La Croisade des Albigeois – Honorius III
La Croisade des Albigeois
(1208-1244)
Honorius III
(Rome ? – 1227)
GRANDES FIGURES DE LA CROISADE DES ALBIGEOIS
Albigeois, nom donné au 12ème siècle aux cathares du Languedoc
PROLOGUE
LE CATHARISME, UNE MENACE POUR L’ÉGLISE ET POUR LE ROI
Vers le milieu du 12ème siècle, alors que l’Europe est dominée par une profonde et ardente foi catholique, le Midi toulousain est gagné par une hérésie toute aussi enflammée, le Catharisme. Cette nouvelle religion, qui apparaît vers le 12ème siècle dans les Balkans, s’appuie essentiellement sur une dualité. Ses disciples, « les Parfaits », croient en deux principes divins opposés : d’une part un monde spirituel avec un Dieu bon, celui de l’Évangile, et de l’autre un monde matériel et corrompu avec un prince du mal et des ténèbres, Dieu de l’Ancien Testament. Les valeurs morales et l’austérité de ses adeptes, contrastent avec l’opulence et le relâchement des représentants de l’Église catholique. Les cathares rejettent les sacrements, les indulgences, le purgatoire et le culte des saints. Ils ne glorifient point le sacrifice de la croix, et ne reconnaissent pas le pape comme le successeur légal des apôtres. Refusant le concept de propriété et condamnant le serment, ils sont considérés comme subversifs par la société féodale et par la royauté. Les fondations du christianisme vont chanceler, au point de décider le pape Innocent III à déclarer les « Bons Hommes » et les « Bonnes Dames », hérétiques.
En France, lorsque les croyances cathares apparaissent, la chrétienté est partagée au sein de l’Église et une grande divergence d’idées demeure entre les Français du Nord et les gens du Midi. Alors que ceux du Nord admettent la foi catholique romaine, dans les régions du Sud l’on a adopté l’« arianisme » depuis les premières heures du christianisme. Cette disparité va opposer le Languedoc à l’autorité de Rome, et faire de lui un foyer où les hérésies et les schismes vont se développer sans contrainte.
L’ÉTINCELLE
C’est vers le début du 13ème siècle, en 1204, que le pape Innocent III demande au roi Philippe Auguste (Philippe II) de mener une croisade contre les hérétiques cathares du Languedoc. Pour mener à bien la lutte contre cette nouvelle religion qui fait vaciller les dogmes de l’église catholique, le pape nomme dans cette région les légats apostoliques Pierre de Castelnau et Arnaud Amaury. Le sud de la France va alors s’embraser dans une guerre fratricide, qui opposera ses habitants et ses seigneurs aux forces de l’Église Catholique qui ont pris la Croix. Plus connue sous le nom de Croisade des Albigeois, cette guerre dévastera le midi et durera plus de 30 ans. La région sera dévastée, pillée et ruinée. Les années de destructions et de combats vont plonger le pays dans la famine et l’appauvrissement. Avec autant de morts et de désolation, peut-on parler de génocide ? Même de nos jours, il est difficile de faire ressortir un véritable coupable de cette triste page de notre histoire.
PREMIER APPEL A LA CROISADE
L’expédition porte officiellement le nom d’«Affaire de la Paix et de la Foi» (en latin, negotium pacis et fidei).
Innocent III promet les mêmes indulgences que pour un pèlerinage à Jérusalem. Philippe II refuse la proposition ; il est trop occupé dans son combat avec les Plantagenêt et ne prend pas part à la croisade contre l’hérésie cathare. Il préfère se tenir en retrait, ne voulant pas écorner son image en guerroyant contre des gens qui sont ses sujets. Il n’est pas d’accord avec le pape qui s’apprête à s’investir dans une affaire intérieure au pays, et il le lui fait savoir. Mais il accorde néanmoins sa bénédiction à ses vassaux et ne s’oppose pas à ce que l’abbé Guy des Vaux-de-Cernay recrute parmi les barons du nord.
Le légat pontifical Pierre de Castelnau essaie alors de se tourner vers Raymond VI de Toulouse, afin que celui-ci prenne la tête d’une force armée destinée à soumettre l’hérésie cathare. Mais le Comte de Toulouse, descendant du notoire Raymond IV de Saint-Gilles, chef de la Première Croisade en terre sainte, réfute l’offre du pape, arguant qu’il ne veut pas combattre ses propres sujets. Jugé trop complaisant envers les ennemis de l’Église, il sera excommunié. Fait inédit dans l’Histoire, pour la première fois une croisade est dirigée contre des disciples du Christ. Cet événement ne semble pas troubler les contemporains de cette époque ; il est vrai que l’hérésie cathare ne peut être tolérée.
Le choix d’Innocent III va se porter sur Simon de Montfort, un petit seigneur d’Île-de-France. Ce dernier va mettre le Languedoc à feu et à sang.
- Avril 1202 : départ de Venise de la 4ème croisade.
- 12 avril 1204 : prise de Constantinople.
- Avril 1204 : fondation de l’Empire latin d’Orient.
Prise de Constantinople 12 avril 1204
LES CROISES SUR LES ROUTES DU LANGUEDOC
Trois grands suzerains féodaux règnent alors sur le Languedoc : Pierre II d’Aragon, qui est aussi Comte de Barcelone, de Gévaudan, de Roussillon, et seigneur de Montpellier, Raymond VI, Comte de Toulouse et Raimond-Roger Trencavel, Vicomte de Béziers, de Carcassonne et d’Albi. En 1202, la sœur du roi Pierre d’Aragon, Eléonore d’Aragon, épouse le Comte de Toulouse. Par ce mariage, les deux seigneurs deviennent beaux-frères.
CHRONOLOGIE
QUELQUES DATES :
1205
– 5 février : Folquet de Marseille (1155-1231) devient évêque de Toulouse.
1206
Dominique de Guzman, futur « Saint Dominique », (né en 1170 à Caleruega, non loin de Silos en Castille, mort à Bologne le 6 août 1221), s’établit à Notre-Dame de Prouilhe, à Fangeaux, dont il devient le curé en 1214. Il ouvrira un refuge destiné à recevoir les femmes cathares après leur conversion.
1207
– Printemps 1207 : lors d’une rencontre avec des Cathares, Dominique parvient à les convertir.
– 29 mai 1207 : Accusé d’être complaisant à l’égard des Cathares, Raymond VI de Toulouse est excommunié par Pierre de Castelnau, légat du pape Innocent III, et l’interdit est jeté sur ses terres.
– mai 1207 : Innocent III confirme par lettre la sentence d’excommunication de Raymond VI de Toulouse.
1208
Le 14 janvier 1208, alors qu’il traverse le Rhône près de Saint-Gilles à Trinquetailles, le légat Pierre de Castelnau est assassiné par un homme à la solde du Comte de Toulouse. Cet événement est considéré comme le déclencheur de la Croisade des Albigeois.
– janvier : Raymond VI requiert vainement le pardon de l’Église.
Le 10 mars, Pierre de Castelnau est canonisé. (Bulle d’Innocent III contre les assassins de Pierre de Castelnau). Toutes les tentatives du pape pour ramener les hérétiques au sein de l’Eglise catholique ont échoué. A la cour de France comme à Rome, on est décidé à mettre un terme aux ambitions d’indépendance du Languedoc.
– 22 juillet : prise de Béziers ; la population est massacrée. On dénombrera entre 20 000 et 30 000 morts.
1211
CONCILE DE MONTPELLIER
En 1211, le concile se réunit à Montpellier pour statuer sur le cas du Comte de Toulouse. Bien que Raymond VI se soit rallié à la croisade, les faveurs du synode ne penchent toujours pas de son côté. L’assemblée, réunie pour la circonstance, maintient donc sa sentence d’excommunication envers lui. Cette décision est assortie d’une charte qui devra être respectée point par point par le Comte de Toulouse et ses descendants. Cette pénitence, qualifiée de « Charte Infâme » par les Toulousains, se présente comme suit :
1- Raymond VI de Toulouse doit renvoyer ses routiers (mercenaires regroupés en Grande Compagnies).
2- Il doit arrêter de protéger les hérétiques et les juifs.
3- Il doit faire maigre 6 jours par semaine.
4- Il doit porter des habits de drap sombre et rugueux.
5- Ses châteaux et les remparts de ses villes seront abattus.
6- Il lui sera interdit, à lui et ses chevaliers, de se rendre dans les villes.
7- Ses droits de péage lui seront retirés.
8- Il aura pour obligation de partir en terre sainte sous la garde des hospitaliers jusqu’à ce que Rome décide de son retour.
Si toutes ces conditions sont réunies, le concile se garde le droit de lui réattribuer ses fiefs, dès sa pénitence terminée….
– Pierre II d’Aragon tente de négocier la paix entre Raymond VI de Toulouse, le légat Arnaud Amaury, et Simon IV de Montfort.
1215
8 janvier : le Concile de Montpellier attribue provisoirement les biens de Raymond VI de Toulouse à Simon IV de Montfort.
– Dominique de Guzman, futur « Saint Dominique », chargé par le pape d’extirper définitivement l’hérésie cathare, fonde l’Ordre des Dominicains.
– Toulouse accueille le premier contingent de frères prêcheurs, fondé par le futur saint Dominique.
– 11 novembre : ouverture du 4ème Concile de Latran.
– Appel du pape à la 5ème croisade vers l’Égypte (1217-1221).
– 30 novembre : clôture du 4ème Concile de Latran.
– 15 décembre : à l’issue du Concile de Latran, le pape Innocent III lègue définitivement le comté de Toulouse, le duché de Narbonne, les vicomtés de Carcassonne et de Béziers à Simon IV de Montfort. Le marquisat de Provence est donné à Raymond VII de Toulouse, le fils de Raymond VI de Toulouse.
1216
– 16 juin 1216 : à Pérouse, mort du pape Innocent III, Giovanni Lotario, Comte de Segni.
– Honorius III succède à Innocent III ; il s’engage à poursuivre l’œuvre de son prédécesseur dans la lutte contre l’hérésie cathare.
1218
– 25 juin : percuté par un projectile lancé par une pierrière actionnée par des femmes, Simon IV de Montfort décède aux pieds des remparts de Toulouse.
– 26 juin : Amaury de Montfort succède à son père à la tête des armées du Nord.
– A la demande du pape Honorius III, le futur Louis VIII, fils du roi Philippe Auguste, donne son aval pour continuer la croisade.
Honorius III
1221
– 6 août : mort de Dominique de Guzman (Saint Dominique).
1222
– 2 août : mort de Raymond VI de Toulouse ; son fils Raymond VII lui succède. Ce dernier va continuer de guerroyer contre les armées croisées d’Amaury de Montfort afin de récupérer son héritage. Il demandera au roi de France Philippe II, Auguste, de lui en accorder la légitimité.
1223
– 27 mars : mort de Raymond-Roger, Comte de Foix, allié du Comte de Toulouse.
– 3 avril : Roger-Bernard II, Comte de Foix, lui succède.
– 1er mai : le cardinal Conrad de Porto, légat du saint siège, sollicite le roi Philippe Auguste d’organiser un concile de l’épiscopat français, afin de juguler l’avancée de l’hérésie cathare.
– 2 juin : le cardinal Conrad de Porto demande par une missive à tous les prélats français de se réunir à Sens.
– juillet : réunion du Concile de Sens, pour mettre un terme à la Croisade des Albigeois.
– 14 juillet : mort du roi de France Philippe II, Auguste ; son fils Louis VIII monte sur le trône.
– 6 août : couronnement dans la cathédrale de Reims de Louis VIII.
1224
– 14 janvier : après avoir perdu presque toutes les conquêtes de son père, Amaury de Montfort finit par quitter le midi de la France pour toujours.
– Février : Amaury de Montfort cède ses droits en Occitanie au roi Louis VIII de France.
– Raimond II Trencavel, le fils du vaincu de 1209, rentre en possession de ses fiefs et terres et reprend la tête de Carcassonne.
– 3 juin : à Montpellier, le Comte de Toulouse Raymond VII et ses alliés, Roger-Bernard II, Comte de Foix, et Raimond II Trencavel, demandent au pape de reconnaître leur légitimité et leurs droits héréditaires sur les comtés de Toulouse, de Foix, et de Carcassonne. En retour, ils promettent de purger le Languedoc de l’hérésie cathare, et de restituer les biens pris au clergé.
– 25 août : le pape Honorius III accepte leur serment, et les certifie dans leurs fiefs.
1225
– Juin : avant de partir pour le Languedoc, le roi rédige son testament pour ses fils cadets. D’importantes concessions constituent l’apanage royal. Le partage se répartira comme suit : l’Artois ira à Robert de France, le Poitou et l’Auvergne à Alphonse de France, enfin l’Anjou et le Maine à Jean de France.
– 29 novembre : début du Concile de Bourges pour régler l’hérésie cathare. Raymond VII réitère sa requête auprès du pape. Mais ce dernier se heurte à Amaury de Montfort, qui fait valoir ses droits en Occitanie et espère voir ses possessions du comté de Toulouse récupérées par la couronne de France.
– Mort d’Arnaud Amaury à l’abbaye de Fontfroide.
1226
– 28 janvier : fin du Concile de Bourges. Raymond VII, n’ayant pas satisfait aux conditions imposées par le pape Honorius III, est excommunié.
– Louis VIII prend la croix contre les Albigeois.
– Avril : promulgation d’une ordonnance, la première en France, qui condamne les hérétiques à être suppliciés par le feu.
– 8 novembre : mort de Louis VIII le lion.
1227
– 18 mars : mort du pape Honorius III ; son neveu Grégoire IX lui succède.
– Le Concile de Narbonne confirme les excommunications de Raymond VI de Toulouse, du Comte de Foix Roger-Bernard II, et de Raimond II Trencavel.
Honorius III
(Rome ? – en 1227)Simon
NAISSANCE ET JEUNESSE
Cencio Savelli naît à Rome (date inconnue), et meurt à Rome le 18 mars 1227. Il prendra le nom d’Honorius III. Élu le 18 juillet 1216, intronisé le 24 juillet suivant, il occupera la fonction papale jusqu’en 1227, date de sa mort.
D’abord chanoine à l’église de Sainte-Marie-Majeure à Rome, Cencio Savelli accède en 1188 au titre de chambellan du pape, puis, en 1193, de cardinal-diacre de Santa Lucia in Silice.
Il sera aussi le trésorier de l’Église catholique sous les pontificats de Clément III et Célestin III.
En 1197, Cencio Savelli devient le protecteur du futur empereur Frédéric II. La garde de ce dernier avait été confiée à Innocent III par l’impératrice Constance.
Le 13 mars 1198, Innocent III le nomme Cardinal-prêtre, puis cardinal de Saints-Pierre-et-Paul.
Il est consacré pape à Pérouse le 24 juillet 1216.
CONTINUER L’ŒUVRE D’INNOCENT III
Honorius III lance la 5ème Croisade en terre sainte, laquelle avait été pressentie par Innocent III lors du Concile de Latran. Pour mener à bien le projet, il lève une contribution exceptionnelle (dîme), n’hésitant pas à solliciter les cardinaux et les évêques à participer et à donner suivant leurs revenus. Mais les fonds recueillis ne seront pas à la hauteur de ses espérances.
Le 9 avril 1217, il fait couronner Pierre Augustus II de Courtenay et Yolande de Hainaut empereur et impératrice de Constantinople.
En 1220, il couronne Frédéric IIde Hohenstaufen empereur des Romains. Ce dernier prête allégeance au Saint Siège, et promet de partir en croisade pour libérer la Terre Sainte.
Le départ de Frédéric IIde Hohenstaufen est prévu pour le 21 juin 1225, mais ce dernier temporisera et le retardera de deux ans. Honorius III mourra le 18 mars 1227 sans avoir vu ses projets de croisade aboutir. C’est son successeur Grégoire IX qui reprendra le flambeau.
8 septembre 1221 : la Chrétienté essuie un revers lors de la 5ème Croisade. Les soldats du Christ, encerclés devant Le Caire, doivent rétrocéder le port de Damiette pour pouvoir rembarquer.
LUTTER CONTRE L’HÉRÉSIE CATHARE
Dans le but de poursuivre l’action menée par son prédécesseur, Honorius III encouragera les Croisés à poursuivre la Croisade contre les Albigeois et sollicitera l’aide du roi de France Louis VIII.
Comme l’avait fait Innocent III en 1208, il soutiendra les actions des ordres mendiants tels que les Dominicains, les Carmes et les Franciscains, convaincu de leur efficacité en opposition à la violence des armées.
– 1217 : approbation pontificale de la création des Dominicains.
– 29 novembre 1223 : approbation pontificale de la création des Franciscains (bulle du pape « Solet annuere »).
– 30 janvier 1226 : approbation pontificale de la création des Carmes (bulle du pape « Ut vivendi normam »).
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[…] HONNORIUS III […]