Le cauchemar de Saipan

       

                                                                                                                                                                                                                                                                          

 

SECONDE GUERRE MONDIALE

CAMPAGNE DES MARIANNES

Drapeau du Japon

LE CAUCHEMAR DE SAIPAN

Du 15 juin au 9 juillet 1944

Un fantassiste japonais est étendu devant l’un des chars de l’empereur après que les deux aient été mis hors d’action par les Marines américains.

SOMMAIRE

Au cours des campagnes de 1943 et de la première moitié de 1944, les Alliés envahirent les îles Salomon, les îles Gilbert, les îles Marshall, et la péninsule papoue de Nouvelle-Guinée. Dès lors, dans le Pacifique, ils étaient tout près de la ligne de défense japonaise principale : les îles Carolines, les îles Palaos, et les îles Mariannes (toutes occupées et puissamment défendues par le Japon depuis la fin de la Première Guerre mondiale).

La bataille de Saipan, lors de la Guerre du Pacifique, se déroula du 15 juin au 9 juillet 1944 sur l’île de Saipan, dans les îles Mariannes. Au cours de cette bataille (qui s’inscrivait dans le cadre de l’opération « Forager »), les 2ème et 4ème Divisions de Marines et la 27ème Division d’Infanterie de l’Armée américaine, commandées par le général Holland Smith, débarquèrent et anéantirent la 43ème Division de l’Armée impériale japonaise, commandée par le général Yoshitsugu Saito.

La bataille (qui fit plus de 46 000 victimes militaires et au moins 8 000 morts civiles) intervint après celle de la mer des Philippines. C’était le premier objectif de la campagne des îles Mariannes et Palaos. Les lourdes pertes subies par les Alliés influencèrent l’organisation américaine pour les opérations futures, y compris pour l’invasion préméditée du Japon.

La prise de l’île par les Américains leur permit de pénétrer dans le périmètre de défense intérieur japonais, et de placer les principales villes japonaises dans le rayon d’action des bombardiers B-29 (Super Forteresse) et de leurs bombardements stratégiques destructeurs. Suite à ces évènements, le gouvernement japonais informa pour la première fois la population que la guerre était aux portes de la patrie, et qu’il fallait s’attendre au pire.

Cette bataille poussa également à la démission de Hideki Tōjō (le Premier ministre du Japon).

CONTEXTE

Saipan. Juin 1944

LES PLANS STRATÉGIQUES AMÉRICAINS

Jusqu’au début de l’année 1944, les actions alliées contre l’armée japonaise dans le Pacifique s’étaient concentrées sur la protection des lignes de communication entre l’Australie et les États-Unis. Ces opérations avaient permis de reprendre les îles Salomon, l’est de la Nouvelle-Guinée, l’ouest de la Nouvelle-Bretagne (île de la mer des Salomon, située dans l’archipel Bismarck), les îles de l’Amirauté (groupe de 18 îles de la mer de Bismarck, en Papouasie-Nouvelle-Guinée) et les îles Gilbert et Ellice (colonie britannique située dans l’océan Pacifique).

Pour vaincre le Japon, l’amiral Ernest J. King (commandant en chef de la flotte américaine) voulut réaliser le « Plan orange », que le « Naval War College » avait mis au point pendant quatre décennies.

L’amiral Ernest Joseph King

Le plan prévoyait une offensive dans le Pacifique central partant d’Hawaï, passant d’île en île par la Micronésie (avec la Mélanésie et la Polynésie, l’une des trois grandes régions en Océanie) et les Philippines. Le but était de contraindre la marine japonaise à une bataille décisive, pour provoquer ainsi la chute économique du Japon.

En janvier 1943, à la conférence de Casablanca, King présenta la possibilité d’une offensive amphibie dans le Pacifique central, y compris les îles « Marshall » et « Truk » (groupe d’îles de Chuuk dans le Pacifique, à environ 1 000 kilomètres au sud-est de Guam), offensive qui permettrait de prendre les îles Mariannes.

Il expliqua que l’occupation des Mariannes (en particulier Saipan, Tinian et Guam) couperait la route maritime et aérienne entre les îles japonaises et le Pacifique occidental. Mais aucune décision ne fut prise alors.

Le général Douglas MacArthur (commandant suprême des forces alliées dans la zone du Pacifique Sud-Ouest) s’opposa à l’offensive du Pacifique central proposée par l’amiral Ernest J.  King. Il affirma que l’opération serait coûteuse, qu’elle serait longue à mettre en place, et qu’elle détournerait sa propre progression dans le sud-ouest du Pacifique, en direction des Philippines.

En août 1943, au cours de la conférence de Québec, Ernest Joseph King insista, plaidant pour l’intégration des îles Mariannes dans une offensive du Pacifique central. Il affirma que l’importance stratégique des îles Mariannes pourrait attirer la flotte japonaise principale dans une importante bataille navale.

Le plaidoyer de King reçut le soutien et l’approbation du général Henry H. Arnold (chef des forces aériennes de l’armée), qui voulait faire usage du nouveau bombardier B-29. Les îles Mariannes pourraient héberger alors des aérodromes sécurisés. On aurait dès lors la possibilité d’entreprendre des offensives stratégiques de bombardements. Les grands centres urbains et les zones industrielles du Japon se trouveraient alors en grande partie dans le rayon d’action de 2 600 km du B-29.

En novembre 1943, au cours de la conférence du Caire, le chef d’état-major soutint à la fois l’offensive de Douglas MacArthur dans le Pacifique Sud-Ouest, et celle de Ernest Joseph King dans le Pacifique central. Il ajouta les îles Mariannes comme objectif pour l’offensive du Pacifique central, et décida du 1er octobre 1944 comme date de leur invasion. L’amiral Chester Nimitz (commandant en chef de la zone océan Pacifique) devait mener l’offensive.

En janvier-février 1944, les îles « Marshall » furent rapidement conquises. Une attaque aérienne massive, lancée sur les îles « Truk » à partir d’un porte-avions américain, démontra qu’elles pouvaient être neutralisées. Le 12 mars 1944, le chef d’état-major combiné avança la date de l’invasion au 15 juin. Il fallait créer des aérodromes pour les B-29 et développer des bases navales secondaires. Nimitz actualisa les plans de l’offensive sur les îles Mariannes et Palaos (dont le nom de code fut « Granite II »), et fixa l’invasion des Mariannes (dont le nom de code particulier fut « Forager ») comme objectif initial. Saipan fut prévue pour être l’objectif de la première attaque.

LES PLANS STRATÉGIQUES JAPONAIS

En septembre 1943, le Conseil impérial de guerre japonais délimita la « Zone de défense nationale absolue ». Elle englobait les îles Kouriles, l’archipel Ogasawara, les Mariannes, la Nouvelle-Guinée occidentale, la Malaisie et la Birmanie.

Si le Japon voulait gagner la guerre, cette partie du Pacifique devait être défendue à tout prix. Les Nippons considéraient les Mariannes comme cruciales, car leur perte mettrait le Japon à portée du rayon d’action des bombardiers américains, et couperait les voies d’approvisionnement entre les îles japonaises et le Pacifique occidental.

Le Japon impérial à son apogée en 1942.

La puissante marine impériale japonaise envisageait de tenir cette ligne de défense. Pour parvenir à leur fin, les Japonais devaient battre la flotte américaine au cours d’une seule bataille décisive, après quoi les Américains devraient négocier la paix. Toute tentative américaine de pénétrer dans cette zone de défense devait servir de prétexte pour commencer la bataille. Les défenseurs de la zone attaquée devraient résister, pendant que la flotte japonaise frapperait celle des Américains, coulerait leurs porte-avions, et achèverait leur flotte avec des navires de surface. Pour mettre ce plan à exécution, les Japonais pouvaient aligner plus de 500 avions basés à terre (constituant la 1ère flotte aérienne, placée sous le commandement du vice-amiral Kakuji Kakuta dont le quartier général était à Tinian).

LES FORCES EN PRÉSENCE

Marines américains à Saipan, juin 1944

POUR LES JAPONAIS

Le commandement de la flotte de la zone du Pacifique central est sous les ordres du vice-amiral Chūichi Nagumo (1887-1944).

Chūichi Nagumo

– armée de terre : 25 649 soldats.

– troupes de marine : 6 160 soldats placés sous le commandement du Vice-amiral.

Près de 32 000 militaires japonais se trouvent sur l’île, dont 6 000 soldats de la marine impériale. Les deux principales unités de l’armée défendant l’île sont la 43ème division, commandée par le lieutenant-général Yoshitsugu Saitō, et la 47ème brigade mixte indépendante, commandée par le colonel Yoshira Oka. Toutes deux sont affectées à la 31ème armée, placée sous le commandement général du lieutenant-général Hideyoshi Obata.

Saito Yoshitsugu

Les Japonais ont rapidement renforcé l’île avant l’invasion. Mais de nombreux transports de troupes ont été coulés par des sous-marins américains (par exemple, cinq des sept navires transportant la 43ème division). La plupart des soldats ont été sauvés, mais la majorité de leur équipement (y compris les chapeaux et les chaussures) a été perdue, ce qui a affaibli leur combativité. Il y a environ 80 chars sur l’île ; beaucoup plus que ce que les Américains ont eu à affronter lors des batailles précédentes avec les Japonais.

Les systèmes de défenses japonaises mises en place sont faits pour vaincre une force d’invasion sur les plages de Saipan, là où elle serait le plus fragile. On a donc choisi de se concentrer sur les lieux d’invasion les plus probables : les plages occidentales au sud de Garapan. Si les Américains franchissent les défenses sur ces plages, il n’existe pas de position de repli organisée : les troupes japonaises devront s’accrocher au terrain accidenté de Saipan (notamment ses grottes) pour se protéger.

Les plans initiaux ont prévu une défense en profondeur pour fortifier l’ensemble de l’île ; mais les Japonais n’ont pas pu achever leurs fortifications au moment de l’invasion. Une grande partie des matériaux de construction envoyés à Saipan, tels que le béton et l’acier, ont été coulés pendant le transport par des sous-marins américains. En juin, de nombreuses fortifications restent incomplètes, et de nombreux canons d’artillerie n’ont pas été correctement installés.

Comme le lieutenant-général Hideyoshi Obata se trouve à Guam (loin de son quartier général de Saipan) lorsque l’invasion commence, le commandement des unités de l’armée de Saipan est confié à Saitō, qui est l’officier le plus haut gradé sur l’île. Le chef d’état-major d’Obata, le général de division Keiji Igeta, dispose d’un quartier général séparé qui est souvent hors de contact avec Saitō.

POUR LES AMÉRICAINS

Les forces des USA sont placées sous le commandement des généraux Raymond Ames Spruance (commandant de la flotte du Pacifique-1886-1969) et Holland Smith (commandant en second du Corps des Marines -1882-1967), ainsi que de l’Amiral Richmond K. Turner (commandant des Forces Amphibies du Pacifique central en 1943 et 1944-1885-1961).

Forces d’assaut : 71 034 marines.

Flotte du Pacifique : 23 616 troupes de marine.

Total : 94 650 hommes.

Pour l’ensemble des îles Mariannes, la flotte d’invasion se compose de plus de 600 navires et de 300 000 hommes, dont environ 105 000 à 127 000 soldats d’assaut amphibie.

Entre 66 000 et 72 000 soldats doivent participer à l’assaut de Saipan. La force d’invasion dispose de 150 chars, dont plus de 100 M4 Sherman. Ce dernier est supérieur au char moyen utilisé par les Japonais, le Type 97. Il est principalement utilisé pour soutenir l’infanterie, et considéré comme l’une des armes les plus efficaces pour détruire les positions ennemies. Le M4 Sherman est aussi doté de lance-flammes, qui seront largement utilisés au cours de la bataille.

LES BLINDÉS JAPONAIS À SAIPAN

En juin 1944, lors de la bataille de Saipan, l’un des chars moyens les plus emblématiques de l’armée impériale japonaise, le Type « 97 Chi-Ha », se retrouva engagé dans des combats d’une intensité rare contre les blindés et l’infanterie de l’US Marine Corps, et de l’US Army. Le Type « 97 Chi-Ha » était le char moyen le plus produit et le plus utilisé par l’Armée impériale japonaise pendant la Seconde Guerre mondiale. Conçu à la fin des années 1930 par Mitsubishi, il affichait une ébauche de modernisation des forces blindées japonaises.

Le « Chi-Ha » était à l’origine destiné à affronter des forces faiblement mécanisées. Mais sur les plages et dans les jungles de Saipan, il fut opposé aux redoutables « M4 Sherman » américains, bien mieux protégés et mieux armés.

Équipé d’un canon de 57 mm (dans sa version initiale), ou d’un 47 mm (plus performant dans la version « Shinhoto Chi-Ha »), et de deux mitrailleuses Type 97, le « Chi-Ha » était pensé avant tout pour appuyer l’infanterie. Une version améliorée, le Type « 97 Kai » (ou « Shinhoto Chi-Ha ») fut développée ; elle était dotée d’une nouvelle tourelle et d’un canon long de 47 mm, plus efficace contre les chars adverses.

Propulsé par un moteur diesel Mitsubishi de 170 chevaux, le « Chi-Ha » pouvait atteindre une vitesse maximale d’environ 38 km/h, et pesait près de 15 tonnes. Bien que maniable, et relativement fiable mécaniquement, il souffrait d’un blindage trop mince (de 8 à 33 mm seulement) le rendant vulnérable aux canons antichars et aux obus perforants alliés.

À Saipan, les équipages japonais tentèrent de compenser cette infériorité matérielle par des tactiques audacieuses : attaques nocturnes, embuscades dans la végétation dense, et charges suicides destinées à briser les lignes ennemies.

Employé massivement dans les campagnes de Chine, de Malaisie, des Philippines et de l’archipel du Pacifique, le « Chi-Ha » participa également aux derniers combats en Mandchourie, contre l’Armée rouge en 1945. Si au début du conflit il pouvait rivaliser avec certains blindés alliés, il fut rapidement surclassé par des adversaires bien plus puissants tels que le « M4 Sherman » américain ou le « T-34 » soviétique.

Malgré ses faiblesses, le Type « 97 Chi-Ha » resta un char symbolique de l’effort militaire japonais, et fut construit à plus de 2100 exemplaires. Il constitua le fer de lance des unités blindées impériales et demeure aujourd’hui l’un des blindés japonais les plus symboliques de la guerre du Pacifique.

Le 17 juin 1944, l’un des épisodes les plus notables vit plusieurs « Chi-Ha » participer à une contre-attaque massive près de la ville de Garapan (le plus grand village de Saipan). Malgré la détermination des équipages, la supériorité numérique et la puissance de feu des Américains transformèrent l’assaut impérial en un véritable cimetière de blindés japonais.

Aujourd’hui, les rares épaves de « Chi-Ha » visibles à Saipan sont des spectateurs muets de ces affrontements désespérés. Elles témoignent à la fois de la bravoure des soldats qui les manœuvraient et de l’inégalité technologique qui fixa le sort des forces japonaises dans les îles Mariannes.

LA BATAILLE DE SAIPAN

Le 15 juin

Le débarquement débute le 15 juin, vers 8h40. Plus tôt dans la matinée, les bombardements navals et aériens préparatoires au débarquement ont commencé, bouleversant le réseau de communication japonais. Les canons de marine alliés déclencheront un feu d’appui nourri tout au long de la journée.

Le « V Amphibious Corps » débarque sur les plages du sud-ouest de Saipan, et dépose 8 000 Marines, des blindés et de l’artillerie légère sur la côte ouest de l’île. L’artillerie japonaise parvient à détruire environ 20 tanks amphibies.

La 2ème division de Marines débarque sur deux plages (nommées « Red » et « Green ») de Charan Kanoa, et la 4ème débarque sur les plages nommées « Blue » et « Yellow », au sud de la ville. Environ 700 véhicules amphibies participent à l’assaut, dont 393 tracteurs amphibies (LVT) et 140 chars amphibies. En l’espace de 20 minutes, environ 8 000 hommes se trouvent sur les plages.

Les « Landing Vehicles Tracked » (LVT) étaient une classe de véhicules amphibies de débarquement utilisés par la Marine américaine, le Corps des Marines des États-Unis, et l’Armée de terre des États-Unis, au cours de la Seconde Guerre mondiale. Si les LVT étaient initialement conçus uniquement comme transporteurs de fret pour la marine, ils évoluèrent rapidement pour le transport de troupes d’assaut et de véhicules blindés. Dans l’armée américaine, ils étaient aussi couramment appelés « amtrack », d’après la contraction du mot « amphibious tractor » (tracteur amphibie en anglais).  

Ils pouvaient atteindre une vitesse maximale de 32 km/h (12 km/h dans l’eau) et recevoir jusqu’à 30 hommes de troupe.

La zone de débarquement est fortement défendue par quatre bataillons. Les Japonais disposent de 16 canons de 105 mm, 30 de 75mm, et 8 de 150 mm, placés sur les hauteurs et pouvant atteindre avec précision les plages de débarquement. Pour stopper l’invasion, les Japonais ne peuvent compter que sur l’artillerie et quelques tanks pour arrêter l’invasion.

Les plages sont fortifiées par des tranchées et quelques casemates, mais les Américains doivent surtout affronter les tirs constants et intenses de l’artillerie, des mortiers, et des mitrailleuses japonaises. Les Japonais ont placé au moins 50 grosses pièces d’artillerie sur les hauteurs (24 obusiers de 105 mm, et 30 pièces de campagne de 75 mm), autour des plages de l’invasion. Nombre d’entre elles sont déployées sur des contre-pentes, et des fanions ont été plantés sur la plage pour permettre un repérage précis des distances.

On estime que pour ce premier jour de combat, 2000 Marines ont perdu la vie ; la majorité de ces pertes étant due aux tirs d’artillerie et de mortier. En outre, 164 tracteurs et chars amphibies, soit environ 40 % de ceux engagés au cours de la journée, sont détruits ou endommagés.

Ces tanks amphibies doivent ouvrir l’attaque, avancer d’un kilomètre environ dans les terres, et créer ainsi une zone plus ou moins sûre pour les troupes. Dans la soirée, les Marines sont parvenus à établir une tête de pont d’environ 9 km le long de la plage, et de 1 km de profondeur à l’intérieur des terres. Cette tête de pont n’a que les deux tiers de la taille de l’objectif prévu, et les deux divisions de Marines sont séparées par une large brèche. L’artillerie japonaise, elle, est intacte sur les hauteurs qui entourent la plage.

Au coucher du soleil, Saitō lance une série d’attaques nocturnes pour repousser les envahisseurs à la mer. Il déclenche de nombreuses contre-attaques pendant la nuit et les premières heures de la matinée. Toutes sont repoussées, en partie grâce à la puissance de feu fournie par les chars et l’artillerie qui ont réussi à être déchargés sur la plage, ainsi que par les navires de guerre américains qui éclairent les zones de combat avec des obus éblouissants.

Du 16 au 20 juin

Le 16 juin, le général Holland Smith (commandant en second du Corps des Marines) engage ses réserves pour renforcer la tête de pont. Il ordonne à deux des trois régiments de la 27ème Division d’infanterie (le 165ème et le 105ème) de débarquer. Les deux divisions de Marines s’affairent la majeure partie de la journée à remplir leur mission.

Pendant la nuit, Saitō lance ses blindés sur le flanc de la tête de pont, avec environ 35 chars moyens de type 97 et légers de type 95, et un millier de soldats. L’attaque est mal combinée. Les troupes navales du vice-amiral Chūichi Nagumo, qui doivent participer à l’assaut, ne coopèrent pas. L’opération est finalement stoppée par des bazookas, des canons antichars de 37 mm, des chars « Sherman M4 » et des obusiers automoteurs de 75 mm. Environ 31 chars japonais sont détruits.

Les jours suivants, la 2ème division de Marines nettoie la zone autour du lac Susupe (seul lac de Saipan), et finit par atteindre les objectifs fixés au premier jour de l’invasion. Dans la moitié sud de la tête de pont, la 4ème division de Marines commence son avancée sur le champ d’Aslito.

Le 18 juin, les deux régiments de la 27ème division d’infanterie s’emparent du champ alors que les Japonais se retirent vers la pointe Nafutan, au sud-est de l’île. La 4ème division de Marines atteint la côte orientale de l’île, coupant les troupes japonaises de « Nafutan Point » par le nord. C’est alors que la rumeur de la mort de Saitō circule parmi la troupe.

Holland Smith ordonne de s’emparer rapidement de la pointe Nafutan, mais la 27ème division d’infanterie n’y parvient pas. Smith pense qu’il n’y a pas plus de 300 soldats japonais dans la zone ; ils sont en réalité plus d’un millier. La bataille pour la pointe va se poursuivre pendant plus d’une semaine.

Le 19 juin, les pertes de l’armée japonaise sont énormes ; ce qui oblige Saitō à retirer ses troupes vers une nouvelle ligne de défense, au centre de l’île. Les pertes américaines, elles, s’élèvent à plus de 6 000 hommes. Alors que les Marines se dirigent vers le nord, en direction des nouvelles défenses japonaises, Holland Smith fait appel à sa dernière réserve. Le 20 juin, il ordonne au dernier régiment de la 27ème division d’infanterie, le 106ème, de débarquer sur Saipan.

Du 21 au 24 juin : attaque sur le centre de Saipan

La nouvelle ligne de défense de Saitō occupe la plupart des hauteurs de l’île.  Cette position permet aux Japonais d’observer les mouvements des Américains. Le terrain est accidenté et comporte de nombreuses grottes, dissimulées par la végétation.

Le 22 juin, les Américains se préparent à un assaut frontal sur la ligne de Saitō, sur un terrain vallonné. La 2ème division de Marines se dirige vers Garapan et le mont Tapatchou ; la 4ème avance le long de la côte est, créant des brèches dans les lignes entre les deux divisions. Dans la soirée, la 27ème division d’infanterie reçoit l’ordre de monter sur le terrain difficile entre les deux divisions de Marines.

Le lendemain, la 27ème, qui a commencé son attaque tardivement, piétine dans une vallée défendue par environ 4 000 soldats japonais. Les soldats américains, qui ont surnommé cette bataille la « vallée de la Mort » et la « crête du Purple Heart », commencent à plier. La ligne de l’avancée américaine prend la forme d’un fer à cheval.

Choqué par l’arrêt de la progression de la 27ème division, Holland Smith relève son commandant, le major général Ralph Smith, et le remplace temporairement par un autre officier de l’armée de terre, le major général Sanderford Jarman.

La réaction de Holland Smith (un général des Marines renvoyant un général de l’armée de terre) provoque instantanément une controverse interarmées. Malgré le remplacement du commandant de la 27ème division d’infanterie, il faudra encore six jours de combats acharnés pour que la vallée soit prise.

Le 22 juin, le gouverneur de Saipan reçoit un message du Palais Impérial, l’informant que tout civil qui mourra en se battant contre les Américains se verra accorder les mêmes privilèges que les soldats morts pour l’empereur.

Du 25 au 30 juin ; le centre de Saipan est percé

Pour poursuivre l’attaque vers le nord, des P-47 de la septième armée de l’air atterrissent à l’aérodrome d’Aslito, et se lancent immédiatement à l’attaque. Les Américains mettent en place 24 canons de campagne de 155 mm et 24 obusiers de 155 mm pour tirer sur les positions japonaises. Ils ont également des roquettes lancées à partir de camions. Des avions d’observation L-4 aident l’artillerie, et des « code talkers navajos » transmettent des informations sur les mouvements des troupes japonaises.

LES « CODE TALKER »

Face aux percées des Japonais dans le Pacifique, les États-Unis avaient besoin de communications instantanées et inviolables. La solution ne vint pas des machines, mais des racines profondes d’une culture autochtone. En 1942, le Corps des Marines lança un programme secret, recrutant des Navajos pour utiliser leur langue à des fins militaires. Les Américains recrutèrent spécialement pour le théâtre Pacifique de la Seconde Guerre mondiale des « code talker » (litt. « parleur de code ») amérindiens. Néanmoins, outre les « Navajos », il y eut aussi des « Cherokees », « Chactas », « Lakotas », « Mesquakies » et des « Comanches ».

Lors de la Première Guerre mondiale, l’armée américaine avait utilisé les « Chactas » pour ses communications chiffrées (ils étaient plus rapides que les machines à coder), mais les Allemands étaient parvenus à casser le code.

Pendant le second conflit, les « Navajos » développèrent un code incassable en utilisant leur langue maternelle. Ce procédé, qui déconcerta les briseurs de code ennemis, jouera un rôle déterminant dans la victoire alliée.

Dans leur langue, il était parfois nécessaire de transcrire certains mots avec des expressions du quotidien, faute d’équivalents : « Avion » était ainsi traduit par « oiseau », et « bombardier » par « oiseau enceinte ». Le code navajo attribuait par ailleurs un mot indien pour chaque lettre de l’alphabet latin.

Chaque mot Navajo signifiait une lettre ou un terme militaire, comme « Chʼéʼéh degháhii » (tank). Le mot « moasi », qui renvoie au « chat », était ainsi utilisé pour désigner la lettre « C » ; ce qui rendait impossible aux étrangers de le décoder.

Aux côtés des membres de 33 autres tribus indigènes, ces héros amérindiens changèrent l’histoire avec leur langue et leur bravoure. Ce code restera classifié jusque dans les années 80, l’armée américaine estimant qu’il pouvait de nouveau servir en cas de guerre. Durant la Seconde Guerre mondiale, d’autres indiens des tribus Choctaws, Comanches et Seminoles furent aussi chargés de transmettre dans leur langue des messages codés.

Dans les collines, les soldats utilisent des lance-flammes individuels, surtout dans les endroits que les lance-flammes motorisés ne peuvent atteindre. Ils développent progressivement des tactiques pour réduire efficacement les grottes, en utilisant une combinaison de lance-flammes et de charges de démolition, souvent pour en clôturer l’entrée.

Le 24 juin, les navires de guerre américains, revenus de la bataille de la mer des Philippines, fournissent un appui-feu. Les Japonais redoutent particulièrement les tirs des navires car ils peuvent frapper de partout, dans presque toutes les directions. Saitō souligne que les canons de marine américains usent la capacité et l’ardeur des Japonais à lutter.

Le 25 juin, les principaux postes japonais d’observation d’artillerie dans le centre de Saipan (mont Tapotchau) sont pris.

NELSON GORMAN, UN « NAVAJO CODE TALKER »

Sur cette photo, prise en juin 1944, le soldat de 1ère classe Carl Nelson Gorman (soldat du Corps des Marines des États-Unis) guette, depuis son poste sur les hauteurs de Garapan, l’île de Saipan, dans l’archipel des Mariannes. Mais ce que cette image ne révèle pas instantanément, c’est que cet homme fait partie d’un groupe légendaire, celui des 29 premiers « Navajo Code Talkers » (ces Amérindiens qui ont bouleversé les communications militaires américaines dans le Pacifique).

Recrutés en 1942 par les Marines, ces hommes mirent au point un code basé sur leur langue natale, le navajo ; une langue orale incroyablement complexe, et pratiquement inconnue des étrangers. Ce système de codage, d’une efficacité redoutable, ne fut jamais déchiffré par les forces japonaises. Grâce à ces hommes, les transmissions radio sur les champs de bataille (rapides, précises et indéchiffrables) ont joué un rôle décisif dans de nombreuses campagnes, dont Guadalcanal, Iwo Jima, Saipan et Peleliu.

Carl Gorman, l’un des 29 premiers Code Talkers navajos – Saipan, juin 1944

Carl Gorman est né en 1907 en Arizona. Il fut bien plus qu’un soldat : avant la guerre, il était un artiste et un éducateur navajo, profondément attaché à ses racines et à sa culture. Son engagement dans l’armée représentait une affirmation de l’identité amérindienne au sein même de la machine militaire américaine.

À Saipan, comme dans d’autres îles du Pacifique, Gorman transmit des messages codés vitaux sous le feu ennemi, garantissant la coordination des troupes et le succès des offensives. Après la guerre, il devint professeur d’art, et œuvra pour la reconnaissance des services rendus par les peuples autochtones aux États-Unis.

Il faudra pourtant attendre plus de 40 ans pour que le rôle des « Code Talkers » soit pleinement reconnu. En 2001, le président George W. Bush leur rendit hommage, et Carl Gorman fut décoré à titre posthume. Son fils, R. C. Gorman, est devenu un peintre navajo de renommée mondiale.

Carl Gorman est mort en 1998, mais son héritage (celui d’un homme qui mit sa langue au service de la liberté) continue d’exister.

Le 27 juin, la 31ème armée du Major-général Keiji Igeta envoie un télégramme pour informer l’état-major que sa situation est désespérée : face à la puissance américaine, les forces japonaises connaissent une grave pénurie de matériel, de nourriture et d’eau. Le manque d’eau est particulièrement important dans les grottes que les japonais utilisent pour se défendre. Igeta rapporte que certains soldats n’ont pas eu d’eau depuis trois jours, et se nourrissent d’escargots et de feuilles d’arbres.

Le 30 juin, la 27ème division d’infanterie s’empare de la Vallée de la Mort et de la crête de « Purple Heart », puis progresse pour rétablir le contact avec les deux divisions de Marines sur leurs flancs. La principale ligne de défense de Saitō a été percée, et les Japonais commencent leur retraite vers le nord jusqu’à leur dernière ligne de défense. À ce jour, les pertes américaines s’élèvent à environ 11 000 hommes.

Du 1er au 6 juillet, retraite nippone dans le nord de Saipan

Saitō veut former une nouvelle ligne dans le nord de Saipan, sur « Tanapag » à l’ouest, qui s’étendrait au sud-est, jusqu’à un village appelé « Tarahoho », et traverserait la côte est. Mais il n’y parvient pas : son armée se délite et se désagrège. Certains soldats se replient vers le nord, d’autres se terrent dans les grottes qu’ils peuvent trouver ; d’autres encore opposent une résistance désorganisée sur place.

Ce qui reste de son commandement est piégé dans un coin nord de l’île, presque à court de nourriture et d’eau. Saitō sait que son armée est lentement détruite par l’écrasante puissance de feu américaine. Le 6 juillet, il décide que la situation est désespérée, et donne l’ordre au reste de ses forces d’effectuer un « gyokusai » (une dernière attaque suicide visant à détruire le plus grand nombre possible d’ennemis).

Il ordonne l’attaque pour le lendemain, afin de laisser aux troupes une chance de concentrer ce qui reste de leurs forces. Il en confie la responsabilité à son chef d’état-major de division, le colonel Takuji Suzuki. Cette nuit-là, Saitō mange un dernier repas et se fait « seppuku » (« hara-kiri »). Le vice-amiral Chūichi Nagumo se suicidera à peu près au même moment.

L’attaque Gyokusai La plus grande attaque suicide « Gyokusai » (bijou brisé) de la Guerre du Pacifique se déroula le 7 juillet 1944, lors de la bataille de Saipan. Au prix de près de 4 300 morts parmi les soldats japonais, elle décima presque entièrement les 1ers et 2èmes bataillons du 105ème régiment d’infanterie américain, qui perdit près de 650 hommes.

Sur les 22 000 civils à Saipan, des milliers combattirent les Américains, et participèrent à la charge suicide du 7 juillet.

Saipan compte un nombre important d’habitants civils. La propagande japonaise leur avait présenté les Américains comme des monstres sanguinaires. Les bombardements acharnés et les durs combats ne sont pas faits pour les faire changer d’opinion.

« Banzaï ! » : les origines d’un cri de guerre japonais

Le mot « Banzaï » est resté gravé dans l’imaginaire collectif comme étant le cri de guerre lancé par les soldats de l’armée impériale japonaise, lors de charges suicidaires pendant la Seconde Guerre mondiale. Pourtant, ses origines remontent bien plus loin dans l’histoire, et n’avaient au départ rien de guerrier.

Le terme « Banzai » signifie littéralement « dix mille ans ». Il évoque une idée de longévité et de prospérité. Venu de Chine à l’époque impériale japonaise, il était utilisé comme une acclamation respectueuse à l’adresse de l’empereur : « Tenno Heika Banzai » (« longue vie à Sa Majesté l’Empereur »). Ce cri solennel, répété à l’unisson lors de cérémonies officielles, servait à exalter l’unité nationale et la loyauté au souverain.    

À partir de l’ère Meiji (fin XIXème siècle), alors que le Japon se modernise et militarise son idéologie, le « Banzai » prend une dimension nouvelle : il devient le cri guerrier de ralliement des troupes.

Dans les écoles, les combattants apprennent à le scander comme marque d’élan patriotique. Pendant la guerre russo-japonaise (1904-1905), il accompagnait déjà les assauts de l’infanterie, mais restait encore perçu comme une invocation au succès collectif plutôt qu’un appel à la mort.    

C’est durant la Seconde Guerre mondiale que le « Banzai » change de nature et se charge d’une intensité dramatique.

Les soldats japonais sont alors formés par l’idéologie impériale, et par le « bushidō » (code des principes moraux que les guerriers japonais « samouraïs et bushi » étaient tenus d’observer). Les guerriers l’utilisent comme cri ultime avant de lancer des charges frontales massives contre les positions américaines ou alliées, notamment à Saipan, Tarawa ou Guadalcanal. Ces attaques, que les Américains qualifient de « Banzai charges », deviendront le symbole du sacrifice extrême, souvent voué à l’échec, mais marquant l’imaginaire par leur brutalité et la détermination désespérée des assaillants.

Ainsi, un mot issu d’un souhait de prospérité envers l’Empereur se transforme en cri de guerre, puis en synonyme d’assaut suicidaire.

Aujourd’hui, le terme conserve une double mémoire : celle d’un cri patriotique traditionnel encore utilisé au Japon lors de célébrations civiles, et celle, plus sombre, de la fureur guerrière des champs de bataille du Pacifique.

–  Guadalcanal

76 heures d’enfer sur l’atoll de Tarawa

Banzaï !

Saipan sera également marquée par le suicide massif de civils de l’île, prêts à mourir plutôt que de se rendre aux Américains.

Un marine américain, Johnny N. Popham, tenant dans ses bras un nouveau-né couvert de sang et de mouches, seul survivant d’un massacre silencieux

Les falaises Banzaï de Saipan

Au fur et à mesure que les américains avançaient, les populations qui ne combattaient pas fuyaient ; la plupart allaient s’abriter dans les grottes. Lorsque les Américains parvinrent au nord de l’île, des milliers de civils, hommes, femmes et enfants, se trouvèrent bloqués par les falaises qui dominaient la mer.

Plutôt que de se rendre aux Américains (considérés comme des monstres), des milliers se suicidèrent alors en sautant du haut des falaises. Des interprètes réussirent à en dissuader quelques-uns, mais on estime que 8 000 civils se précipitèrent en sautant dans le vide. Ces lieux portent aujourd’hui les noms de « Suicide Cliff » et « Banzai Cliff. »

Les Américains trouveront le corps du général Yoshitsugu Saitō le 11 juillet. Il sera inhumé le 13 juillet, avec tous les honneurs militaires, dans un cercueil drapé du drapeau japonais.

Les Marines enterrent le général japonais Yoshitsugu Saitō, après que son corps ait été retrouvé dans une grotte sur Saipan – 13 juillet 1944

LES MARINES À SAIPAN

LA MARINE US À SAIPAN

L’AVIATION US À SAIPAN

PERTES

POUR LES JAPONAIS

La quasi-totalité de la garnison japonaise (environ 30 000 hommes) est anéantie au cours de la bataille. 1 700 d’entre eux (dont la moitié sont des travailleurs coréens) sont faits prisonniers. Près de 40 % des civils de Saipan sont morts. Environ 14 000 survivront et seront internés, mais on estime que 8 000 à 10 000 mourront pendant les combats ou par la suite.

De nombreux civils ont été tués par les bombardements et les tirs d’artillerie. D’autres sont morts parce qu’ils se sont cachés dans des grottes et des abris impossibles à distinguer des positions de combat japonaises ; et que les Marines ont systématiquement détruits avec des explosifs, des grenades et des lance-flammes.

Bien que de nombreux civils se soient rendus au début de la bataille, la capitulation devient plus difficile au fur et à mesure que les combats se déplacent vers les montagnes du nord. Le terrain, de plus en plus bouleversé, rend bien souvent impossible de distinguer les combattants des civils qui se rendent ; les deux risquent d’être tués par les deux camps. D’autre part, beaucoup refusent de se rendre parce qu’ils croient aux rumeurs selon lesquelles la flotte japonaise va venir les secourir.

D’autres encore refusent de se livrer en raison de la peur répandue par la propagande japonaise selon laquelle les Américains les violeraient, les tortureraient et les tueraient. Environ 1 000 civils se suicideront au cours des derniers jours de la bataille ; certains après le 9 juillet, lorsque l’île sera déclarée sécurisée. Beaucoup se jetteront du haut de falaises qui deviendront connues sous le nom de « Falaise des Suicides » ou « Falaise Banzaï ». Le nombre précis de suicides n’est pas connu. Un témoin déclarera avoir vu « des centaines de corps » en bas d’une falaise, alors que d’autres sources parleront de milliers.

POUR LES AMÉRICAINS

Sur les 71 000 militaires de la force d’assaut initiale, les forces américaines perdent environ 16 500 hommes (3 100 tués et 13 000 blessés). La conquête de Saipan est alors la bataille la plus meurtrière livrée par les Américains dans le Pacifique.

CONSEQUENCES

Le 20 juillet, après la bataille et suite à de grands travaux, l’aérodrome de Aslito deviendra « Isley Field » et recevra son premier avion américain. À partir de septembre 1944, des B-24 pourront commencer à mener des missions sur les îles Bonin. Un second aérodrome sera construit pour les B-29, et le premier raid de B-29 sur les îles Truk aura lieu en octobre 1944.

Saipan ne servira pas seulement de base aérienne (ce rôle était dévolu à Tinian), mais deviendra une importante base navale pour les sous-marins. Saipan jouera un rôle important lors des opérations futures dans les Mariannes, pendant la bataille du golfe de Leyte, et l’invasion des Philippines ; deux opérations qui auront lieu en octobre 1944. L’invasion de Saipan fut donc une étape indispensable vers la défaite du Japon.

PRIVATE JOE KIEYOOMIA

Le sergent Joe Kieyoomia fut capturé par les forces japonaises en 1942, alors que les Philippines tombaient sous le joug japonais. Pour lui, c’était malheureusement le début de 43 mois de captivité, qui débutèrent avec la tristement célèbre Marche de la Mort de Bataan, et ne se terminèrent qu’avec la reddition du Japon.  

Sgt. Joe Kieyoomia

Lors de sa capture, Kieyoomia (comme des dizaines de milliers d’autres prisonniers de guerre philippins et américains) fut contraint de marcher quelques 60-70 miles (environ 113 kilomètres) dans la chaleur étouffante, et sous la maltraitance constante et brutale de l’ennemi. Quand lui et ses compagnons d’infortune arrivèrent finalement dans un camp de prisonniers, leurs ravisseurs les forcèrent à creuser leurs propres tombes avant de les abattre.

Kieyoomia fut miraculeusement épargné et envoyé au Japon (l’ennemi supposa qu’il était japonais américain, probablement à cause de son apparence et de son nom), où il fut torturé.

Kieyoomia n’était pas un « Navajo Code Talkers ». Il fut envoyé aux Philippines avec le « 200th Coast Artillery » du Nouveau-Mexique. Lorsque les Japonais eurent besoin de connaître ce qu’était le « code Najavo », ils interrogèrent Kieyoomia ; non seulement il ne connaissait pas le code, mais il ignorait son existence.

Ses geôliers lui firent écouter des émissions de radio en amérindien, et Kieyoomia fut surpris d’entendre des messages dans sa langue maternelle. Pour lui, les émissions n’avaient aucun sens. Ses gardiens ne le crurent pas et, pour le punir, l’obligèrent à se tenir nu dans la neige par des températures glaciales inférieures à zéro. Les pieds de Kieyoomia se figeaient dans le sol gelé et, lorsqu’on l’obligeait à rentrer à l’intérieur, sa peau, restant collée dans la glace, laissait une traînée sanglante sur le terrain. Il fut torturé ainsi des mois durant.

Les Japonais montrèrent à Kieyoomia des paroles écrites, traduites en anglais, et le martyrisèrent pour qu’il apprenne le code navajo. Mais les mots les plus simples étaient très différents de sa langue maternelle. Même s’il l’avait voulu, Kieyoomia ne pouvait rien dire : c’était du charabia. Le code navajo était incompréensible, même pour quelqu’un parlant la langue.  

Le soldat Kieyoomia tenta de mettre fin à ses jours par une grève de la faim, mais cela ne lui valut que plus de coups. Son martyre prit fin le 9 août 1945, lorsque la deuxième bombe atomique fut larguée sur Nagasaki ; « Fat Man » explosa au-dessus de la ville, tuant instantanément 40 à 75 000 personnes.

Kieyoomia survécut miraculeusement à l’explosion nucléaire (il était assis contre le mur en béton de sa cellule). Il fut abandonné et laissé pour mort pendant trois jours avant qu’un officier japonais ne le libère.

Après la guerre, le sergent Joe Kieyoomia retourna parmi son peuple Navajo, et se remit de ses blessures ; il vécut jusqu’à l’âge de 77 ans. Il décéda en 1997.

Lire : la Marche de la Mort de Bataan

Sources :

Mes photos

Photos publique Facebook

https://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Saipan

http://milguerres.unblog.fr/bataille-de-saipan/

https://fr.wikipedia.org/wiki/Banza%C3%AF_(charge)

 

 

 

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