L’enfer de Guam

                                                                                                                                                                                                                                                      

        SECONDE GUERRE MONDIALE

CAMPAGNE DES MARIANNES

Drapeau de Guam

L’ENFER DE GUAM

Du 21 juillet au 10 août 1944

L’assaut amphibie de Asan Beach – Guam 21 juillet 1944

SOMMAIRE

GUAM, REPRENDRE PIED DANS LE PACIFIQUE…

L’île de Guam, territoire américain envahi par les forces japonaises en 1941, est l’un des bastions clés du Pacifique central. Sa reconquête par les forces alliées débute le 21 juillet 1944 et marque un tournant stratégique. C’est le début d’un des affrontements les plus âpres du théâtre océanien. Guam représente un objectif vital pour les Américains : plateforme logistique, terrain d’aviation, porte d’entrée vers les Philippines. Mais la résistance nippone est acharnée : tunnels, embuscades, kamikazes terrestres.

Les Marines du IIIème corps amphibie, soutenus par la NAVY, doivent faire face à une défense japonaise fanatique, embusquée dans la jungle dense, les grottes volcaniques et les collines stratégiques. Chaque mètre gagné coûte cher. Au 28 juillet, les troupes américaines progressent vers le centre de l’île, enfonçant lentement mais sûrement la ligne de défense ennemie.

La bataille de Guam se soldera le 10 août 1944 par une victoire américaine, au terme de trois semaines de combats sanglants, ayant coûté la vie à près de 1800 soldats américains et plus de 18 000 soldats japonais. Les civils chamorros, pris en étau entre les deux forces, auront aussi payé un lourd tribut.

LA CAMPAGNE DES ÎLES MARIANNES ET PALAOS

La campagne des îles Mariannes et Palaos (Opération « Forager » et Opération « Stalemate II ») est une action de la guerre du Pacifique pendant la Seconde Guerre mondiale. Elle a pour objectifs, d’une part de conquérir des bases pour les nouvelles superforteresses B-29 (dont l’autonomie de 9 000 km définit les Mariannes comme une base idéale pour bombarder Tokyo, situé à 2 400 km), d’autre part d’ouvrir une voie au nord, vers les Philippines.

L’opération, qui se déroule de juin à novembre 1944, comprend :

Pour l’ « Opération Forager » (Mariannes) : la bataille de Saipan, la bataille de la mer des Philippines, la bataille de Guam, et la bataille de Tinian.

Pour l’ « Opération Stalemate II » (Palaos) : la bataille de Peleliu, et la bataille d’Angaur.

FORCES EN PRÉSENCE

POUR LES JAPONAIS

La garnison de l’île s’élève à environ 18 600 hommes. Les forces nippones sont placées sous le commandement des généraux Hideyoshi Obata (chargé de toutes les Mariannes) et Takeshi Takashima.

POUR LES AMÉRICAINS

Les 36 000 hommes de la « III Amphibious Corps » sont placés sous le commandement des généraux Holland Smith et Roy Geiger.

LE RETOUR DU DRAPEAU

21 juillet 1944-Les Marines américains arborent le drapeau américain pour une photographie peu après avoir sécurisé une tête de pont pendant la libération de Guam.…

CONTEXTE

Le 21 juillet 1944, à peine 8 minutes après que les Marines du « 3rd Marine Division » ont posé le pied sur les plages de l’île de Guam, dans le Pacifique, deux soldats américains gravent un moment d’histoire dans le sable brûlant de l’île : ils plantent la première bannière étoilée sur le sol reconquis.

Ce geste, immortalisé par les photographes de guerre, ne durera qu’un court instant, mais il concrétise des mois de souffrance, de stratégie et d’attente. Guam, possession américaine depuis 1898, a été conquise par les forces japonaises dès décembre 1941, lors de l’expansionnisme fulgurant du Japon dans le Pacifique. Pendant près de trois ans, l’île a été occupée, sa population soumise et asservie à l’ordre militaire japonais, et ses terres fortifiées dans l’attente d’un retour inéluctable des Alliés.

Le retour du drapeau – 81 ans après le débarquement sur Guam

L’opération de reconquête s’affiche dans le cadre plus large de la campagne des Mariannes. Elle correspond à une série de batailles stratégiques, destinées à rapprocher les États-Unis du Japon en vue de frappes aériennes décisives. Guam devient ainsi un objectif militaire clé : son port, ses pistes et sa position géographique en font une base idéale pour les bombardiers B-29 et les convois alliés.

Mais ce 21 juillet, ce ne sont pas encore les observations stratégiques qui dominent. C’est l’émotion pure, le retour, et la fierté. La bannière étoilée qui flotte de nouveau sur le sol de Guam n’est pas qu’un symbole de victoire : c’est la promesse d’un retour à la liberté pour ses habitants, et un signal clair envoyé au monde ; les États-Unis sont de retour, résolus, méthodiques, et invincibles.

LA BATAILLE

L’assaut amphibie de Asan Beach – Guam 21 juillet 1944

Le 21 juillet 1944, à l’aube, les plages de l’île de Guam sont de nouveau foulées par les troupes de l’ « US Marine Corps » et de l’Armée américaine. Cette opération marque le début de la bataille de Guam.

L’assaut est lancé après une préparation navale et aérienne intense, transformant une partie du littoral en un paysage rempli de fumée, de cratères et de palmiers déracinés. À 08h29, les premières vagues d’assaut (principalement les « 3rd Marine Division » et la « 1st Provisional Marine Brigade ») atteignent la côte sud-ouest de l’île, de part et d’autre de la ville d’Agat et de la péninsule d’Orote ; le but premier étant de prendre le port d’Apra et l’aérodrome d’Orote.

Les Marines débarquent sous le feu nourri des défenseurs japonais, solidement retranchés dans les grottes, les collines boisées et les bunkers de fortune.

L’île de Guam (la plus grande île de l’archipel) a été transformée par les Japonais en véritable forteresse. Elle est défendue par environ 18 000 soldats de l’Armée impériale, commandés par le général Takashina. Tous ont juré de se battre jusqu’au dernier homme.

L’artillerie japonaise réussit à couler 20 véhicules amphibies de débarquement ; mais à 09h00, les chars américains, qui suivaient la première vague de débarquement, réussissent à prendre pied sur les plages.

LES PT BOATS

Les PT boats (ou vedettes-torpilleurs) étaient un type de vedette lance-torpilles, un petit navire rapide utilisé par l’United States Navy, durant la 2nd Guerre mondiale, pour attaquer les navires de surface de plus grande taille. Le code d’immatriculation « PT » sur la coque signifiait « Patrol Torpedo », littéralement « torpilleur de patrouille ». Les flottilles de bateaux PT boat étaient surnommées « la flotte des moustiques ». Les Japonais les appelaient « devil boats ».

LES HIGGINS BOATS

Après le jour J, le général Eisenhower déclara solennellement que cela n’aurait pas pu se produire sans les bateaux Higgins.

Andrew Jackson Higgins naquit en 1885, à Columbus, dans le Nebraska. En 1908, il vint dans le sud (en Alabama, et au Mississippi) pour acquérir et gérer des usines de bois.

En 1915, il déménagea à la Nouvelle-Orléans. Il fonda plus tard, en 1930, la « Higgins Industries ». En 1936, Higgins conçut le bateau « Eureka », un navire peu profond utilisé par les foreurs et les trappeurs, le long de la côte du Golfe et du Mississippi. En 1939, le Corps des Marines l’adapta comme embarcation de débarquement pour les fantassins. Higgins conçut également des torpilles et des patrouilleurs, utilisés pendant la Guerre du Pacifique, lors de la Seconde Guerre mondiale.

DES TÉMOINS SILENCIEUX…

Cette photo montre l’épave d’un tank amphibie allié qui a coulé dans les eaux près de l’île de Guam. Ce char est l’une des nombreuses reliques de la Seconde Guerre mondiale trouvées sur les fonds marins autour de l’île. Ces reliques sont les témoins silencieux de la bataille de Guam en 1944, au cours de laquelle les forces américaines ont réussi à récupérer l’île aux Japonais. Ces chars ont été utilisés par les troupes alliées pour débarquer sur les plages de Guam pendant la bataille. Aujourd’hui, beaucoup d’épaves de ces chars et autres véhicules de combat servent de sites de plongée et d’attractions touristiques pour les amateurs d’histoire et les plongeurs.

Dans la soirée du 21 juillet, les Américains établissent des têtes de pont d’environ deux kilomètres de profondeur.

Au cours des premiers jours de l’invasion, l’approvisionnement des forces alliées est difficile : les navires ne peuvent s’approcher à moins de plusieurs centaines de mètres de la plage du fait des récifs, et les véhicules amphibies sont rares.

Bataille de Guam, 21 juillet-10 août 1944. Les manutentionnaires de munitions afro-américains déchargent des boîtes pour les utiliser dans la bataille

Les japonais tentent diverses contre-attaques, la plupart du temps la nuit, usant de tactiques d’infiltration qui leur permettent plusieurs fois de pénétrer les lignes américaines. Mais ces attaques sont repoussées avec de lourdes pertes. Les combats, acharnés et souvent au corps à corps dans la jungle dense et sous une chaleur écrasante, dureront près de trois semaines, jusqu’au 10 août 1944, date à laquelle l’île sera déclarée sécurisée.

Le 28 juillet, le général Takeshi Takashima est tué, et le général Hideyoshi Obata reprend le commandement des défenseurs.

Le 30 juillet, l’aérodrome d’Orote est capturé.

Les contre-attaques épuisent les défenseurs japonais. Début août, ils commencent à manquer de nourriture et de munitions, et il ne leur reste plus qu’une poignée de chars. Dix Type 95 Ha-Go seront détruits par des tirs de bazooka et de chars M4 Sherman.

Le général Hideyoshi Obata opère une retraite stratégique du sud de Guam vers la partie centrale plus montagneuse de l’île, afin d’y construire une nouvelle ligne de défense. Sans renfort ni ravitaillement possible, il ne peut cependant espérer que retarder de quelques jours l’inéluctable défaite.

Du 2 au 4 août 1944, la pluie et la difficulté de se déplacer et de se battre dans la jungle épaisse qui recouvre les montagnes, n’empêchent pas les Américains de franchir cette ligne de défense lors de la bataille du mont Barrigada.

Le reste de la bataille se transforme alors en une poursuite vers le nord de l’île, où la plupart des défenseurs, refusant de se rendre, sont tués.

PERTES

Près de 7000 soldats japonais y trouvent la mort. Les pertes américaines s’élèvent à environ 1700 tués et plus de 6000 blessés.

Quelques soldats japonais se cachent dans les grottes, et le 8 décembre 1945, trois Marines sont tués au cours d’une embuscade.

En janvier 1972, le sergent Shoichi Yokoi sera découvert par des pêcheurs. Il vivait depuis 28 ans caché dans les grottes.

SHOICHI YOKOI, UN RESCAPÉ DE L’OUBLI…  

Shoichi Yokoi resta caché pendant 28 ans dans la jungle de Guam, persuadé que la guerre faisait toujours rage autour de lui.    

C’est en janvier 1972 que deux pêcheurs locaux découvrirent le sergent de l’armée impériale japonaise vivant, se terrant dans une grotte souterraine scrupuleusement dissimulée. Ses premières paroles les stupéfièrent : « je suis un soldat de l’Empereur ».  

Yokoi, qui était sur Guam depuis 1944, resta caché longtemps après la capitulation du Japon, en 1945. Bien qu’il ait découvert des tracts d’après-guerre, il les rejeta, les considérant comme de la propagande ennemie conçue pour le faire sortir de sa cachette.  

Il survécut pendant près de 30 ans grâce à son incroyable ingéniosité. Il se confectionnait des vêtements à partir d’écorce d’arbres, fabriquant des nasses en tissant des paniers de vignes pour capturer des poissons et des anguilles. La nuit, il sortait de sa cachette pour chercher de la nourriture supplémentaire.  

En février 1972, lorsqu’il rentra au Japon, Yokoi fit une déclaration qui surprit l’attention mondiale : « C’est avec beaucoup d’embarras que je reviens ». Ses paroles indiquaient le sens profond du devoir qui l’avait accompagné et soutenu durant toutes ces remarquables années d’épreuves.  

De retour dans sa patrie natale, Yokoi eut bien du mal à s’adapter à une nation transformée par la modernité, et à supporter une autre idée de la vie. L’humble soldat, qui avait vécu dénué de tout, se retrouva dans un pays qu’il reconnaissait à peine.  

Alors que son histoire étonna le monde, on découvrit que Yokoi n’était pas le seul rescapé de la Seconde Guerre Mondiale : en effet, deux autres soldats, Hiroo Onoda et Teruo Nakamura, furent découverts en 1974. Ils s’étaient cachés encore plus longtemps aux Philippines et en Indonésie.  

Sources : Archives nationales du Japon, Société historique de Guam, mémoire de Yokoi de 1974

Bataille de Guam, juillet-août 1944. Le chef Radioman G.R. Tweed, USN, sauvé de Guam où il se cachait depuis le 10 août 1939. Photographié, le 12 juillet. Photographié par le photographe USS Indianapolis (CA 35).

[su_note note_color= »#90edf6″]LES CHIENS DE GUERRE, DES COMPAGNONS FIDÈLES…

Le cimetière national de chiens de guerre, à la base navale de Guam, est un hommage aux braves chiens de guerre (principalement Doberman Pinschers) qui servirent en 1944 avec le Corps des Marines américains, lors de la deuxième bataille de Guam. Ces chiens jouèrent un rôle crucial dans la bataille, et beaucoup donnèrent leur vie aux côtés des Marines. Initialement enterrées à Asan, les tombes des chiens furent oubliées au fil du temps. Mais grâce à William Putney (le commandant du 3ème peloton de chiens de guerre) et au « United Doberman Club », un mémorial fut créé pour les honorer.

En juin 1994, le monument fut dévoilé, devenant le premier mémorial officiel des chiens de guerre aux États-Unis. Les restes des chiens furent transférés dans un nouveau cimetière sur la base navale, et le mémorial fut dédié le 21 juillet 1994 pour le 50ème anniversaire de la bataille.

Au sommet du monument se dresse une sculpture du célèbre Doberman Kurt, intitulée « Always Faithful » (un hommage approprié à la loyauté et à la bravoure de ces incroyables chiens).[/su_note]

PRIVATE FRANK PETER WITEK

Le 3 août 1944, lors de la bataille de Guam, le soldat de première classe Frank Peter Witek, âgé de 22 ans, entre dans l’histoire. Avançant avec le 9ème Marines, son peloton est pris dans une embuscade. Sous le terrible feu japonais, Witek résiste sur le terrain, tirant sans cesse à bout portant pour protéger ses compagnons.

Même quand d’autres reculent, il refuse de laisser un camarade blessé, couvrant l’évacuation avant de continuer seul. Avec des grenades et son fusil, il détruit un nid de mitrailleuses, tuant huit soldats ennemis.

Lorsque quelques instants plus tard, Witek sera abattu, il ne lui reste plus que 8 balles sur les 240 que comportait son arme. Pour son courage et son sacrifice extraordinaires, il recevra à titre posthume la médaille d’honneur. Son nom figure parmi les marines qui ont tout donné pour la victoire dans le Pacifique.

Source : citations de la médaille d’honneur du Corps des Marines américains, records de la Seconde Guerre mondiale


LES INDISPENSABLES « CORPSMAN »

Dans cet enfer tropical, les « corpsmen » (infirmiers) jouent un rôle vital. Non-combattants armés d’un brassard rouge, d’un courage immense, ils s’élancent sous les balles pour secourir les blessés, souvent au péril de leur vie. Le geste capturé ici n’est pas anodin : il est l’expression ultime de la fraternité des armes, où chaque goutte d’eau partagée devient un acte de survie, de dignité et d’espérance.

Mais au-delà du bilan militaire, cette photo rappelle que dans chaque guerre, il existe aussi des actes de tendresse, de dévouement et de lumière. Des moments où la barbarie recule face à l’humanité. Le « corpsman » qui tend l’eau à son frère d’armes ne soigne pas seulement une blessure, il sauve ce qu’il reste de civilisé dans un monde en flammes.


LE DERNIER DES « CODES TALKERS »

En 1944, Peter MacDonald n’était qu’un jeune opérateur navajo. Il servit à Guam et en Chine avec la 6ème division de Marines, mais ne portait pas d’arme.

En 1944, Peter MacDonald n’était qu’un jeune opérateur radio navajo.

Son pouvoir, il le tenait dans les mots qu’il prononçait, et qu’aucun ennemi ne put jamais décoder.

Il avait pour mission d’envoyer des messages cruciaux sur le champ de bataille dans un code secret. Un code entièrement appuyé sur la langue navajo, rapide, complexe, et non écrite. Les japonais brisèrent tous les codes chiffrés excepté celui-ci, qui fut inventé par les soldats amérindiens. Ils échouèrent à chaque fois, et aucun message envoyé en code navajo ne fut jamais craqué.

Le Navajo n’était pas la seule langue utilisée : il y eut aussi le Mohawk, le Choctaw, le Seminole, le Pawnee, et l’Iroquois… Une douzaine de langues autochtones participèrent à assurer la victoire des Alliés. Chacune était devenue une arme.  

Aujourd’hui âgé de presque 100 ans, Peter MacDonald demeure l’un des derniers des « Codes Talker » (parleur de code) survivants. Il est président de l’Association des parleurs de code navajo, et représente la mémoire de ceux qui ont été oubliés dans les livres d’histoire.

Sources :

Mes photos

Photos publique Facebook

Archives nationales du Japon, Société historique de Guam, mémoire de Yokoi de 1974

https://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Guam_(1944)

https://en.wikipedia.org/wiki/National_War_Dog_Cemetery?oldid=982939086

https://www.39-45.org/viewtopic.php?f=19&t=35678

 

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