Pluie de feu sur Monte Cassino

SECONDE GUERRE MONDIALE

Corps Expéditionnaire Français en Italie

PLUIE DE FEU SUR MONTE CASSINO

1944 – Bataille de Monte Cassino

LA BATAILLE DU MONT CASSIN

Du 17 janvier au 19 mai 1944

EN BREF…

MONTE CASSINO

La bataille de Monte Cassino (aussi appelée « bataille du Mont-Cassin » en français) fut une série de quatre batailles de la Seconde Guerre mondiale. Elles furent livrées autour du Mont Cassin de janvier à mai 1944, par les Alliés contre les forces allemandes. L’objectif était de percer la « ligne Gustave », afin de faire la jonction avec les forces débarquées à Anzio (à environ une centaine de kilomètres à l’ouest du mont) et de s’emparer de Rome.

Durant ce terrible affrontement, des centaines de bombardiers américains anéantirent la vieille abbaye bénédictine du Mont-Cassin. La position de cet ancien monastère était d’une importance stratégique : elle constituait un verrou sur la route vers Rome, et la Wehrmacht y avait installé une importante garnison. Les pertes furent énormes : 55 000 hommes pour les Alliés, et 20 000 pour les Allemands.

ANZIO

La campagne d’Anzio (« opération Shingle ») dura du 22 janvier au 5 juin 1944. Elle fut caractérisée par une guerre de tranchées et par des barrages d’artillerie, plus communément associés à la Première Guerre mondiale. Les conditions difficiles dans les tranchées et les étangs-réservoirs causèrent de nombreux cas de « pied de tranchée » (exposition prolongée des pieds à l’humidité, à l’insalubrité et au froid). Le paludisme et d’autres maladies furent également un danger dans les marais infestés de moustiques. Le nombre de victimes alliées non-combattantes pour la campagne s’éleva à 37 000.

SOMMAIRE

A la fin décembre 1943, les forces alliées en Italie furent stoppées par les défenses solides de la ligne Gustave. Avec des fortifications et une rivière quasi infranchissable, le périmètre de la ville de Cassino constituait l’une des positions clés de la ligne de défense allemande.

Les Alliés tentèrent de pénétrer les défenses du Mont Cassin à quatre reprises :

1 – Le premier affrontement eut lieu entre le 17 janvier et le 11 février 1944, et causa de lourdes pertes aux Alliés. Afin de soulager la tension exercée sur la tête de pont d’Anzio, où ces derniers étaient bloqués par la résistance nazie, une seconde offensive fut lancée du 16 au 18 février.

2 – La veille, le 15 février, une pluie de bombes lancées par les bombardiers américains s’abattit sur le Mont Cassin, et anéantit la célèbre abbaye. Le commandement allié était persuadé, à tort, que c’était un poste d’observation allemand. Mais ce fut l’effet inverse qui se produisit. Les forces allemandes investirent les ruines après le raid, ce qui leur donna un point d’ancrage supplémentaire pour continuer le combat.

3 – La troisième attaque se déroula entre le 15 et le 23 mars, mais ce fut aussi un échec.

4 – La quatrième bataille se déroula le 11 mai (« opération Diadème »). Le 25 mai 1944, les Allemands abandonnèrent la ligne Gustave.

Après cinq mois de combats sur la ligne Gustave, la route vers Rome fut enfin libre d’accès, mais à quel prix ! On estime que les pertes dans le camp des Alliés (l’Australie, le Canada, la France libre, C.E.F – corps expéditionnaire français en Italie -, le Royaume d’Italie, l’Inde, la Nouvelle-Zélande, la Pologne, l’Afrique du Sud, le Royaume-Uni et les États-Unis) s’élevèrent à environ 55 000, et à 20 000 pour l’Allemagne et l’Italie.

CONTEXTE

Du 10 juillet au 17 août 1943, les Alliés entreprirent l’« opération Husky » (ou débarquement et prise de la Sicile par les troupes alliées : britanniques, américaines, françaises et canadiennes).

En septembre 1943, les Alliés débarquèrent en Calabre et prirent Naples dans la foulée. Le front d’Italie alors s’enlisa.

L’armée allemande ne pouvait aligner qu’une faible résistance face à la progression des Alliés. Mais la ligne de front se réduisait à la largeur de la botte italienne (une étendue de territoire bien plus facile à défendre que les grands espaces russes, à l’Est).

L’Italie avait en principe rejoint le camp allié, et la plupart des troupes italiennes furent désarmées ou froidement exécutées par les Allemands. Ceux-ci avaient installé dans le Nord de l’Italie une république fasciste fantoche, la république de Salò, dirigée par Mussolini.

Effectivement, les Allemands disposaient de forces moins nombreuses que leurs ennemis, mais celles-ci étaient fermement retranchées sur un solide dispositif de défense. Cette ligne fortifiée occupait toute la largeur de la péninsule italienne, ce qui, avec un front raccourci, atténuait leur infériorité numérique. Ce dispositif était échelonné sur plusieurs lignes. Il était constitué par une série de fortifications plus ou moins resserrées, et utilisait les montagnes comme un véritable rempart.

Les vallées ou plaines littorales qui communiquaient du sud vers le nord furent, quant à elles, entièrement minées et parsemées de réseaux de barbelés. La plus redoutable de ces lignes défensives était la « ligne Gustave ». Elle prenait appui sur la région montagneuse des Abruzzes, et le point de blocage était constitué par le massif fortifié du Mont Cassin. Le maréchal allemand Albert Kesselring interdisait ainsi solidement la route de Rome aux Alliés.

LA LIGNE GUSTAVE La ligne Gustave (ou ligne d’hiver) était une série de fortifications construites par l’Organisation « Todt », de l’Allemagne nazie, dans la péninsule italienne pendant la campagne d’Italie.

Elle s’étendait sur plus de 150 km, sur la partie la plus étroite de la « botte italienne ». Elle débutait à l’ouest à Minturno (sur la mer Tyrrhénienne), longeait le fleuve Garigliano, et traversait les montagnes des Apennins jusqu’à l’embouchure de la rivière Sangro, dans la mer Adriatique. Le centre de la ligne, au croisement de la grande route nord-sud, était situé au niveau du sommet du monte Cassino et de sa vieille abbaye bénédictine.

Drapeau de l’Italie de 1861 à 1956

FORCES EN PRÉSENCE

Pour les Alliés

105 000 hommes placés sous les ordres du général Dwight David Eisenhower, commandant suprême des forces alliées.

Dwight David Eisenhower (fin 1943).

– Harold Alexander (1891-1969), Royaume-Uni

– Oliver Leese (1894-1978), Royaume-Uni

– Mark Clark (1896-1984), États-Unis

– Alphonse Juin (1888-1967, France

– Władysław Anders (1892-1970), Pologne

Pour les Allemands

80 000 hommes, plus un bataillon de 1500 soldats italiens placés sous les ordres de :

– Albert Kesselring (1885-1960)

– Heinrich von Vietinghoff (1887-1952)

– Frido von Senger (1891-1963)

– Richard Heidrich (1896-1947)

DÉROULEMENT DE LA BATAILLE

Ruines de l’Abbaye de Monte Cassino

Le 17 Janvier 1944 : premier assaut anglo-américain sur Cassino

A l’origine, le plan prévoyait que le CEF (Corps expéditionnaire français) devait exécuter une attaque de diversion visant à déborder Cassino au nord-est, par la montagne, et atteindre Atina par le mont Santa Croce et le Carella.

Pendant ce temps, le 2ème corps américain (avec une partie de la 1ère division de chars) avait pour objectif d’avancer sur les villes de Cassino et de Sant’Angelo, et le 10ème corps britannique de progresser vers Minturno.

Toutes ces manœuvres avaient pour but de préparer l’opération Shingle. Celle-ci prévoyait, le 22 janvier 1944, un débarquement à Anzio-Nettuno, sur les arrières du flanc droit de la ligne Gustave.

Au début des opérations, le 10ème corps britannique du général McCreery parvint à franchir le fleuve Garigliano, près de son embouchure. Le 19 janvier, il arriva près de Castelforte. Dès le 20 janvier, les Allemands lancèrent une série de contre-attaques qui furent repoussées au bout de douze jours.

Dans un deuxième temps, le 2ème corps américain du général Keyes lança la 36ème division contre Sant’Angelo, soutenue par la 34ème division qui, elle, attaqua Cassino. Le 20 janvier 1944, la tentative de franchissement du Rapido par la 36ème division échoua. La 34ème division, elle, réussit presque à prendre Cassino et le monastère : ils s’approchèrent seulement à 300 mètres de l’objectif. Lorsque la 4ème division indienne vint relever les Américains, la division ne comptait plus que 840 hommes sur les 3 200 du début de l’attaque.

Au début du mois de février, les Allemands avaient reconquis presque tout le terrain perdu. Le 6 février 1944, la 36ème division américaine fut relevée par la 2ème division néo-zélandaise.

Pendant ce temps, les forces débarquées à Anzio (de l’« opération Husky » du 10 juillet au 17 août 1943) étaient, quant à elles, immobilisées par les forces allemandes.

De son côté, faute de réserves, le CEF ne put s’emparer du mont Santa Croce et du Carella. Néanmoins, il enregistra de nombreux succès sur un terrain difficile et escarpé : la prise de La Selva, de la Costa San Pietro (1 450 mètres d’altitude), d’Acquafondata, et de la Monna Casale (dont les deux sommets jumeaux culminaient à 1 220 et 1 225 mètres) représentèrent autant de bravoures et d’efforts démesurés.

En deux mois, la 2ème division d’infanterie marocaine (2ème DIM), puis la 3ème algérienne (3ème DIA), appuyées par deux groupements de tabors marocains (GTM), obtinrent des résultats non négligeables : une percée à certains endroits de plus de 15 kilomètres, la capture de 1 200 allemands, et la mise hors de combat d’une division entière ennemie.

Au cours de cette première offensive, les tirailleurs nord-africains furent les seuls à menacer sérieusement la ligne Gustave. Mais ces opérations sur le flanc nord-est de Cassino n’étaient pas la priorité de l’état-major anglo-américain, qui s’entêta à vouloir percer les lignes allemandes du mont Cassin par une attaque de front.

Du 15 au 18 février 1944 (« opération Bradman ») : deuxième assaut sur le Mont Cassin.

La 4ème division indienne et la 2ème division néo-zélandaise eurent à leur tour l’ordre de se préparer à prendre d’assaut le mont Cassin. Le plan consistait à passer par la crête de la Tête de Serpent, et à s’emparer également de la gare du chemin de fer de Cassino.

Le 15 février, le commandement allié ordonna le bombardement du monastère du Mont-Cassin. Deux cent vingt-quatre appareils larguèrent quatre cent vingt tonnes de bombes, qui dévastèrent le monastère. Les Alliés étaient persuadés que des observateurs allemands se trouvaient sur les toits ; ce qui s’avéra faux. La destruction de l’abbaye permit toutefois aux Allemands d’en transformer les ruines en une véritable forteresse.

Le 16 février, l’attaque fut déclenchée. Les Néo-Zélandais s’emparèrent de la gare de Cassino, mais furent presque aussitôt contraints d’abandonner et de se retirer.

Le 17 février, la 78ème division britannique se joignit au corps néo-zélandais. Mais le lendemain, l’opération fut suspendue : les mauvaises conditions climatiques neutralisèrent les opérations durant trois semaines.

Du 14 au 22 mars, la bataille reprit. Après des bombardements intensifs, le général néo-zélandais Freyberg donna l’assaut en direction du sud, le long des deux rives du Rapido. Les Alliés voulaient s’emparer de la ville de Cassino. Après six jours de combat, le corps néo-zélandais fut contraint de se retirer.

La situation s’enlisa, ce qui fit jubiler la propagande allemande. Des affiches furent placardées sur les murs de l’Europe occupée, où l’on comparait l’avancée des armées alliées en Italie à celle d’un escargot.

Dans ses mémoires, Von Senger écrira à propos de cette phase de la bataille que ce qu’il craignait le plus à ce moment-là, « c’était une attaque du corps de Juin avec ses superbes divisions marocaines et algériennes ».

Du 11 au 19 mai 1944 : succès des troisième et quatrième batailles, simultanées, des Français et des Polonais sur le Monte Cassino.

Au printemps 1944, les Alliés préparèrent une nouvelle offensive. La 8ème armée britannique et le corps expéditionnaire français furent ainsi repositionnés en secret.

Cette fois-ci, le plan d’attaque fut basé sur des objectifs audacieux : ceux du général Alphonse Juin.

LE GÉNÉRAL JUIN (1888-1967)

Alphonse Juin

Héros de la Première Guerre mondiale, le général Alphonse Juin s’imposa comme l’un des grands chefs de l’armée de la libération en 1943-1944.

À la tête du corps expéditionnaire français en Italie, il mena ses hommes à la victoire du Garigliano, une bataille décisive qui ouvrit les portes de Rome aux Alliés. Son commandement lui valut les éloges des généraux britannique et américain Harold Alexander et Mark Wayne Clark, qui lui adressèrent chacun des lettres saluant ses qualités.

Nommé chef d’état-major général de la Défense nationale auprès du général de Gaulle, il entra à ses côtés dans Paris libéré, le 25 août 1944.

Alphonse Juin

Fait notable : il fut le seul général de la Seconde Guerre mondiale à avoir été élevé à la dignité de maréchal de France de son vivant, en 1952.

Alphonse Juin avait réussi à imposer ses vues à l’état-major anglo-américain. Il voulait éviter toute nouvelle attaque frontale contre le mont Cassin (les défenses avaient été encore renforcées, et les troupes allemandes d’élite semblaient impossibles à déloger). Ce qui serait différent par la montagne.

C’était à 25 kilomètres au sud-ouest de Cassino, là où l’ennemi ne s’y attendait pas, qu’il fallait porter le coup de boutoir : à travers les monts Aurunci ; des reliefs considérés par les Allemands comme « impénétrables aux armées ».

Le plus gros effort incombait à la 8ème armée : elle devait tenter de « briser les lignes de défenses ennemies dans la vallée du Liri, et avancer en direction de Rome ». La 5ème armée avait reçu, elle, l’ordre d’attaquer et de pénétrer dans la vallée du Liri par les monts Aurunci, et de se diriger vers Minturno.

Ce plan devait permettre de couper les positions arrière de l’ennemi, en enveloppant ainsi toute la ligne Gustave. Pour le général Juin, seul le CEF était capable de mener à bien cette opération. En effet, l’aptitude au combat en montagne des tirailleurs et des goumiers du général Guillaume n’était plus à démontrer ; ils étaient, à n’en pas douter, les hommes de la situation.

C.E.F (Corps Expéditionnaire Français en Italie)

Le C.E.F était commandé par le général Alphonse Juin. Il était constitué de quatre divisions militaires issues en majorité des unités de l’Armée d’Afrique, des troupes coloniales, et des forces de la France libre. Cette armée était composée à 60 % de soldats coloniaux, surtout des Nord-Africains (des Algériens, des Marocains, et des Tunisiens).

Le plan comprenait un assaut du monastère par le nord, par le 2ème corps polonais, tandis que le 13ème corps britannique devait franchir le Rapido pour couper la route et isoler la ville.

Pour le Mérite

La Caporale Stanisława Biernacka (commandant de la cantine des blessés du Service auxiliaire féminin, du 2ème corps polonais) fut décorée de la Croix du Mérite avec les épées pour bravoure évidente (pour être restée au poste le 25 septembre 1944, pendant la bataille de Monte Cassino, à servir des boissons chaudes aux blessés malgré les bombardements constants des Allemands).

Honneur au Caporal Stanislaw Biernacka Héroïne de la bataille de Monte Cassino

L’officier qui la décora était le général Zygmunt Bohusz-Szyszko, le commandant adjoint du 2ème corps.

Tout en acceptant ce plan, Anglais et Américains n’en demeuraient pas moins dubitatifs. Ils doutaient que les Français réussissent à accomplir la manœuvre de débordement pour libérer enfin les portes de Rome.

La date et les objectifs de cette offensive étaient inconnus des Allemands (en témoigne l’envoi de leurs réserves vers Anzio, où ils prévoyaient une tentative de percée des Alliés). Une autre inconnue inquiétait Kesselring : savoir où et comment le CEF allait attaquer.

La percée de la ligne Gustave fut au début confiée à la 2ème division d’infanterie marocaine (2ème DIM). Considérée comme « le bélier du CEF » (selon l’expression de Juin), elle devait s’emparer pour cette mission des monts Faito et Majo.

L’attaque générale des Alliés sur l’ensemble du front italien débuta le 11 mai 1944 dans la soirée, à 23 heures. Une puissante préparation d’artillerie de 2 000 canons précéda l’assaut. Mais dans le secteur de la 2ème DIM, ce pilonnage n’impacta que les crêtes, sans détruire le dispositif de défense allemand (blockhaus, barbelés, mines…) qui jalonnait les pentes que devaient escalader les tirailleurs marocains pour s’emparer des hauteurs.

Dans les autres secteurs d’attaque du CEF, comme celui de la 4ème division marocaine de montagne (4ème DMM), il n’y eut aucune préparation d’artillerie. L’assaut s’avèrera terrible… Les régiments de la 2ème DIM attaquèrent de nuit, ce qui provoqua des combats désordonnés et très sanglants ; mais la ligne Gustave tenait toujours. Juin décida alors la reprise de l’offensive pour la nuit suivante, mais cette fois-ci, après une préparation d’artillerie plus importante et mieux ajustée. Très tôt dans la matinée du 13 mai, les tirailleurs marocains se ruèrent sur les positions allemandes. Les défense ennemies, dévastées par le bombardement des canons français, cédèrent de toutes parts.

La prise du mont Majo par les troupes marocaines de la 2ème DIM fut saluée par un drapeau français de 30 m2 hissé à son sommet (940 mètres). Il était visible à des kilomètres à la ronde, par les troupes du CEF mais aussi par les Allemands.

La poussée fut désormais possible vers les monts Aurunci puis, plus à l’ouest, vers les monts Lépins. Dès le 14 mai, ce fut la 4ème DMM (division marocaine de montagne) et les trois groupes de Tabors marocains (formant le corps de montagne du CEF) qui s’en chargèrent, à « un train d’enfer ».

« Les Français avancent si rapidement, que les communiqués ne peuvent suivre leur rythme », rapporta un journaliste américain.

À la suite de l’assaut des Goumiers marocains, les Britanniques prirent l’habitude de qualifier toute attaque audacieuse de « goumisation ».

Les Marocains prirent par la suite le mont Fammera (1 175 mètres) et le mont Revole (1 307 mètres).

LE GOUMIER

Un goumier était un combattant d’une troupe supplétive dans les colonies françaises en Afrique. Un goum désignait notamment une compagnie, un escadron ou un bataillon de 200 à 400 hommes.

Corps Expéditionnaire Français en Italie

Le bataillon, formé de soldats de Goumiers marocains, était encadré par des officiers et sous-officiers français des Affaires indigènes.

Simultanément, le 4ème RSM (4ème régiment de spahis marocains incorporé temporairement à la 3ème DIA, division d’infanterie algérienne) participa à la prise de Castelforte (sur le Garigliano) qui ouvrait la route d’Ausonia dans la vallée de l’Ausente ; ce qui permit de parvenir sur la vallée du Liri, au sud-ouest de Cassino, derrière les lignes allemandes.

Mon grand-père Ernest Mirabella, en Spahis marocain, Berkane 1927

Le 3ème régiment de spahis marocains (3ème RSM, mis provisoirement à la disposition de la 1ère division de la France libre, la 1ère DFL) participa à l’action générale de cette division qui s’engagea dans la haute vallée du Liri via San Apollinare (six kilomètres au sud de Cassino), en débordant également Cassino par le sud.

Alors que le quartier général de la Xème armée allemande était détruit par une attaque aérienne, le CEF continuait sa progression tant en montagne que dans les vallées. Il engagea le dispositif défensif allemand de la ligne Gustave, ce qui facilita l’avancée des Britanniques et des Américains. Ces derniers atteignirent ainsi rapidement Spigno, sur l’axe Minturno /Cassino.

Le 17 mai 1944, Kesselring ordonna à ses troupes de délaisser Cassino, craignant d’être encerclé par la manœuvre française. Le même jour, la route nationale fut coupée par le 13ème corps.

19 mai 1944 : victoire polonaise sur Monte Cassino

Le 2ème corps polonais du général Anders mena la quatrième et ultime bataille. Le 17 janvier 1944, il donna l’assaut sur le monastère, et, au terme de combats acharnés, s’en empara le 19 mai.

Les 50 000 soldats du 2ème corps polonais du général Władysław Anders avaient débarqué en Sicile en juillet 1943, sous le commandement du général Eisenhower. Ils avaient participé à la campagne d’Italie. Alors que la progression des Alliés était stoppée au pied du mont Cassin, ils prirent part de manière définitive à une bataille parmi les plus difficiles de toute la campagne d’Europe.

L’assaut fut au préalable précédé de préparatifs, courts et discrets, pour ne pas alerter l’adversaire : les sapeurs polonais aménagèrent, de nuit, des chemins et des routes pour acheminer en secret les équipements et les munitions au plus près possible du sommet et de l’abbaye. Ce chemin conserva longtemps son appellation de « Chemin du génie (ou des sapeurs) polonais ».

Au prix d’énormes sacrifices, les Polonais mirent un terme à deux mois d’infructueux assauts alliés contre le rocher du monastère bénédictin.

2ème corps polonais

Le 19 mai 1944, à 10 h 20, les soldats polonais du général Anders eurent l’honneur de hisser, sur les ruines du monastère du Mont-Cassin, le drapeau du 12ème régiment de lanciers Podolski (faute de drapeau national polonais disponible). Un clairon fit sonner le « hejnal mariacki » (la mélodie jouée chaque heure à la basilique Sainte-Marie de Cracovie). La victoire fut chèrement acquise, mais la route de Rome était définitivement ouverte.

3 juin 1944 – l’armée française de la Libération entre la première dans Rome !

BILAN ET PERTES

Le 4 juin 1944, les Alliés firent enfin leur entrée dans Rome. Mais cette victoire, qui marqua la renaissance des armées françaises, fut occultée par le débarquement allié en Normandie deux jours plus tard (le 6 juin 1944).

Pour les Alliés : 54 000 hommes.

Pour les Allemands : 20 000 hommes.

Pour les Français de la première division française libre, ainsi que les Goumiers marocains et les Tirailleurs algériens et tunisiens : 6 255 soldats tués et 23 500 soldats blessés, dont environ les deux tiers originaires du Maghreb.

Pour les Polonais : le Champ d’honneur militaire polonais du mont Cassin abrite les tombes de 1 052 soldats du 2ème corps polonais, morts lors de la bataille de Monte Cassino entre le 17 janvier et le 18 mai 1944. Wladyslaw Anders, commandant et général polonais, décédé à Londres en 1970, y est également enterré.

ANZIO

La campagne d’Anzio (opération Shingle), qui dura 131 jours, fut caractérisée par une guerre de tranchées et des barrages d’artillerie couramment assimilés à la Première Guerre mondiale. Le débarquement d’Anzio se fit dans des conditions de surprise tactique exceptionnelles. Mais, faute d’avoir été exploité rapidement, il se transforma vite en une épuisante bataille d’usure. Les conditions difficiles dans les tranchées et les étangs-réservoirs provoquèrent de nombreux cas de « trench foot » (pied de tranchée : exposition prolongée des pieds à l’humidité, à l’insalubrité et au froid). Le paludisme et d’autres maladies étaient également un danger permanent dans les marais infestés de moustiques.

Le nombre des pertes humaines alliées fut de 40 000 hommes, dont 9 000 Britanniques et 29 000 Américains. Les Allemands, quant à eux, déplorèrent la mort de 35 000 soldats.

Rome fut la première capitale européenne à être libérée. La retraite allemande laissa la voie libre aux Alliés qui, les 4 et 5 juin 1944, s’emparèrent de la ville et libérèrent la population romaine de l’occupation nazie.

Alain Mimoun, athlète français, futur vainqueur du marathon des Jeux olympiques de Melbourne en 1956, fut grièvement blessé au pied le 28 janvier 1944 par un éclat d’obus, lors de la bataille du mont Cassin ; il évita de justesse l’amputation de sa jambe gauche.

Alain Mimoun

Exemple même de l’abnégation et du courage, il sera 12 ans plus tard champion olympique.


LES « MARROCHINATE », DES VIOLS EN SÉRIE…

En Italie, le souvenir des combattants du C.E.F est resté présent dans les mémoires, mais pour des actes criminels. Un mot générique y fait même référence : « marocchinate » en italien, ou « maroquinade » en français. Il indique les viols de masse perpétrés par les soldats de l’armée française entre avril et juin 1944 dans la région de la Ciociara, au sud-est de Rome. Ces crimes de guerre furent imputés, comme le terme l’indique, aux Goumiers marocains du CEF ; un seul d’entre eux, sera par la suite condamné.

Les Goumiers du corps expéditionnaire français furent accusés de nombreux crimes de guerre commis au cours de cette campagne, notamment dans les environs de la région de la Ciociaria : destruction de villages, vols et violences, mais surtout viols de masse (et assassinat de ceux qui essayaient de s’interposer) se seraient multipliés autour du Mont Cassin.

La France a indemnisé près de 1 500 victimes, mais ne s’est pas excusée pour ces viols de masse. Des Italiens réclament toujours justice, dont les membres de l’ « Associazione Nazionale Vittime delle Marocchinate » (L’association nationale des victimes des « maroquinades »).

L’historienne Julie Le Gac estime que « le comportement du CEF lors de la libération de l’Italie est ainsi comparable à celui d’autres armées alliées envahissant le territoire de l’ennemi à la fin de la Seconde Guerre Mondiale », sans atteindre « la dimension tragique des viols perpétrés par l’Armée rouge lorsqu’ils pénétrèrent en Allemagne » (entre 95 000 et 130 000 femmes violées lors de la bataille de Berlin).

Dans son ouvrage, elle s’est penchée sur cette question ô combien sensible : « Ces crimes ont été suffisamment massifs ». L’historienne estime ainsi que de 3 000 à 5 000 viols furent commis par le CEF durant toute la campagne d’Italie, même si ce nombre est sujet à controverse. Elle rappelle que par le passé et encore de nos jours, les femmes ont été perçues comme « un butin de guerre ». Pour ces violences sexuelles, elle cite que 207 soldats du CEF furent traduits devant des tribunaux militaires français. Au total, 156 soldats furent condamnés (87 Marocains, 51 Algériens, 12 Français, 3 Tunisiens et 3 Malgaches), mais parmi eux, un seul faisait précisément partie des Goumiers marocains.

L’historien américain J. Robert Tilly (dans son ouvrage « La Face cachée des GIs ») rend compte de 379 dossiers archivés, de 879 cas recensés officiellement. Il estime que plus de 17 000 viols auraient été commis par les GIs pendant la campagne de France, et considère illimités ceux perpétrés une fois entrés en Allemagne entre 1942 et 1945.

L’historien Jean-Christophe Notin donne d’autres explications : sortes de « boucs émissaires », les Marocains furent loin d’avoir été les auteurs de toutes les atrocités de cette campagne. Certains journalistes anglais reconnurent que les seuls incidents dont ils se souvenaient n’impliquèrent pas des Marocains, mais des GI’s. Une enquête de 1946 constatera que le gouvernement italien versait 15 000 lires au plaignant à chaque dépôt de plainte, ce qui aurait pu encourager certaines dérives…

Sources :

Mes photos

Photos publique Facebook

https://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Monte_Cassino#Crimes_de_guerre_et_pol%C3%A9mique_apr%C3%A8s_la_bataille

https://www.defense.gouv.fr/terre/mieux-nous-connaitre/histoire-larmee-terre/lengagement-larmee-terre-seconde-guerre-mondiale/liberation

https://www.france24.com/fr/france/20240518-monte-cassino-bataille-entre-gloire-et-d%C3%A9shonneur-pour-l-arm%C3%A9e-fran%C3%A7aise

https://www.liberationroute.com/fr/stories/175/the-campaign-of-monte-cassino

https://fr.wikipedia.org/wiki/Alphonse_Juin

https://www.liberationroute.com/fr/pois/334/polish-military-cemetery-monte-cassino

 

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