Charles VII réforme l’armée française
LA GUERRE DE CENT ANS
De 1337 à 1453
LES VALOIS DIRECTS
CHARLES VII REFORME L’ARMÉE FRANÇAISE
SOMMAIRE
Charles VII est bien décidé, une bonne fois pour toutes, à se débarrasser de la présence anglaise sur le sol de France. Mais pour accomplir ses desseins, il doit s’en donner les moyens et entamer une refonte totale de l’armée.
Jusqu’alors, son royaume est ravagé par des compagnies de routiers et écorcheurs désœuvrés qui, en temps de paix, arpentent les campagnes en maraudes et pillent les populations.
Lire : Mercenaires routiers et écorcheurs au Moyen Âge.
En 1438, Charles a signé la Trêve de Tours, lui permettant de souffler provisoirement et de suspendre d’une manière temporaire la Guerre de Cent Ans.
Lire : La Trêve de Tours.
Pendant ce temps, en Angleterre la guerre civile, la « Guerre des Deux Roses », fait rage. Le roi de France Charles VII a donc les mains libres pour entreprendre ses réformes. Son but, jeter les bases d’une armée de métier. Celle-ci, payée à grand frais, va pouvoir par la suite se lancer à la reconquête des territoires perdus de Normandie et de Guyenne.
LA GUERRE DES DEUX ROSES
Les affrontements décimeront les lignées masculines des deux dynasties. L’issue de ce conflit conduira la famille Tudor à monter sur le trône d’Angleterre.
En juillet 1453, la victoire de Castillon viendra à point nommé pour conforter cette politique militaire, car elle mettra un point final à la Guerre de Cent Ans.
CONTEXTE
Les Trêves de Tours, qui ont été signées en 1438, laissent un précieux répit à Charles VII.
En 1444, il profite de ce délai opportun pour entamer une réforme aux objectifs très précis : mettre sur pied une solide armée, bien organisée et compétente. Elle aura pour mission de reconquérir les terres perdues qui n’ont pas encore été reprises aux Anglais. C’est une tâche qui paraît insurmontable, car malgré les réformes précédentes entreprises par Charles VII, l’ost royal n’est pas prêt à guerroyer efficacement.
C’est ainsi que la piétaille (l’infanterie) est prompte à s’enfuir dès le début des combats. En outre, cette masse compacte se transforme, une fois la bataille terminée, en une meute de brigands sillonnant les campagnes en quête de rapines.
Quant à la cavalerie, l’élite de l’armée royale, elle attire davantage les « épées de fer » (petits nobles sans fortune et bâtards roturiers) que les véritables gens de guerre.
LES COMPAGNIES D’ORDONNANCE
En 1439, pour remédier à cette situation, à l’occasion du dixième anniversaire de la prise de la ville d’Orléans par Jeanne d’Arc, Charles VII réunit dans cette ville les États Généraux de langue d’oïl (la moitié nord du royaume).
Parmi ces réformes qui touchent à l’administration et à la fiscalité, le roi tente de reprendre la main sur une armée de plus en plus libre de ses mouvements.
Les capitaines doivent détenir une autorisation royale pour pouvoir diriger les troupes qu’ils commandent ; les compagnies iront en garnison là où le roi l’ordonnera, etc.
Les sanctions encourues par les contrevenants seront extrêmement sévères : perte des titres et des terres (donc des revenus qui en résultent), interdiction de détenir un office (charge administrative très lucrative), perte de la protection du roi, etc.
Malgré des mesures fortes, le roi ne parvient pas à mettre en place sa réforme. D’abord, en raison du manque d’argent, mais aussi et surtout à cause de la grande opposition de ses vassaux, qui refusent ces changements menaçant leur intégrité.
C’est le début d’une grande rébellion de la noblesse. Elle prendra le nom de « Praguerie » (parce qu’une révolte identique a lieu à Prague au même moment).
La Praguerie est une guerre menée contre le roi de France par les grands féodaux du royaume entre mi-février et mi-juillet 1440. Les princes rebelles sont les ducs de Bourbon, de Bretagne, le dauphin Louis, et les grands seigneurs d’Alençon et de Vendôme.
Les nobles, à la suite des Princes des Fleur de Lys (les ducs d’Alençon et de Bourbon, le comte d’Armagnac principalement), entrent en rébellion ouverte contre le roi. Tous les révoltés, à l’exception du dauphin Louis (futur Louis XI), seront décapités ou pendus.
L’ordonnance d’Orléans est un échec pour Charles VII. Celui-ci décide alors d’amplifier le recrutement des soldats. Par l’ordonnance de Louppy-le-Château (mai 1445), il choisit 15 capitaines, chacun étant chargé de créer des compagnies. Ces capitaines seront triés selon des critères de noblesse, de loyauté au roi, et de compétences militaires. Afin de se garantir la fidélité des nouvelles compagnies, et pour éviter le retour d’une situation comme celle des années 1430, le roi Charles doit être sûr de la fiabilité des capitaines. Pour cela, il les choisit parmi l’élite nobiliaire, et ne prend que des hommes d’expérience (en 40 et 50 ans, donc avec au moins 20 ans de combat derrière eux).
UN NOUVEAU CORPS DE CAVALERIE
Chaque capitaine doit à son tour choisir 100 « lances ». Une lance comprend 6 hommes répartis ainsi : un homme d’arme, un cavalier lourd et chef de la lance, deux archers, un coutilier, un valet et un page.
Chaque compagnie rassemble donc 600 hommes, tous montés, dont au moins 400 combattants. On a ainsi une armée permanente de 9 000 hommes, payés par le roi et placés aux points stratégiques du royaume.
Plus tard viendront se rajouter cinq nouvelles compagnies, portant l’effectif total de l’armée à 12 000 soldats.
LES CAMPAGNES LIBÉRÉES DES ROUTIERS ET DES ÉCORCHEURS…
En 1445, Charles VII décide donc de mettre un terme aux excursions dévastatrices des mercenaires. Il crée quinze, puis bientôt dix-huit compagnies d’ordonnance permanentes, chacune choisie selon des critères sélectionnés. C’est ainsi que disparaissent de la cavalerie française un grand nombre de « hobereaux » (gentilshommes campagnards de petite noblesse). Mais aussi tous les princes qui sont tentés de mener leurs propres guerres à des fins personnelles, plutôt que de se battre pour la défense du royaume.
Charles VII choisit comme capitaines ses plus fidèles sujets (des anciens compagnons de Jeanne d’Arc, comme par exemple le futur maréchal Poton de Xaintrailles), ou des étrangers : Italiens, Espagnols, ou Ecossais.
Une fois expurgée de sa cohorte d’aventuriers vénaux, parmi lesquels se mélangent débauchés, mendiants, et parasites de la pire espèce, la nouvelle cavalerie du roi est fin prête. L’armée du Valois peut commencer sa reconquête…
Néanmoins, il restera au souverain à mettre sur pied une « petite ordonnance », c’est-à-dire une infanterie qui aura pour mission d’occuper les territoires reconquis. Ces « petites ordonnances » sont composées de quatre hommes qui seront disposés dans les grandes cités du royaume. L’entretien de cette troupe sera à la charge des populations concernées.
NAISSANCE DU CORPS DES « FRANCS ARCHERS »
Cette ébauche d’armée permanente ne décide pas Charles VII à abolir le ban et l’arrière-ban ancestral (service armé dû au seigneur par tout propriétaire de fief).
C’est un mode de recrutement obsolète, et qui a montré ses limites. Mais le roi Charles espère en retirer beaucoup plus d’argent que de combattants. En effet, les possesseurs de fief ont la possibilité de racheter ce service au souverain. Et il faut toujours plus d’argent ; tout le monde le sait : l’argent, c’est le « nerf de la guerre ».
L’autre point faible de l’ost royal, c’est l’infanterie. Celle-ci ne peut rivaliser avec les redoutables archers gallois et écossais.
L’édit de Montil-les-Tours du 28 avril 1448 voit la naissance du corps des « francs archers » ; « francs » parce qu’ils sont exonérés de la taille.
Chaque paroisse de plus de 50 feux doit fournir un archer à l’ost royal. Ces hommes sont des roturiers ; ils doivent s’entraîner au tir à l’arc tous les dimanches et doivent montrer leur capacité une fois par an, lors de la « revue de détail ». Cette milice constitue une réserve d’environ huit mille combattants.
Bien vite on assiste à une ruée des candidatures. Elles vont attirer un grand nombre d’opportunistes et de profiteurs. Ceux-ci sont plus alléchés par l’exemption de la taille, et par la solde de quatre francs, que par la vocation militaire. Certaines paroisses produiront comme volontaires des infirmes, et même des vieillards séniles !
En 1480, face à de tels abus, Louis XI finira par supprimer les « francs archers ». Il les remplacera par des mercenaires suisses soldés à grands frais.
LA PUISSANTE ARTILLERIE FRANÇAISE
L’artillerie fait un bond spectaculaire, notamment depuis 1445, date où les frères Bureau, prestigieux fondeurs de canons, en détiennent la charge. Inventeurs de génie, ils mettent au point des canons mobiles dont les affûts sont montés sur des essieux. Ces nouvelles armes ont des trajectoires plus précises, et dès 1452, les projectiles utilisés sont devenus des boulets explosifs. A la fin de la Guerre de Cent Ans, Charles VII, avec près de cent cinquante canons, possède l’artillerie la plus puissante et la plus redoutable du monde.
Lire : La naissance de l’artillerie.
Sources :
Photos publiques Facebook
Les rois de France des Éditions Atlas (Valois directs).
https://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_de_Cent_Ans
https://fr.wikipedia.org/wiki/Compagnie_d%27ordonnance