Joseph Fouché, Duc d’Otrante, comte Fouché
par Jean Marie Borghino · 10 janvier 2015
Joseph Fouché
(21 mai 1759 – 26 décembre 1820)
Duc d’Otrante, comte Fouché
Dit Fouché de Nantes
«Ce singulier génie qui frappa Napoléon d’une sorte de terreur, ne se déclara pas tout à coup chez Fouché. Cet obscur Conventionnel, l’un des hommes les plus extraordinaires et les plus mal jugés de ce temps, se forma dans les tempêtes.»
Honoré de Balzac (1799-1850)
Naissance
Joseph Fouché naît le 21 mai 1759 dans la petite commune de « Le Pellerin », près de Nantes en Loire-Atlantique, et décède le 26 décembre 1820 à Trieste, au bord de la mer Adriatique. La ville, alors redevenue autrichienne depuis 1814, revendiquera plus tard ses appartenances italiennes en tant que territoire irrédente.
L’individu
Fouché de Nantes était l’homme de toutes les contradictions. D’aucuns voyaient en lui un caméléon, qui n’hésitait pas, pour atteindre ses objectifs, à se rapprocher et faire cause commune avec le diable. Adroit et malin, il fut craint par Robespierre (l’incorruptible), à la fois appréhendé et apprécié par Napoléon. Il put ainsi se maintenir avec hypocrisie dans les plus hautes sphères du pouvoir. Il suscita la haine et l’aversion d’un grand nombre de ses contemporains, et la surabondance de malédictions dont il fut la cible, ne l’empêcha pas de traverser sans coup férir et la Révolution française et l’Empire. Se tenant toujours au plus près du pouvoir, cet homme insaisissable, surprenant, au caractère complexe, sut résister alors que les Grands s’écroulaient autour de lui.
Jeunesse
Fils d’un officier de marine, il décide dans un premier temps de suivre les traces de son père. Puis, se destinant à l’enseignement comme professeur de mathématiques et de physique, il entre au séminaire de l’Oratoire de Nantes où il reçoit les ordres mineurs de la hiérarchie ecclésiastique.*
Fouché enseignera successivement à Saumur, Vendôme, Juilly et Arras où il y rencontrera Robespierre.
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Pendant la Révolution française (1792-1799).
En 1789, lorsque la Révolution française éclate, c’est avec fougue et ferveur qu’il en servira la cause.
Carrière politique.
En 1792, de retour à Nantes, Fouché commence sa carrière politique. Elu député à la Convention Nationale, il siège dans un premier temps dans les rangs des Girondins. Après avoir voté la mort du roi, lors du procès de Louis XVI, il change de groupe politique et se retrouve sur les bancs des Montagnards. Fervent défenseur de l’esprit révolutionnaire, il est envoyé en mission dans l’Ouest (recrutement de volontaires pour mater l’insurrection vendéenne), et dans le Centre de la France, où il participe activement à la *déchristianisation de la Côte-d’Or et de la Nièvre.
Le Centre et L’Ouest.
En Province comme dans les campagnes, toutes ces mesures sont ressenties avec stupeur et colère par le peuple. Dans l’Ouest par exemple, le curé, avec son église et son clocher, représente le clou central de la vie sociale vendéenne. Mis à part les bonnes œuvres, et les offices relatifs aux services religieux, il est le lien privilégié avec le petit peuple des paysans, des commerçants, des pécheurs… Ses prérogatives sont importantes : elles s’étendent des registres de l’état-civil (qui seront par la suite délégués aux mairies), jusqu’à l’enseignement et la transmission du savoir. De telles mesures vont générer la colère et engendrer le soulèvement populaire. Ce sont ces troubles-là qui vont en partie amener la terrible Guerre de Vendée. Le 23 octobre 1793, le gouvernement révolutionnaire de Paris (Commune de Paris) ordonne la fermeture de toutes les églises de la capitale, interdisant ainsi tous les rassemblements pour la pratique du culte. *
Fouché, « le mitrailleur de Lyon » (1793-1794).
Lyon, ville de manufactures, vit essentiellement du marché de la soie. La corporation subit de plein fouet la crise économique de la France ; 20% de la population lyonnaise plongent dans la disette. En 1793, la ville se soulève contre la Convention et prend le parti des Girondins. La répression est impitoyable et la ville doit se rendre après un siège de deux mois.
Le 30 octobre 1793, Fouché, qui se trouve à ce moment-là dans la Nièvre, est désigné par la Convention avec Collot d’Herbois pour réprimer l’insurrection. Il est choisi pour exécuter le décret qui stipule la destruction de la ville. Il fera preuve à cette occasion d’une intense cruauté en répandant un état de terreur extrême. Jugeant la guillotine inefficace et trop lente pour supprimer les foules insurgées, il lui préférera les canons chargés avec de la mitraille et recevra, pour cet acte, le surnom de « mitrailleur de Lyon ».
Il est à noter que les seuls à tirer profit et à se réjouir de ces troubles, ce sont les britanniques dont les intérêts consistent à répandre, à l’intérieur de la France, un maximum d’événements nuisibles à la République. Ce qui doit, le pensent-ils, discréditer cette dernière aux yeux de l’Europe.
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Sous le Directoire de 1795-1799.
Après avoir participé à la chute de Robespierre (l’Incorruptible), Fouché revient sur la scène politique du pays et collabore avec Barras lors de la journée du 13 vendémiaire an IV. Il devient, par la suite, le représentant du Directoire à la fois à Milan, en république Cisalpine et à la Haye, en Hollande. Le 2 thermidor an VIII (20 juillet 1799), il est nommé ministre de la police, nomination qui lui permet d’arrêter les Directeurs lors du coup d’état du 18 brumaire (9 novembre 1799).
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Sous le Consulat.
Conforté dans sa fonction et dans ses attributions par les trois consuls Bonaparte, Sieyès et Ducos, il se lance alors dans le remaniement de son ministère. Il donne une part prépondérante aux services d’espionnage et reçoit en sus de Bonaparte, la direction de la gendarmerie. Il se retrouve ainsi à la tête d’une puissante police politique, et devient un des personnages les plus importants du Consulat. C’est lui qui prouvera que l’attentat de la rue Saint Nicaise du 24 décembre 1800 était bien l’œuvre des royalistes.
En 1802, Fouché s’opposera à la charge de Consul à vie, ce qui provoquera sa destitution et la suppression de son ministère. Il sera néanmoins élu sénateur, et restera le principal informateur du Premier Consul.
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Sous l’Empire.
En 1804, il rejoint l’Empire. En juillet, face à l’incapacité de ses successeurs à la tête de la police, il est rappelé et reprend son ministère. Un poste qu’il occupera avec efficacité jusqu’en juin 1810. En 1808, il devient Comte d’Empire, et Duc d’Otrante en 1809. En juillet 1810, il tombe à nouveau en disgrâce : il envoie un émissaire à Londres, sans en avertir Napoléon, pour soumettre au ministre anglais Arthur Wellesley (duc de Wellington) des propos de paix.
En 1813, après la Campagne de Russie, il bénéficie d’un retour en grâce et se voit nommé gouverneur des Provinces illyriennes sur l’Adriatique.
En 1814, avec Joachim Murat, il se rend à nouveau coupable de trahison envers l’Empereur. Il fait allégeance auprès du Comte d’Artois (futur Charles X), et lui propose la lieutenance générale du royaume une fois l’Empire aboli.
Lors de la première Restauration, il sera suspecté de conspirer avec les républicains. Au retour de l’île d’Elbe, il est à nouveau réhabilité sur son poste de ministre de la police, fonction qu’il assumera pendant les Cent-Jours. Après Waterloo, il devient président du gouvernement provisoire ; c’est lui qui sera chargé de parlementer avec les pays coalisés.
Estimant le retour du roi inévitable, il devient tout naturellement ministre de Louis XVIII. Mais celui-ci n’a pas oublié le passé de Fouché comme régicide, et l’éloigne en le nommant ambassadeur à Dresde.
Le 12 janvier 1816, il apprend la promulgation d’une ordonnance royale qui proscrit tous les régicides et le condamne à l’exil. Fouché se retire alors à Trieste avec une immense fortune ; il y décède le 26 décembre 1820. Depuis 1875, sa tombe se trouve au cimetière de Ferrières-en-Brie en Seine et Marne.
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