L’abjuration de Jeanne d’Arc
LA GUERRE DE CENT ANS
De 1337 à 1453
LES VALOIS DIRECTS
L’ABJURATION DE JEANNE D’ARC
24 mai 1431
Jeanne d’Arc à son procès (le 15 mars 1431)
Lire :
– Jeanne d’Arc, du procès au bûcher
– Jeanne d’Arc face à ses juges
– Jeanne d’Arc, sorcière et maudite
– Jeanne d’Arc brûlée vive sur le bûcher
SOMMAIRE
Le procès de Jeanne est sur le point de se terminer ; et pourtant, elle s’est toujours refusée à prononcer le moindre aveu. L’évêque de Beauvais Pierre Cauchon, dans une dernière tentative, celle de la dernière chance, veut à tout prix la faire basculer au sein de la Sainte Église catholique.
Le 24 mai, il va pour cela organiser une funeste comédie au cimetière Saint-Ouen. Jeanne comparaît, et, évènement inattendu, on assiste à un revirement de situation : « la Pucelle » prend peur, abjure, renie ses voix, et renonce à porter des vêtements masculins. C’est un véritable Coup de Théâtre. Jeanne signe l’acte d’abjuration. Elle vient de sauver sa vie et de s’épargner le bûcher ! Elle est condamnée à la prison à vie. Mais quelques jours plus tard, elle se rétracte et se rend parjure…
Le 29 mai 1431, dans la salle épiscopale, les juges, sans sa présence, déclarent Jeanne relapse ; elle ne peut plus échapper au bûcher.
Elle est brûlée vive le 30 mai 1431 place du Vieux Marché, à Rouen.
UN INTERMINABLE PROCÈS
Depuis le 21 février 1431, Jeanne est soumise à un procès sans fin. Lors d’interminables cessions, elle y subit d’incessantes et douloureuses admonestations qui la rendent un peu plus fragile chaque jour.
L’acte d’accusation du promoteur (procureur) d’Estivet est accablant. Elle est déclarée « sorcière, devineresse, pseudo-prophétesse, invocatrice des malins esprits, conjuratrice, superstitieuse, adonnée aux arts magiques, mal pensante dans notre foi catholique (…), sacrilège, idolâtre, apostate, maudite et malfaisante ».
Mais l’évêque de Beauvais Pierre Cauchon n’est pas entièrement satisfait. Pour que le jugement du tribunal qu’il a organisé lui-même soit reconnu comme tel, il lui faut l’essentiel : les aveux de la petite Lorraine !
Malgré les charges, les intimidations et menaces de torture, « la Pucelle » refuse de reconnaître et de confesser ses fautes.
L’évêque de Beauvais, grand ordonnateur du procès, décide de passer à la vitesse supérieure, et recourt à l’« acte de foi » (sermon public établi par la Sainte Inquisition).
La délibération n’est pas négociable. Jeanne a deux possibilités : soit elle abjure ses erreurs, et elle aura la vie sauve, soit elle périra brûlée vive sur le bûcher.
UNE MISE EN SCÈNE ORCHESTRÉE DE MAIN DE MAÎTRE !
Le jeudi 24 mai 1431, le décor mis en place par Cauchon se déroule au cimetière de l’abbaye de Saint-Ouen à Rouen. Précisément dans l’enclos voisin de l’abbaye en construction, et près du sinistre bâtiment où l’on entasse les ossements retirés de la fosse commune.
LE CIMETIÈRE SAINT-OUEN ET L’ÉGLISE SAINTE-CROIX-SAINT-OUEN
A cette époque, le cimetière était un espace clos qui s’étendait au sud de l’abbatiale en construction, et qui relevait de la compétence de l’abbé Jean IV Richard, partisan du roi de France mais excommunié. Il fut remplacé par l’anglophile Guillaume Lemesle, abbé de Sainte Catherine du Mont. En 1431, le chœur de l’abbatiale était achevé mais le transept n’était pas terminé. Par contre, Jeanne dut voir l’église Sainte-Croix-Saint-Ouen, édifiée en 1322. https://www.patrimoines-rouen-normandie.fr/IMG/pdf/09–cimetiere_st_ouen_et_eglise_sainte-dan.pdf
Les juges sont présents, ainsi que de nombreux ecclésiastiques normands, des représentants de l’Université de Paris, des hauts dignitaires du pouvoir anglais, l’évêque de Winchester, celui de Norwich, et William Ainwick (le secrétaire privé du jeune roi Henry VI qui n’a alors que dix ans).
Alors qu’un bûcher est publiquement dressé, la population rouennaise s’agglutine autour pour assister à la scène qui va avoir lieu sous ses yeux.
Jeanne arrive la tête inclinée et nu-pieds, en toute humilité, comme une pénitente apeurée. Elle tient un cierge allumé à la main.
UNE CÉRÉMONIE MACABRE …
Cinq jours auparavant, le tribunal ecclésiastique de Rouen a condamné Jeanne comme hérétique, schismatique, sorcière, pècheresse, etc… Mais avant d’appliquer la sentence, on lui a donné une dernière chance de renoncer, de se repentir et d’accepter la pénitence infligée par l’Église selon sa propre règle. Ce qu’elle fit.
Guillaume Erard (chanoine de Rouen et maître de l’Université de Paris) donne à Jeanne la lecture d’un sermon solennel. La jeune fille a déjà entendu ces accusations à maintes reprises au cours de son interminable procès ; elles ne peuvent être pires…
Et comme le président, sentant toute la portée de cet appel et craignant de voir sa proie lui échapper, défend au greffier d’écrire ses paroles, l’innocente victime reprend : « Ah ! vous écrivez bien ce qui est contre moi, mais ce qui est pour moi vous ne l’écrivez pas ! ».
Dès ce moment, Jeanne devrait être conduite devant le souverain pontife, puisqu’elle vient de s’en remettre à lui. Jusqu’à sa mort, elle protestera qu’elle a été soustraite à la justice de l’Église, et qu’elle aurait mieux aimé mourir avant de tomber aux mains des Anglais.
Normalement, l’instruction aurait dû s’arrêter là, mais on lui répond qu’il est « impossible d’aller chercher Notre Seigneur le pape aussi loin ».
Puis Guillaume Erard (le chanoine de Rouen) lance à l’accusée : « Fais-le maintenant, sinon aujourd’hui tu finiras tes jours par le feu ! » Il s’exclame ensuite : « Ô Maison de France ! Tu n’avais jamais connu de monstre jusqu’ici ! Mais à présent te voilà déshonorée en prêtant foi à cette femme, magicienne, hérétique, superstitieuse ».
Indignée, Jeanne l’interrompt : Ne parlez pas de mon roi, il est bon chrétien ».
UNE CROIX EN GUISE DE SIGNATURE
Les réprobations continuent de s’abattre sur « la Pucelle », mais elle ne change rien à tout ce qu’elle a maintenu jusqu’alors durant tout le procès.
Pour terminer, elle signe d’une croix le texte de son abjuration. La petite pucelle vient-elle d’échapper au bûcher ?
Mais c’est sans compter avec les Anglais, qui sont furieux de la tournure des événements et qui constatent avec amertume que le procès se termine ainsi : pour eux, « la Pucelle doit périr » !
Jeanne sera remise malgré tout à la garde de ses geôliers, ceux-là mêmes qui lui ont fait subir tant de sévices. Pour montrer sa soumission, elle devra endosser une tenue de femme. Nonobstant, quelques jours plus tard, elle s’habillera à nouveau avec ses vêtements masculins, revenant ainsi sur son abjuration.
Ce dernier parjure est extrêmement grave : déjà coupable d’hérésie, elle est désormais relapse.
UNE CÉDULE BIEN ÉTRANGE
La cédule est un écrit par lequel une personne prend un engagement, reconnaît une dette.
C’est l’huissier Jean Massieu qui la cite : « Je Jeanne, appelée la Pucelle, misérable pècheresse, après que j’ai connu le lac d’erreurs en lequel j’étais tenue et que, par la grâce de Dieu, suis retournée à notre mère Sainte Église, afin qu’on voie que, non pas feintement, mais de bon cœur et de bonne volonté, suis retournée à icelle, je confesse que j’ai gravement péché, en feignant mensongèrement avoir eu révélation de par Dieu et ses anges (…). Et de tous mes dits et faits qui sont contre l’Eglise, je me révoque, et veux demeurer en l’union de l’Église, sans jamais en départir. Témoin mon seing manuel. Signé Jeanne par une croix ». Jean Massieu raconte : « Parmi l’assemblée des dignitaires présents, il y eut un grand murmure ». Il ajoute : « Je voyais bien que Jeanne ne comprenait pas cette cédule ». Ignorance ? Épuisement dû à un interminable procès et à des souffrances physiques dont elle a du mal à se remettre ? Ou cède-t-elle aux implorations de la foule émue (« Abjure, Jeanne, ne te fais pas mourir ! ») ?
Sources :
Mes photos
Photos publiques Facebook
Les rois de France des Éditions Atlas (Valois directs).
https://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_de_Cent_Ans
https://fr.wikipedia.org/wiki/Jeanne_d%27Arc
https://www.patrimoines-rouen-normandie.fr/IMG/pdf/09–cimetiere_st_ouen_et_eglise_sainte-dan.pdf