org/wiki/Charlemagne
https://www.superprof.fr/ressources/histoire/histoire-5eme/roi-francais-charles-martel.html
https://fr.wikipedia.org/wiki/Widukind
http://chrisagde.free.fr/carolingiens/charlemagneguerre.php3?page=9