L’Abbaye troglodytique de Saint-Roman

LES TÉMOINS DU PASSÉ

L’ABBAYE TROGLODYTIQUE

DE

SAINT ROMAN

Des vestiges de vie monastique uniques en Europe

ORDRE : Bénédictin.

CULTE : catholique.

STYLE : roman.

TYPE : monastère troglodytique

ÉTAT DE CONSERVATION : Vestiges.

FONDATION : VIIème siècle ?

FIN D’ACTIVITE : XVIème siècle.

PÉRIODES DE CONSTRUCTION : IXème ; Xème. XIIème ; XVème siècles.

PROTECTION DU SITE :

– Inscrit aux Monuments Historiques en 1935.

– Classé Monuments Historiques le 11 décembre 1990.

PROPRIÉTAIRE : Propriété de la commune de Beaucaire depuis 1988, l’abbaye est gérée cependant par la Communauté de Communes Beaucaire Terre d’Argence, via une délégation de service public ou concession.

La Terre d’Argence est un territoire de 20 000 hectares situé au cœur du triangle Nîmes-Arles-Avignon.

SITUATION :

Commune : Beaucaire.

Département : Gard.

Région : Occitanie.

LOCALISATION 

L’abbaye de Saint-Roman est une ancienne abbaye troglodytique située sur le territoire de la commune de Beaucaire, dans le département français du Gard. Elle se trouve à 6,5 km de Beaucaire et à 9,4 km de Tarascon. Elle est située sur un rocher calcaire, en surplomb au-dessus de la confluence du Gardon et du Rhône.

PRÉSENTATION

L’Abbaye de Saint-Roman est un Monument Historique où l’on peut voir les vestiges de l’un des plus anciens monastères de Gaule. Le site fut creusé par des ermites, puis des moines troglodytes à partir de la fin du Vème siècle.

L’ancienne abbaye troglodytique de Saint-Roman, ouverte à la visite, est située à deux pas de Beaucaire et de Tarascon, sur la colline de l’Aiguille. Un lieu surprenant et émouvant creusé dans la roche calcaire. On y découvre de nombreux vestiges de la vie monastique, mais surtout une vaste nécropole comportant de nombreuses tombes rupestres (creusées dans la roche). Du sommet du rocher, on surplombe un magnifique panorama d’où l’on peut admirer le Rhône, les Alpilles, le Luberon et le Mont Ventoux.

On accède au monastère par un sentier aménagé d’environ 600 mètres, qui serpente à travers les chênes verts, chênes kermès, pins d’Alep, genêts et cistes (plantes caractéristiques de la garrigue méditerranéenne).

L’entrée du site est payante (5,50 €). Un chemin fléché nous guide, non sans peine, tout au long de la visite, dans les entrailles du rocher : chapelle abbatiale, cellules, grande salle… et sur la terrasse où de nombreuses tombes anthropomorphes (creusées dans la roche) nous dévoilent le splendide paysage alentour.

Tombe anthropomorphe : qui a la forme d’un corps humain ou qui a l’apparence humaine. Et où l’on distingue, creusé dans la pierre, l’emplacement de la tête du défunt.

C’est un lieu qui se prête à la contemplation, et qui ne pouvait que favoriser une présence mystique et religieuse.

ABBAYE DE SAINT-ROMAN

HISTORIQUE

Préhistoire : première occupation du site

Durant cette période le massif calcaire, ou sera édifiée plus tard l’abbaye, est truffé de grottes habitées par des tribus de chasseurs.

1er siècle

Ugernum qui deviendra plus tard Beaucaire, fut probablement l’antique port sur le Rhône de la colonie latine de Nîmes (Nemausus).

Vème siècle : apparition des premiers ermites

A partir de la fin du Vème siècle, le site est probablement occupé par des ermites. Au fil du temps, ces anachorètes aménagent et agrandissent progressivement les cavités naturelles du rocher.

Ermite ou Anachorète : « qui s’est retiré du monde ». C’est une personne qui s’est volontairement soustraite de la société temporelle pour des raisons religieuses, afin de suivre une vie basée sur l’austérité, la rigueur et la pénitence. Les anachorètes sont des ermites qui vouent leur existence à la spiritualité, à la prière et à l’Eucharistie.

L’histoire raconte que ces moines, émules de Saint-Roman (lui-même disciple de Saint Jean Cassien qui avait fréquenté les moines du désert d’Egypte), adoptèrent un style de vie monastique qui s’inspire de celui des moines de l’Orient Chrétien (sites érémitiques et monastiques d’Egypte et de Cappadoce).

Jean Cassien est né entre 360 et 365 en Scythie mineure (probablement en Dobroudja actuelle Roumanie) ; il meurt à Marseille entre 433 et 435. Ses origines, ainsi que les dates de sa naissance et de sa mort, sont apocryphes ou mal définies. C’est un religieux méditerranéen, moine et écrivain qui, au 5ème siècle, a marqué de son empreinte les débuts de l’Eglise en Provence. Il est le fondateur de l’Abbaye Saint-Victor de Marseille. 

Lire : l’abbaye Saint Victor

Comme dans toute abbaye, il devait y avoir un cloître à proximité des tombes, mais celui-ci a de toute évidence disparu.

Milieu du VIIème siècle et l’Adoption de la règle de Saint Benoît

Durant cette période, Ugernum et la rive droite du Rhône sont intégrés dans le système défensif d’Arelate (Arles). Ce n’est qu’entre cette date et le début du IXème siècle que la terre d’Argence deviendra une enclave des diocèses d’Arles, de Nîmes, d’Uzès et d’Avignon.

C’est aussi au cours de cette époque que la communauté d’ermites adopte la règle de Saint Benoît et devient une abbaye bénédictine. L’abbaye se dote alors d’une chapelle, de cellules monastiques, de quelques autres salles et d’une nécropole, le tout creusé dans la pierre.

Vers 911

Au milieu du Xème siècle, l’abbaye de Saint-Roman est pour la première fois mentionnée dans les domaines de l’Archevêque d’Arles, Manassès. Il va développer Saint-Roman, site élevé qui domine la contrée aux limites des diocèses voisins.

XIIème siècle

En 1102, une décision de l’archevêque d’Arles lui impose une réforme : l’abbaye se transforme en prieuré rattaché à l’abbaye bénédictine de Psalmody, près d’Aigues-Mortes.

L’abbaye devient un important lieu de pèlerinage, où la foule des pénitents afflue pour y contempler des reliques de Saint Roman et de Saint Trophime.

XIIIème siècle

Le site est utilisé comme place forte lorsque le château de Saint-Roman est attribué, par l’archevêque d’Arles, à Simon de Montfort, ainsi que le château de Beaucaire et toute l’Argence.

Lire : la Croisade des Albigeois

1310

Le roi de France, Philippe le Bel, ordonne au sénéchal de Beaucaire de réinstaller les moines de Saint-Roman dans le prieuré. Ceux-ci avaient été expulsés à une date et pour une raison inconnues.

XIVème siècle  

En 1363, l’abbaye est fortifiée : un fossé est creusé tout autour et des murs sont élevés. Le site accueille désormais un studium (collège pour adolescents) créé par le pape d’Avignon Urbain V. Le but est de donner une instruction à des jeunes gens doués pour les études, pauvres ou riches.

Ce foyer d’enseignement pour les enfants va durer pendant quelques années. Plusieurs bâtiments construits à cette époque ont disparu aujourd’hui.

XVIème siècle : édification d’un château

En 1538, Psalmody se sécularise (laïcise) en collège de chanoines à Aigues-Mortes. L’abbaye de Saint-Roman est cédée par Psalmody à François de Conseil. Par la suite, l’abbaye va peu à peu décliner. Les moines abandonnent les lieux, et le monastère est vendu à un particulier. Celui-ci fait alors construire un château au faîte du rocher, connu sous le nom de château de Saint-Roman.

Lire: Aigues-Mortes, un port royal

Entre 1574 et 1576, la bâtisse est occupée par des soldats. Le propriétaire des lieux, voulant récupérer son bien, donne l’assaut des fortifications. Mais il meurt en sautant du haut des murailles.

L’édifice sera par la suite démoli, et le site définitivement abandonné.

La propriété se transmet alors par héritages dans diverses familles nobles provençales. Le dernier seigneur de Saint-Roman sera Isidore de Forbin (1730-1813), dont la descendance est représentée par la branche de Forbin des Issarts.

Révolution française

A la suite des bouleversements de cette période, le site est vendu comme bien national.

1830-1835

A cette date, le monastère tombe en ruine. La famille propriétaire le fait démolir pour vendre les pierres.

1935

Le site de Saint-Roman est inscrit à l’inventaire des Monuments Historiques. Cette action devient urgente face à la menace d’une extension de carrière, suite à la construction d’une cimenterie à Beaucaire.

1965

Le dégagement du site commence. Il est effectué par la Société d’Histoire et d’Archéologie de Beaucaire. L’opération attire l’attention des pouvoirs publics, et la colline est intégrée dans le patrimoine communal.

1988

Le site, après être resté longtemps à l’abandon, est acquis par la commune de Beaucaire.

1990

Les ruines de l’abbaye sont classées Monuments Historiques. Des travaux initiaux sont entrepris afin d’ouvrir le site au public.

2018

Un programme collectif de recherche historique et archéologique, étalé sur quatre années, est commencé afin de permettre une valorisation plus complète du site.

SAINT-ROMAN

UN MONASTÈRE PALÉOCHRÉTIEN

LA CHAPELLE

La chapelle

Citée dans les textes « Saint-Roman de l’Aiguille », l’abbaye abritait dans sa chapelle les reliques de Saint-Roman, Saint-Trophime et celles d’un bienheureux Georges. La question d’une origine paléochrétienne semble pourtant fort improbable.

L’art paléochrétien, ou art et architecture primitifs chrétiens, est un art développé par les Chrétiens ou sous l’égide chrétienne entre l’an 200 et l’an 500. Il couvre une période s’étalant du règne de Justinien (482-565) en Orient, jusqu’aux invasions barbares au 6ème siècle en Occident, et à la conquête arabe (Omeyades) en Syrie, en Égypte et en Afrique du Nord. Avant l’an 200, il demeure très peu de vestiges artistiques qui puissent être qualifiés avec certitude de chrétiens. Ils sont pour la plupart apocryphes. Après l’an 500, l’art paléochrétien s’ouvre sur l’art byzantin et celui du haut Moyen Âge.

TOMBES ET ENFEUX

Alors que la première mention écrite évoquant l’abbaye date de 961, l’historien beaucairois Vincent Sève note au XVIIème siècle une origine du monastère « aux premiers temps de la chrétienté ». D’autres historiens locaux ont voulu chercher dans certaines tombes de la chapelle souterraine des sépultures paléochrétiennes antérieures à celle-ci.

Nonobstant, les dernières recherches semblent affirmer que les tombes les plus anciennes et souterraines de la chapelle ont été construites sous « Arcosolia ».

Un arcosolium (pluriel : arcosolia) est un type de tombe utilisé depuis l’Antiquité, notamment dans les grottes à l’époque paléochrétienne : il prend la forme d’une niche semi-circulaire, avec un arc creusé au-dessus du sarcophage. Il est souvent présent dans le « cubiculum », la chambre funéraire.

L’arcosolium se distingue du loculus, qui se présente comme une niche plus petite et rectangulaire.

Ces tombes affichent des similitudes avec les premières sépultures chrétiennes des catacombes romaines.

La nef de la chapelle souterraine a été aménagée et taillée dans une grotte que l’on a, au fil du temps, agrandie.

Le labeur des carriers est nettement visible aux paliers de découpe. Il a contribué à rabaisser le sol de la chapelle d’un mètre cinquante sur les deux tiers de sa longueur, lui faisant perdre ainsi son aspect bas et sombre. On peut encore voir de nos jours les points d’accrochages au plafond et les niches dans les murs qui recevaient de multiples lampes à huile.

LE SIÈGE DU PRIEUR ET DE L’ABBÉ

Le siège du prieur est flanqué d’un autre siège plus modeste, celui de l’abbé. Cet élément unique du XIIème siècle était probablement peint et pourvu de pièces complémentaires, disparues depuis (accoudoir, abat-voix)…

Sièges de l’abbé et du prieur excavés dans la chapelle

LA TERRASSE

Une citerne de 140 m3, dont l’excavation au XIVème siècle est postérieure à l’utilisation du cimetière, se situe au centre des vestiges d’une large cour. Les remblais sous les arbres brouillent la visibilité de cet endroit particulier.

Les vestiges de fortifications médiévales subsistent sur la terrasse supérieure.

LES TOMBES ANTHROPOMORPHES

Sur la terrasse supérieure, on découvre une véritable nécropole accueillant des centaines de sépultures creusées dans le rocher, ainsi que les vestiges de la fortification médiévale

Près de 200 tombes d’adultes et d’enfants sont encore présentes, mais beaucoup ont été détruites par la retaille du rocher au moment de sa fortification. D’autres tombes perdurent sous les murs et les talus.

Les défunts pouvaient être des moines, mais essentiellement des laïcs locaux. Des ossements de femmes et d’enfants ont été identifiés par les anthropologues.

La présence de pins provient de la création d’un jardin romantique au milieu des ruines à la fin du XIXème siècle.

LE PANORAMA

De la terrasse, un magnifique panorama à couper le souffle s’offre au regard du visiteur. On a une vue unique, face aux Alpilles, sur le Rhône et sur la Provence.

LES CELLULES RUPESTRES

On y accède par des escaliers qui descendent de la terrasse supérieure. Elles ont été taillées dans la roche et se présentent comme de petites pièces troglodytes. On y découvre de nombreuses alvéoles et niches destinées à recevoir de petites veilleuses à huile.

Certaines cellules laissent apparaître, à travers une ouverture, une vue sur l’extérieur du rocher.

LE PRESSOIR A VIN

C’est une installation viticole qui se compose d’un fouloir maçonné et de logements creusés pour recevoir le pressoir. C’est un exemple de réemploi d’anciennes cellules monastiques.

LES GRANDES SALLES

Elles étaient jadis divisées en trois niveaux :

– Les deux premiers, datant du XVIème siècle, comportaient des voûtes d’arêtes en plein cintre.

– La salle la plus haute, du XIIème siècle, avait le rocher pour plafond.

– La salle du bas a sans doute été utilisée comme écurie (on observe un vestige de mangeoire au fond à droite, ainsi que des râteliers à fourrage).

Il existait, appuyé contre le rocher, un très grand bâtiment, aujourd’hui disparu.

LE TOUR DU ROCHER

Une pancarte nous propose de faire le tour du rocher. La balade s’avère aisée et le terrain, cette fois-ci, plat. Tout au long de ce cheminement, on peut se rendre compte de la difficulté extrême du travail des moines pour rendre ce lieu austère habitable. La tâche a dû être ardue. Il a fallu travailler en hauteur, le long de la paroi abrupte et dangereuse. Les ouvriers ont dû résoudre des difficultés prodigieuses, générées par l’excavation et l’évacuation de tonnes de pierres et de gravats. Nonobstant, tout ce labeur ne s’est pas fait en un jour…  Mais le résultat est surprenant et inouï ! Que dis-je : dantesque et grandiose à la fois !

Partout l’on découvre le travail fait par la main de l’homme pour maîtriser la pierre. Les coups de pioches ont façonné le rocher pour lui donner un aspect plus présentable, plus accueillant. Néanmoins la vie devait y être dure…

Un fossé, d’une largeur d’environ 4 mètres, ceinturait entièrement le rocher, et avait une profondeur de près de 3 mètres. Une rampe permettait d’accéder au petit pont (restauré en 2003) qui franchit le fossé pour entrer dans la partie supérieure de l’abbaye.

L’aspect abrupt du rocher et les fortifications proviennent de l’exploitation en carrière de la pente naturelle de la colline, du creusement d’un grand fossé l’entourant, et de l’apport de murs percés d’archères.

Sources :

Mes photos

Photos publique Facebook

Fascicule offert au public avec le droit d’entrée.

https://www.avignon-et-provence.com/monuments/labbaye-troglodyte-de-saint-roman

https://avignon-tourisme.com/activites/abbaye-de-saint-roman/

https://fr.wikipedia.org/wiki/Abbaye_de_Saint-Roman

https://abbaye-saint-roman.com/

https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/merimee/PA00103018

 

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1 réponse

  1. 9 octobre 2023

    […] 115         L’abbaye de Saint Roman […]

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