Les Croisades – La prise de Constantinople 1204
LES CROISADES
(1095 – 1291)
LA PRISE DE CONSTANTINOPLE
(Du 8 au 13 avril 1204)
QUATRIÈME CROISADE
« La Croisade de Venise »
(1202-1204)
« Dieu le veut ! »
Un long chemin vers la terre du Christ
Lire :
1 – Des origines à l’appel du pape Urbain II
INTRODUCTION
CONTEXTE
CHRONOLOGIE
1202
– Mort de Bohémond III d’Antioche, dit « le bègue ». Son fils Bohémond IV d’Antioche, dit « le borgne », devient comte d’Antioche et de Tripoli.
– Avril : Venise promet de convoyer l’armée chrétienne (4500 chevaliers, 9000 écuyers et 20 000 fantassins) par mer jusqu’en Terre-Sainte, moyennant 85 000 ducats d’argent et la moitié du butin ; 30 % seulement de l’armée croisée rallient alors la cité des Doges.
– Octobre : les Croisés ne pourront verser que 51 000 ducats d’argent, et seront incapables de fournir la totalité de la somme réclamée par Venise. Après de multiples négociations, un accord voit le jour. Les Croisés devront aider les Vénitiens à reconquérir la ville dalmate de Zara, possession hongroise depuis 1186. Le Doge de Venise, Enrico Dandolo, accepte le marché.
– 8 octobre : départ de la Quatrième Croisade en direction de Zara, petit port de l’Adriatique. L’expédition est conduite par Boniface de Montferrat, Baudouin de Flandre, Enrico Dandolo et Geoffroi de Villehardouin.
– 11 novembre : début du siège de Zara.
– Novembre : prise de Zara par les Croisés.
– décembre : à Zara, une proposition d’alliance est offerte aux Croisés par Philippe de Souabe. Moyennant une forte somme (200 000 ducats d’argent), ils doivent aider Alexis IV Ange à rétablir son père Isaac II Ange sur le trône de Constantinople. En outre, les Byzantins participeront militairement à la Croisade et promettent de fournir 10 000 hommes pendant une année.
1203
– 6 avril : les Croisés quittent Zara et se dirigent sur Corfou.
– 24 mai : les Chrétiens quittent Corfou.
– Juin : les Croisés se dirigent sur Constantinople pour rétablir sur son trône Isaac II Ange, destitué par son frère Alexis III Ange.
– 6 juillet : prise de la forteresse de Galata par les Croisés.
– Du 11 au 17 juillet : 1er siège de Constantinople.
– 18 juillet : reddition de Constantinople ; Alexis III Ange prend la fuite.
– 1er août : Isaac II Ange est rétabli sur son trône ; il le partage désormais avec son fils, Alexis IV Ange.
1204
– Janvier : des émeutes surviennent à Constantinople. La population est mécontente. Elle accuse son Empereur Isaac II Lange de se soumettre sans condition à la suprématie franque, et refuse que leur souverain honore sa dette.
– 28 janvier : mort de l’Empereur byzantin Isaac II Ange ; son fils Alexis IV Ange lui succède.
– 8 février : mort de l’Empereur byzantin Alexis IV Ange, étranglé en prison par un usurpateur du nom d’Alexis V Doukas, surnommé Murzuphle.
– Alexis V Doukas, gendre d’Alexis III, succède à Alexis IV Ange.
– Mars : Vénitiens et Croisés se partagent l’Empire byzantin, suivant un traité conclu entre les deux parties. C’est la naissance de l’Empire latin de Constantinople, avec pour capitale Nicée.
– Du 8 au 13 avril : siège de Constantinople par les Croisés.
Le 12 avril, les troupes vénitiennes et croisées s’emparent de la riche et puissante capitale de l’Empire byzantin. La ville est saccagée et pillée par les chevaliers ; 2000 Grecs sont assassinés. L’indignation est immense dans tout l’Occident chrétien. Le déshonneur de ce jour déplorable marque une date, celle de la véritable cassure entre la chrétienté orthodoxe d’Orient et la chrétienté catholique d’Occident.
– Avril : fondation de l’Empire Latin de Constantinople, ou Empire Latin d’Orient.
– 16 mai : le comte Baudouin de Flandre est sacré « Empereur latin de Constantinople » ; il prend le nom de Baudouin IX.
– Décembre : Alexis V Doukas, gendre d’Alexis III, est condamné à mort par Baudouin 1er de Flandre et exécuté.
– Hiver : les Croisés réussissent à reprendre une grande partie de la Grèce méridionale. Détournée de son but initial, la Quatrième Croisade n’a pu aboutir. Elle ne s’est terminée qu’avec la conquête de Constantinople, et la création de nouveaux États croisés qui vont se montrer très fragiles.
LE SAC DE CONSTANTINOPLE
(12 avril 1204)
SITUATION
En 1202, certains barons, comme Simon de Montfort, avaient refusé d’affronter une cité chrétienne. Il n’en était pas de même pour de nombreux autres seigneurs. La plupart avait oublié le sens commun de la Croisade, celui d’aller reprendre Jérusalem aux mains des infidèles. Après Zara, une autre destination va les écarter de la Terre Sainte et de leur pieux objectif.
LE CASUS BELLI
Les Francs respectent leurs accords, et le 1er août 1203 Isaac II Ange est rétabli sur son trône. Son père Alexis IV Ange avait promis aux Croisés 200 000 marcs et un renfort de 10 000 hommes. Mais la dette tarde à être acquittée, et le 5 février 1204, Isaac II Ange est renversé et étranglé en prison par un usurpateur du nom d’Alexis V Doukas, surnommé Murzuphle.
Avec ce changement de situation, les Francs se rendent à l’évidence : ils ne pourront jamais récupérer leur dû. Démunis, sans vivres, n’ayant pas assez de moyens pour retourner en Occident ni pour continuer vers la Palestine, ils décident, en accord avec leurs alliés vénitiens, de donner l’assaut à Constantinople et de s’emparer de ses richesses. Osant défier la volonté du pape qui leur a interdit d’attaquer une ville chrétienne, le 9 avril à l’aube, les Croisés se ruent à l’attaque de la capitale de l’Empire d’Orient.
TROIS JOURS DE COMBATS
9 AVRIL
Mai la cité est fortement défendue, et après plusieurs heures de combats acharnés, les opérations franques semblent compromises. De nombreux engins de sièges ont été détruits par les projectiles lancés par les Grecs du haut des remparts. En outre, les mauvaises conditions météorologiques entravent les manœuvres des forces croisées. Les fortes rafales de vent gênent considérablement les navires, qui ne peuvent s’approcher au plus près des murs pour amorcer un assaut déterminant. Vers le milieu de l’après-midi, les Occidentaux ne peuvent que constater leur échec.
Les chefs croisés essaient alors de redonner un nouvel élan à leurs troupes. Mais nombreux sont ceux, parmi les plus croyants, qui se remémorent les ordres du pape Innocent III et montrent beaucoup de réticence à s’emparer d’une ville chrétienne. Cependant, les Chrétiens orthodoxes ont fait, par le passé, plusieurs fois alliance avec les Musulmans et cette coalition contre-nature suscite de la méfiance envers eux. Pour revitaliser le moral des forces franques au combat, les évêques prêchent des serments, attisant ainsi la rancœur et le ressentiment.
PIERRIÈRE
MANGONNEAU
TRÉBUCHET
12 AVRIL
Les Croisés, mieux préparés et galvanisés par le butin qui se dessine derrière les hauts murs, repartent à l’assaut de la cité. A force de persévérance, ils parviennent à se rendre maîtres des remparts et, à la fin de la journée, ils pénètrent dans Constantinople. Dès leur irruption dans l’enceinte fortifiée, et afin de prévenir une contre-attaque des troupes de Murzuphle, une grande partie de la ville est incendiée.
TROIS JOURS DE CARNAGES ET DE PILLAGES
Dès le lendemain, alors que les défenseurs de la cité ont déposé les armes, les Francs vont se livrer aux pires exactions. Un horrible massacre va se perpétrer durant trois jours, jetant l’opprobre sur les chevaliers du Christ. Terrifiés, les habitants de la cité (pour la plupart des Grecs orthodoxes) essayent en vain d’échapper à la fureur exterminatrice des Francs. Les hommes sont égorgés, les femmes et les jeunes filles violées, puis tuées, des familles entières sont brûlées vives dans leurs habitations en flamme.
Enfin la cité est mise à sac… Simples soldats du Christ ou bien chevaliers, tous se précipitent sans scrupules sur les biens et les trésors.
Les reliques, dont le culte est alors si prisé en Occident, et dont la cité de Constantinople est garnie à souhait, ne seront pas épargnées. Il est à noter que même les clercs, hélas, se précipiteront pour se les accaparer.
CONSÉQUENCES
Faisant suite au pillage de la cité, les Croisés fondent l’Empire Latin de Constantinople, ou Empire Latin d’Orient. Le 16 mai suivant, ils offrent la couronne au comte Baudouin de Flandre qui est sacré « Empereur latin de Constantinople » ; il prend le nom de Baudouin IX. De leur côté, les Grecs créent à Nicée un Empire byzantin en exil.
Il est attesté qu’après la violence des exactions commises lors du sac de Constantinople, tant sur le plan politique que religieux, la rupture est acquise pour longtemps entre les Chrétiens catholiques d’Occident et les Chrétiens orthodoxes d’Orient.
LA « TRAHISON » DES BARONS