L’abbatiale Sainte-Marie de Cruas

LES TÉMOINS DU PASSÉ

L’ABBATIALE SAINTE-MARIE DE CRUAS

 

Abbatiale Sainte-Marie de Cruas

TYPE : abbatiale, puis église paroissiale.

CULTE : catholique romain.

ORDRE : bénédictin.

ÉPOQUE : Moyen Âge.

FONDATION : sur les bases d’une église d’une abbaye bénédictine fondée au IXème siècle (804).

CONSÉCRATION : en 1095, par le pape Urbain II.

PÉRIODES DE CONSTRUCTION : XIème et XIIème siècles, sur des vestiges gallo-romains et paléochrétiens.

L’ART PALÉOCHRÉTIEN, ou art et architecture primitifs chrétiens, est un art développé par les Chrétiens ou sous l’égide chrétienne entre l’an 200 et l’an 500. Il couvre une période s’étalant du règne de Justinien (482-565) en Orient, jusqu’aux invasions barbares au 6ème siècle en Occident, et à la conquête arabe (Omeyades) en Syrie, en Égypte et en Afrique du Nord. Avant l’an 200, il demeure très peu de vestiges artistiques qui puissent être qualifiés avec certitude de chrétiens. Ils sont pour la plupart apocryphes. Après l’an 500, l’art paléochrétien s’ouvre sur l’art byzantin et celui du haut Moyen Âge. 

STYLE : roman méridional.

PROPRIÉTÉ : la commune.

PROTECTION : classement sur la liste des Monuments Historiques en 1862.

VILLE : Cruas.

DÉPARTEMENT : Ardèche.

Blason de l’Ardèche

RÉGION : Auvergne-Rhône-Alpes.

Blason de l’Auvergne-Rhône-Alpes

LOCALISATION

CRUAS

Cruas est une commune française qui se trouve dans le département de l’Ardèche, sur la rive droite du Rhône, en région Auvergne-Rhône-Alpes. Elle se situe entre Montélimar (15,4 km) et Valence (40,6 km), et proche de Privas (24,6 km). Ses habitants sont appelés les Cruassiens.

L’ABBATIALE, DES SIÈCLES D’HISTOIRE…

L’ABBATIALE EN BREF 

C’est aux XIème et XIIème siècles que l’abbatiale de Cruas fut construite. Elle fut érigée en pierre calcaire de Cruas par les moines bénédictins, à côté des bâtiments de l’abbaye, aujourd’hui disparus : cloître, dortoir, réfectoire…. L’abbaye, bâtie sur les ruines d’une villa gallo-romaine et d’un édifice paléochrétien, sera consacrée par le pape Urbain II en 1095, et agrandie au XIIème siècle. Le sanctuaire connaîtra son apogée au cours des XIème et XIIème siècles. Puis s’ensuivra une déchéance inéluctable jusqu’en 1741, date de sa suppression par l’évêque de Viviers.

UN PROBLÈME NOMMÉ « CRÛLE »

Cette église n’a pas été érigée telle que nous la voyons aujourd’hui. En effet, les violentes crues du ruisseau « Crûle » ont provoqué des inondations que l’on croyait irréparables. Ce cours d’eau (aujourd’hui canalisé et donc « maîtrisé ») est, avec ses dépôts d’alluvions successifs, à l’origine d’un rehaussement significatif du niveau du sol.

Les inondations répétées furent d’ailleurs un des problèmes majeurs des moines. Ce qui les obligera à construire la chapelle Saint-Benoît, plus haut au-dessus de Cruas.

Il faut savoir que dès le XIIème siècle les débordements du torrent voisin ont ruiné les bâtiments abbatiaux, pendant que des torrents de boue et de cailloux envahissaient régulièrement l’église.

LE CHÂTEAU DES MOINES DE CRUAS Le château en ruines, dit « château des Moines », est un édifice abbatial fortifié qui servit de refuge aux religieux pendant les périodes de troubles jusqu’au XVIIème siècle.

Chapelle des moines

L’édifice fut construit sur une colline dominant le village médiéval. Aujourd’hui, il est en cours de restauration. Dès le XIème siècle, les moines décident de construire une chapelle secondaire. Les débordements du torrent Crûle inondent trop souvent l’église de boue et de pierres, et causent des dégâts insurmontables pour les moines.

Au XIIème siècle, un petit oratoire est construit sur les hauteurs de Cruas.

Au XIIIème siècle, les moines s’y installent définitivement. C’est à cette époque que les remparts sont construits pour fortifier et protéger le village. Au Moyen Âge, le château abbatial constitue une redoutable forteresse.

Au XIVème siècle, les murs de la chapelle sont surélevés. De nouveaux agrandissements sont réalisés au cours des siècles qui suivent, et les remparts sont déplacés (à la fin du XVème siècle viennent se rajouter aux catastrophes naturelles les Guerre de Religion, ce qui décidera les moines à s’abriter derrière des remparts).

Le domaine se compose du château, de sa chapelle inférieure (avec l’aile abritant la petite chapelle), de la courtine du front nord, et de la tour carrée. L’ensemble sera classé au titre des Monuments Historiques le 3 septembre 1912.

Un petit oratoire rectangulaire sera construit à la fin du XIIème siècle et servra de chapelle privée à l’abbé. La grande chapelle romane, qui date de la même époque que l’abbatiale, a été modifiée au XIVème siècle par la création d’un donjon, avec notamment la construction de tourelles d’angle, de bretèches et de mâchicoulis. On y trouve aussi un chemin de ronde crènelé, avec des archères. Les religieux vivaient dans un bâtiment de deux étages, situé au sud de la chapelle.

Cette petite forteresse permit aux religieux de se mettre à l’abri pendant les Guerres de Religion ; notamment en 1574 et en 1585, lorsque les huguenots se rendirent maîtres de toutes les places fortes aux alentours.

Plus tard, en 1628, ils réussiront à tenir le siège contre les assauts des protestants de Rohan. À la fin des Guerres de Religion, il ne restera que six moines sur le site fortifié.

Le château des moines

La Chapelle possède deux fenêtres orientées Est et Ouest. L’extérieur, délabré, est décoré de bandes lombardes. On distingue encore la trace des contreforts.

HISTORIQUE

UN SITE OCCUPE DES L’ANTIQUITÉ

Les fouilles archéologiques ont permis d’établir que le site fut peuplé depuis l’Antiquité. Cette présence se traduit sous la forme d’une habitation gallo-romaine (fin du IIIème siècle), qui sera remplacée plus tard, au Vème siècle, par une construction paléochrétienne dont l’utilisation n’est pas assurée.

En 804, sur ordre du comte Eribert de Vivarais, des moines bénédictins venus de l’abbaye d’Aniane fondent une abbaye à Cruas.

Une église carolingienne est construite par la suite sur les fondations des édifices précédents, lors de la création de l’abbaye bénédictine.

Les archevêques d’Arles ont un droit de protection et de visite à l’abbaye ; un privilège qui leur fut accordé par les rois de Provence.

L’ÉDIFICATION DE L’ABBATIALE

L’abbatiale actuelle fut érigée en pierre calcaire de Cruas, entre le XIème et XIIème siècle. Cette construction s’est déroulée en quatre phases consécutives de travaux, d’est en ouest. Le sanctuaire accueillait en priorité les moines, mais il recevait aussi les fidèles et les pèlerins de passage du Chemin de Compostelle.

L’agencement d’une église sur trois niveaux permettait un accueil séparé de ces deux groupes, qui ne devaient que rarement se croiser, surtout lors des offices.

Les bâtiments conventuels qui entouraient l’église au sud ont été détruits à plusieurs reprises, et ont entièrement disparu.

LA GUERRE DE CENT ANS

Les complications pour les moines de Cruas commencent aux XIVème et XVème siècles. Ceux-ci subissent les affres et les troubles de la Guerre de Cent Ans. Ils abandonnent régulièrement l’abbaye pour aller s’abriter dans la chapelle Saint Benoît, alors fortifiée.

Guerre de Cent Ans : conflit qui opposa la France et l’Angleterre de 1337 à 1453 (entrecoupé de nombreuses trêves).

LES GUERRES DE RELIGION

A la fin du XVIème siècle, les Guerres de Religion sont dévastatrices pour la petite abbaye. En effet, les affrontements entre Catholiques et Protestants sont ravageurs en Vivarais. L’abbaye apparaît aux yeux des belligérants comme une position catholique à investir. Elle sera assaillie plusieurs fois ; les bâtiments seront réduits à un champ de ruines ; les moines se réfugieront une seconde fois sur les hauteurs du village, dans leur fortification.

C’est de cette époque que daterait la destruction du cloître et des bâtiments conventuels. La petite abbaye ne s’en relèvera jamais.

En 1628, lorsque les moines reviennent prendre possession des lieux dévastés, ils renonceront à déblayer en totalité les nefs, devant le travail insurmontable à accomplir. Ils se résoudront avec beaucoup d’efforts à assainir les surfaces, en les comblant par des apports de chaux et de décombres.

Dès la fin du XVIIIème siècle, le sol est partout remblayé au niveau de celui du sanctuaire.

Guerres de Religion : nom donné en France aux guerres qui opposèrent catholiques et protestants dans la seconde moitié du 16ème siècle.

SUPPRESSION DE LA MENSE CONVENTUELLE

En 1741, l’évêque de Viviers ordonne l’annulation de la mense conventuelle accordée aux moines. L’abbaye en tant qu’institution est supprimée.

Cette décision épiscopale est en partie encouragée par le faible nombre de moines qui, en outre, vivent davantage sur les hauteurs du village fortifié que dans l’abbaye. Une fois la mense conventuelle supprimée, les revenus échouent alors dans les recettes du diocèse de Viviers.

En 1768, il ne reste plus que deux moines à l’abbaye de Cruas.

La mense est le nom du revenu ecclésiastique attribué :

– soit à l’évêque ou à l’abbé – Abbesse

– (mense épiscopale ou abbatiale) – soit aux chanoines ou aux moines (mense capitulaire ou conventuelle)

– soit au curé ou desservant (mense curiale ou mense priorale).

LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

Lorsque les mouvements révolutionnaires éclatent, il ne subsiste plus qu’un seul moine à Cruas.

Ce dernier disparaîtra peu après et l’abbaye sera vendue comme Bien National en 1794.

La Révolution française désigne une période de bouleversements sociaux et politiques de grande importance, en France, dans ses colonies et en Europe, à la fin du XVIIIème siècle. Sa durée s’étend entre l’ouverture des États généraux, le 5 mai 1789, et au plus tard du coup d’État de Napoléon Bonaparte, le 9 novembre 1799 (18 brumaire de l’an VIII).

PRÉSENTATION

A l’origine, l’abbatiale était composée de trois nefs de quatre travées, voûtées en berceau. Elle possédait un imposant transept avec coupole sur trompes, et trois absides semi-circulaires. Le sol du chœur et du transept surplombait de plus de trois mètres celui des nefs. Il couvrait une immense crypte transversale, qui s’étendait sur la totalité du chevet et du transept dont elle épousait les dimensions.

A l’intérieur de celle-ci se trouvaient les reliques de Saint Torquat et de Saint Josserand. Les fidèles venaient les honorer, sans pour cela déranger l’office des religieux qui priaient au-dessus, dans le chœur.

Au XIIème siècle, l’église était devenue trop petite. Pour pouvoir accueillir la foule des pèlerins et autre fidèles, on rajouta une cinquième travée, plus longue que les autres.

Mais à l’ouest, la déclivité du terrain amèna les bâtisseurs à construire un escalier pour permettre de descendre dans l’église : le portail d’entrée se trouvait alors à peu près à la même hauteur que le chœur surélevé.

L’ABBATIALE SAINTE-MARIE

Abbatiale Sainte-Marie de Cruas

LE PLAN

LES EXTÉRIEURS

LE CHEVET & SES ABSIDES LATÉRALES

LE PORTAIL D’ENTRÉE

LE LANTERNON AVEC SES BANDES LOMBARDES

 

Les travaux de l’abbatiale débutent au XIème siècle. L’église est représentative du premier âge roman méridional : on remarque l’apparition de bandes lombardes sur l’extérieur du chevet, l’étroitesse des fenêtres, et le lanternon doté de baies géminées. La partie supérieure est une réadaptation du XIXème siècle.

[su_note note_color= »#f6bf90″]Baie géminée : baie groupée par deux, sans être en contact direct.[/su_note]

LE CLOCHER-PORTE & SA ROSACE

La rosace qui surplombe le parvis de l’église date du XVème siècle.

La rosace et Le clocher-porte

Le clocher évoque ceux de Vienne et du Velay. Son assise, qui date du XIIème siècle, a été haussée de deux rangées au XIVème siècle.

LES FAÇADES ET CONTREFORTS

On remarque, sur le mur sud de l’abbatiale, les vestiges de la naissance des voûtes du cloître, à peine débarrassées des strates de boue et d’alluvions laissées par les crues successives de la Crûle.

LA NEF

La nef comprend cinq travées recouvertes d’une voûte en berceau. On distingue la présence d’un décor mural, principalement sur les murs de la quatrième travée (nous rappelant qu’au Moyen Âge, les églises étaient souvent peintes).

Travée : espace compris entre deux points d’appui d’une construction (colonnes, piliers, pilastres).

LES FRESQUES XIVème-XVème 

Comme la plupart des églises au Moyen-Âge, l’abbatiale était entièrement peinte.

LA FRESQUE DE SAINT SÉBASTIEN

Sur le mur sud, on trouve la fresque de Saint Sébastien : on y distingue deux archers qui se font face et qui s’apprêtent à le cribler de flèches. Sébastien se trouvait au centre mais a aujourd’hui disparu. Les deux moines agenouillés en prière rappellent que nous sommes dans une abbatiale.

Sébastien est un martyr chrétien du IIIème siècle, condamné à être attaché à un poteau et à mourir transpercé de flèches.

Saint Sébastien est le patron des archers, des fantassins et des policiers, mais aussi troisième patron de Rome (avec Pierre et Paul). Il est surtout prié pour lutter contre la peste et les épidémies en général.

LA FRESQUE DE LA SCÈNE DE CHASSE

Tout en bas sont représentés des animaux (un cerf, deux chiens) et un homme, évoquant une scène de chasse. Un personnage est agenouillé et auréolé : sans doute Saint Eustache ou Saint Hubert, des saints tous deux saint patrons de la chasse.

LA FRESQUE DE LA TRINITÉ

A gauche, un ange tient un encensoir. Au centre sont représentés Dieu en majesté présentant le Christ en Croix, et la colombe du Saint-Esprit. A droite, on trouve l’archange Saint Michel affrontant le dragon, et la Pesée des âmes par Saint Michel.

LE GISANT D’ADHEMAR VI

Ce gisant est celui d’Adhémar VI de Poitiers-Valentinois, seigneur de Baix, et mécène de l’abbaye de Cruas. Cette sculpture évoque les donations vitales de ses bienfaiteurs envers une abbaye. En effet, leurs legs permettent de constituer un patrimoine sur lequel se développe la prospérité de l’institution.

Au cours des périodes trouble des Guerres de Religion et de la Révolution, l’on a martyrisé la malheureuse sculpture : la tête, les bras et les pieds ont été martelés. Les pieds ont été retrouvés au XXème siècle et restaurés (ils n’ont pas encore été repositionnés sur le corps du gisant).

LES VESTIGES ARCHÉOLOGIQUES

On a mis à jour, sous l’actuelle église abbatiale, les vestiges d’une villa gallo-romaine. Elle fut construite sur l’itinéraire de l’ancienne voie romaine « d’Antonin-le-Pieux », qui reliait Lyon et Vienne à Nîmes (de nos jours, la N86).

Au cours des campagnes de fouilles, les archéologues ont découvert et étudié certains vestiges qui étaient antérieurs à l’abbatiale romane.

Pour mieux se situer et faire un repérage exact, l’on a éclairé d’une lumière bleue les restes de la villa gallo-romaine (elle fut détruite par un incendie au IVème siècle). La lumière jaune nous indique les vestiges de l’édifice paléochrétien du Vème siècle, ainsi que ceux de l’église du IXème siècle (rebâtie sur les vestiges antérieurs, puis détruite par une inondation du ruisseau Crûle).

A partir de la fin du Vème siècle, le site est voué à la religion. Un premier édifice paléochrétien à nef unique est construit. Il se termine à l’est par une vaste abside, et reprend en partie les murs de la villa.

LA CROISÉE DU TRANSEPT

C’est à la croisée que l’on trouve l’espace consacré au chœur. Au-dessus du chœur, sous la coupole, on distingue des trompes l’œil de coquilles Saint-Jacques qui rappellent que Cruas se trouvait sur un chemin de Saint-Jacques de Compostelle.

LA COUPOLE

LES CHAPITEAUX DÉCORÉS

LA TRIBUNE MONASTIQUE BASSE REDÉCOUVERTE

Au XIXème siècle, Prosper Mérimée (inspecteur général des Monuments Historiques) va s’intéresser particulièrement à l’abbatiale de Cruas. En 1847, il la classera Monument Historique.

Entre 1972 et 1977 puis entre 1983 et 1998, des fouilles archéologiques sont entreprises, qui seront déterminantes pour l’édifice et sa restauration. Les résultats sont hallucinants ; ils permettent à une tribune oubliée de sortir de terre.

Tout est d’origine (du XIIème siècle) : la tribune avec ses voûtes, ses colonnettes et ses chapiteaux, n’a subi aucune restauration. C’est probablement l’élément architectural le plus exceptionnel de l’abbatiale. Elle sépare l’espace assigné aux moines, au niveau supérieur, de celui réservé aux fidèles et aux pèlerins, au niveau inférieur.

Ainsi organisée, cette tribune permet aux moines de dire en commun, sans intervention extérieure, les prières quotidiennes dictées par la Règle de Saint Benoît.

L’AUTEL & LES VITRAUX

UNE RÉSURRECTION…

L’état de conservation de cette tribune est exceptionnel. Il faut savoir qu’elle n’a pas été restaurée, mais seulement dégagée des détritus qui l’encombraient et soigneusement nettoyée.

Il faut rechercher l’explication à l’époque moderne, au début du XVIème siècle.

Avant de fuir les crues causées par le Crûle pour aller s’abriter sur les hauteurs de Cruas, les moines, par manque de temps, ont muré la tribune et une partie des bas-côtés ; le reste de la nef n’a pas été sauvegardé. Par la suite, l’eau a charrié toute sortes de boue et de vase, permettant ainsi aux alluvions de colmater les surfaces qui n’avaient pas été protégées.

Dès leur retour, à la fin du XVIème siècle, les moines, n’ayant pas les ressources pour déblayer les détritus, entreprennent de colmater avec de la terre, des pierres et de la chaux vive jusqu’au niveau de la tribune. En plongeant ainsi dans l’oubli la tribune basse, ils ont créé une nouvelle nef de plain-pied.

On peut encore aujourd’hui constater les traces sombres laissées sur les piliers, nous signalant l’ancien niveau du sol.

Protégé et entouré par ses quatre murs, le niveau inférieur de la tribune a longtemps été estimé comme étant une seconde crypte. Il faudra attendre les années 1970, lorsqu’on extraira les alluvions, pour que l’on redécouvre la tribune ensevelie, dans son aspect primitif.



LES CHAPITEAUX DE LA TRIBUNE BASSE

Les voûtes qui supportent la tribune sont portées par des colonnes arborant des chapiteaux diversement décorés. Ils ont été réalisés à la même époque, mais ne sont cependant pas le travail du même tailleur de pierre.

Les différences dans les exécutions montrent que c’est l’œuvre de plusieurs mains ; peut-être celles du maître et de ses apprentis.

Les décors sont richement décorés et variés : les motifs végétaux, animaux ou d’inspiration corinthienne sont ici très présents.

Ordre corinthien : ordre d’architecture caractérisé notamment par l’utilisation de chapiteaux à deux rangs de feuilles d’acanthes.

On découvre d’autres motifs d’inspiration plus locale : un chapiteau affiche des cordages assemblés en nœud marin. Ce décor rappelle la proximité du Rhône, alors distant de 500 mètres à peine, à l’est de l’abbatiale.

On distingue aussi des références bibliques : l’arbre de vie et symbole de la tentation est représenté ici par deux serpents entourant une tête humaine.

Les clés de voûte sont aussi décorées (ex : une lionne se mordant la queue, représentant l’éternel) Remarquons au sol le tracé de l’abside du Vème siècle.

Clés de voûte représentant une lionne se mordant la queue

L’ÉGLISE HAUTE & LES CHAPITEAUX

On accède à l’étage supérieur par un des escaliers latéraux. C’était la tribune haute, celle où prenaient place les moines pour leurs prières quotidiennes et leurs chants. Les fidèles et les pèlerins, eux, se trouvaient au niveau inférieur, dans la tribune basse.

Dans cet espace, les voûtes qui soutiennent la tribune sont supportées par des colonnes arborant des chapiteaux aux décorations variées.

Les chapiteaux du XIIème siècle ont été construits pour être contemplés à hauteur d’homme. Les motifs principaux affichent un bestiaire fantastique : des hippogriffes, des griffons, des dragons… On trouve sur un chapiteau côté sud un monstre à deux têtes, dont la queue est munie d’une espèce de tête d’oiseau, et dont la gueule s’ouvre vers un visage humain (probablement un moine).

Autant de symboles qui sont assurément placés autour des moines comme des mises en garde contre le mal, comme pour les prévenir.

La MOSAÏQUE DE L’ABSIDE

Elle daterait du début du XIIème siècle. Elle a été réalisée en commémoration du pape Urbain II, à son retour du Concile de Clermont (en 1095), au cours duquel il prêcha la Première Croisade. Elle représente Elie et Hénoch, deux personnages de l’Ancien Testament enlevés et menés vivants au ciel par Dieu, dont la présence est rappelée par la main bénissant au-dessus de leur tête…

Au centre de la mosaïque on distingue le Jardin d’Eden, avec l’arbre de vie à gauche (Lignum), et l’arbre de la connaissance à droite (Ficus). Entre les deux arbres, une croix de marbre à cinq bras rappellerait l’échelle de Jacob.

Échelle de Jacob : échelle symbolisant, dans l’art chrétien, le lien entre le Ciel (Dieu) et la terre (le monde des hommes).

En-dessous, quatre dômes transpercés par un trait vertical symboliseraient les quatre monts et les quatre fleuves du Paradis. La grande dalle de pierre signale l’emplacement originel de l’autel roman.

LA CRYPTE

C’est la partie la plus ancienne de l’abbatiale. Elle est semi-enterrée ; c’est l’élément le plus à l’est de l’ensemble. Elle abritait les reliques des deux saints : Saint Josserand (l’un des moines de l’abbaye), et Saint Torquat (évêque de Saint Paul-Trois-Châteaux). Ses mesures imposantes s’expliquent par les proportions du transept, qui se situe au-dessus.

LES CHAPITEAUX DE LA CRYPTE

Les chapiteaux sont de style primitif ; ils représentent des décors d’animaux, des feuillages, et des motifs divers comme la rouelle solaire (ci-dessous).

On distingue une seule représentation humaine : il s’agit d’un orant (personnage en prière). Il se présente à nous debout, les mains levées, pour obtenir les bénédictions du ciel. Cette vision de la prière était très répandue dans l’Antiquité chrétienne jusqu’ au XIIème siècle. Cette posture sera remplacée par la prière les mains jointes (un symbole de soumission qui s’inspire du vassal respectueux envers son seigneur).

Les mains et la tête de l’orant sont exagérément démesurées pour augmenter le signe de l’adoration. On remarque que la pierre a été polie au cours des siècles, à cause du toucher maintes fois répété des fidèles et des pèlerins.

Les chapiteaux sont taillés en méplat, c’est-à-dire que le relief est peu accentué (sur certains d’entre eux, on distingue encore la marque laissée par l’outil du sculpteur).

La crypte est ornée de formes géométriques simples, comme des animaux domestiqués, ce qui lui donne un aspect de bestiaire médiéval.

On distingue, parmi ces chapiteaux décorés, une représentation de l’homme (Âne) partagé entre le bien (le coq) et le mal (le loup).

LA PIÉTA

Cette piéta (date inconnue) est appelée « Mater dolorosa » (Vierge douloureuse). C’est une représentation classique dans l’art. La Vierge porte sur ses genoux le corps du Christ mort et descendu de la Croix. Ici, la douleur de la Vierge s’exprime d’autant plus qu’elle pleure à grosses larmes, alors que la position du Christ nous laisse penser qu’il n’est pas tout à fait mort.

Sources :

Mes photos

Photos publique Facebook

Document produit par le Pays d’art et d’histoire du Vivarais méridional. 32 bd Stalingrad 07402 Le Teil.

Panneaux explicatifs affichés à l’intérieur de l’abbatiale à l’attention du public.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Abbatiale_Sainte-Marie_de_Cruas

http://lieuxsacres.canalblog.com/archives/2009/09/09/15009192.html

https://www.ardeche-actu.com/decouverte/tourisme-patrimoine/labbatiale-de-cruas-et-sa-tribune-monastique/

https://www.patrimoine-ardeche.com/visites/cruas.htm

https://monumentum.fr/eglise-pa00116701.html

 

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