La Croisade des Albigeois – Pierre II d’Aragon
La croisade des Albigeois
(1208-1244)
Pierre II d’Aragon
(1174-1213)
GRANDES FIGURES DE LA CROISADE DES ALBIGEOIS
Albigeois : nom donné au 12ème siècle aux cathares du Languedoc
PROLOGUE
LE CATHARISME,UNE MENACE POUR L’ÉGLISE ET POUR LE ROI
Vers le milieu du 12ème siècle, alors que l’Europe est dominée par une profonde et ardente foi catholique, le Midi toulousain est gagné par une hérésie toute aussi enflammée, le Catharisme. Cette nouvelle religion, qui apparaît vers le 12ème siècle dans les Balkans, s’appuie essentiellement sur une dualité. Ses disciples, « les Parfaits », croient en deux principes divins opposés : d’une part un monde spirituel avec un Dieu bon, celui de l’Évangile, et de l’autre un monde matériel et corrompu avec un prince du mal et des ténèbres, Dieu de l’Ancien Testament. Les valeurs morales et l’austérité de ses adeptes contrastent avec l’opulence et le relâchement des représentants de l’Église catholique. Les cathares rejettent les sacrements, les indulgences, le purgatoire et le culte des saints. Ils ne glorifient point le sacrifice de la croix, et ne reconnaissent pas le pape comme le successeur légal des apôtres. Refusant le concept de propriété et condamnant le serment, ils sont considérés comme subversifs par la société féodale et par la royauté. Les fondations du christianisme vont chanceler, au point de décider le pape Innocent III à déclarer les « Bons Hommes » et les « Bonnes Dames » hérétiques.
En France, lorsque les croyances cathares apparaissent, la chrétienté est partagée au sein de l’Église, et une grande divergence d’idées demeure entre les Français du Nord et les gens du Midi. Alors que ceux du Nord admettent la foi catholique romaine, dans les régions du Sud l’on a adopté l’« arianisme » depuis les premières heures du christianisme. Cette disparité va opposer le Languedoc à l’autorité de Rome, et faire de lui un foyer où les hérésies et les schismes vont se développer sans contrainte.
L’ÉTINCELLE
C’est vers le début du 13ème siècle, en 1204, que le pape Innocent III demande au roi Philippe Auguste (Philippe II) de mener une croisade contre les hérétiques cathares du Languedoc. Pour mener à bien la lutte contre cette nouvelle religion qui fait vaciller les dogmes de l’église catholique, le pape nomme dans cette région les légats apostoliques, Pierre de Castelnau et Arnaud Amaury. Le sud de la France va alors s’embraser dans une guerre fratricide, qui opposera ses habitants et ses seigneurs aux forces de l’Église Catholique qui ont pris la Croix. Plus connue sous le nom de Croisade des Albigeois, cette guerre dévastera le midi et durera plus de 30 ans. La région sera dévastée, pillée et ruinée. Les années de destructions et de combats vont plonger le pays dans la famine et l’appauvrissement. Avec autant de morts et de désolation, peut-on parler de génocide ? Même de nos jours, il est difficile de faire ressortir un véritable coupable de cette triste page de notre histoire.
PREMIER APPEL A LA CROISADE
L’expédition porte officiellement le nom d’«Affaire de la Paix et de la Foi» (en latin, negotium pacis et fidei).
Innocent III promet les mêmes indulgences que pour un pèlerinage à Jérusalem. Philippe II refuse la proposition ; il est trop occupé dans son combat avec les Plantagenêts et ne prend pas part à la croisade contre l’hérésie cathare. Il préfère se tenir en retrait, ne voulant pas écorner son image en guerroyant contre des gens qui sont ses sujets. Il n’est pas d’accord avec le pape qui s’apprête à s’investir dans une affaire intérieure au pays, et il le lui fait savoir. Mais il accorde néanmoins sa bénédiction à ses vassaux et ne s’oppose pas à ce que l’abbé Guy des Vaux-de-Cernay recrute parmi les barons du nord.
Le légat pontifical Pierre de Castelnau essaie alors de se tourner vers Raymond VI de Toulouse, afin que celui-ci prenne la tête d’une force armée destinée à soumettre l’hérésie cathare. Mais le comte de Toulouse, descendant du notoire Raymond IV de Saint-Gilles, chef de la Première Croisade en terre sainte, réfute l’offre du pape, arguant qu’il ne veut pas combattre ses propres sujets. Jugé trop complaisant envers les ennemis de l’Église, il sera excommunié. Fait inédit dans l’Histoire, pour la première fois une croisade est dirigée contre des disciples du Christ. Cet événement ne semble pas troubler les contemporains de cette époque ; il est vrai que l’hérésie cathare ne peut être tolérée.
Le choix d’Innocent III va se porter sur Simon de Montfort, un petit seigneur d’Île-de-France. Ce dernier va mettre le Languedoc à feu et à sang.
LES CROISES SUR LES ROUTES DU LANGUEDOC
CHRONOLOGIE
QUELQUES DATES:
– 5 février 1205 : Folquet de Marseille (1155-1231) devient évêque de Toulouse.
– 1206 : Dominique de Guzman, futur « Saint Dominique », (1170 à Caleruega, non loin de Silos en Castille, Rome le 6 août 1221) s’établit à Notre-Dame de Prouilhe, à Fangeaux, dont il devient le curé en 1214. Il ouvrira un refuge destiné à recevoir les femmes cathares après leur conversion.
1207
– Printemps 1207 : lors d’une rencontre avec des Cathares, Dominique parvient à les convertir.
– 29 mai 1207 : Accusé d’être complaisant à l’égard des Cathares, Raymond VI de Toulouse est excommunié par Pierre de Castelnau, légat du pape Innocent III, et l’interdit est jeté sur ses terres.
– mai 1207 : Innocent III confirme par lettre la sentence d’excommunication de Raymond VI de Toulouse.
LA CROISADE DES BARONS DU NORD
1208
– janvier : Raymond VI requiert vainement le pardon de l’Église.
– 14 janvier : alors qu’il traverse le Rhône près de Saint-Gilles à Trinquetailles, le légat Pierre de Castelnau est assassiné par un homme à la solde du comte de Toulouse. Cet événement est considéré comme le déclencheur de la Croisade des Albigeois.
Le 10 mars, Pierre de Castelnau est canonisé. (Bulle d’Innocent III contre les assassins de Pierre de Castelnau). Toutes les tentatives du pape pour ramener les hérétiques au sein de l’Église catholique ont échoué. A la cour de France comme à Rome, on est décidé à mettre un terme aux ambitions d’indépendance du Languedoc.
Le choix d’Innocent III va se porter sur Simon de Montfort, un petit seigneur d’Île-de-France. Ce dernier va mettre le Languedoc à feu et à sang…
1209
– Au printemps : le cœur de l’armée croisée se réunit à Lyon. Tandis que le gros des troupes se forme, Arnaud Amaury prend le commandement de l’expédition.
– 18 juin : acte de soumission de Raymond VI à l’Église ; il est publiquement flagellé et humilié à Saint-Gilles. Nonobstant, il rejoint la croisade et prend la croix.
– 22 juin : afin de protéger ses terres de la convoitise des barons du Nord, Raymond VI se joint à l’armée croisée, et ne peut donc pas être attaqué.
– 22 juillet : prise de Béziers ; la population est massacrée. On dénombrera entre 20 000 et 30 000 morts.
– 1er août : début du siège de Carcassonne. Tentative de médiation, sans succès, de Pierre d’Aragon entre Raimond-Roger Trencavel et les croisés d’Arnaud Amaury.
– 15 août : capitulation de Carcassonne privée d’eau. Raimond-Roger Trencavel est fait prisonnier et enfermé dans une de ses propres basses-fosses.
– fin août : à l’instigation d’Arnaud Amaury, Simon de Montfort prend la tête de la croisade. Il devient le nouveau vicomte de Carcassonne, Béziers, Albi et Razès.
– En automne : la « quarantaine » (service militaire obligatoire de 40 jours) s’achève pour un grand nombre de croisés et les rangs de l’armée du Christ se disséminent. La résistance occitane en profite pour se réorganiser. Les « faydits » désertent leurs bastions, devenus vulnérables, pour gagner les forteresses de montagne difficiles à investir.
Lors de la croisade des Albigeois, les « Faydits » étaient des chevaliers et des seigneurs du Languedoc qui avaient été dépossédés de leurs biens, fiefs et terres par les soldats croisés. Ils se rallièrent à la résistance occitane et luttèrent contre les armées venues du Nord.
– Fin octobre : rencontre entre Pierre d’Aragon et Simon de Montfort.
– 10 novembre : Raymond-Roger Trencavel meurt au fond de son cachot, probablement de soif et de dysenterie (Simon de Montfort sera accusé plus tard de l’avoir fait empoisonner).
1210
– Septembre : nouvelle excommunication de Raymond VI.
1211
CONCILE DE MONTPELLIER
En 1211, le concile se réunit à Montpellier pour statuer sur le cas du comte de Toulouse. Bien que Raymond VI se soit rallié à la croisade, les faveurs du synode ne penchent toujours pas de son côté. L’assemblée, réunie pour la circonstance, maintient donc sa sentence d’excommunication envers lui. Cette décision est assortie d’une charte qui devra être respectée point par point par le comte de Toulouse et ses descendants.
– Pierre II d’Aragon tente de négocier la paix entre Raymond VI de Toulouse, le légat Arnaud Amaury et Simon IV de Montfort.
1213
– Janvier : le pape Innocent III suspend les hostilités ; une trêve est instaurée à l’initiative de Pierre II d’Aragon.
– 21 janvier : Pierre II d’Aragon se déclare protecteur de son beau-frère, le comte de Toulouse.
– mai : fin de la trêve. Le fils de Philippe Auguste,Louis, futur Louis VIII, prend la croix ; la croisade reprend.
– 12 septembre : bataille de Muret (Haute Garonne).
Victoire des troupes croisées de Simon IV de Montfort, sur celles de Pierre II d’Aragon le catholique, du comte de Toulouse Raymond VI, de Raymond Roger comte de Foix, et de Bernard IV de Comminges. Le roi d’Aragon, Pierre II, perdra la vie lors du combat.
En sortant victorieux de la bataille de Muret, Simon IV de Montfort annonce les débuts de la domination française sur l’Occitanie, et la fin des prétentions territoriales de la couronne d’Aragon au nord.
PIERRE II d’ARAGON
(1174-1213)
« Le Catholique »
NAISSANCE ET FAMILLE
Pierre II d’Aragon, dit « le Catholique », naît vers 1174-1176 probablement à Huesca, et meurt le 14 septembre 1213 à la bataille de Muret, lors de la Croisade contre les Albigeois. Issu de la Maison de Barcelone, il est le fils d’Alphonse II et de Sancha de Castille. A la mort de son père en 1196, il lui succède et devient roi d’Aragon de 1196 jusqu’à sa mort en 1213.
DYNASTIE :
Maison de Barcelone.
TITRES :
– Roi d’Aragon (1195-1213).
– Comte de Barcelone, de Gérone, d’Osona, de Cerdagne, de Besalú, et de Pallars Jussà, de Roussillon et Comte de Provence (1195-1213).
– Comte de Ribagorce et de Gévaudan (1196-1213).
– Seigneur de Montpellier (1204-1213).
MARIAGE ET DESCENDANCE
En 1204, par son mariage avec Marie de Montpellier, Pierre assoit son pouvoir sur la seigneurie de Montpellier. De cette union naît en 1208 un fils, Jacques 1er d’Aragon, dit « le Conquérant ».
SON RÈGNE ET SON ACTION
EN ESPAGNE
En 1201, il crée l’Ordre militaire des chevaliers de Saint-Georges d’Alfama, dans la région de Tortosa. Une position stratégique afin de sauvegarder les côtes catalanes contre les pirates musulmans.
En 1204, il se fait couronner par le pape Innocent III, et s’affirme comme son vassal.
En 1204, Pierre le Catholique renforce son alliance avec le roi de Castille, Alphonse VIII. Les deux rois, réunis à Campillo, près de Tarazona, y délimiteront la frontière entre les deux royaumes. Fidèle aux accords, le roi d’Aragon apporte une aide substantielle au souverain de Castille dans sa lutte contre la Navarre et contre les musulmans.
Pierre le Catholique combat ces derniers et étend son autorité à toute la Catalogne. Il reprend des villes comme Mora de Rubielos (1198), Manzanera (1202), Rubielos de Mora (1203) et Camarena (1205).
En 1210, lors de la guerre contre le royaume de Valence, il s’empare d’El Cuervo, Castielfabib et Ademuz, dans la région du nord.
16 juillet 1212 : bataille deLa Navas de Tolosa.
En 1212, à la grande satisfaction du pape, il vainc les Maures d’Espagne à La Navas de Tolosa. Lors de cette bataille, Pierre II d’Aragon est allié avec les rois Alphonse VIII de Castille et Sanche VI de Navarre. Ce jour-là, les Almohades essuient une lourde défaite.
DANS LE LANGUEDOC
L’année suivante, le voilà sur les routes du Languedoc pour porter secours au Comte de Toulouse. Pierre II d’Aragon veut stopper la guerre de conquête des armées croisées venues du Nord, guerre menée d’une main de fer par Simon de Montfort. C’est le 14 septembre 1213 qu’il est tué, lors de la bataille de Muret, alors qu’il guerroie aux côtés de son beau-frère Raymond VI. L’Histoire retiendra que c’est un chevalier originaire de l’Artois, Alain de Renty, qui a porté le coup d’épée fatal au roi d’Aragon.
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