Les Témoins du Passé – Le château de Villerouge Termenès

LES TÉMOINS DU PASSÉ

LE CHÂTEAU

DE

VILLEROUGE TERMENES

Le château de Villerouge-Termenès

Blason de la ville de Villerouge Termenès

Blason de la région Occitanie

 

TYPE : château fort.

ÉPOQUE : Moyen Âge.

DÉBUT DE CONSTRUCTION : XIIème siècle.

FIN DE CONSTRUCTION : XIVème siècle.

ÉTAT DE CONSERVATION : vestiges.

LIEU : Villerouge Termenès, département de l’Aude (Occitanie).

PROPRIÉTÉ : de la commune.

PROTECTION : classé Monument Historique par arrêté le 6 octobre 1976.

PRÉSENTATION

Villerouge Termenès est un château de plaine édifié dans la vallée du Libre. Il fut jusqu’à la Révolution la propriété des archevêques de Narbonne. Le site est mentionné pour la première fois en 1110.

Lire :  Le château des archevêques de Narbonne : Le château de Capestang.      

Au premier coup d’œil, l’édifice s’affiche sous la forme d’un quadrilatère irrégulier. Il est flanqué par quatre tours semi-circulaires, dont la plus importante était utilisée comme donjon. Ses murailles sont truffées de grandes archères.

Les deux tours du couchant (ouest) sont moins volumineuses que les deux autres. Au nord, on découvre une porte avec des mâchicoulis.

Le portail ogival précédant cette porte est décoré à sa clé d’un blason aux armes de Bernard de Farges, archevêque de Narbonne (1311-1341).

Villerouge Termenès est connu pour le bucher dressé le 24 août 1321, où Guilhem de Bélibaste, dernier parfait cathare, fut brûlé sur ordre de Bernard de Farges.

SITUATION

Le château de Villerouge-Termenès se trouve sur la commune du même nom, dans les Corbières, dans le département de l’Aude (en région Occitanie).

UN PEU D’HISTOIRE

Lire : Répertoire de la Croisade des Albigeois.

Carcassonne 1209

Le catharisme, une menace pour l’Église et pour le roi

Vers le milieu du 12ème siècle, alors que l’Europe est dominée par une profonde et ardente foi catholique, le Midi toulousain est gagné par une hérésie toute aussi enflammée, le Catharisme. Cette nouvelle religion, qui apparaît vers le 12ème siècle dans les Balkans, s’appuie essentiellement sur une dualité. Ses disciples, « les Parfaits », croient en deux principes divins opposés : d’une part un monde spirituel avec un Dieu bon, celui de l’Evangile, et de l’autre un monde matériel et corrompu avec un prince du mal et des ténèbres, le Dieu de l’Ancien Testament. Les valeurs morales et l’austérité de ses adeptes contrastent avec l’opulence et le relâchement des représentants de l’Église catholique. Les cathares rejettent les sacrements, les indulgences, le purgatoire et le culte des saints. Ils ne glorifient point le sacrifice de la croix, et ne reconnaissent pas le pape comme le successeur légal des apôtres. Refusant le concept de propriété et condamnant le serment, ils sont considérés comme subversifs par la société féodale et par la royauté. Les fondations du christianisme vont chanceler, au point de décider le pape Innocent III à déclarer les « Bons Hommes » et les « Bonnes Dames », hérétiques.

Le Midi de la France en 1209, après la mort de Raymond V.

Carte du Languedoc au XIIIème siècle

 

En France, lorsque les croyances cathares apparaissent, la chrétienté est partagée au sein de l’Église : une grande divergence d’idées demeure entre les Français du Nord et les gens du Midi. Alors que ceux du Nord admettent la foi catholique romaine, dans les régions du Sud l’on a adopté l’« arianisme » depuis les premières heures du christianisme. Cette disparité va opposer le Languedoc à l’autorité de Rome, et faire de lui un foyer où les hérésies et les schismes vont se développer sans contrainte.

C’est à Arius (256-336), théologien alexandrin, que l’on attribue au début du 4ème siècle le courant de pensée théologien, l’« arianisme ». Sa pensée assure que si Dieu est divin, son fils Jésus, lui, est avant tout un humain mais possède cependant une part de divinité. C’est en 325 que le concile de Nicée, rassemblé par l’empereur Constantin, rejeta l’« arianisme », jugé hérétique.

HISTORIQUE

Les premières mentions historiques du château remontent au XIIème siècle.

A cette époque et jusqu’à la Révolution française, les puissants archevêques de Narbonne sont les seigneurs du château et du village.  

Nonobstant, le château de Villerouge-Termenès sera plusieurs fois convoité et occupé.

En 1107, le pape Pascal II doit confirmer l’archevêque Richard dans sa possession de Villerouge qui est, depuis 1070, occupé par Pierre de Peyrepertuse.  

Celui-ci le donnera en dot à sa fille Garsende de Peyrepertuse au moment de ses épousailles avec Pierre Olivier de Termes

Vers 1110, la famille de Termes acceptera de restituer le château à l’archevêque de Narbonne.

D’autres différends auront lieu entre les châtelains de Termes et les archevêques de Narbonne.  

En 1227, le pape Honorius III demande à son légat de donner suite aux plaintes de l’archevêque contre les appropriations du chef de la Croisade, Simon de Montfort, et de son vassal Alain de Roucy, qui avaient investi les fiefs des anciens seigneurs de Termes.

Le village est directement lié au Catharisme, et en 1321, Guilhem Bélibaste, le dernier parfait cathare occitan connu, y est brûlé sur le bûcher.

Seuls les Parfaits pouvant transmettre la religion, la mort de Bélibaste marquera la fin de la religion cathare.

Au XIVème siècle, le château est le centre administratif, fiscal et judiciaire de l’archevêché pour le Termenès. Il s’affirme comme l’un des plus riches des Corbières ; il est le siège d’une des 11 bayles de l’Archevêché.

Villerouge était situé au centre d’un immense domaine, et les archevêques durent défendre leurs biens contre leurs voisins avant et après la Croisade des Albigeois. L’archevêque était le seigneur de nombreux villages des environs. Il percevait des dîmes, des taxes et des impôts. Pour effectuer ces tâches et gouverner ses vassaux, il avait à sa disposition un bayle (ou bailli). 

Le château fut classé monument historique en 1976.

Bayles, ou baillis, et prévôts sont des agents de même nature, des percepteurs d’impôts, recrutés parmi la petite noblesse ou la bourgeoisie.

Le bailli était, sous l’Ancien Régime français, un officier de judicature représentant de l’autorité du roi ou du prince dans le bailliage, chargé de faire appliquer la justice et de contrôler l’administration en son nom.

La juridiction dont est responsable un bailli s’appelle un bailliage. En France méridionale, le terme généralement utilisé était « sénéchal » et la circonscription la « sénéchaussée ». En Provence, les couples de mots « bayle », « baillie » ainsi que « viguier », « viguerie » étaient répandus.

UNE JOURNÉE BIEN REMPLIE

Une journée de travail pour labourer, une autre encore pour tailler la vigne, assurer le transport de la récolte jusqu’au cellier… le bayle est chargé de faire respecter les nombreuses corvées que doivent les paysans à leur seigneur. Il veille également à percevoir la dîme, ainsi que les taxes et impôts. Le bayle, c’est aussi celui qui accueille le personnel au service de l’archevêque, ses hôtes, ou l’archevêque lui-même.

Lire : la paysannerie et la ruralité au Moyen Âge.

LE CHÂTEAU DE VILLEROUGE TERMENES

LE PLAN

Au premier abord on distingue quatre splendides tours, des créneaux et une porte fortifiée. Nul doute : la résidence des archevêques de Narbonne est bel et bien une forteresse. Elle s’incorpore à l’enceinte fortifiée du village, tout en défendant la partie la plus exposée aux dangers d’un possible assaut venu de l’extérieur.

1– 1ère salle avec fresques.

2– 2ème salle avec fresques.

3– 3ème salle avec fresques.

4– La cour intérieure.

5– Le 1er étage.

6– Le chemin de ronde.

7– Le donjon.

LA COUR D’ENTRÉE

LA COUR INTÉRIEURE & L’ACCUEIL

Des poutres et des escaliers défilent sous nos yeux, et le bois de châtaignier donne au décor un aspect cossu. C’est une représentation trompeuse, car au Moyen Âge, cet espace formé par l’accueil était à ciel ouvert. Il fallait le traverser pour se rendre au donjon.

En nous retournant, nous sommes interpelés depuis l’étage par une voix grave, celle du mannequin qui représente le bayle et qui se penche sur nous, visiteurs.

Au-delà de notre interlocuteur se dresse le donjon, entouré d’un hourd représentant un chemin de ronde. Cette ouvrage de bois est fidèlement disposé à l’emplacement du dispositif d’origine médiéval. On distingue d’ailleurs sur les parois les « trous de boulin » utilisés pour le chemin de ronde actuel.

Au XIVème siècle, Villerouge est le siège de deux tribunaux de l’archevêché.

Le Tribunal de l’Officialité, dirigé par l’official, est chargé des affaires spirituelles.

Le Tribunal de la Temporalité tient « assises » à Villerouge une fois l’an, sous la présidence du sénéchal de l’archevêque pour juger les crimes. Le reste de l’année, les affaires du Termenès se jugent à Narbonne.

Enfin, le notaire de l’archevêque a la haute main sur toutes les affaires que traitent ses confrères. C’est lui qui reçoit les testaments et les actes de mariage, documents stratégiques pour les familles.

LES SALLES DÉCORÉES

Les deux premières salles laissent apparaître sur les murs des fresques réalisées au XXème siècle, fidèles aux modèles médiévaux. Le thème décoratif de la vigne sur les encadrements de portes de la première salle nous rappelle à quel point cette culture était importante en ces temps lointains. (Le vin est un élément essentiel dans l’Eucharistie ; pour les croyants il symbolise le sang du Christ lors de la messe).

Dans la vie de tous les jours, le peuple l’utilise en remplacement de l’eau, jugée très souvent impure et malsaine.

SCÈNES DE LA VIE DE GUILHEM BELIBASTE

BELIBASTE ET BERNARD DE FARGES

Ces deux personnages vont nous accompagner tout au long de notre visite. De salle en salle, leur récit retrace la grande Histoire de la société médiévale languedocienne. Et tout spécialement celle de l’antagonisme entre les Cathares et les Catholiques. Cette opposition brutale se déroulera tout au long du XIIIème siècle et prendra fin avec le bûcher de Bélibaste, le dernier « Parfait », brûlé en ce lieu en 1321.

La religion cathare avait alors presque entièrement disparu. L’Inquisition les avait pourchassés, capturés et exécutés. Elle avait tout détruit jusqu’aux liens qui les unissaient entre eux. Le frère dénonçant la sœur, le fils livrant la mère, pas de pardon sans trahison. Ce fut la méthode imposée par l’Église de Rome envers ceux qu’elle qualifiait d’hérétiques, et qui se faisaient appeler eux-mêmes « les bons chrétiens ».    

Dans la salle suivante, nous apercevons un four et une imposante cheminée comportant un « recantou ». C’est une alcôve munie d’un banc de pierre qui servait aussi bien à y déposer des pots à feu que de s’assoir pour se réchauffer. Cette cavité est bâtie en forme de demi-lune.

Au plafond, on découvre un beau parquet moderne posé sur des corbeaux en pierre. Sur un support saillant du mur, on peut apercevoir les armes de Bernard de Farges.

Cette salle présente aussi plusieurs fresques médiévales. Notamment une du XIVème siècle, laissant apparaître Saint-Christophe.

Dans une petite pièce attenante, on distingue aussi un évier taillé dans une petite fenêtre.

Dans la première salle du 1er étage, on peut découvrir une scène de repas peinte sur le mur. Elle permet de mieux comprendre ce que pouvait être un repas à la table de l’archevêque.

On y distingue les tranchoirs (planche de bois qui servent d’assiette). Les gobelets habituellement partagés entre plusieurs convives sont ici individuels. Au centre, le blason de l’archevêque Bernard de Farges.

Au Moyen Âge tout a valeur de symbole, tout exprime l’ordre voulu par Dieu. La société temporelle est organisée en trois ordres : ceux qui protègent (les nobles), ceux qui prient (les religieux), ceux qui nourrissent (les paysans).

Chacun se nourrit selon son rang. Plus on est de grande noblesse, plus on mange (tout particulièrement de la viande et du gibier), car la chasse est l’apanage des nobles. Les oiseaux sont appréciés, car ils évoluent dans le ciel, donc plus près de Dieu. Les porcs au contraire, servent à nourrir les paysans…

L’ENCEINTE FORTIFIÉE

LE CHEMIN DE RONDE

En quittant le chemin de ronde on aperçoit une poutre posée au mur, à droite de la porte de sortie. Elle est décorée des armes de l’archevêque Bernard de Farges et date du XIVème siècle. Selon toute vraisemblance, à l’origine, cette poutre avait dû être installée verticalement.

Le chemin de ronde relie les courtines (c’est-à-dire les remparts) les unes aux autres, ainsi que les tours de défense et le donjon.

La vallée, ceinturée par les monts que l’on distingue au loin, apparaît entre les créneaux.

LE DONJON

Il date de la fin du XIIIème siècle. 

Salle supérieure du donjon

Dans cette première salle, située au deuxième étage, on peut apercevoir une belle fenêtre à coussiège. On distingue encore les traces des gonds et du verrou d’un petit volet intérieur.

La voûte en berceau montre à sa base les trous ayant servi aux échafaudages au moment de sa construction.

Un coussiège est un banc ménagé dans l’embrasure d’une fenêtre par un ressaut de la baie. Forme courante dans les constructions médiévales, il est souvent en pierre, intégré à la maçonnerie, revêtu de bois, de coussins. …

Escalier en colimaçon reliant les deux niveaux

Cette tour, plus grosse que les autres, sert de donjon pour protéger la partie la plus exposée du château. Un escalier mène à la salle basse. Il est bâti dans l’épaisseur des murs, ce qui permet aux défenseurs de circuler en toute protection.

Salle inférieure du donjon

Sources :

Fascicule offert au public avec le droit d’entrée.

www.payscathare.org

www.villerouge.fr

https://fr.wikipedia.org/wiki/Ch%C3%A2teau_de_Villerouge-Termen%C3%A8s

http://www.audecathare.fr/chateaux/chateau_villerouge_termenes.htm

https://www.grandsudinsolite.fr/98-11-aude-le-chateau-villerouge-termenes.html

https://monumentum.fr/ruines-chateau-pa00102922.html

 

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