« Typhon d’Acier » sur Okinawa
![]()
SECONDE GUERRE MONDIALE
GUERRE DU PACIFIQUE
![]()
CAMPAGNE DES ARCHIPELS
D’OGASAWARA ET RYUKYU

L’Archipel d’Okinawa
![]()
TYPHON D’ACIER SUR OKINAWA
Du 1er avril au 22 juin 1945

Aviateurs japonais kamikazes
SOMMAIRE
L’ASSAUT FINAL DU PACIFIQUE

Attaque aérienne sur la base de sous-marins nains japonais à Okinawa
Le dernier grand débarquement de la guerre

Avril 1945 – Les Marines de la 6th Marine Division débarquent à Okinawa…
Le 1er avril 1945, les Marines de la 6ème Division US débarquent sur les plages d’Okinawa. Armés, concentrés, silencieux, ils progressent dans les vagues vers une terre hostile qui, bientôt, va devenir l’un des champs de bataille les plus meurtriers du XXème siècle. Cette division, composée de vétérans aguerris par les campagnes de Guam et de Bougainville, s’apprête à combattre un ennemi invisible, fanatique, retranché dans les grottes et les collines de l’île.
Okinawa : la dernière étape avant le Japon

Okinawa, distance avec le Japon
L’île d’Okinawa, située à seulement 550 km des côtes japonaises, est un enjeu stratégique vital. Si les Alliés s’en emparent, ils disposeront d’une voie magistrale pour envahir la terre sacrée du Japon. Mais les Japonais en sont conscients. Le général Mitsuru Ushijima, commandant la 32ème Armée impériale, a organisé une défense en profondeur : il a truffé l’île de fortifications souterraines, de champs de mines et de bunkers bétonnés. Il va affronter plus de 180 000 soldats américains (dont les Marines de la 6ème Division) qui s’apprêtent à débarquer sur les plages Hagushi.
La 6ème Division US prend position sur le flanc gauche, avec pour objectif d’avancer vers le nord et de sécuriser l’isthme, avant de se diriger vers le sud.
Les Marines sont prêts, et savent à quoi s’attendre…

3 juin 1945. Les Marines de la 2nd Marine Division se dirigent vers Iheya sur Okinawa
Les Marines qui débarquent des péniches ce jour-là ne sont plus des recrues. Ce sont des vétérans ; ils ont déjà connu le feu, les assauts amphibies, les tranchées creusées dans le corail, les corps des amis abandonnés dans la boue ou sous les cocotiers. Ils savent surtout que l’ennemi est irréductible et ne se rend presque jamais. Cette bataille, la plus proche du Japon, ils savent qu’elle sera différente : plus périlleuse, incertaine, et plus horrible.
Mais ils marchent, disciplinés, l’arme au poing et le regard figé. Le plus petit bosquet, la moindre butte, peut cacher un nid de mitrailleuses ou une embuscade kamikaze. Leur mission sera de tenir puis de vaincre, d’occuper, et surtout de ne pas céder…

Les Kamikazes – Des héros sacrifiés, une valeur militaire contestée
Une bataille que les Japonais ont nommée « typhon d’acier »

Le feu dans les entrailles d’Okinawa – 3 mai 1945
La campagne d’Okinawa durera 82 jours. Les combats au sud de l’île, notamment autour des lignes de Shuri, deviendront un enfer de feu, de pluie et de boue. Les Marines de la 6ème Division, comme les autres unités engagées, subiront de lourdes pertes ; mais ils combattront jusqu’au bout. L’île sera prise au prix d’un lourd tribut de près de 12 000 morts américains, et de plus de 100 000 soldats japonais tués.
Les civils, pris en tenaille, subiront eux aussi les effets tragiques de cette bataille d’anéantissement.
Conclusion : des hommes sur une plage, à l’aube d’un cataclysme

Okinawa débarquement – 1945
La photo de ces Marines de la 6ème Division débarquant sur Okinawa est un moment suspendu dans le temps, un intervalle entre deux horreurs. Ces hommes jeunes ne sont pas encore des héros ; ce sont des enfants remplis d’effroi, mais conscients de faire leur devoir. Ils ne savent pas encore que cette île sera le dernier témoin d’une grande bataille de la guerre du Pacifique, ni que leur courage changera le cours de l’histoire. Mais ils avancent, droit vers la tempête ; vers le « typhon d’acier ».
![]()
LES FORCES EN PRÉSENCE ALLIÉES
LES COMMANDANTS
![]()
![]()
LES FORCES TERRESTRES
– La 10ème armée américaine, soit 541 000 hommes (de 183 000 à 250 000 soldats combattants).
– le 24ème corps d’armée américain
– la III Amphibious Corps
Cette unité gérait aussi bien l’administration générale que le ravitaillement, la formation, l’équipement, la planification opérationnelle, et la coordination sur le terrain.
LES FORCES NAVALES
– l’United States Fifth Fleet
– la British Pacific Fleet
![]()
LES FORCES EN PRÉSENCE JAPONAISES
LES COMMANDANTS
![]()
LES FORCES TERRESTRES
– La 32ème armée japonaise, soit 67 000 à 77 000 soldats japonais, et 20 000 à 40 000 conscrits à Okinawa.
Les commandants japonais d’Okinawa (y compris l’amiral Minoru Ōta, le lt. gén. Ushijima, le lt. gén. Chō, et le col. Hiromichi Yahara) en février 1945.
LES FORCES NAVALES
– La 2ème flotte.
7 avril 1945 – Le cuirassé japonais Yamato, considéré comme le plus grand cuirassé du monde à l’époque, est coulé par les forces alliées lors de la bataille d’Okinawa
CONTEXTE
Drapeau du Japon
UNE BATAILLE AUTANT SYMBOLIQUE QUE STRATÉGIQUE…
Le dimanche de Pâques 1er avril 1945, une immense flotte américaine s’approche d’Okinawa, dans l’archipel des Ryûkyû, à plus de 500 km de Tokyo. Pour les Alliés, l’objectif est de se rendre maîtres de cette île, car elle représente une étape essentielle à l’invasion du Japon. C’est une terrible bataille de la seconde guerre mondiale qui commence. Okinawa sera la première île japonaise à être attaquée sur le sol sacré du Japon ; autant dire que son importance est autant symbolique que stratégique.
Mais les Japonais y ont organisé une résistance farouche et désespérée ; ils ne renonceront pas facilement, et sont prêts à tous les sacrifices pour vaincre.
Jamais les États-Unis n’ont rassemblé dans le Pacifique une telle armada : 1300 navires, un demi-million d’hommes, sans compter l’appui de la Royal Navy. Celle-ci, en se positionnant entre Formose et Okinawa, a pour objectif de ceinturer le secteur et d’empêcher tout renfort japonais d’accéder à l’île.
L’île elle-même est longue de 100 km et large de 5 à 16 km. Selon le commandement japonais, les retranchements d’Okinawa doivent stopper la progression de l’ennemi. Le but est de lui infliger enfin une défaite cinglante. Une fois l’ennemi terrassé, cela permettra de desserrer l’étau qui se referme de plus en plus sur l’archipel, et de se trouver ainsi en meilleure position pour négocier ; c’est ce que l’empereur attend de la défense d’Okinawa.
![]()
LA BATAILLE NAVALE
La Force opérationnelle de porte-avions rapides (« Task Force 38 » lorsqu’elle est affectée à la Troisième Flotte, et « Task Force 58 » lorsqu’elle est affectée à la Cinquième Flotte) est un groupe de navires durant la Seconde Guerre mondiale.
Les forces navales américaines commencent la campagne avec la cinquième flotte des États-Unis (TF 58), sous le commandement de l’amiral Raymond Spruance, puis la terminent avec la troisième flotte (TF 38), sous le commandement de l’amiral William F. Halsey.
La « Task Force 58 » est la principale force de frappe de l’US Navy dans le Pacifique (de janvier 1944 à la fin du conflit, en septembre 1945). Cette force opérationnelle est composée de plusieurs groupes opérationnels distincts, chacun généralement constitué de trois à quatre porte-avions et de leurs navires de soutien. Ces derniers comprennent des destroyers d’escorte, des croiseurs et des cuirassés rapides récemment construits.
La « Task Force 58 » est déployée à l’est d’Okinawa, avec un groupe de six à huit destroyers protégeant treize porte-avions (7 CV et 6 CVL) en action du 23 mars au 27 avril. Jusqu’au 27 avril, entre quatorze et dix-huit porte-avions d’escorte (PAE) sont positionnés en permanence dans la zone. En même temps, jusqu’au 20 avril la « Task Force 57 » britannique, avec quatre grands porte-avions et six porte-avions d’escorte, demeure au large des îles Sakishima pour protéger le flanc sud de l’opération.
Le 31 mars à l’aube, un chasseur-bombardier japonais réussit à larguer sa bombe sur le navire amiral de Spruance (le croiseur lourd USS Indianapolis), lui causant d’énormes dégâts avant de le heurter et de s’écraser dans l’océan.
Les attaques de l’aviation japonaise sont légères au cours des premiers jours suivant le débarquement. Cependant, le commandement japonais prépare une attaque kamikaze sans précédent. Le « Kikusui » (ou chrysanthème flottant) est l’emblème de toutes les forces kamikazes affectées à la défense d’Okinawa. Du 6 avril au 22 juin 1945, il y aura 10 opérations « Kikusui » lancées contre les navires américains.
Le 6 avril, le Japon lance sa première contre-attaque aérienne avec 400 avions partis depuis l’ile de Kyūshū. 250 appareils sont détruits avant de pouvoir commencer leur attaque. Néanmoins, un certain nombre de navires, dont le porte-avions USS Hancock, sont plus ou moins gravement endommagés. Quelques bâtiments plus légers sont coulés, comme les destroyers USS Colhoun ou USS Bush.
Le 11 avril, le cuirassé USS Missouri, les porte-avions USS Enterprise et USS Essex ainsi que six destroyers, sont endommagés par les forces aériennes japonaises.
Le 12 avril, l’USS Mannert L. Abele est le premier navire coulé par un avion kamikaze suicide (un « Yokosuka MXY-7 Ohka »).
Les forces kamikaze suicide « Kikusui » attaqueront jusqu’à deux fois par jour tout au long de la bataille d’Okinawa.
Durant le mois d’avril, les attaques aériennes japonaises se poursuivent régulièrement. Entre le 26 mars et le 30 avril, 20 navires américains sont coulés et 157 endommagés. Au 30 avril, les Japonais ont déjà perdu, eux, plus de 1 100 avions.
Le mois de mai est terrible pour les forces navales alliées :
– le 4 mai, les avions kamikazes coulent deux destroyers, les USS Morrison et USS Luce (faisant au total 281 morts), et endommagent un certain nombre d’autres navires, dont le porte-avions britannique Formidable et le dragueur de mines USS Shea.
– le 6 mai, le South Dakota et le Formidable sont touchés par les avions kamikaze ; mais la structure du pont en acier du navire britannique résiste, et les dégâts sont limités.
– le 9 mai 1945, deux destroyers d’escorte ainsi que deux porte-avions britanniques, les HMS Victorious et Formidable, sont endommagés. Le 11 mai, c’est l’USS Hugh W. Hadley qui est gravement touché.
– le 18 mai, le destroyer USS Longshaw (échoué sur un récif) est coulé par les batteries côtières japonaises.
– le 25 mai, le destroyer USS Bates est coulé, et plusieurs autres navires sont endommagés au large d’Okinawa.
– le 27 mai, les destroyers USS Braine et USS Drexler sont aussi touchés.
Le 29 juillet 1945, un avion nippon s’écrase sur le destroyer USS Callaghan, au large d’Okinawa (le Callaghan sera le dernier navire de guerre américain coulé par une attaque japonaise).
![]()
« LE VENT DIVIN »

22 octobre 1944 – Les premiers kamikazes japonais…
Les héros sacrifiés du « Vent Divin » Les Kamikazes – Des héros sacrifiés, une valeur militaire contestée La photographie d’un groupe de pilotes kamikazes japonais, prise à l’aérodrome de Chōshi en novembre 1944, est un témoignage bouleversant d’une stratégie désespérée employée par le Japon impérial durant la Seconde Guerre mondiale. Parmi les 18 pilotes présents sur l’image, un seul a survécu : Toshio Yoshitake (il a échappé à la mort parce que son avion a été abattu par la DCA américaine avant d’atteindre sa cible). Les kamikazes, littéralement « Vents Divins », étaient des pilotes-suicide dont la mission consistait à s’écraser volontairement sur les navires ennemis (en particulier les porte-avions américains), au prix de leur vie. Cette action, qui s’inscrit dans l’esprit de sacrifice et de loyauté inconditionnelle envers l’empereur, pose la question de son efficacité réelle et de sa valeur militaire. Sur le plan tactique, les kamikazes infligèrent des pertes considérables aux forces alliées, notamment durant la bataille d’Okinawa, en 1945. Plusieurs navires alliés furent gravement endommagés ou coulés par ces attaques suicides. L’ennemi dut renforcer ses défenses aériennes, et fut forcé de développer de nouvelles stratégies pour contrer cette menace imprévisible. Cependant, l’impact stratégique global des kamikazes fut souvent jugé limité. Les pertes matérielles causées par ces attaques n’inversèrent pas le cours de la guerre, et leur coût humain fut extrêmement élevé. Des centaines de jeunes pilotes furent sacrifiés dans des missions où la probabilité de réussite était faible, face à une force ennemie technologiquement supérieure, et de mieux en mieux préparée à contrer ces attaques. De plus, sur le plan psychologique, si les kamikazes étaient perçus par certains comme des héros, leur utilisation massive révéla également la situation désespérée dans laquelle se trouvait le Japon à la fin du conflit. Les pilotes kamikazes étaient souvent de jeunes recrues à peine formées, expédiées au front avec très peu d’expérience, ce qui posait des questions sur le manque de préparation et la gestion des ressources humaines du Japon en temps de guerre. En conclusion, bien que les pilotes kamikazes aient incarné un certain idéal de sacrifice pour la patrie, leur efficacité militaire resta débattue. Ils causèrent certes des dégâts aux forces alliées, mais au prix d’un nombre démesuré de vies japonaises, et sans impact décisif sur le cours de la guerre.
![]()
Shinichi Ishimaru, pilote de la Marine impériale japonaise Shinichi Ishimaru fut l’un des nombreux jeunes aviateurs de la Marine impériale japonaise qui s’illustrèrent dans les premières années de la guerre du Pacifique. Comme beaucoup de ses camarades, il appartenait à cette génération d’hommes formés dans l’euphorie et la liesse des victoires initiales du Japon ; mais destinés à affronter ensuite la supériorité industrielle et aérienne écrasante des Alliés. Un enfant dans le ciel du Pacifique Né au Japon dans les années 1920, Shinichi Ishimaru s’engagea dans l’aviation navale impériale, et devint pilote de chasse sur Mitsubishi A6M Zero (l’appareil emblématique du Japon). Le Zero, rapide, maniable et doté d’une autonomie considérable, incarnait alors la suprématie aérienne japonaise au début du conflit, notamment lors de Pearl Harbor et des premières campagnes dans le Pacifique. Le sacrifice des enfants soldats, et la guerre totale… À mesure que la guerre avançait, Ishimaru, comme tant d’autres pilotes de son époque, dut faire face à des missions de plus en plus périlleuses. À partir de 1944, le Japon, acculé par la perte de ses pilotes expérimentés et par l’écrasante avance des forces américaines, lança une stratégie de guerre désespérée : les attaques kamikazes. Ces missions-suicides, menées par de jeunes aviateurs, visaient à frapper les navires ennemis au prix de leur vie. Shinichi Ishimaru fut choisi pour participer à ces unités spéciales. Comme beaucoup d’entre eux, il écrivit une lettre d’adieu, témoignage de loyauté à l’empereur et d’attachement à sa famille. Le 11 avril 1945, au plus fort de la bataille d’Okinawa, il prit les commandes de son « Zero » pour une mission sans retour. Il plongea avec son appareil sur le destroyer américain USS Kidd (DD-661), le frappant de plein fouet. L’explosion causa de lourds dégâts, tuant 38 marins américains et en blessant 55. Ishimaru, bien entendu, périt dans l’impact. Héritage et mémoire Aujourd’hui, le souvenir de Shinichi Ishimaru est sujet à controverses. Pour certains au Japon, il incarne le sacrifice ultime d’une jeunesse endoctrinée dans un conflit qui la dépassait. Pour d’autres, il reste un symbole de l’aveuglement tragique d’une idéologie militariste qui amena toute une génération à la mort. Du côté américain, son nom est lié à l’histoire de l’USS Kidd, conservé aujourd’hui comme navire-musée à Baton Rouge, en Louisiane. Les Marines américains, qui y servent comme guides, rappellent encore le jour où un jeune Japonais, à peine sorti de l’adolescence, se jeta sur leur navire dans une ultime mission. Shinichi Ishimaru avait 19 ans.
![]()
L’OPÉRATION TEN-GO

Les commandants japonais d’Okinawa (y compris l’amiral Minoru Ōta, le lt. gén. Ushijima, le lt. gén. Chō, et le col. Hiromichi Yahara) en février 1945.
L’opération Ten-Go est une tentative de contre-attaque suicide menée par une force de frappe composée de dix navires de surface japonais, sous le commandement de l’amiral Seiichi Itō, et dirigée par le super cuirassé Yamato. Ce petit groupe naval a reçu l’ordre de se frayer un chemin à travers les forces navales ennemies, afin de leur détruire un maximum de navires. Puis il doit échouer le Yamato, combattre depuis la côte en utilisant ses canons comme artillerie côtière et son équipage comme infanterie de marine.
La force Ten-Go est repérée par des sous-marins peu après avoir quitté les eaux territoriales japonaises. Elle est interceptée par des avions embarqués depuis les porte-avions américains bien avant qu’elle n’atteigne Okinawa.
Le 7 avril 1945, durant près de deux heures, 386 avions (en cinq vagues d’assaut) frappent le plus grand cuirassé du monde qui sombre vers 14 h 30. Sur les 3000 marins à bord, seul 269 seront repêchés.
Parmi les navires d’escorte du Yamato, le croiseur léger Yahagi et 4 des 8 destroyers sont également coulés. La Marine impériale japonaise perd environ 3 700 marins, dont l’amiral Itō.

Seiichi Itō
Du côté allié, 10 avions sont détruits et 12 aviateurs américains tués.
Pendant l’opération « Ten-Go », 115 avions japonais attaquent la flotte américaine à Okinawa, principalement des kamikazes. Le porte-avions Hancock et le cuirassé USS Maryland subissent des dommages faibles. Le destroyer Bennett est sérieusement endommagé, mais aucun navire américain ne sera coulé dans la bataille. Environ 100 avions japonais sont détruits durant le raid. Cette opération représente la dernière grande bataille aéronavale de la guerre du Pacifique.
LA FLOTTE BRITANNIQUE

La flotte britannique du Pacifique participe en tant que « Task Force 57 ». Elle reçoit pour mission de neutraliser les aérodromes japonais des îles Sakishima ; ce qu’elle accomplit avec succès du 26 mars au 10 avril.
Le 10 avril, son action se porte contre les aérodromes situés au nord de Formose ; le 23, la flotte britannique se retire dans la baie de San Pedro pour ravitaillement. Le 1er mai, elle retourne sur la zone des combats pour frapper à nouveau les aérodromes, mais cette fois-ci par des bombardements aériens en plus de son artillerie de marine.
Plusieurs attaques kamikazes ont lieu au cours des combats, causant des dégâts importants ; mais grâce au blindage des ponts d’envol des porte-avions de la Royal Navy, les opérations ne sont que brièvement interrompues.
LA BATAILLE TERRESTRE
La bataille sur terre débuta le 1er avril 1945 et dura 81 jours.
Le 26 mars, les premiers Marines à débarquer sont des soldats de la 77ème division d’infanterie ; ils posent le pied dans les îles Kerama, à 24 km à l’ouest d’Okinawa. D’autres débarquements de renfort vont suivre, et le groupe de Kerama sera sécurisé au bout de 5 jours. Lors de ces opérations préliminaires, la 77ème division d’infanterie comptera 27 morts et 81 blessés, tandis que les pertes japonaises (morts et prisonniers) s’élèveront à plus de 650.
Le 28 mars 1945, après le débarquement des troupes américaines, 394 civils de l’île de Tokashiki sont contraints au suicide par des soldats japonais.
Le 31 mars, des Marines du bataillon de reconnaissance amphibie débarquent sans rencontrer de résistance sur Keise Shima (quatre îlots situés à seulement 13 km à l’ouest de Naha), la capitale d’Okinawa.
Un groupe de pièces d’artillerie de 155 mm « Long Tom » est débarqué sur les îlots pour protéger les actions à Okinawa.

Des Marines américains ouvrent le feu sur les positions japonaises dans les ruines de Naha – Bataille d’Okinawa, juin 1945 …
La voie du guerrier dans l’aviation militaire japonaise Le « Bushidō » (ou voie du guerrier) était un code de conduite samouraï qui a profondément influencé la mentalité militaire japonaise, notamment durant la Seconde Guerre mondiale. Cette philosophie mettait l’accent sur la loyauté absolue envers l’empereur, le courage inébranlable et la disposition au sacrifice ultime pour le bien de la nation. Influence du Bushidō sur les pilotes japonais Dès le début du conflit, les pilotes de la marine et de l’armée impériales japonaises avaient été formés selon les principes du « Bushidō ». Cette formation rigoureuse insistait sur l’honneur, la discipline et le refus catégorique de la reddition. Des aviateurs tels que Saburō Sakai incarnèrent cet esprit en affrontant l’ennemi avec une détermination sans faille, même dans des situations désespérées. Mutation vers les attaques suicides À mesure que la guerre progressait et que les pertes s’accumulaient, une interprétation extrême du « Bushidō » avait conduit à l’adoption de tactiques suicidaires. Les unités « Shinpū Tokubetsu Kōgekitai », plus connues sous le nom de « kamikazes », furent créées dans ce contexte. Les jeunes pilotes étaient endoctrinés pour considérer la mort au combat comme le summum de l’honneur, les incitant à précipiter leurs avions chargés d’explosifs sur des cibles ennemies, principalement des navires alliés. Exemples marquants d’attaques kamikazes – La bataille du golfe de Leyte (octobre 1944) : Lors de cette confrontation, les kamikazes infligèrent de lourds dommages à la flotte américaine. Le porte-avions d’escorte USS St. Lo fut coulé suite à une attaque directe d’un avion suicide. – La bataille d’Okinawa (1945) : Cette bataille vit un accroissement des attaques kamikazes, avec l’utilisation d’avions spécialement conçus pour ces missions, tels que le Yokosuka MXY-7 Ohka, un missile piloté. Malgré le dévouement des pilotes, ces actions n’ont pas suffi à inverser le cours de la guerre. Conséquences et héritage Les attaques kamikazes causèrent la perte de près de 3 800 pilotes japonais. Ces derniers avaient réussi à couler environ 50 navires alliés et à provoquer la mort de près de 7 000 soldats américains. Après la guerre, cette interprétation militariste du « Bushidō » fut largement controversée. Dès lors, le Japon entreprit de promouvoir une société basée sur la paix et la reconstruction. Néanmoins, l’héritage des pilotes kamikazes demeure aujourd’hui un chapitre intense et complexe de l’histoire militaire japonaise. Il illustre le dévouement extrême et les sacrifices consentis au nom d’un code d’honneur ancestral.
ACTIONS AU NORD D’OKINAWA
Le 1er avril, l’assaut principal est effectué par le XXIVème corps et le IIIème corps amphibie sur les plages d’Hagushi, sur la côte ouest d’Okinawa. La 2ème division de Marines débarque au large des plages de Minatoga, sur la côte sud-est, afin de faire diversion.
La Xème Armée traverse la partie centre-sud de l’île avec facilitée, tout en s’emparant des bases aériennes de Kadena et de Yomitan peu de temps après le débarquement. La résistance nippone étant faible, le général Buckner décide de passer immédiatement à la phase II de son plan, c’est-à-dire prendre le nord d’Okinawa. La 6ème division de Marines remonte l’isthme d’Ishikawa et, le 7 avril, relie la péninsule de Motobu.
Entre le 6 et le 9 avril, la situation évolue complètement lorsque les Américains arrivent au contact des premières lignes japonaises dans la presqu’île de Motobu (au nord), et dans la région de Nakagusuku (au sud). Les combats s’intensifient et deviennent rapidement difficiles.
L’essentiel des forces japonaises au nord est alors acculé sur la péninsule de Motobu. Le terrain étant montagneux et boisé, les défenses japonaises sont concentrées sur le mont Yaedake (un massif rocheux accidenté de crêtes et de ravins, au centre de la péninsule). Le 18 avril, de violents combats ont lieu, mais les Marines parviennent finalement à libérer Yaedake.
Au cours de cette phase, le nombre de victimes japonaises s’élève à plus de 2 500 morts et 46 prisonniers ; les Marines comptent, eux, 236 morts, 1 061 blessés, et 7 disparus.
Cependant, les combats terrestres dans le nord d’Okinawa ne sont pas terminés. Le 24 mai, les Japonais lancent l’opération « Gi-gou ». Une compagnie de commandos « Giretsu Kuteitai » (« Parachutistes héroïques » ») est héliportée pour une attaque suicide sur Yomitan. Le commando réussit à détruire 260 000 litres de carburant et 9 avions avant d’être décimé par les Marines, qui perdent 2 hommes.
Parallèlement, le 16 avril, la 77ème division d’infanterie lance l’assaut sur « Ie-jima » (une petite île située à l’extrémité ouest de la péninsule). Outre les dangers des défenses du terrain, elle doit affronter les attaques des kamikazes, et même celles des femmes locales armées de lances. De terribles combats auront lieu jusqu’au 21 avril, avant que la zone ne soit déclarée sécurisée.
ACTIONS AU SUD D’OKINAWA
LA LIGNE MACHINATO
Jusqu’au 24 juin, les combats continuent dans la partie sud d’Okinawa. Les Marines doivent nettoyer un à un à la grenade les trous et les abris enterrés ; en étant souvent victimes de pièges dissimulés. L’avancée est donc très lente et très coûteuse en vies, les Japonais cherchant à tuer le maximum d’ennemis en se battant jusqu’à la dernière limite ; jusqu’à la mort, qui est le plus souvent suicidaire.
Alors que la 6ème division des Marines nettoie le nord d’Okinawa, les 7ème et 96ème divisions d’infanterie de l’armée américaine avancent vers le sud, à travers l’étroit isthme d’Okinawa.
Dans le centre-ouest d’Okinawa, la 96ème division d’infanterie commence, à partir du 6 avril, à rencontrer une résistance acharnée des troupes japonaises. Elles sont retranchées dans des positions fortifiées à l’est de la route nationale n° 1, et à environ 8 km au nord-ouest de « Shuri », entre « Machinato » et « Ouki » (le long de la première des trois lignes de défense japonaises, la ligne « Machinato »). Cette zone sera bientôt connue sous le nom « Cactus Ridge » (la crête des cactus).
La 7ème division d’infanterie rencontre aussi une opposition féroce au niveau d’un piton rocheux situé à environ 910 m au sud-ouest d’Arakachi (surnommé plus tard « The Pinnacle »). Pendant la nuit du 8 avril, les troupes américaines finissent par nettoyer ces défenses, ainsi que plusieurs autres, puissamment fortifiées. Lors de ces opérations, les Américains capturent ou éliminent environ 4 500 Japonais, et déplorent la perte de 1 500 Marines. Mais la bataille ne fait que commencer, car on s’aperçoit que ces positions ne sont que les « avant-postes » de la ligne de défense « Shuri ».
L’objectif américain suivant est « Kakazu Ridge » (crête Kakazu), deux collines reliées par un col qui font partie des défenses extérieures de la ligne « Shuri ». Les soldats japonais, qui ont bien préparé leurs positions, combattent avec ténacité en se cachant dans des cavernes fortifiées, et en utilisant un système de tunnels enterrés. Les forces de la 96ème division d’infanterie vont subir de lourdes pertes en essayant de nettoyer les grottes afin de déloger les Japonais de leur cachette.
Les soldats japonais exigent, sous la contrainte, de la population civile (les Okinawais), qu’elle leur fournisse de l’eau et des provisions ; ce qui entraînera de nombreuses victimes civiles.
Aussi impitoyable que sera l’avance américaine, elle causera un nombre élevé de victimes dans les deux camps.
Près de 80 ans plus tard, des piliers en bois soutiennent toujours les parois du tunnel. Ces vestiges sont les sinistres témoins du vaste réseau de tunnels creusés en 1945 par l’armée impériale japonaise sous le château de Shuri-jo, avant la féroce bataille d’Okinawa. Auparavant fermées au public, des sections du réseau de tunnels ont récemment été ouvertes aux public. Les 25 avril et 12 mai 2025, environ 110 mètres du tunnel n° 2 et du tunnel n° 3 ont été montrés à une équipe de la « Japan Broadcasting Corp » (NHK), et du Okinawa Times. Il s’agit du premier accès médiatique au site depuis 2020 (date d’ouverture du tunnel n° 5). En raison du risque d’effondrement, ces vestiges sont généralement interdits au public. Le réseau de tunnels abritait le quartier général de la 32ème armée, chargée de défendre les îles les plus méridionales du pays contre l’invasion américaine. On pense que le tunnel n° 3 était le bureau de Mitsuru Ushijima, commandant de la 32ème armée. Les galeries partiellement effondrées mesurent de 1,2 à 2 mètres de haut et de 1,3 à 2,8 mètres de large, avec des chutes de rochers, des éboulis, et des flaques d’eau répandues un peu partout. Construit entre 1944 et 1945, ce complexe souterrain comprend cinq tunnels d’une longueur totale d’environ un kilomètre. On estime que 1 000 officiers et soldats y ont vécu. Vers la fin mars 1945, deux mois après le débarquement des militaires américains à Okinawa, la 32ème armée décida de se retirer du quartier général de Naha et de faire sauter les tunnels. Le quartier général fut déplacé à Mabuni, dans le sud d’Okinawa, et toute la partie sud de l’île devint un champ de bataille, de nombreux civils étant pris au piège dans les combats sanglants. On estime qu’un quart des habitants d’Okinawa ont trouvé la mort lors de la bataille. Le 23 juin est commémoré à Okinawa comme la « Journée du souvenir », marquant la fin des opérations militaires japonaises. La préfecture s’efforce de préserver les tunnels et de permettre l’accès du public à ce site du patrimoine de guerre. Au cours de l’exercice 2023, une équipe de recherche préfectorale a découvert, dans le parc du château de Shuri-jo, une entrée menant au tunnel n° 1. Ce tunnel, jusqu’alors inexploré, aurait abrité la salle du quartier général opérationnel et d’autres fonctions essentielles. L’ancien quartier général souterrain de la marine japonaise, ou « Kaigungo », était un complexe de tunnels construit en 1944 lors de la bataille d’Okinawa. Avec environ 20 mètres de profondeur et 450 mètres de long, les tunnels servaient de quartier général de la marine japonaise et d’abri souterrain contre les raids aériens. Quelque 4 000 soldats vivaient, travaillaient, et étaient cachés ici, endurant les bombardements des forces américaines, jusqu’à la reddition finale et la fin de la guerre.![]()
Alors que l’assaut américain contre la crête de Kakazu s’enlise, le lieutenant-général Ushijima, influencé par le général Chō, décide de passer à l’offensive. Le soir du 12 avril, la 32ème armée attaque les positions américaines sur tout le front. L’attaque japonaise est massive, soutenue et bien organisée. Après de violents combats au corps à corps, les assaillants se retirent, pour ensuite renouveler leur offensive la nuit suivante. Le 14 avril, un dernier assaut est de nouveau repoussé. Ces attaques révèlent aux officiers de la 32ème armée que les Américains sont vulnérables aux tactiques d’infiltration nocturne. Cependant, la puissance de feu américaine, nettement supérieure à la leur, rend toute concentration offensive des troupes japonaises extrêmement dangereuse ; ils reviennent donc à leur stratégie défensive.
Les troupes américaines sont fortement ralenties par la défense acharnée des Japonais. Le 14 avril, Buckner arrive sur le terrain pour débloquer la situation. Il décide l’envoi d’une 3ème division, la 27ème, en soutien des 96ème et 7ème, rendues exsangues par la férocité et la dureté des combats.
Fraternité dans le chaos L’image saisit un instant brut, presque insoutenable : deux Marines américains, épuisés, assis sur une colline rocailleuse près de Shuri, au cœur de l’île d’Okinawa. L’un vient de perdre un camarade, tombé sous les balles ou les éclats. L’autre, la main posée sur le front d’un camarade blessé, tente de lui offrir un réconfort que les mots ne sauraient donner. Okinawa, avril-juin 1945. C’est la dernière grande bataille du Pacifique, l’une des plus sanglantes. Les forces américaines, débarquées en masse, affrontent des défenseurs japonais retranchés dans des positions fortifiées (creusées à même la roche), et décidés à résister jusqu’au dernier homme. Les Marines et soldats américains découvrent un enfer : pluie d’artillerie, kamikazes, corps à corps dans les grottes, pertes immenses. Dans ce décor de boue, de flammes et de désolation, ce cliché révèle une autre vérité de la guerre : la fraternité. Quand tout s’effondre autour d’eux, les hommes ne tiennent que par les liens tissés entre compagnons d’armes. La mort est omniprésente, mais l’amitié, elle, devient une bouée. Okinawa a coûté la vie à plus de 12 500 Américains, et à près de 100 000 Japonais, soldats et civils mêlés. Le drame humain fut si terrible qu’il pèsera directement dans la décision d’utiliser l’arme atomique quelques mois plus tard, pour éviter une invasion du Japon métropolitain. Cette photo, figée dans la poussière et la douleur, raconte mieux que des chiffres ce qu’est la guerre : la perte, le chagrin, mais aussi la main fraternelle posée sur un visage.
La 27ème division d’infanterie débarque le 9 avril. Elle prend le relais sur la droite, le long de la côte ouest d’Okinawa. Le général John R. Hodge dispose désormais de trois divisions en ligne : la 96ème au centre et la 7ème à l’est, chaque division opérant sur un front d’environ 2,4 km. Le 19 avril, Hodge lance une nouvelle offensive avec un barrage de 324 canons (19 000 obus tirés en quelques heures, le plus important jamais réalisé dans le théâtre d’opérations du Pacifique). Cuirassés, croiseurs et destroyers se joignent au bombardement, appuyés par 650 avions de la Navy et des Marines frappant les positions japonaises au napalm, aux roquettes, aux bombes, et aux mitrailleuses.
De leur côté, les défenses japonaises se sont installées dans des grottes et cavernes, sur des pentes inversées (d’où les défenseurs peuvent attendre la fin du barrage d’artillerie et des attaques aériennes en relative sécurité). Ils n’en sortent que pour faire pleuvoir des obus de mortier et des grenades sur les Américains qui avancent sur la pente principale.
Les combats sont acharnés. Un assaut de blindés, mené par la 27ème division, tente une percée afin de déborder les positions japonaises à Kakazu Ridge. Mais il ne peut établir le contact avec son soutien d’infanterie qui tente, lui, de franchir la crête. L’assaut se solde par la perte de 22 blindés sur les 30 que possédait la division au premier jour de cette offensive. Bien que les chars lance-flammes permettent de nettoyer de nombreuses grottes défensives, la percée est un échec. Le 24ème corps d’armée accusera la perte de 720 hommes (tués, blessés ou disparus).

Un Marine et son lance flammes à Okinawa – 1945
Le 24 avril, après 18 jours de durs combats, la première des trois lignes de défense japonaises, l’anneau défensif extérieur, la ligne Machinato, est prise. Les Marines atteignent la crête Kakazu (clé du système de défense Machinato). Les troupes japonaises se retirent sur la seconde ligne défensive plus lourdement armée et fortifiée, la ligne « Shuri », située entre Naha, la capitale, et Yonabaru.
LA LIGNE SHURI
Les combats les plus ardus se déroulent le long de la seconde ligne de défense japonaise, la ligne « Shuri ». Cette crête, qui possède des atouts naturels, est plus puissamment armée et retranchée. Elle est parsemée de positions défensives, ce qui permet aux Japonais de résister et de tenir sans pour autant utiliser un grand nombre de soldats. Alors que l’adversaire doit arpenter un terrain tourmenté tout en se déplaçant à travers les ravins, les rivières et les sommets.
Interceptés en permanence par les Nippons, les Marines affrontent la furia japonaise en subissant de sévères contre-attaques ; qui sont presque toutes décimées par la puissance de feu américaine.
À la fin du mois d’avril, la 1ère division des Marines remplace la 27ème division d’infanterie, et la 77ème division d’infanterie remplace la 7ème.
Les Américains se heurtent alors à la ligne défensive de « Shuri », qui résistera jusqu’au 21 mai. Les contre-attaques japonaises ayant redoublé et étant synchronisées avec les attaques kamikazes, les pertes alliées deviennent colossales. La résistance acharnée des Japonais, et les difficultés rencontrées par les Américains sur cette ligne, incitent le général Ushijima à passer à l’offensive.
Le 4 mai, la 32ème armée lance une grande contre-offensive. Cette fois, Ushijima a prévu de lancer une puissante attaque, avec une brigade de 3 000 hommes appuyée par des chars. Les blindés sont chargés de frapper le centre des lignes américaines. De concert, l’offensive est soutenue par un assaut amphibie sur les côtes, en arrière des forces américaines, pour faire diversion. En soutien de l’attaque nippone, Mitsuru Ushijima déplace son artillerie à découvert (elle peut tirer 13 000 coups en appui mais l’efficacité des tirs de contrebatterie américains détruit des dizaines de pièces d’artillerie japonaises).

Le général de division Mitsuru Ushijima
Pendant ce temps, les bâtiments de la flotte de guerre américaine, puis la 1ère division des Marines, repèrent les troupes amphibies japonaises et les pulvérisent en mer ; il n’y aura aucun survivant. Des unités navales américaines repèrent aussi la brigade d’infanterie et la frappent avec leur artillerie et leur l’aviation.
L’ultime attaque japonaise planifiée de la Seconde Guerre mondiale tourne au désastre.
Dès lors, le 11 mai, Buckner lance une autre offensive américaine qui s’étalera sur dix jours de combats acharnés.

Simon Bolivar Buckner, Jr.
Le 13 mai, les troupes de la 96ème division d’infanterie et le « 763rd Tank Battalion » s’emparent de « Conical Hill ».
Pendant ce temps, sur la côte opposée, la 1ère et la 6ème divisions de Marines combattent pour prendre « Sugar Loaf Hill ». Le complexe de « Sugar Loaf Hill », « Horseshoe Ridge », et « Half Moon Hill », est l’une des zones les plus durement disputées de toute la bataille. Chaque colline couvrant les deux autres, les Japonais les ont aussi reliées entre elles par un réseau de galeries. « Sugar Loaf Hill » changera de mains quatorze fois avant d’être finalement prise par les Américains le 18 mai. La capture de ces deux positions clés expose les Japonais sur les deux côtés de la ligne « Shuri ». Buckner souhaite ainsi encercler « Shuri » et piéger les principales défenses japonaises.
Le 11 mai, l’effort américain se porte sur Naha, la capitale d’Okinawa, contre laquelle les troupes américaines lancent leur offensive. Le 17 mai, après une féroce bataille, elles investissent la cité en ruines.
Le 20 mai, les Marines atteignent le château de Shuri ; mais les pluies torrentielles réduisent l’avancée des blindés, ce qui donne un répit aux Japonais.
Le 29 mai, le major-général Pedro del Valle, commandant de la 1ère division des Marines, ordonne à la compagnie A du 1er bataillon, 5ème de Marines, de capturer le château.

Pedro del Valle
En prévision de cette opération, la zone est bombardée pendant trois jours par le cuirassé USS Mississippi. Le 29 mai, la prise du château de Shuri est une défaite à la fois stratégique et psychologique pour les Japonais, et une étape importante dans la progression des Alliés.
Del Valle recevra la « Navy Distinguished Service Medal » pour son commandement victorieux dans les combats et l’occupation d’Okinawa.
LA DÉBÂCLE JAPONAISE ET LA FIN DES COMBATS
Après leur retraite de « Shuri », les japonais se retranchent d’ouest en est, derrière leur dernière ligne défensive, « Itoma » (entre « Itoma » et « Mabum »), le long des crêtes entre « Kunishi Ridge », « Yuza-Dake », et « Yaeju-Dake ». La retraite japonaise (harcelée par des tirs d’artillerie) sera un succès. Elle est dirigée de nuit, avec une grande habileté, aidée par les tempêtes de la mousson. La 32ème armée japonaise est capable de déplacer près de 30 000 hommes derrière cette dernière ligne de défense, sur la péninsule « Kiyan » ; il s’y déroulera la plus grande boucherie d’Okinawa, avec la mort de milliers de civils.
En outre, 9 000 soldats de la Marine impériale japonaise, soutenus par 1 100 miliciens, sont retranchés sur la colline surplombant la base navale d’Okinawa, à « Uruma », dans la péninsule « Oroku », à l’est de l’aérodrome.
Le 4 juin, les forces américaines déclenchent l’assaut sur la presqu’île d’« Oroku ». Des éléments de la 6ème division des Marines lancent un assaut amphibie sur la péninsule.
L’aérodrome est rapidement investi, mais les marins de l’amiral Minoru Ōta vont opposer une rude résistance dans les grottes et les replis de terrain.

Minoru Ōta
Le 13 juin, pour ne pas tomber aux mains des Américains, les 4 000 marins japonais (y compris l’amiral Ōta) se suicideront dans les tunnels souterrains creusés à la main lors du siège du quartier général naval.
Dans la soirée du 7 juin, la 1ère division des Marines se dirige vers le sud, atteignant les faubourgs d’ « Itoman ». Le lendemain, les Marines se heurtent à une nouvelle ligne défensive japonaise ; les combats sont extrêmement violents. Dès lors, les Américains font sauter tous les blockhaus et toutes les entrées de grotte, emmurant ainsi les Japonais.
Les collines ne seront prises qu’après plusieurs jours de terribles combats causant beaucoup de pertes de chaque côté, et ce n’est que le 17 juin au soir que l’ensemble du complexe sera neutralisé.
Le 17 juin, les restes de la 32ème armée nippone d’Ushijima sont acculés dans une petite poche à l’extrême sud de l’île, au sud d’ « Itoman ». Le 18 juin, le général Buckner est tué par l’artillerie ennemie alors qu’il observait, au sommet de la colline « Mezado » (l’une des hauteurs de « Sugar Loaf Hill »), l’avancée de ses troupes. Buckner sera remplacé par Roy Geiger.
Le 19 juin, la côte sud d’Okinawa est atteinte ; les Américains encerclent alors les dernières positions japonaises encore très agressives.
À la grande surprise des Américains, qui redoutent une ruse, de nombreux Japonais isolés ou en groupe se rendent. Des unités de soldats ainsi qu’un groupe d’infirmières se suicident. Une grande quantité d’habitants de l’île, parfois des familles entières, se donnent la mort pour ne pas se rendre à l’armée américaine. Selon des témoins, ces suicides ont été ordonnés par l’armée impériale et sont le résultat de la propagande « shōwa » (paix éclairée).
Le 21 juin, les derniers débris de la résistance japonaise tombent, bien que certains Japonais aient tenté de se cacher. Mitsuru Ushijima et Isamu Cho se suicident par « seppuku » (hara kiri) dans les heures précédant la fin de la bataille, dans leurs quartiers généraux, sur la colline 89.
Le colonel Yahara demande la permission à Ushijima de se suicider ; mais le général refuse sa demande, en disant : « Si vous mourez, il n’y aura pas un survivant connaissant la vérité sur la bataille d’Okinawa. Portez cette honte provisoire, mais supportez-la. Ceci est un ordre de votre Commandant. ». Yahara sera le plus haut gradé à avoir survécu à la bataille d’Okinawa et plus tard, il écrira un livre intitulé « La bataille pour Okinawa ». La cérémonie officielle de reddition se déroule le 7 septembre, à proximité de l’aérodrome de Kadena.
![]()
PERTES
POUR LES AMÉRICAINS
![]()
Pertes humaines :
Sur les 183 000 à 250 000 soldats combattants engagés dans la bataille, les Américains auront environ 10 000 morts, et de 31 000 à 40 000 blessés.
Les pertes américaines s’élèvent à plus de 82 000 tués ou mis hors de combat pour diverses raisons (blessures, maladies, problèmes psychiatriques…), dont plus de 12 500 disparus ou morts au combat : 4 907 marins de l’US Navy, 4 675 soldats de l’US Army et 2 938 Marines.
29 810 964 cartouches de fusils et de mitrailleuses furent tirées par les forces américaines durant cette bataille.
Pertes matérielles :
– 38 navires
– 763 avions
– 225 blindés
LA MARINE US
L’AVIATION US
POUR LES JAPONAIS
![]()
Pertes humaines :
Sur les 67 000 à 77 000 soldats de la 32ème armée japonaise, et les 20 000 à 40 000 conscrits à Okinawa, les pertes japonaises s’élèveront à 110 000 morts (estimations US) et 7 000 prisonniers.
Civils japonais : 40 000 à 150 000 morts.
Pertes matérielles :
– 16 navires
– 7 800 avions
– 27 blindés
– 743 pièces d’artillerie
LA MARINE JAPONAISE
L’AVIATION JAPONAISE
LES CIVILS
Un geste d’humanité – Okinawa juin 1945 Sur cette photo poignante, le caporal américain Fenwick H. Dunn, du corps des Marines, tend une sucrerie à une vieille femme okinawaïenne. Nous sommes le 1er avril 1945, jour du débarquement américain sur l’île d’Okinawa, dernière grande étape avant le Japon continental. La bataille d’Okinawa va devenir l’une des plus sanglantes du Pacifique, avec plus de 200 000 morts, militaires et civils confondus. Cette image nous interpelle : elle nous dit que même dans le chaos d’une guerre totale, des gestes de compassion demeurent. Le contraste est fort : d’un côté, un soldat casqué, tendu par les combats ; de l’autre, une femme âgée, fragilisée, hagarde, peut-être rescapée d’un bombardement ou de la terreur imposée par les troupes impériales japonaises, qui interdisaient toute reddition. Ce cliché incarne la dualité de la guerre : la destruction massive et la tendresse discrète, la violence brutale et la main tendue. Dans un monde ravagé, une simple friandise devient alors un acte de reconnaissance de l’humanité de l’autre. C’est cela aussi, l’histoire : une rencontre, un regard, un geste qui résiste à la barbarie.
Deux Tekketsu Kinnōtai (enfants soldats japonais) Sur cette photo saisissante, prise en juin 1945, un Marine essaie d’établir un contact humain avec deux enfants soldats japonais capturés sur l’île d’Okinawa. L’image à elle seule résume toute l’ambiguïté d’une guerre totale, entre la rigueur impitoyable du conflit et les formes d’humanité qui peuvent subsister malgré tout. À Okinawa, la population civile fut entraînée dans une spirale de violence sans précédent, jusqu’au fanatisme. Le régime impérial japonais, refusant toute idée de reddition, arma jusqu’aux enfants et aux personnes âgées, les poussant à combattre ou à se suicider plutôt que de se rendre. Ces jeunes garçons sur la photo, hagards, traumatisés, vêtus de haillons militaires trop grands pour eux, sont le visage tragique d’une propagande aveugle, qui a sacrifié une génération entière au nom de l’honneur. Le Marine debout devant eux n’affiche ni arme, ni regard hostile. Il essaie de parler, d’expliquer, de rassurer. C’est un moment suspendu dans l’horreur de la bataille d’Okinawa, qui fut l’une des plus sanglantes du conflit : plus de 200 000 morts, dont près de la moitié étaient des civils. Cette scène reflète aussi un changement de perception chez les forces américaines. Loin de l’image caricaturale de l’ennemi, ces enfants capturés rappellent aux soldats alliés que l’adversaire n’est pas toujours un combattant volontaire, mais parfois une victime collatérale d’un système militariste et autoritaire. Le contraste est puissant : un soldat aguerri, en uniforme, protégé et nourri, face à deux enfants soldats perdus, affamés, endoctrinés. Cette photo est une leçon silencieuse : la guerre n’épargne personne, pas même l’enfance.
![]()
CONSÉQUENCES
En 83 jours d’intenses combats, 90% des bâtiments de l’île seront détruits, ainsi qu’une multitude de documents historiques, d’objets et de trésors culturels. Le paysage tropical sera transformé en un vaste champ de boue, de plomb et de pourriture.
La prise de ces îles sera primordiale pour les Alliés. Okinawa permettra de fournir un mouillage à la flotte US, des zones de rassemblement pour les troupes terrestres, et des aérodromes à proximité du Japon. Après la bataille, les forces armées américaines procéderont à un déminage en mer (opération Zebra). Elles installeront aussi le gouvernement militaire américain des îles Ryūkyū (en poste jusqu’en 1950, avant son transfert vers l’administration civile américaine des îles Ryūkyū).
UNE BATAILLE AUSSI STRATÉGIQUE QUE SYMBOLIQUE
Jamais les États-Unis n’avaient rassemblé une telle flotte dans le Pacifique : 1300 navires, un demi-million d’hommes, sans compter l’appui de la Royal Navy qui, en se positionnant entre Formose et Okinawa, empêchera tout renfort japonais d’accéder à l’île en enfermant le secteur.
L’horreur et le désastre de la bataille d’Okinawa, et les crimes commis, engendrèrent d’énormes pertes en vies humaines. Certains historiens militaires affirment que c’est ce colossal bilan qui poussa les Etats-Unis aux bombardements atomiques d’Hiroshima et de Nagasaki. Nombreux considèrent que c’était le seul moyen pour éviter l’invasion du Japon. On pouvait supposer que mettre le pied sur le sol sacré de l’Empire du Soleil Levant serait extrêmement coûteux en vies humaines.
Malgré la polémique que cela provoque, des forces américaines importantes sont toujours stationnées à Okinawa, entre autres à Kadena, la plus grande base aérienne américaine en Asie. En 2011, dans un contexte de tension entre la Chine et le Japon, la présence militaire américaine à Okinawa continue de faire débat.
![]()
Sources :
Mes photos
Photos publique Facebook
https://fr.wikipedia.org/wiki/Archipel_Okinawa
https://www.marianne.net/agora/tribunes-libres/la-bataille-dokinawa-l-autre-debarquement