La légende de Roland de Roncevaux
LES CAROLINGIENS
LA LÉGENDE DE ROLAND DE RONCEVAUX
La mémoire collective est assez capricieuse ; elle ne retient parfois qu’un mot, qu’une phrase, qu’une anecdote, sans pour cela approfondir le sujet. Aussi, chose tout à fait remarquable, cet épisode célèbre est traité par tous comme une victoire. Pourtant, la bataille de Roncevaux est une défaite qui se termine dans un bain de sang, mais qui s’honore de la mort d’un glorieux vaincu. C’est de ce héros illustre et malheureux, de cet immortel chevalier que j’ai voulu ici rappeler la légende…
Roland, dit « Roland le Preux » ou « Roland de Roncevaux », meurt en 778 à Roncevaux (probablement au col d’Ibañeta, en Espagne). Neveu de Charlemagne, c’était un guerrier franc, préfet de la marche de Bretagne, chargé de défendre la frontière du royaume des Francs contre les Bretons.
Selon la légende, il a notamment donné son nom à la « brèche de Roland » et à la « Chanson de Roland ». Il est considéré comme un des douze preux de Charlemagne.
Le personnage de Roland est associé à son épée Durandal, à son cheval Veillantif, et à son cor, un olifant. Sa mort à Roncevaux, dans une embuscade tendue par des Vascons (Basques), est racontée dans la Chanson de Roland, où les Vascons sont remplacés par les Sarrasins.
Les Sarrasins : En Europe, durant le Moyen Âge, le mot « Sarrasins » ou « Sarrazins » était employé pour dénommer les peuples de confession musulmane. On les appelait aussi « Mahométans », « Arabes », « Ismaélites », ou bien « Agarènes ». Quant au terme « Maures », il faisait allusion aux Berbères de l’Afrique du Nord après la conquête des Omeyades. Les mots « Islam » et « Musulmans » n’existaient pas encore en Occident médiéval. En français, le mot « Musulman » est cité pour la première fois en 1551 ; « Islam » en 1697. Avant ces dates on utilisait, pour définir la religion des peuples musulmans, l’expression « loi de Mahomet », ou « loi des Sarrasins ».
LA BATAILLE
La légende de Roland à Roncevaux est un élément essentiel de la gloire de Charlemagne, illustre empereur à la « barbe fleurie ». Grâce à la chanson de Roland, première chanson de geste, sa renommée sera un des épisodes majeurs de l’Histoire de France.
Mais commençons par le commencement…
En 777, le prince sarrasin Soliman ben Alarabi, le « Wali » (gouverneur) de Saragosse, se rend à Paderborn pour y rencontrer Charlemagne. Au cours de l’assemblée générale qui se tient dans le nouveau palais, Soliman fait une proposition spectaculaire au roi des Francs ! Il lui fait une offre alléchante ; celle de le laisser envahir le nord de l’Espagne, tout en lui promettant de lui « abandonner » les villes « auxquelles il commande » : Pampelune, Saragosse et Barcelone. En soutenant militairement le « Wali » contre l’émir de Cordoue (lui-même en révolte contre Bagdad), Charlemagne entrevoit la possibilité de se rapprocher et de consolider les liens avec les Abbassides. De plus, il souhaite apporter son soutien aux populations chrétiennes d’Espagne, qui sont réfugiées pour la plupart dans les Asturies. En outre (et c’est une de ses principales préoccupations), il veut assurer la protection de ses frontières en s’emparant des contrées limitrophes. Il entend ainsi protéger l’Aquitaine, qui est régulièrement assaillie par des incursions sarrasines.
Depuis le mois d’avril 778, le roi est en Espagne. Il veut renforcer la frontière d’Aquitaine. L’entreprise s’annonce ardue, et ne sera pas couronnée de succès. En effet, les territoires sont alors aux mains des Musulmans. Charlemagne s’empare de Barcelone et de Pampelune, puis par la suite, les deux villes seront reconquises par les Sarrasins.
A la demande de Soliman ibn al-Arabi, le « wali » de la ville, le roi conduit ses troupes à Saragosse. Mais le gouverneur a été remplacé entre-temps, et Charles trouve les portes de la ville closes. Refoulés devant Saragosse, trahis par leur allié maure infidèle, les Francs rentrent bredouilles en franchissant les nombreux cols pyrénéens.
Mais avant, pour compenser cet échec, l’aile occidentale de l’armée franque, conduite par le roi, se venge sur la ville de Pampelune. La cité navarraise avait pourtant résisté à la pression musulmane ; mais les Francs abattront ses remparts.
Le 15 août 778, l’armée franque, commandée par Charlemagne, revient d’Espagne à la suite de son long voyage au-delà des Pyrénées. Sur le chemin du retour, le roi marche avec le plus gros de ses troupes. Austrasiens, Bourguignons, Neustriens, Lombards, et Provençaux avancent avec à leur tête les principaux vassaux de Charlemagne et les grands officiers du palais. Ils parviennent au col de Roncevaux (probablement au col d’Ibañeta, en Espagne), à une quarantaine de kilomètres au Nord de Pampelune.
La région est sauvage, inhospitalière, parsemée de gorges et de gouffres, où vivent les « Vascons ». Un peuple, ancêtre des Basques, en qui les Francs ne font aucune confiance.
Les Vascons ont prêté allégeance à Charlemagne, mais ce n’est en fait qu’un leurre : ils sont remplis de haine et de vengeance envers les Francs.
En représailles du sac de Pampelune, les Vascons se sont embusqués de part et d’autre du col de Roncevaux. Bien cachés, ils contemplent la lourde armée des Francs défiler sous leurs yeux sur les chemin difficiles de montagne.
L’avant-garde passe, s’éloigne, puis le principal corps de l’armée s’engouffre et s’éloigne ; les Vascons ne bougent pas et restent silencieux. Ils savent qu’ils ne font pas le poids face à la puissante armée du roi Charles. Ils veulent surtout l’arrière-garde, là où se trouvent les charriots remplis de vivres et de butins de guerre. C’est le moment propice pour eux de faire un carnage avantageux.
Charlemagne et le gros de l’armée se trouvent maintenant loin devant, et ignorent tout ce qui se trame à l’arrière de la colonne. A la tombée de la nuit, c’est la surprise totale : les Vascons se ruent sur les gardes qui protègent le convoi et les massacrent. Ceux-ci n’ont le temps ni de se positionner, ni de pouvoir se défendre et de riposter avec leur cavalerie.
Le combat est pathétique ; l’arrière gardes est décimée ; tous meurent avec vaillance et désespoir.
UNE DÉFAITE TERRIBLE…
Roland est une des plus intéressantes et aussi une des mieux conservées de ces figures presque réelles, à demi imaginées. Sa mort à Roncevaux, son courage et celui des douze pairs qui l’accompagnent, constituent un des épisodes exceptionnels de la littérature du Moyen Âge. La célèbre Chronique de l’archevêque Turpin a fourni les principales lignes où sont représentés tous ces personnages fameux des fantaisies chevaleresques du Moyen Age…
Selon la Chronique de Turpin (aussi appelée Pseudo-Turpin), datée du XIIème siècle, qui raconte les aventures de Charlemagne en Espagne, il serait mort à Vienne, en Isère. Son personnage est lié à ceux de Charlemagne et de Roland, qu’il accompagne dans des chansons de geste du cycle carolingien, composées à partir du XIème siècle. Sa plus ancienne mention se trouve probablement dans la « Nota Emilianense » (un très court texte en latin rédigé vers 1065 dans la marge d’un manuscrit, et résumant l’histoire de Roland). Il y est cité dans une liste des neveux de Charlemagne : « Il avait à ce moment-là douze neveux (…) ; parmi eux on nomme Roland, Bertrand, Ogier à l’Épée Courte, Guillaume au Nez Courbé, Olivier et l’évêque Turpin ».
UNE DÉFAITE CRUELLE…
Parmi les victimes gisant au milieu de leurs hommes, qu’ils n’ont pas voulu abandonner, se trouve Roland, le lieutenant de Charlemagne, tenant sa fidèle épée Durendal. Il y a Egghiard (l’échanson du roi), qui commandait l’arrière-garde sacrifiée, et Anselme (comte du palais), allongé et mortellement blessé.
Roland sonne de l’olifant pour avertir son roi Charles ; mais il est trop tard. Lorsque Charlemagne arrive enfin sur le lieu du carnage, les cadavres gisent partout, et les Vascons ont pris la fuite dans l’obscurité des montagnes. La nouvelle du massacre de Roncevaux marquera énormément les esprits.
VITRAIL DE ROLAND A RONCEVAUX – XIIIème SIÈCLE, CATHÉDRALE DE CHARTRES.
Chose rare, le dessin représente Roland à deux reprises, sur deux tableaux distincts : alors qu’il fend le rocher, et pendant qu’il sonne du cor. À ses pieds, le sol est couvert de morceaux de Sarrasins découpés lors du combat précédent. On observe deux têtes sans corps, et deux corps sans tête. Le plus spectaculaire étant le Sarrasin en cotte de mailles verte, coupé en deux au niveau du ventre, dont les boyaux rosâtres sortent en nappe de la moitié inférieure. Comme toujours, les Sarrasins sont représentés avec des casques pointus et des boucliers ronds. Roland n’a plus son bouclier ; il garde son heaume à sommet plat dans sa tentative de briser Durandal, mais son heaume est posé à ses pieds pendant qu’il sonne de l’olifant. Dans ces deux représentations, un nimbe rouge le désigne comme martyr de la foi ; et la main de Dieu sortant des nuages bénit les deux scènes, montrant qu’il a gagné son paradis par sa mort contre les infidèles. Un « nimbe » est un cercle, un disque de lumière qui, depuis l’Antiquité, coiffe d’une auréole la tête des personnages sacrés, des héros divinisés, des Dieux ou des Saints.
SARCOPHAGES CAROLINGIENS
– Lire : La Chapelle Notre-Dame de la Gayole
En 1964, à Cornillon-Confoux (Bouches du Rhône), en creusant un nouvel accès au cimetière, neuf sarcophages d’une nécropole paléochrétienne (Vème, VIIème siècle) furent mis au jour, ainsi que dix-huit autres en 1971.
Lire : Cornillon-Confoux
Sources :
Les rois de France des Éditions Atlas (Les Carolingiens).
Photos publiques Facebook
https://fr.wikipedia.org/wiki/Charlemagne
https://fr.vikidia.org/wiki/Arm%C3%A9e_carolingienne
https://fr.wikipedia.org/wiki/Roland