La bataille de la Bérézina
Bataille de la Bérézina
(Du 26 au 29 novembre 1812)
« Que l’on frappe les riches, c’est une nécessité de guerre, mais les pauvres, c’est une infamie.»
Napoléon Bonaparte
Campagne de Russie (1812)
Une bataille victorieuse menée dans une Campagne perdue.
Bataille de la sixième coalition
Situation
La bataille se déroule aux alentours de la ville de Borissov (en Biélorussie actuelle), près de la rivière Bérézina, un affluent du Dniepr. L’événement de la retraite de Russie marque la fin de la Campagne de 1812.
Issue
La victoire sera revendiquée dans les deux camps. D’une part par les Français, qui réussissent à franchir le fleuve et à sauvegarder les restes de la Grande Armée, préférant parler d’une victoire militaire. D’autre part par les Russes, qui considèrent la retraite de l’armée française comme un succès majeur qui, pour eux, marquera un déclic et un sursaut national.
Forces en présence
Pour les Français : environ 90 000 hommes, dont la moitié en état de combattre. La Grande armée est sous les ordres de Napoléon 1er, les maréchaux d’Empire, Nicolas Charles Marie Oudinot, Claude-Victor Perrin et Michel Ney.
Pour les Russes : environ 144 000 hommes divisés en trois armées, sous les commandements respectifs de :
– Mikhaïl Illarionovitch Golenichtchev-Koutouzov (80 000 hommes).
– Pavel Vassilievitch Tchitchagov (34 000 hommes).
– Louis-Adolphe-Pierre, prince de Sayn-Wittgenstein (30 000 hommes).
Événements qui ont précédé la bataille
– Du 14 septembre au 23 octobre : La Grande Armée entre dans Moscou et occupe la ville.
– Du 15 au 18 septembre : Les Russes incendient Moscou.
– 24 septembre : propositions de paix de Napoléon, au tsar Alexandre 1er de Russie.
– 5 octobre : ordre est donné par Napoléon d’évacuer les blessés.
– 13 octobre : chutes des premières neiges.
– 18 octobre : bataille de Winkowo ou bataille de Taroutino, au sud de Moscou.
Victoire de l’armée russe sous les ordres de Mikhaïl Illarionovitch Golenichtchev-Koutouzov, sur les forces françaises commandées par Joachim Murat.
– Du 18 au 20 octobre : deuxième bataille de Polotsk (Biélorussie).
Victoire de l’armée russe sous les ordres de Pierre Wittgenstein, sur les troupes françaises du maréchal d’Empire Laurent Gouvion, marquis de Saint-Cyr.
– 19 octobre : début de la retraite ordonnée par l’Empereur Napoléon 1er.
– 23 octobre : tentative de coup d’État manqué du général Claude-François de Malet, à Paris.
– 24 octobre : bataille de Maloyaroslavets, (110 kms au sud-ouest de Moscou).
Victoire des forces françaises sous les ordres d’Eugène Rose de Beauharnais, sur les troupes russes du général Dmitri Sergueïevitch Dokhtourov.
– 28 octobre : à Paris, un conseil de guerre juge le général Claude-François de Malet et ses complices.
– 29 octobre : les conjurés sont tous passés par les armes.
– 31 octobre : bataille de Czaśniki (Biélorussie).
Victoire des forces russe sous les ordres de Pierre Wittgenstein, sur les troupes françaises commandées par le maréchal d’Empire Claude-Victor Perrin.
– 3 novembre : bataille de Viazma (Russie).
Victoire de l’armée russe sous les ordres du général Mikhaïl Andreïevitch Miloradovitch, face aux troupes de l’armée française commandées par Louis-Nicolas Davout, Eugène de Beauharnais, Józef Antoni Poniatowski et Michel Ney.
– Les 13 et 14 novembre : bataille de Smoliani (Biélorussie).
Victoire des forces russes sous les ordres de Pierre Wittgenstein, sur les troupes françaises commandées par les maréchaux d’Empire Claude-Victor Perrin et Nicolas-Charles Oudinot.
– Du 15 au 18 novembre : bataille de Krasnoï.
Défaite de l’armée française commandée par l’Empereur Napoléon 1er, face aux troupes russes sous les ordres du prince de Smolensk, Mikhaïl Illarionovitch Golenichtchev-Koutouzov.
– 24 novembre : les pontonniers du général Jean-Baptiste Eblé commencent la construction des ponts sur la Berezina. (La température extérieure avoisine les -37,5° Celsius).
Contexte
Cinq mois après avoir franchi le Niémen (24 juin 1812), Napoléon et la Grande armée se trouvent bloqués face à la rivière Bérézina. Les Russes veulent saisir leur chance. Aidés par l’arrivée des premiers froids de l’hiver rigoureux qui s’annonce, ils veulent en finir avec l’armée française qui est stoppée sur cet obstacle naturel. Le maréchal Michel Ney commande l’arrière-garde et couvre de son mieux la retraite.
Napoléon a pourtant choisi de reculer en utilisant le même chemin qu’à l’aller. Tout en prenant le risque d’affaiblir ses forces d’invasion, il a prévu de disposer tout au long du trajet, et de place en place, des unités de couvertures pour protéger une retraite éventuelle. Ces forces sont sous le harcèlement permanent des cosaques et subissent, à chaque instant, de grosses pertes.
Le 22 novembre, Napoléon est informé que les troupes cantonnées à Borissov, qui gardaient les ponts sur la Bérézina, ont été mises en déroute par les forces russes. Il sait, dès lors, que le franchissement de la rivière n’est plus assuré, et que son armée est bloquée.
L’instant est tragique. La Grande armée est flanquée par les troupes de Pierre Wittgenstein (30 000 hommes), acculée contre la Bérézina par l’armée de Mikhaïl Illarionovitch Golenichtchev-Koutouzov (80 000 hommes), et stoppée à Borissov par Pavel Vassilievitch Tchitchagov (34 000 hommes), qui s’est rendu maître des ponts.
La politique de la «terre brûlée», livrée par les généraux russes Michel Barclay de Tolly et son successeur Mikhaïl Illarionovitch Golenichtchev-Koutouzov, a dépouillé la région de ses réserves de nourriture.
Talonnée par les 80 000 hommes de Mikhaïl Illarionovitch Golenichtchev-Koutouzov, c’est une Grande Armée désemparée, gelée, affamée, et démunie de moyens vitaux pour sa survie, qui se présente le 22 novembre au matin devant la Bérézina, qu’elle doit traverser au plus vite. Son salut passe par la construction de deux ponts à 15 kms en amont, en face du village de Stoudienka. A cet endroit la rivière n’y est large que de vingt mètres et n’a que deux mètres de profondeur. C’est là que va survenir l’épisode le plus dramatique de la retraite de Russie.
Déroulement
Harcelés de toute part par les forces russes, les Français, désemparés, démunis, vont se lancer dans une tentative désespérée. C’est alors que le général Jean-Baptiste, baron Éblé, et ses 400 pontonniers, vont entreprendre dans l’urgence la construction de deux ponts sur la rivière. Pour accélérer leurs ouvrages, les hommes du génie de d’Eblé n’hésiteront pas à se jeter dans l’eau de la rivière glacée, et un grand nombre d’entre eux y mourra.
En cette période de l’année, la Bérézina est recouverte par les glaces. Mais un dégel imprévu a fait fondre la glace, et le courant de la rivière transporte d’énormes amas gelés. Malgré cette adversité, les pontonniers érigent, en quelques heures seulement, deux ponts de 90 mètres de long et 5 mètres de large ; un véritable exploit, compte tenu de la situation environnante.
On estime que six pontonniers sur 400 ont survécu à la retraite de Russie ; les autres sont morts de froid dans les eaux de la Bérézina. Le général Jean-Baptiste, baron Éblé, lui-même mourra d’épuisement à Königsberg.
Durant trois jours, les 26,27 et 28 novembre, sous la pression permanente des Cosaques, les débris de la Grande Armée vont franchir les ouvrages temporaires ainsi improvisés. Pendant ce temps, les maréchaux d’Empire Claude-Victor Perrin et Nicolas-Charles Oudinot se battent pour faire diversion.
Plus tard, alors que le gros de l’armée est passé de l’autre côté de la rivière, de nombreux attardés sont encore sur la rive gauche de la Bérézina. Après avoir, à maintes reprises, averti les retardataires que les ponts allaient être détruits pour protéger les restes de l’armée en fuite, au matin du 29 novembre, d’Eblé brûle les ponts. Des milliers de traînards se ruent sur les ouvrages en flamme, pour échapper à l’ennemi qui ne fait pas de quartier. Beaucoup se noient dans les eaux glacées ; parmi eux, un grand nombre de femmes et d’enfants accompagnant les soldats.
Pertes
Pour la Grande Armée : 45 000 morts ou blessés.
Pour l’armée russe : 20 000 morts ou blessés.
Conséquences
Après la traversée de la Bérézina, Napoléon dispose encore de 25 000 soldats valides en état de continuer à se battre, et 30 000 non-combattants. 20 000 seulement retrouveront leurs foyers… On évalue à 50 000 le nombre de prisonniers et de déserteurs qui s’établiront définitivement en Russie.