789, Charlemagne à la conquête des Slaves
LES CAROLINGIENS
789, CHARLEMAGNE A LA CONQUÊTE DES SLAVES
Vers la fin du VIIème siècle, les Slaves sont parvenus jusqu’en Europe centrale. Ils se sont établis dans le pays abandonné par les Germains (entre la Vistule et l’Elbe), et par les Lombards et les Gépides (en Bohême et Moravie). Puis ils ont franchi le Danube jusque dans les Balkans, où ils se sont éparpillés jusque sur les côtes de la mer Adriatique. Sur cette partie de l’Europe, il faut encore assurer la sécurité de l’Empire. A partir de 807, d’autres « marches » seront formées le long de l’Elbe et de la Saale, barrant le passage aux tribus slaves des Sorabes et des Abodrites. Cette frontière sera, comme le Rhin l’avait été aux IVème et Vème siècles, la séparation entre l’Europe chrétienne et le paganisme. Il est à noter et à constater qu’il y eut à ce moment-là une réapparition de l’esclavage. Le paganisme des Slaves les mettant en dehors de l’humanité, ceux d’entre eux qui étaient faits prisonniers étaient vendus comme du bétail. Aussi, le mot qui, dans la plupart des langues occidentales, désigne l’esclave (esclave, sklave, slaaf) n’est pas autre chose que le nom même du peuple slave. Gépides : peuple germanique proche des Goths installé en basse Vistule, puis au centre de l’Europe, notamment dans le bassin des Carpates (269–670) durant le Haut Moyen Âge. Abodrites : peuple slave établi au VIème siècle dans les régions connues aujourd’hui sous le nom de Holstein et de Mecklembourg, au nord-est de l’actuelle Allemagne. Les Sorabes : peuple slave vivant dans la région de la Lusace, qui s’étend en Allemagne à l’est de la Saxe et au sud-est du Brandebourg. La Lusace est partagée en Haute-Lusace et Basse-Lusace.
UN PEUPLE REMUANT…
Charlemagne ne conquit pas les peuples slaves qui vivaient à l’est de l’Elbe et de son affluent la Saale, ainsi que dans le quadrilatère de Bohême ; il les garda à une certaine distance et les empêcha de bouger, si besoin, souvent par la force. Ainsi, il put les contrôler.
D’ailleurs, ces États n’avaient pas de frontières précises et pérennes, et leur population y était éparpillée. Les Slaves circulaient souvent en changeant parfois de nom, ou en s’amalgamant avec d’autres peuplades, voire en formant des alliances.
Leur territoire était couvert par de vastes étendues de forêts parsemées de lacs, marais et landes, d’un accès particulièrement rude. A l’époque, les Germains nommaient les Slaves « Wendes ou Wenden ».
Au cours des VIème et VIIème siècles, plusieurs ethnies de Slaves traversèrent progressivement l’Oder et la Neisse occidentale, tout en se déplaçant vers l’ouest jusqu’à l’Elbe et la Saale, qu’ils franchirent en plusieurs points. Ces Slaves, dispersés en tribus composites, devinrent vite pour les Francs des voisins très menaçants.
C’est à partir de 789 que Charlemagne entreprit de s’allier, ou de conquérir par les armes cette multitude de peuplades, de renforcer et de consolider les territoire situés le long de la vallée de l’Elbe.
UN ENNEMI DISSÉMINÉ
Charlemagne rencontra une première fois les Slaves en 780, lorsque la guerre contre les Saxons dirigea les troupes franques jusqu’à l’Elbe. Les « Vélètes » (une confédération tribale de Slaves occidentaux, aussi nommés « Wélatabes » ou « Wiltses », ou encore « Wilzes ») vinrent par milliers, apeurés, se convertir au Christianisme et obtenir le sacrement du baptême.
En 782, le roi des Francs envoya des troupes affronter les Sorabes qui envahissaient et pillaient sans cesse le sud de la Saxe et une partie de la région de la Thuringe. La guerre ne fut véritablement officielle que sept ans plus tard.
Par leur nombre et leur vaillance au combat, les Slaves étaient impressionnants. Mais leur principal défaut fut leur division et leur éparpillement ; de ce fait, ils ne purent s’organiser et mener une action commune. Charlemagne, habilement, va tirer profit de la situation et exploiter leurs rivalités et leurs désunions, en essayant d’accroître la discorde entre les différents chefs de tribus.
Il conclut un traité d’alliance avec le duc des Abodrites (en conflit avec les Wilzes), et obtint son soutien. Les Abodrites respectèrent loyalement leurs accords avec les Francs dans leur combat contre les Saxons de Nordalbingie, auxquels ils vouaient une véritable détestation.
A la fin des guerres saxonnes, lorsque les populations vaincues furent déportées, les Abodrites reçurent en récompense des terres au-delà de l’Elbe. Cet acte de générosité augmentera d’autant plus leur fidélité envers le roi des Francs.
Lire :
– La soumission du chef saxon Widukind
– Charlemagne intègre la Saxe dans le royaume de France
Ce dernier rendit ainsi hommage au rôle important réalisé par le duc des Abodrites et à son armée dans la conquête de la Saxe.
En revanche, les Sorabes s’affichèrent plus récalcitrants. Entrés en guerre en 786, ils furent vaincus (leur duc, Milibwich, fut tué au combat, et ils durent livrer des otages aux Francs).
Il en fut de même avec les Wilzes (qui en permanence harcelaient les Abodrites depuis qu’ils avaient pactisé avec les Francs), ainsi qu’avec les Linons. Charlemagne décida d’employer la manière forte contre ces peuples indisciplinés.
En 789, afin de réprimer leur audace, le roi Charles lança plusieurs campagnes, soutenues par des forces Abodrites et Sorabes. Il traversa l’Elbe, progressa le long de la Havel (rivière du nord de l’Allemagne et affluent de l’Elbe) jusqu’à la Peene (petit fleuve du nord-est de l’Allemagne, en Mecklembourg en Poméranie-Occidentale), et arriva tout près de la mer Baltique.
Les Francs, qui progressèrent victorieusement, se livrèrent à des saccages méthodiques dans tout le nord du pays. Cette avancée triomphante va décider Ragovit, le chef des Wilzes, à livrer lui aussi des otages, et à prêter serment d’allégeance au roi des Francs.
Irrémédiablement, l’ensemble des populations habitant la rive droite de l’Elbe (les Linons, les Wilzes, les Sorabes, et les Bohémiens) furent tous astreints à s’acquitter d’un impôt.
Au cours de sa marche victorieuse vers l’Est, Charlemagne fit construire deux ponts sur l’Elbe. Pour renforcer sa défense et protéger ses arrières en cas de retraite éventuelle, il fit édifier à chacune des extrémités une forteresse de terre et de bois, cernée par un fossé et dotée d’une garnison.
Après avoir maté les Slaves, le roi Charles décida d’établir la frontière de son royaume sur ce fleuve. Il y fit bâtir, ainsi que sur la Saale, des châteaux forts et des têtes de pont, l’une en aval de Magdebourg, l’autre à Halle. Quant à la rive gauche de l’Elbe, elle fut fortifiée depuis la Normandie jusqu’à la forêt de Bohême.
Cette ligne de camps retranchés s’étalera jusqu’à la Bavière et la Carinthie (land – État fédéré- le plus méridional de l’Autriche, limitrophe de l’Italie et de la Slovénie).
Extension de l’Empire carolingien sous Charlemagne.
De ce fait, de la Mer du Nord à l’Adriatique, la suprématie franque fut solidement établie. Le royaume fut protégé par ce système qui se nommera « limes sorabicus », la « Marche des Slaves ». L’ensemble deviendra le Brandebourg (le premier élément du futur État Prussien).
Au haut Moyen Âge, une marche est un fief créé dans une zone frontalière, soit après conquête, soit par détachement d’un autre territoire, et auquel le souverain attribue une fonction particulière de défense contre les territoires voisins. Les marches désignent à l’origine de nombreux territoires frontaliers de l’Empire carolingien (espaces limitrophes, périphériques ou frontaliers qui, jadis, tenaient lieu d’espaces tampons entre deux souverainetés). Par extension, le terme a également désigné une province frontalière, militarisée ou non. La marche est l’ancêtre du marquisat ou du margraviat.
De surcroît, la direction des forces militaires d’Avarie (le pays des Avars), qui a sa propre organisation de défense, divisera en deux les Slaves (ceux du Nord et ceux du Sud), tout en les pacifiant les uns et les autres.
Les Slaves sont établis en Europe orientale, au-delà du Rhin et du Danube. Leurs tribus sont rattachées par leur langue et le paganisme. Divisées, et en incessants conflits les unes contre les autres, elles ne représentent pas une nation à part entière. Les Slaves pratiquent la pêche, l’agriculture, l’élevage, et font du négoce le long des fleuves praticables. Leur société est régentée par une aristocratie des « grands », elle-même soumise le plus souvent à l’autorité d’un duc, ou parfois d’un roi qui s’est propulsé au premier rang « par la noblesse de sa race et l’autorité de sa vieillesse ». Les chefs slaves vivent avec leur Cour, la « druzina », protégés dans leurs forteresses. Les Sorabes possèdent une cinquantaine de ces châteaux forts, tout comme les Abodrites. Les Wilzes en ont quatre-vingt-quinze. Les Slaves pillent leurs voisins et excellent dans l’art de la guerre. Malgré leur éparpillement sur un immense territoire, et malgré leurs divisions, ils représentent pour les Francs de terribles guerriers.
SARCOPHAGES CAROLINGIENS
– Lire : La Chapelle Notre-Dame de la Gayole
En 1964, à Cornillon-Confoux (Bouches du Rhône), en creusant un nouvel accès au cimetière, neuf sarcophages d’une nécropole paléochrétienne (Vème, VIIème siècle) furent mis au jour, ainsi que dix-huit autres en 1971.
Lire : Cornillon-Confoux
Sources :
Les rois de France des Éditions Atlas (Les Carolingiens).
Photos publiques Facebook
https://fr.wikipedia.org/wiki/Charlemagne
https://fr.vikidia.org/wiki/Arm%C3%A9e_carolingienne