Moyen Âge – La Hanse parisienne des marchands de l’eau

 

La Hanse parisienne des marchands de l’eau

Sceau des marchands de l’eau de Paris de 1210

SOMMAIRE

La Hanse parisienne des marchands de l’eau est une communauté de marchands de Paris qui, par une charte royale de 1170, acquiert le privilège du droit de navigation sur la Seine, du pont de Mantes jusqu’aux ponts de Paris. Les droits perçus, variables suivant les époques, seront toujours collectés pour le commerce.

Les bourgeois « Hansés » (du nom des membres de cette association) auront une influence prédominante dans l’administration de la cité. Sous le règne de Louis IX, ils finiront par former la municipalité parisienne.

En 1672, Louis XIV supprimera la hanse et octroiera ses droits au trésor royal.

ORIGINES & HISTORIQUE

Depuis l’époque gallo-romaine, la Seine a fait la fortune de Paris. Le grand fleuve qui traverse la capitale apporte à la ville et à ses habitants une véritable source de profit.

La hanse est une communauté de marchands qui exercent la police fluviale. Il ne faut pas la confondre avec la corporation des Nautes qui a le monopole de la batellerie. La hanse s’est formée, comme dans de nombreuses villes du Nord de l’Europe, à la fin du Xème ou au début du XIème siècle. Naute : dans la Gaule romaine, batelier assurant les transports fluviaux.

A cette époque, les routes sont de véritables coupe-gorges. Des bandes désœuvrées de routiers et de mercenaires en maraudes arpentent les contrées à la recherche de rapines. Ces écorcheurs (comme on les nomme) n’hésitent pas à piller et à égorger tous les téméraires et imprudents qui s’aventurent par mégarde sur leur chemin.

Grandes Compagnies attaquant des paysans et des religieux

Lire :

« Mercenaires, routiers et écorcheurs au Moyen Âge »

« L’insalubrité des rues de Paris au Moyen-Âge »

Au XIIème siècle, les fleuves et les rivières deviennent donc des voies de communication sûres et indispensables au commerce médiéval. Paris est alors principalement approvisionné par les bateaux qui remontent ou descendent la Seine. Les entrepreneurs de transports de marchandises par voie d’eau possèdent donc le privilège de ce commerce ; un véritable monopole de plus en plus lucratif.

Dès 1121, le roi Louis VI permet aux marchands le droit de prélever 60 sous pour chaque batelage convoyant du vin.

En 1141, les bourgeois Hansés achètent la Place de Grève.

C’est par la charte du roi Louis VII, accordée en 1170, que la police de l’eau (droit féodal) est octroyée comme privilège à ces marchands, qui partagent avec le roi la moitié des droits. Ce décret prend le nom de « Hanse des marchands de l’eau ». 

La police de l’eau sur le fleuve est la propriété du roi. Celui-ci les conforte dans leurs privilèges, tout en les protégeant et en renforçant le commerce fluvial parisien.

DROIT ANCIEN – Droit féodal : au Moyen âge le seigneur est maître de l’eau. L’eau est indispensable (pêche, navigation, usage domestique). Le seigneur contrôle la rivière et tous ses usages : puisage, navigation, flottage du bois, installation de moulins. … Le seigneur peut aussi concéder le droit de construire un moulin.

FONCTIONNEMENT

La charte de 1170 définit la limite de la zone géographique de son privilège. Elle s’étend à 7 ou 8 lieues en aval et en amont de la capitale.

La Seine et la rue au Moyen-Âge

Les commerçants hansés sont unis par un contrat, enregistré par les échevins ou par le prévôt des marchands de Paris. Ce contrat est consigné par une lettre de Hanse, écrit par le prévôt et recouvert du sceau.

Les manquements ou différents sont déférés au « Parloir aux bourgeois », qui a compétence pour émettre des sentences y compris pénales.

Les marchands de l’eau, au XIIème et XIIIème siècles, acquièrent une influence et un pouvoir prépondérant dans la cité. Les marchands hansés (les Bourgeois de Paris) domineront la vie économique puis politique de la cité au XIVème siècle.

CONTEXTE

Hanse : au Moyen Âge, une hanse, parfois appelée anse, est une association professionnelle de marchands exerçant une activité commune.

A Paris, toute une foule issue de différentes corporations de marchands foisonne, se presse et s’active autour de la Seine. Le grand fleuve qui partage la ville en deux est, comme nous l’avons vu ci-dessus, une voie vitale de communication pour les Parisiens ; et cela depuis l’époque gallo-romaine. Une multitude de bateaux y transportent chaque jour les marchandises ou les biens nécessaires aux habitants de la cité.

Pavage des rues et caniveau central

Cependant la prépondérance et le rayonnement, sans cesse croissants du port voisin de Rouen, embarrassent et préoccupent les « marchands de l’eau ». Ces derniers n’ont-ils pas dans la capitale l’exclusivité du trafic et de tout l’acheminement des marchandises par voie fluviale ?

Rue marchande au Moyen Âge

En effet, le port de Rouen fait lui aussi équiper et armer des navires sur la Seine. Les armateurs ont l’appui et le soutien du roi d’Angleterre et du duc de Normandie. Ce qui permet à ceux-ci de faire circuler des marchandises depuis la Champagne et la Bourgogne jusqu’en outre-Manche. Nul doute que pour les « Hansés », la peur de la concurrence anglaise est omniprésente.

Et cela pose un problème, même si le roi d’Angleterre Henri II (1133-1189) est le vassal du roi de France Louis VI le Gros (1081-1137), puis de Louis VII le jeune (1120-1180).

Il faut souligner qu’à cette époque-là, les possessions anglaises sur le territoire français sont toutes proches.

Possessions anglaises au XIIème siècle

Afin de défendre les privilèges des convoyeurs de Paris, Louis VII décide donc de promulguer une charte qui reconnaît aux commerçants de la capitale qui travaillent sur le fleuve, d’avoir le monopole de « l’emmenée sur la Seine et ce, entre tous les ports situés entre Paris et Mantes ».

Cet acte conforte l’ordonnance décrétée au préalable par Louis VI le Gros. Chaque année, au moment des vendanges, le roi cédait aux marchands de l’eau la levée de la taxe de soixante sous, prélevée sur tout bateau transportant du vin accostant Paris.

UNE SOLIDE CORPORATION

A l’instar des autres communautés de marchands des villes de la mer du Nord et de la Baltique, les Hansés parisiens veillent jalousement sur leurs prérogatives. A l’exemple des « guildes », très nombreuses au Moyen Âge, la Hanse regroupe les riches et les dynamiques armateurs de transport par voie fluviale. Au XIIème siècle, elle deviendra la plus importante de ces corporations.

Guilde : au Moyen Âge, association de secours mutuel réunissant des marchands, des artisans, des bourgeois de même profession.

Désormais, seuls les Parisiens « Hansés », ou les commerçants qui ont passé un contrat avec l’un d’eux, ont la possibilité de naviguer librement sur le fleuve, en amont et en aval de Paris. Ils peuvent y débarquer ou embarquer leurs marchandises, et les contrevenants s’exposent à de lourdes peines (ex : saisie et vente de la cargaison). Les bénéfices sont partagés pour moitié entre le Trésor Royal et la Hanse

Cependant, ces avantages octroyés par le roi dissimulent bien d’autres calculs. En effet, ce dernier tient à affermir son pouvoir face à l’évêque, son principal rival dans Paris.

Les Parisiens qui habitent sur la rive gauche de la Seine sont presque tout naturellement sous la protection du prélat. Ils vivent à l’abri des églises et des grandes abbayes, à l’exemple de celle de Saint-Germain-des Prés.

Quant à ceux de la rive droite, quand il s’agit de défendre leurs intérêts commerciaux ou d’organiser une police fluviale, ils recherchent plutôt l’appui du roi.

« FLUCTUAT NEC MERGITUR »

Locution latine utilisée comme devise de la ville de Paris. La devise signifie « Il est battu par les flots, mais ne sombre pas ».

En se tournant vers les commerçants de la rive droite, et en protégeant leurs intérêts, Louis VII va s’en faire de précieux alliés. Les marchands de l’eau ont les mains libres sur l’acheminement des pondéreux (pondéreux : qui a un poids considérable et une densité élevée, comme les céréales, le bois, le fourrage, la laine). Mais aussi sur celui du vin, du sel, des fruits et légumes, qui sont convoyés par le fleuve sur des péniches ou des barques à faible tirant d’eau.

Paris et la Seine vers 1550

L’Histoire de Paris nous révèle que, face aux périls des pillards normands du IXème siècle, ce sont les marchands de l’eau qui, pour se protéger, ont érigé des remparts, et ont organisé la résistance armée. En les protégeant, le roi consolide son pouvoir.

Petit à petit, ce sont ces mêmes commerçants qui vont se charger de la perception des diverses taxes et impôts royaux. Ils vont aussi mettre sur pied une police qui aura pour mission de garantir la sécurité à la fois sur les berges de la Seine, dans les ports parisiens, mais aussi dans toute la cité.

Par ailleurs, ils donneront à la capitale la nef dessinée sur les armes de la ville, et leur devise latine : « Fluctuat nec mergitur » (flotte mais ne coule pas).

LES MISSIONS DE LA HANSE

L’importance vitale de la Seine a permis aux marchands de l’eau de devenir les maîtres de Paris. La charte de Louis VII les renforce dans leurs prérogatives. De ce fait, la Hanse assure un grand nombre de responsabilités. Sous sa direction, les ports sont gardés, les ponts sont restaurés, les quais construits. Les moulins dont les roues fonctionnent grâce à la force de l’eau sont bâtis.

La Hanse, qui dispose de sa propre juridiction reconnue par le roi, va instaurer sa propre justice. Elle veille au règlement des conflits, et sera à l’initiative des jugements rendus par le « Parloir aux bourgeois ». De celui-ci naîtra au siècle suivant, lors de la réforme de la prévôté de Paris, la municipalité parisienne.

Sources :

https://fr.wikipedia.org/wiki/Hanse_parisienne_des_marchands_de_l%27eau

Les rois de France des Éditions Atlas.

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