Frederick Douglass

                                                                                      

 

 

 

LA GUERRE DE SÉCESSION

 (1861-1865)

LES GRANDES FIGURES DE L’ESCLAVAGE

FREDERICK DOUGLASS

1818-1895

Frederick Douglass

Surnommé « Le sage d’Anacostia », ou « Le lion d’Anacostia ».

« Les Noirs sont la clef du problème, l’axe central autour duquel s’articule la rébellion. Cette guerre, quoiqu’on en dise, n’est virtuellement rien de plus ni de moins que le combat de l’esclavage perpétuel contre la liberté universelle. C’est bien cet ultime objectif que les États libres redevront atteindre ».

Frederick Douglass 

La « Guerre de Sécession », de Ken Burns.  

SA LUTTE CONTRE L’ESCLAVAGE

Frédérick Douglass

Frédérick Douglass était un orateur éloquent, un abolitionniste de la première heure, un éditeur, et un homme d’Etat. Devenu chef de file national du mouvement abolitionniste dans le Massachusetts (« la Massachusetts Anti-Slavery Society ») et à New York, il fut célèbre grâce à ses talents d’orateur et à son antiesclavagisme incisif.

Sa réputation mit sa liberté en danger et la rendit illégale dans les États non esclavagistes du Nord. Douglass dût se réfugier en Europe où ses nouveaux amis obtinrent son affranchissement, et certainement une rétribution pour qu’il puisse, à son retour, fonder le journal « The North Star ».

Douglass était considéré par les abolitionnistes de son époque comme un « contre-exemple vivant » face aux arguments des esclavagistes. Lesquels pensaient que les esclaves n’avaient pas la capacité intellectuelle de fonctionner en tant que citoyens américains indépendants.

A l’époque, d’aucuns doutaient même dans le Nord qu’un si grand orateur ait été une fois un esclave. C’est en réponse à cette incrédulité que Douglass écrivit sa première autobiographie.

Douglass fit paraître trois autobiographies sur ses expériences en tant qu’esclave :

–  son premier livre, « Narrative of the Life of Frederick Douglass » (mémoire et traité de 1845 sur l’abolition, écrit pendant son séjour à Lynn, dans le Massachusetts), devint un best-seller. Il joua un rôle important dans la promotion de la cause de l’abolition.

– son deuxième livre, « My Bondage and My Freedom », écrit en 1855 (un récit d’esclave autobiographique, principalement une extension de sa première autobiographie « Narrative of the Life of Frederick Douglass »), décrit plus en détail sa transition de la servitude à la liberté.

– sa dernière autobiographie, « Life and Times of Frederick Douglass » (publiée pour la première fois en 1881 et révisée en 1892, trois ans avant sa mort), couvre sa vie jusqu’à ces dates.

Douglass a également soutenu le suffrage des femmes. Il occupa plusieurs charges publiques. Il devint le premier Afro-Américain nommé vice-président des États-Unis en tant que colistier de Victoria Woodhull, du « Equal Rights Party ».

Le « National Equal Rights Party » (Parti national pour l’égalité des droits) était une petite formation politique des États-Unis à la fin du XIXème siècle, qui soutenait les droits des femmes.

Les candidats présidentiels de ce parti étaient Victoria Woodhull, en 1872, et Belva Ann Lockwood, en 1884 et 1888.

Toutes deux sont généralement considérées comme les premières femmes à se présenter à la présidence des États-Unis. Certains historiens ne voyaient pas en elles de véritables candidates, car à l’époque, dans la plupart des États, les femmes n’avaient pas le droit de voter aux élections fédérales.

ESCLAVE ET ORPHELIN DE NAISSANCE…

Frederick Douglass

Frederick Augustus Washington Bailey (appelé Frederick Douglass) naît en 1817 ou 1818 à Cordova (comté de Talbot, Maryland, sur la côte est de la baie de Chesapeake). Il meurt le 20 février 1895 à Anacostia, Washington, District of Columbia.

Frederick Douglass naît esclave (à une date que lui-même ignorait précisément, mais qu’il jugeait être 1818). Il réussit à s’instruire et à s’enfuir du Maryland à l’âge de 20 ans, échappant ainsi à l’esclavage.

Harriet Bailey (1800-1824), sa mère, est réputée pour être intelligente. Son père « est un blanc » (ce qui lui fait croire qu’il est le propriétaire de sa mère).

Il est séparé de sa mère alors qu’il n’est encore qu’un nourrisson ; une pratique courante des esclavagistes envers leurs propriétés. Le jeune Douglas ne verra sa mère que quatre ou cinq fois ; elle mourra quand il aura sept ans.

La pratique de séparer les mères de leurs enfants et de les éloigner à distance était une caractéristique de la cruauté et de la barbarie du système esclavagiste.

Les premières années de sa jeunesse, Douglass les passe à la cabane de sa grand-mère, son lieu de naissance (à l’est de Tappers Corner et à l’ouest de Tuckahoe Creek).

llustration tirée de la vie et de l’époque de Frederick Douglass montrant Lloyd fouettant Old Barney

À six ans, il est envoyé dans la plantation nommée « Wye House », gérée par le capitaine Aaron Anthony, et dont le propriétaire est le colonel Edward Lloyd (un des propriétaires les plus riches de l’État qui possède près de mille esclaves, selon les évaluations de Douglass).

C’est là qu’il est confronté à la violence des rapports entre Blancs et esclaves. Il assiste pour la première fois à une séance de châtiment corporel, ce qui le marquera à vie : sa tante, pour avoir été vue en compagnie d’un homme dont le régisseur lui a interdit la fréquentation, est suspendue par les bras, et fouettée à de nombreuses reprises.

 

FRATRIE

Frederick Douglass

Frederick Augustus Washington Bailey a six frères et sœurs :

– Perry Bailey (1813-1878).

– Sara Bailey (1814-1883).

– Eliza Mitchell Bailey (1816-1870).

– Kitty Bailey (1820-1849).

– Arianna Bailey (1822-après 1849).

– Harriet Bailey (1825- ?).

Frederick Augustus Washington Bailey a six demi-frères et sœurs :

– Andrew Skinner Anthony (1797-1833).

– Richard Lee Anthony (1800-1828).

– Lucretia Planner Auld Anthony (1804-1827).

– James Anthony (estimée entre 1772 et 1830- ?).

– Ann Anthony (estimée entre 1772 et 1830- ?).

– John Anthony (estimée entre 1772 et 1830- ?).

MARIAGES

Helen Pitts Douglass assise et son mari Frederick Douglass. Sa sœur Eva se tient en arrière-plan. Prise en 1884. 

Frederick Augustus Washington Bailey aura deux épouses :

1ère –  Anna R. Murray-Douglass (1813-1882). Le mariage a lieu le 15 septembre 1838.

Anna Murray Douglass

De cette union naîtront :

– Rosetta Sprague Douglass (1839-1906).

– Sergent-Major Lewis Henry Douglass (1840-1908).

– Frederick Douglass, Jr. (1842-1892).

– Sergent Charles Remond Douglass (1844-1920).

– Annie Douglass (1849-1860).

Lewis and Charles Douglass pendant la Guerre Civile

2nde – Helen Pitts Douglass (1837-1903), qu’il épouse le 24 janvier 1884, Washington, DC. (Sans descendance).

Helen Pitts Douglass

LA FAMILLE AULD

Frederick Douglass

En 1826, à la mort du capitaine Aaron Anthony, Douglass est envoyé à Baltimore, chez Hugh Auld (dont le frère Thomas a épousé Sophia, la fille du capitaine Anthony). Il a environ douze ans.

Ce séjour passé chez Hugh Auld est, pour le jeune Douglass, un véritable bienfait dans sa misérable existence. Dès le jour de son arrivée, Sophia veillera à ce que Douglass soit correctement nourri et habillé, et qu’il dorme dans un lit avec des draps et une couverture.

Douglass décrit Sophia comme une femme gentille, au cœur tendre, qui l’a traité « comme elle supposait qu’un être humain devait en traiter un autre ».

Sans elle, Douglass n’aurait peut-être jamais pu espérer devenir un homme libre. En effet, Madame Auld se montre très attentionnée envers lui. A l’insu de son mari (et au mépris de la loi qui lui interdit de le faire), elle lui apprend à lire l’alphabet. Son époux, Hugh Auld, désapprouve cette bienveillance, estimant que l’alphabétisation incite les esclaves à vouloir être libres.

Lorsqu’il apprit le « complot », il réprimanda sa femme en lui expliquant que l’apprentissage de la lecture par un esclave le porterait immanquablement à ne plus se satisfaire de sa condition : « Le savoir gâterait le meilleur nègre du monde. Si tu enseignes à ce nègre à lire, il n’y aura plus moyen de le tenir. Cela le rendra à jamais inapte à l’esclavage ». Douglass se rappela  avoir entendu ces paroles à son sujet.

Ces mots sont pour lui comme une révélation, et dès lors, il s’impliquera résolument pour parfaire son enseignement.

Une fois que vous aurez appris à lire, vous serez toujours libre.

Sophia Auld, sous l’influence de son époux, finit par se soumettre à ses ordres. Elle devient convaincue que l’éducation et l’esclavage sont incompatibles, et un jour elle arrache un journal des mains de Douglass. Elle cesse de lui enseigner en lui retirant tout le matériel de lecture, y compris sa Bible.

Mais rien n’y fait. Le jeune Douglas trouve, en échange de pain, à s’instruire auprès d’enfants blancs pauvres. Il lit en secret tout ce qu’il peut dénicher comme livres chez ses maîtres.

« Très bien ! pensai-je », a écrit Douglass. « La connaissance ne convient pas à un enfant pour être esclave ». J’ai instinctivement acquiescé à la proposition, et à partir de ce moment j’ai compris le chemin direct de l’esclavage à la liberté ».

La connaissance rend un homme inapte à l’esclavage

Il parvient à acheter son premier livre, « Columbian Orato », avec de l’argent gagné en vendant des bottes sur le marché noir. Il y trouve un discours de Richard Brinsley Sheridan traitant du catholicisme, ce qui sera à l’origine de sa conversion religieuse.

Il apprend aussi à écrire des laissez-passer pour les esclaves fugitifs. Par sa résolution puisée dans ses lectures, Douglass se fait progressivement une bonne compréhension de ce qu’est l’institution de l’esclavage. Il prépare sa lutte aux préjugés raciaux, et sa conception de la liberté et des droits de l’homme.

Frederick Douglass ne fut pas autorisé à aller à l’école, mais dès son plus jeune âge, il découvrit l’alphabet. À l’âge de 12 ans, il acheta ce livre, « L’orateur colombien », pour 50 cents à Baltimore. C’était un recueil de discours révolutionnaires, de débats et d’écrits sur les droits naturels. Ce livre sensibilisa son besoin de liberté personnelle et lui révéla que l’esclavage était mal. Douglass étudia également le texte pour affiner ses talents oratoires.

Frederick Douglass, un esclave en location…

En 1826, à la mort du Capitaine Aaron Anthony, les deux frères Hugh et Thomas se querellent au sujet de Douglass. Il est envoyé chez ce dernier. Thomas, mécontent de son comportement, le loue pour une année au fermier Edward Covey, qui a la réputation de « discipliner les esclaves ». Chez son nouveau maître, Douglass sera régulièrement fouetté, mais il survivra, et son esprit restera toujours aussi combatif.

Là où il n’y a pas de lutte, il n’y a pas de progrès.’

Un jour, lors d’un affrontement avec Covey, Douglass réplique pendant deux heures aux coups que lui assène son propriétaire. La bagarre n’a pas de vainqueur. Pour Covey, il est primordial de conserver l’honneur, et surtout sa réputation de « briseur » d’esclaves. Aussi, plutôt que de faire connaître son échec à tout le monde, il laisse Douglass sans que celui-ci ne soit inquiété.

Par la suite, Douglass est loué à William Freeland, qui possède une importante plantation près de St-Michael, au Maryland. Ce nouveau propriétaire le traite convenablement. Douglass a la permission de donner des cours de lecture, notamment en se servant du Nouveau Testament. William Freeland tolére cette école du dimanche à laquelle assiste une quarantaine de personnes ; mais les voisins esclavagistes s’y opposeront, et les cours prendront fin.

Ses projets d’évasion

En 1836, Douglass veut s’échapper, mais son projet est éventé et il se retrouve en prison pendant une semaine. Ses juges, manquant de preuves contre lui, le renvoient chez William Freeland.

Frederick Douglass

Puis il retournera chez Hugh Auld. Au cours de ce deuxième séjour à Baltimore, qui durera une année, il apprendra le métier de calfat (qui consiste à rendre étanches les joints de navire).

Pendant cette période, il rencontrera Anna Murray, une Afro-américaine libre, qui deviendra plus tard sa femme.

Anna Murray

Le 3 septembre 1838, déguisé en marin et muni de papiers d’identité obtenus d’un marin noir libre, il s’enfuit par le train de Baltimore et se rend à Havre de Grace, dans le Maryland. Il traverse la rivière Susquehanna à bord du bac, continue en train jusqu’à Wilmington, dans le Delaware, et parvient à Philadelphie par bateau. Il arrive finalement à destination à New York.

Il se retire à New Bedford, dans le Massachusetts, et se fait appeler « Frederick Douglass » plutôt que « Frederick Augustus Washington Bailey ». Il y travaillera dans la clandestinité pendant trois années comme ouvrier agricole.

Une fois arrivé à New York, Douglass écrit à Anna Murray pour qu’elle le rejoigne. Le 15 septembre 1838, ils sont mariés par un ministre presbytérien noir, onze jours seulement après que Douglass a atteint New York. Au début, pour détourner l’attention, ils adoptent Johnson comme nom de famille.

Ses débuts d’orateur et d’abolitionniste

A New Bedford (Massachusetts), Douglass fréquente des membres de la communauté noire et abolitionniste. Sa conscience politique s’accroît avec la lecture du journal édité par

William Lloyd Garrison

William Lloyd Garrison, « The Liberator », qui « occupait dans son cœur la seconde place, juste après la Bible ».

William Lloyd Garrison

William Coffin, un libraire dans les cercles « quaker », lui demande un jour de venir raconter son histoire dans une réunion interraciale d’hommes et de femmes abolitionnistes. C’est, pour un grand nombre, la première fois qu’ils entendent un esclave fugitif parler de sa vie en public. L’audience est envoûtée, séduite et émue.

Douglass devient bientôt un agent du mouvement abolitionniste, la « Massachusetts Anti-Slavery Society ».

En septembre 1841, lors d’un déplacement en train, Douglass et John A. Collins sont victimes de ségrégation et de violence. Suite à ces événements, les abolitionnistes enquêtent sur le respect des droits humains des noirs dans les compagnies de chemin de fer, et éditent leurs résultats dans le « Liberator », de William Lloyd Garrison.

Face aux conséquences de cette publicité néfaste, les quelques compagnies qui ont des politiques ségrégationnistes se voient forcées de les retirer, afin de pouvoir régulariser la situation avec leurs concurrents.

Alors qu’il vivait à Lynn, Douglass prit part à une première manifestation contre le transport séparé entre les Blancs et les Noirs.

En septembre 1841, à la gare de Lynn Central Square, dans le Massachusetts, Douglass et son ami James N. Buffum furent jetés d’un train de l’ « Eastern Railroad » parce que Douglass refusait de s’asseoir dans la voiture de chemin de fer séparée.

Mémoire d’un esclave

Douglass est inlassablement appelé à raconter son histoire. Certains commencent à l’accuser d’être un imposteur.

En 1845, il écrit et publie sa biographie (« Narrative of the life of Frederick Douglass, written by himself »), imprimée par le « Liberator ». Son livre se vend assez vite, d’abord à 4 500 exemplaires les premiers cinq mois, puis à 30 000 en cinq ans ; il sera réimprimé neuf fois dans les trois années qui suivront sa publication, et également traduit en français et en néerlandais.

L’ouvrage est abondamment diffamé par des préjugés raciaux; on prétend que « l’ensemble n’est que mensonges, du début à la fin, qu’un noir n’est pas capable d’une telle éloquence », etc…

Néanmoins, le récit de sa vie par Douglass contribue à informer, et donc humaniser, une partie de l’opinion publique américaine sur les conditions de vie des esclaves.

Dans ce contexte, à partir de 1851, la vie de Douglass aura un impact considérable, de manière indirecte ; elle fournira à Harriet Beecher Stowe une partie des éléments tangibles dont elle se servira pour son très célèbre roman réaliste « La Case de l’oncle Tom ».

Harriet-Beecher-Stowe

Avec le succès de ses publications (« Narrative of the Life of Frederick Douglass », écrit en 1845, « My Bondage and My Freedom », écrit en 1855, et « Life and Times of Frederick Douglass », publié en 1880), Douglass risque d’être reconnu et renvoyé en esclavage. En vertu de la Loi sur les Esclaves fugitifs, il peut être rendu à son ancien propriétaire Hugh Auld.

Ses amis abolitionnistes le pressent alors de se rendre à l’étranger, hors des États-Unis, en Grande-Bretagne. Une fois sur le sol européen, il pourra partager son témoignage et rencontrer les activistes et collaborateurs du « Vieux continent ».

Voyage en Europe et émancipation

Le 16 août 1845, Douglass se rend à Liverpool à bord du Cambria. Pendant les vingt mois qui suivront, il y donnera des conférences, ainsi qu’en Irlande où sévit alors « la grande famine ».

Il se produit en grande partie dans des églises et des chapelles protestantes. Dès son arrivée, il est agréablement surpris de constater qu’il est considéré comme un être humain et un égal. Son éloquence le rend tout de suite populaire. Au cours de son séjour, il se lie d’amitié avec une famille quaker de Newcastle, les Richardson, ainsi qu’avec Daniel O’Connell, le nationaliste irlandais.

En mai 1846, une réception est donnée en son honneur, à Londres. Des philanthropes anglais proposent à Douglass de payer pour sa libération. A l’issue d’une négociation avec Hugh Auld (qui a acquis de son frère Thomas tous les droits légaux sur la vie de Frederick pour 100 dollars), Douglass est racheté pour 150 livres (soit 700 dollars de l’époque).

Il est officiellement affranchi de l’esclavage le 12 décembre 1846, après être resté huit ans en liberté illégale.

Un moment, la pensée de s’installer en Grande-Bretagne avec sa famille lui effleure l’esprit.

Les Anglais lui proposent de lui verser une rente, mais il refuse. Nonobstant, il commence à songer à utiliser cet argent pour fonder son propre journal abolitionniste.

Le 20 avril 1847, il rentre finalement à Boston.

Déplacement dans l’Ouest avec William Lloyd Garrison

Une fois libre, Douglas retourne aux États-Unis, et devient une figure politisée.

En août et septembre 1847, il donne une série de conférences dans l’ouest du pays en compagnie de Garrison (peu de temps avant la fondation de la « Western Anti-Slavery Society », par Abby Kelley et autres abolitionnistes).

À Philadelphie, ville qui n’a encore jamais vu un orateur noir, Douglass et Garrison sont d’abord chahutés et reçoivent toutes sortes d’objets, y compris des œufs…

Mais leurs réunions suivantes dans des églises noires sont des succès, et dans l’ensemble, ils seront très bien accueillis partout. Douglass affirme sa non-violence, et dénonce la complicité des églises avec l’esclavage. Les sujets politiques sont, pour leur part, abordés par son collègue Garrison.

Fondation du journal abolitionniste « North Star »

Le Numéro 1 du North Star du 3 Décembre 1847

Lors de son séjour en Grande-Bretagne, Douglass avait fait part à ses amis qu’il envisageait de fonder son propre journal, qui serait destiné au « témoignage de la race (noire) ». La Société anti-esclavage américaine lui déconseille fortement de le faire. Une telle aventure ne ferait, d’après eux, que « perpétuer les distinctions de couleurs ».

Et on lui alloue à la place une colonne dans le « National Anti-Slavery Standard » de l’association.

Frederick Douglass

Quoi qu’il en soit, avec l’aide financière de ses amis britanniques (500 livres), et avec le soutien de Gerrit Smith, Douglass fonde à Rochester « The North Star ».

Le 3 décembre 1847, le premier numéro du North Star fut publié avec les devises suivantes en en-tête : « Le droit n’a pas de sexe – La vérité n’a pas de couleur – Dieu est notre père à tous et nous sommes tous frères ».

En 1848, Douglass reçoit le soutien de l’activiste afro-américain Martin Delany, qui coéditera avec lui le journal pendant un certain temps. Delany, qui a déjà dirigé son propre journal (le « Mystery of Pittsburgh »), et qui connait le métier, se charge de collecter des fonds dans le Nord et l’Ouest.

Douglass participera les 19 et 20 juillet 1848 à la « Convention de Seneca Falls », la première du genre, dédiée aux droits des femmes aux États-Unis.

L’éducation des afro-américains.

Douglass est convaincu que l’amélioration du statut social des Afro-américains ne pourra passer que par leur accès à l’éducation.

Frederick Douglass

La violence

Partisan déterminé de la non-violence, Douglass change graduellement d’opinion sur la question de l’usage de la violence comme facteur de contestation, notamment à la suite de l’adoption par le Congrès, en 1850, d’une loi sur les esclaves fugitifs.

Il se rapproche de l’abolitionniste radical John Brown, mais s’avère prudent concernant le projet de ce dernier d’armer une rébellion d’esclaves.

Frederick Douglass et James Brown

Douglass pense qu’une attaque contre une propriété du gouvernement fédéral ne peut que le desservir, en soulevant contre lui l’opinion publique américaine. Brown le rencontre deux mois avant de mener, en 1859, un raid contre l’arsenal fédéral d’Harper’s Ferry.

Après le début de l’attaque, Douglass se réfugiera au Canada, craignant d’être arrêté comme conspirateur (il est considéré comme le septième dans le « Secret Six » qui a ourdi le complot avec Brown).

LA GUERRE CIVILE

Dès l’ouverture des hostilités, les abolitionnistes ont poussé le gouvernement à intégrer les Noirs dans l’armée fédérale. A partir de 1862, le congrès autorise la constitution de contingents d’hommes de couleur ; mais une année s’écoule avant que les premiers soldats noirs n’enfilent des uniformes bleus pour servir sous les ordres d’officiers blancs.

&

« Au même titre que l’émancipation des Noirs, cette décision est le coup le plus dur porté à la Confédération. En armant les hommes de couleur, nous nous sommes adjoint un puissant allié ; ils feront de bons soldats ».

Ulysse Grant

La « Guerre de Sécession », de Ken Burns.  

Douglass mène durant le conflit une campagne active pour autoriser les Noirs à se battre aux côtés des soldats de l’Union. Selon lui, le résultat de cette guerre doit mettre un terme à l’esclavage des Noirs. Il estime logique que ceux-ci puissent être autorisés à prendre part à la lutte qui doit aboutir à leur émancipation. En outre, leur mobilisation dans l’armée nordiste pourrait aussi aider l’obtention des droits civils. Ce qui, pour Douglass, aboutira nécessairement à leur libération.

« Laissez, ne serait-ce qu’une fois, l’homme de couleur porter les lettres d’or US ! laissez-le porter l’aigle sur ses boutons, un fusil sur l’épaule, et mettre des balles dans sa poche, et il n’est pas un pouvoir en ce monde qui pourra lui refuser le droit à la citoyenneté des États-Unis ».

Frederick Douglass  

La « Guerre de Sécession », de Ken Burns.  

Au cours de la guerre, Douglass s’opposera aussi avec ferveur à l’idée, un temps reprise par Abraham Lincoln, de déporter les esclaves libérés dans des colonies extérieures aux États-Unis.

Frederick Douglass

Pour Douglass, les Noirs,  au même titre que les Blancs américains, sont sur leurs terres aux États-Unis. Le pays ne doit compter que sur ses propres ressources pour affronter un problème dont il porte l’entière responsabilité.

Il milite pour la libération immédiate des esclaves situés sur le territoire des États-Unis, y compris dans les États en rébellion contre le gouvernement fédéral.

Dans la nuit du 31 décembre 1862, le Président Lincoln signe la Proclamation d’émancipation, qui libère les esclaves des territoires détenus par les Confédérés. Les esclaves continuant à se battre contre l’Union sont affranchis. Dorénavant, l’armée de l’Union va incorporer des Noirs dans ses rangs. Douglass saluera cette décision historique.

Un appel de Frederick Douglass aux hommes de couleur pour rejoindre l’armée.

« Toute l’armée des États-Unis ne parviendrait pas à restaurer l’esclavage dans le sud. Ils ne peuvent récupérer leurs esclaves, pas plus qu’ils ne peuvent récupérer leurs grands-pères défunts. Cette époque est révolue ».

William Tecumseh Sherman

La « Guerre de Sécession », de Ken Burns. 


 

APRÈS LA GUERRE

Frederick Douglass

Sa carrière politique

Après la guerre civile, Douglass occupe plusieurs postes politiques importants. Il devient président de la « Freedman’s Savings Bank » (un organisme gouvernemental chargé de favoriser l’intégration des anciens esclaves durant la période de la « Reconstruction » qui suivit la guerre).

Puis il est marshal du district de Columbia, consul-général de la république d’Haïti (1889-1891), et chargé d’affaires pour la République dominicaine.

Au bout de deux ans, il renoncera à ses fonctions diplomatiques en raison de désaccords avec la politique du gouvernement américain.

En 1868, il milite pour la campagne présidentielle d’Ulysses S. Grant.

En 1871, le Président Grant signe le « Ku Klux Klan Act », ainsi que les second et troisième « Enforcement Acts », afin de lutter contre la terreur et les assassinats d’Afro-américains innocents. Il déclare la loi martiale dans neuf comtés de Caroline du Sud. Plus de 5 000 membres de l’organisation raciste du KKK seront arrêtés, puis libérés faute de preuves. L’organisation sera cependant démantelée.

En 1872, Douglass s’établit à Washington après l’incendie de sa maison de Rochester (New York).

Il assiste en 1876 à l’inauguration du « Freedman’s Memorial » (ou le « Mémorial Émancipation »), érigé en hommage à Abraham Lincoln dans le « Lincoln Park » de Washington.

Freedman’s Memorial

Il est plébiscité par le public, et finit par accepter d’improviser un discours sur l’ancien président.

Douglass insiste sur sa réticence à rejoindre, dès le départ, la cause de l’émancipation. Il souligne que si Lincoln était initialement opposé à l’expansion de l’esclavage, il n’était pas dès l’origine partisan de sa disparition.

Néanmoins, il affirma aussi que « n’importe quel homme de couleur, ou n’importe quel homme blanc éprouvant de la sympathie pour l’égalité de tous les hommes, ne peut oublier la nuit qui a suivi le premier jour de janvier 1863 (celui de la Proclamation d’émancipation), quand le monde entier a vu Abraham Lincoln prouver qu’il était aussi bon que ses discours le laissaient entendre ».

Frederick Douglass   

L’Exposition universelle de 1893

Frederick Douglass, avec trois autres militants (Ida B. Wells, Irvine Garland Penn et Ferdinand Lee Barnett), ordonne un boycott de l’exposition universelle de 1893. Cette dernière, dans les pavillons officiels, ne mentionne à aucun moment l’histoire des Afro-Américains.

Les trois militants rédigent avec lui un pamphlet détaillant le parcours des Noirs depuis leur arrivée en Amérique, pamphlet qui sera distribué à l’entrée de l’exposition. L’article s’intitule « Les raisons pour lesquelles l’Américain de couleur n’est pas à l’exposition universelle » (« Reasons Why the Colored American Is Not in the World’s Columbian Exposition »). Ida Wells confiera plus tard à Albion W. Tourgée que 20 000 copies du pamphlet furent distribuées à cette occasion.

SA FIN DE VIE.

Cedar Hill. La demeure de Frederick Douglass, où il passa ses dix-huit dernières annaes.

Cedar Hill

En 1877, Douglass s’installe dans ce qui va être sa dernière demeure, située dans le district de Washington, sur les bords de la rivière Anacostia (qui inspirera son surnom de « Lion d’Anacostia »).

Il nomme Cedar Hill ce domaine qu’il agrandira progressivement pour porter sa superficie à 6 hectares. La propriété accueille aujourd’hui le site historique national Frederick Douglass.

Le 20 février 1895, il assiste au Conseil national des femmes à Washington, où il reçoit une ovation du public.

Peu de temps après son retour à Cedar Hill, il est victime d’une crise cardiaque.

Il sera enterré au cimetière du Mont Hope à Rochester.

Le 4 juillet, c’est la fête d’indépendance des États-Unis. A cette date, en 1852, le philosophe, politicien et écrivain afro-américain Frederick Douglass a prononcé le célèbre discours « What to the Slave Is the Fourth of July ? » (« Qu’est-ce que représente le 4 juillet pour un esclave ? »).

Douglass décrit la contradiction colossale entre les principes affirmés en 1776 et l’existence de l’esclavage aux USA en 1852. Il dénonce la responsabilité des religieux dans la légitimation d’une réalité indigne d’un pays se prétendant civilisé.

Fers

Sources :

La « Guerre de Sécession », de Ken Burns.  

Photos publiques Facebook

Black History Mini Docs

https://www.facebook.com/BlackHistoryMiniDocs

https://fr.wikipedia.org/wiki/Frederick_Douglass

https://gw.geneanet.org/tdowling?lang=fr&n=douglass&oc=0&p=frederick

https://www.geni.com/people/Frederick-Douglass/6000000012153875412

 

 

 

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2 réponses

  1. 30 juillet 2023

    […] Elle y nouera des amitiés durables avec les militants, comme celle de Frederick Douglass. […]

  2. 31 août 2023

    […] fait aussi la connaissance de Frederick Douglass, et devient une militante pour les droits civiques des […]

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