Les Témoins du Passé – L’abbaye de Boscodon

LES TÉMOINS DU PASSÉ

L’ABBAYE DE BOSCODON

Blason de la ville de Crots

 

Blason des Hautes-Alpes

STYLE : roman.

CULTE : catholique.

TYPE : abbaye.

ORDRE : cistercien.

DÉBUT DE CONSTRUCTION : 1142.

PÉRIODES DE CONSTRUCTION : 12ème, 17ème, et 18ème siècles.

PROTECTION : l’abbaye est classée Monument Historique en 1989 et 1999.

 

En 1974, les parties des bâtiments acquises par l’«Association des Amis de l’Abbaye de Boscodon » sont classées au titre de la loi du 31 décembre 1913 sur les monuments historiques, permettant les débuts des restaurations.

Éléments protégés : l’église, le logis prieural, le cloître, le cellier, le bâtiment conventuel et l’écurie (fiche Mérimée source Monumentum).

PROPRIÉTAIRES : Association des Amis de l’Abbaye de Boscodon et l’Etat (ministère chargé de la culture).

Blason des Hautes-Alpes

 

 SITUATION

L’abbaye de Boscodon est située sur la commune de Crots, proche d’Embrun et du Lac de Serre-Ponçon, dans le département des Hautes-Alpes.

L’ABBAYE DE BOSCODON

LES ORIGINES DE L’ASCÉTISME

En Égypte, dès le 3ème siècle, des Chrétiens s’isolent dans le désert pour mener une vie d’ascèse, de prière et de pauvreté : ce sont les premiers moines. Quelques-uns se regroupent et s’organisent en petites communautés régies par une règle.

L’ascèse ou ascétisme (nom féminin) est une contrainte consentie du corps et de l’esprit ayant pour but d’atteindre une perfection. L’ascèse est généralement rattachée à diverses religions, mais sa pratique n’est pas limitée à celles-ci.

À l’origine du terme « ascèse », le mot grec askêsis, signifiant « exercice » ou « entraînement », s’appliquait à de nombreuses activités, notamment à l’athlétisme. Sa définition était alors exclusivement physique.

Au 5ème siècle apparaît, à travers le latin, le mot asceta ou asceteria, signifiant « moine-religieuse », « monastère-couvent ». C’est ainsi que naît le mot moderne d’ascèse.

Parmi les disciplines de l’ascèse, quelques-unes s’appuient sur la privation pour atteindre une maîtrise spirituelle (comme la mortification et l’abstinence sexuelle). En outre, certaines règles de vie alimentaires se rajoutent à la pratique, comme le jeûne et l’absence de consommation de drogue et d’alcool.

Cette tradition apparaît en Occident au 4ème siècle. Dès lors, la plupart des Ordres monastiques s’installent dans des endroits retirés. Les moines y trouvent le silence propice à la prière et les terrains agricoles qui, une fois cultivés, permettront à la communauté de survivre.

Cependant, au fil du temps, certaines abbayes, comme celles des Clunisiens, vont s’enrichir grâce aux dons des fidèles.

L’ordre de Cluny (ou ordre clunisien) était un ordre monastique de l’Église catholique créé au 10ème siècle et supprimé à la fin du 13ème siècle. Cet ordre suivait la règle de Saint Benoît. Au début du 10ème siècle, une profonde volonté de réformer l’ordre monastique voyait le jour au sein de l’église catholique. Cette réforme prit pour modèle la règle de Saint Benoit. Celle-là même qui prône l’humilité, l’obéissance, la pauvreté, et le juste équilibre entre le travail et la prière. L’Ordre Bénédictin va régir dans ses moindres détails la vie monastique.

Au 12ème siècle, des moines prônant un retour au dépouillement monastique originel vont s’éloigner le plus possible du monde, notamment en montagne, comme à Chalais ou à Boscodon.

Blason de la ville de Crots

 

LA SOCIÉTÉ AU MOYEN AGE

Moyen Age : longue période qui s’étend du 5ème au 15ème siècle.

La société se répartit alors en 3 ordres bien distincts :

Ceux qui prient (le clergé séculier et régulier), ceux qui combattent (chevaliers et seigneurs qui assurent le maintien de la paix) et ceux qui travaillent (paysans, artisans, commerçants…).

Les moines font partie du clergé régulier, car ils vivent selon une règle. Depuis le 6ème siècle la plupart des monastère d’Europe suivent celle de Saint Benoît.

Vers l’An Mil, l’Occident chrétien connaît un essor religieux sans aucune mesure ; de nouveaux ordres monastiques voient le jour.

A l’abbaye de Boscodon, les moines appartiennent à l’Ordre de Chalais (fondé en 1101 près de Grenoble).

PRÉSENTATION

LE CLIN D’ŒIL…

La vie des moines dans leurs ateliers : On trouve des moulins à eau dans tous les grands monastères. Le premier moulin à vent répertorié en Normandie est édifié sur les terres d’une abbaye. Les moines produisent donc leur farine et font leur propre pain ; ils produisent aussi de l’huile s’ils possèdent des oliviers (comme dans le midi). Dans certaines abbayes on façonne des cuirs, des parchemins, du drap, des tissus, des tapisseries, du verre, des vitraux, des briques ou des tuiles pour ériger les bâtiments. S’ils trouvent du fer, les religieux se transforment en forgerons. Si leurs terres produisent du charbon ou des mines de sel, ils se font mineurs.

Les moines vivent en autarcie. C’est-à-dire que par leur travail, ils peuvent suffirent à tous leurs besoins et vivre seulement de leurs propres ressources. L’abbaye doit donc pouvoir produire tout le nécessaire pour leur subsistance.

Ils possèdent l’eau grâce aux torrents, le bois et la pierre pour construire, un verger, un potager, un jardin de plantes médicinales, des champs de céréales, une forge, un four, un moulin à eau…Les moines sont aussi bergers et élèvent des moutons. Enfin ils exploitent le bois de la forêt, un produit qui se négocie très cher et dont la demande est sans cesse croissante en Occident. Certes les moines travaillent, mais ils font travailler aussi des paysans et des serfs vivant sur leurs domaines. Cette main d’œuvre supplétive leur permet de dégager du temps pour la prière.

LA COULE

La coule, aussi appelée cuculle (du latin cucullus), est un vêtement à capuchon (tunique ample et longue), porté par les moines. Utilisé à l’origine pour les travaux des champs, il devient par la suite un habit monastique. Il ne s’agit en aucun cas d’un ornement liturgique. La coule est noire pour les Bénédictins et blanche pour les Cisterciens.

Chaque moine dispose de deux coules, une chaude pour l’hiver et une plus légère pour les saisons plus chaudes. Sous la coule, ils portent une robe, un scapulaire (sorte de tablier) pour travailler, des bas et des chaussures. Lorsque les vêtements sont usés, le moine doit les rendre pour qu’ils soient distribués aux pauvres.

LE CADRE

En 1130, Boscodon n’est qu’un lieu-dit sur une hauteur boisée dominant la vallée de l’Infernet, dont elle tire son nom : Boscodunum, de bosc (bois), et dunum (hauteur). Cette région fort austère dépend du seigneur Guillaume de Montmirail (un vassal du Comte de Forcalquier et de l’Archevêque d’Embrun). Ceux-ci sont eux-mêmes vassaux de l’Empereur du Saint Empire Romain Germanique.

Le seigneur Guillaume de Montmirail habite une motte féodale (ou motte castrale) surplombant la Durance. Son domaine s’étale des sources de Nathon au Nord jusqu’à la Durance au Sud, et d’Est en Ouest de l’Infernet au Barnafret, sur la commune actuelle de Savines-le-Lac. Sur cette terre, bordée par trois torrents, il exploite le bois de la forêt et élève des moutons.

Une motte castrale, souvent appelée « motte féodale », est un type particulier de fortification de terre largement utilisé au Moyen Âge. Elle se compose d’un remblai de terre rapportée volumineux et circulaire, que l’on nomme le tertre.

UNE HISTOIRE MOUVEMENTÉE !

Aux 12ème et 13ème siècles, l’abbaye est tout d’abord affiliée à l’Ordre de Chalais en Chartreuse (obédience proche de l’Ordre Cistercien), puis à l’Ordre bénédictin. Boscodon connaît une histoire mouvementée, notamment due aux différentes spiritualités et propriétaires successifs. En 1770, l’abbaye est sécularisée, et devient un hameau rural pour être finalement vendue à des particuliers après la Révolution.

Depuis 1972, Boscodon ressuscite grâce à l’action simultanée d’une association reconnue d’utilité publique (l’Association des Amis de l’Abbaye de Boscodon), d’une communauté religieuse (la communauté Saint Dominique), et de nombreux partenaires publics et privés, spécialement la Direction régionale des affaires culturelles (DRAC) et le Conseil départemental des Hautes-Alpes.

Blason de la ville de Crots

HISTORIQUE

1130, PREMIÈRE DONATION : L’ARRIVÉE DES ERMITES.

L’abbaye monastique est fondée en 1132 grâce aux donations du seigneur Guillaume de Montmirail.

L’Archevêque d’Embrun, qui ne possède pas d’abbaye dans son diocèse, sollicite résolument Guillaume de Montmirail afin que celui-ci fasse donation d’une partie de ses terres à « des Clercs et laïcs désirant servir Dieu en suivant la règle de Saint Basile ou Saint Benoît ».

Vers le milieu du 12ème siècle, l’Europe est dominée par une profonde et ardente foi catholique. Dans le contexte chrétien de cette époque, les deux seigneurs estiment qu’il va de leur intérêt d’accomplir un tel geste « pour le salut de leur âme et celles de leurs parents »

Des anachorètes conduits par Guillaume de Lyonne arrivent alors d’Oulx (Val de Suze, près de Turin) afin de fonder une maison autonome destinée à la prière. Cette dernière est placée sous l’autorité de l’archevêque d’Embrun. La petite communauté s’installe autour d’une chapelle, « Saint-Marcellin », probablement déjà existante. Cette congrégation d’ermites prend son essor, puisqu’elle fonde assez rapidement un prieuré au Laverq en Ubaye, et hérite d’une vigne à Remolon, en aval sur la Durance.

Ermite ou Anachorète : « qui s’est retiré du monde ». C’est une personne qui s’est volontairement soustraite de la société temporelle pour des raisons religieuses, afin de suivre une vie basée sur l’austérité, la rigueur et la pénitence. Les anachorètes sont des ermites qui vouent leur existence à la spiritualité, à la prière et à l’Eucharistie.

Blason de la ville de Crots

 

1142, DEUXIÈME DONATION : PÉRIODE CHALAISIENNE.

Du 11ème au 12ème siècle, l’Occident connaît un grand renouveau monastique. L’Archevêque d’Embrun, soucieux de pérenniser la postérité de sa fondation, veut en outre combattre les foyers hérétiques de son diocèse. Or l’abbaye primitive existante est insuffisante pour assoir les ambitions du prélat. Il devient vital de rattacher Boscodon à une congrégation monastique de valeur sure. Il se tourne alors vers l’abbaye de Chalais (née en 1101 sur le versant Sud du massif de la Chartreuse près de Grenoble), et propose une fusion.

Vers 1140, un groupe de moines envoyé par l’abbé de Chalais prend la route pour Boscodon et rejoint les ermites déjà installés.

Le 23 mars 1142, Guillaume de Montmirail, satisfait de cette décision, garantit la donation du domaine de Boscodon, mais au bénéfice seul de l’Ordre chalaisien.

L’archevêque d’Embrun, lui, devra « faire contre mauvaise fortune bon cœur », et accepter les demandes d’autonomie de la nouvelle communauté qui vient de voir le jour.

Après la fondation de Boscodon, l’essor de l’Ordre est très rapide (donation de Notre-Dame de Lure, créations des abbayes de Prads-Faillefeu, Clairecombe, Clausonne, et enfin Valbonne et Pierredon).

Cet important développement est essentiellement l’œuvre d’un homme exceptionnel : Guigues de Revel. Arrivé à Chalais en 1135, il est dépêché à Boscodon en 1142 pour en devenir l’abbé.

Cependant, aussi paradoxal que cela puisse paraître, Chalais éprouve d’énormes difficultés de trésorerie et aussi de recrutement.

Dès 1162, un projet de filiation avec l’abbaye cistercienne de Bonnevaux est envisagé ; la décision semble aboutir, mais le pape s’y oppose.

En 1190, c’est le début de l’exploitation de la forêt. Les moines vivent de la production du domaine, puis d’élevages ovins sur la draye provençale qui relie le Queyras à la plaine de la Crau.

En 1247, l’on essaie une nouvelle tentative de rapprochement, cette fois avec l’Ordre des Chartreux ; mais l’ensemble des abbayes de l’Ordre refusent.

D’autres tentatives de fusion subiront un échec (Saint-Chef en Dauphiné, et Saint Pierre de Vienne). L’évêque de Grenoble se tourne alors vers le pape.

Blason de la ville de Crots

 

1303 : BOSCODON RETROUVE SON AUTONOMIE…

En 1303, Chalais, maison-mère de Boscodon, est rattachée à l’Ordre des Chartreux. L’Ordre de Chalais est dissout.

L’Ordre des Chartreux (appelé aussi Ordre Cartusien) est un Ordre religieux contemplatif à vœux solennels. Fondé en 1084 par Saint Bruno et six de ses compagnons (quatre clercs et deux laïcs), il s’appuie sur une vie semi-érémitique (ermite, ou anachorète) de ses adeptes. Son nom est issu du massif de la Chartreuse, situé au nord de Grenoble, sur la commune de Saint-Pierre-de-Chartreuse dans l’Isère, où ils se sont installés à proximité de l’actuel monastère de la Grande Chartreuse.

Après la disparition de Chalais comme maison-mère, seules les abbayes de Boscodon et Clausonne demeurent un temps chalaisiennes, alors que les autres abbayes-filles se rattachent à d’autres congrégations. Boscodon retrouve son indépendance et devient chef d’ordre de Saint Benoît.

Afin qu’ils puissent affermir leur pouvoir religieux et leurs revenus, l’archevêque d’Embrun cède aux moines de Boscodon le prieuré de Sainte-Croix de Châteauroux (Châteauroux-les-Alpes) et ses domaines. De nombreux litiges, concernant les vignes de Chadenas et les pâturages du Morgon, naissent alors avec leurs voisins des Crottes, Embrun, et Pontis. Les nombreux procès qui vont s’ensuivre endetteront progressivement l’abbaye.

Blason de la ville de Crots

GUERRE DE CENT ANS.

Guerre de Cent Ans : conflit qui opposa la France et l’Angleterre de 1337 à 1453 (entrecoupé de nombreuses trêves).

En 1365, Boscodon est détruite et incendiée par des routiers provençaux, puis en 1392, par Raymond de Turenne (1352-1413).

A la fin du XIVème et au début du XVème siècle, les troubles causés par la Guerre de Cent Ans écrivent une page mouvementée de l’Histoire de la région. Durant les cycles de paix de cette guerre, des bandes armées, désœuvrées, en maraudes, vont arpenter les campagnes (lire : Mercenaires, routiers et écorcheurs au Moyen Âge). La région n’échappera pas au pillage : ces bandits de grands chemins la mettront à sac pour survivre.

Les stigmates de tous ces désastres peuvent se voir sur la façade Sud de l’église ; la pierre n’est plus ocre mais rouge : c’est la trace de cet incendie.

Toutes ces calamités ont ruiné l’abbaye, et rares sont les nouveaux moines à venir y vivre. Ceux qui restent se réfugient dans leur maison d’Embrun. Mais les moines retournent rapidement sur les lieux pour la reconstruire. Comme ils n’ont pas le droit de rester autonomes, ils se rapprochent des moines bénédictins sur ordre du pape.

Appauvrie par les incendies, harcelée par le chapitre d’Embrun qui lui réclame des redevances, l’abbaye se met en quête d’un protecteur.

En 1396, Jean de Polignac, nommé abbé de Boscodon par le pape, se tourne vers l’abbaye Saint-Michel de la Cluse, en Piémont. Boscodon peut désormais profiter des privilèges et libertés de Saint-Michel. Même si ce rapprochement est de courte durée, en 1407 l’abbaye devient bénédictine. Alors qu’ils portaient jusqu’à présent l’habit blanc des Chalaisiens, fondateurs de Boscodon, les moines doivent dorénavant porter l’habit noir des Bénédictins.

Mais l’archevêque d’Embrun ne peut tolérer une telle situation. Il dépose une réclamation au pape, qui, en 1431, publie une bulle lui restituant ses droits sur l’abbaye. Les moines qui n’obéissent pas sont excommuniés ; le prélat triomphe et l’abbaye est de nouveau seule face à son destin.

Isolée, Boscodon se cherche à nouveau un protecteur, et tente de se rapprocher des abbayes de Cluny et de l’Île-Barbe, situées au Nord de Lyon. Mais les relations avec le seigneur des Crottes (actuelle commune des Crots) sont tendues. Les habitants de la seigneurie s’octroient le droit de passage sur les terres de l’abbaye ; ce qui n’est pas du tout du goût des occupants de Boscodon. En outre, le refus des moines de s’acquitter de l’impôt (dîme) sur leur propriété de Chadenas, envenime les relations avec l’archevêque d’Embrun.

Dîme : ancien impôt versé à l’Église qui était prélevé sur les récoltes (de fraction variable, parfois le dixième).

Après ces quelques querelles de voisinage, les abbés successifs vont tour à tour parvenir à calmer les tensions avec leurs voisins.

Blason de la ville de Crots

 

LA RENAISSANCE

En 1474, Claude d’Arces, venu de l’Île-Barbe, entreprend une grande reconstruction.

De nouveaux bâtiments sont construits : la maison de l’abbé et la chapelle Saint-Firmin. La cuisine et le réfectoire sont rebâtis ; le dortoir est réaménagé avec des cellules individuelles. Le cellier de l’aile Ouest est transformé en logements pour les cinq moines chargés d’un office : le prieur, le camérier, le cellérier, le sacristain et le chantre.

DES ABBÉS COMMENDATAIRES

Le concordat de Bologne est signé à Rome le 18 août 1516, lors du Vème concile du Latran, entre le pape Léon X et le chancelier Antoine Duprat, qui représentait le roi de France François Ier. Il régit les relations entre l’Église catholique romaine et le roi de France jusqu’en 1790. Il donne au roi de France dans son royaume un pouvoir sur l’Église, privilège dont ne disposait aucun autre souverain catholique jusqu’alors.

Ce texte régit donc pendant trois siècles les relations entre le roi de France et le Saint Siège. Le roi obtient notamment le droit de nommer les évêques et les abbés. De la sorte, c’est lui qui va désigner un administrateur pour l’abbaye de Boscodon ; c’est le régime de la commende. L’abbé commendataire peut-être un moine (régulier), un prêtre (séculier), et même un laîc. Le nouveau gestionnaire n’est pas tenu de suivre la règle de l’Ordre ni de résider de manière permanente dans son abbaye.

La commende : c’est l’usufruit d’un monastère, d’une église ou d’un évêché accordé par le pape à un ecclésiastique ou à un laïc.

Blason de la ville de Crots

 

GUERRES DE RELIGION

Guerres de Religion : nom donné en France aux guerres qui opposèrent catholiques et protestants, dans la seconde moitié du 16ème siècle.

ABEL DE SAUTEREAU, L’HOMME PROVIDENTIEL

Dès le début, pour Boscodon, la mise en place de la commende s’avère difficile.

A partir de 1554, le roi applique en conformité les statuts du concordat de Bologne. Pour des raisons sans doute diplomatiques, il transmet la charge du monastère à des abbés italiens pour lesquels Boscodon ne signifie rien. Ces derniers abandonnent l’abbaye ; seuls deux moines sont présents au moment où les Guerres de Religion dévastent la Provence.

Dès 1562, les forces protestantes de Lesdiguières y affrontent les troupes catholiques.

En 1579, l’abbaye est de nouveau pillée, puis incendiée en 1585.

Pour se prémunir de telles catastrophes, le Concile de Trente (1545-1563) réaffirme l’obligation pour le clergé régulier d’être en conformité avec la règle. Il est vital de rétablir la clôture des couvents et de pratiquer une stricte sélection quant au choix des abbés. 

A Boscodon, Abel de Sautereau, nommé abbé commendataire depuis 1601, désire mettre cette règle en application. Il se contraint tout d’abord à résider à l’abbaye, et, par une réorientation ambitieuse, instaure une renaissance de la vie monacale. 

Il fait reconstruire le bâtiment : surélévation de l’aile des moines, réaménagement de l’abbatiale selon les règles liturgiques tridentines (jubé, stalles…).

En 1628, l’église sera reconsacrée. Sur le plan spirituel, Abel de Sautereau fera réinscrire dans l’esprit du Concile, une règle « de réformation » longue de 70 chapitres. Celle-ci sera appliquée en septembre 1621.

En outre, il s’évertuera à récupérer les biens spoliés par les habitants durant les Guerres de religion. Il accorde aux villageois un passage en bout du domaine, et érige un mur de clôture pour en définir les limites. Il est encore visible par endroits de nos jours.

En 1635, l’abbaye a retrouvé sa prospérité et la communauté compte au moins 12 moines.

Nonobstant, le désordre va revenir lorsqu’Abel de Sautereau signera à nouveau sa charge en 1642, en la cédant à son petit-neveu François qui n’est âgé que de 8 ans. Durant les 40 ans de son abbatiat, il n’habitera que très rarement à Boscodon.

Les ennuis perdureront avec l’abbatiat de son neveu Michel qui, lui, ne s’intéressera à l’abbaye que pour ses revenus. Cependant en 1692, la destruction de l’aile des officiers par le duc Amédée de Savoie, durant la guerre de la Ligue d’Augsbourg, l’obligera à entreprendre des travaux.

La Clôture : périmètre d’un monastère interdit aux laïcs où les religieux cohabitent renfermés, vivant en conformité suivant la règle de Saint Benoît.

Après la destruction de l’abbaye en 1692, il ne subsiste que quelques moines à Boscodon. L’abbé administre l’abbaye à distance et ne vient presque plus sur place. A cette époque-là, le roi désire mieux gérer les dépendances des religieux. En effet, certaines tombent en ruines alors que d’autres dépensent trop d’argent.

En 1779, l’abbaye étant jugée trop riche, l’archevêque d’Embrun obtient de Louis XV sa reprise en main et l’appropriation de ses biens par l’archevêché d’Embrun. L’abbaye est transformée en fermage : le cloître et l’aile des officiers sont détruits pour interdire tout retour des moines. L’abbatiale est utilisée pour entreposer le bois.

Blason de la ville de Crots

LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

La Révolution française désigne une période de bouleversements sociaux et politiques de grande importance en France, dans ses colonies et en Europe à la fin du XVIIIème siècle. Sa durée s’étend entre l’ouverture des États généraux, le 5 mai 1789, et au plus tard du coup d’État de Napoléon Bonaparte le 9 novembre 1799 (18 brumaire de l’an VIII).

Pendant la Révolution française, comme tous les biens de l’Église (bâtiments, objets, terres, mines, bois et forêt), Boscodon devient bien national. Le monastère est confisqué et revendu. En 1791, la forêt devient domaniale (370 ha de forêt ecclésiale sont nationalisés). Les bâtiments sont achetés par une famille, et de transmissions en transmissions, un noyau rural se développe.

Blason de la ville de Crots

PÉRIODE D’OCCUPATION PAYSANNE : BOSCODON DEVIENT UN HAMEAU

Les bâtisses se transforment et se divisent, changent d’usage (écurie, grange, habitation, école, etc.), et le site de Boscodon devient un hameau rural (« hameau Boscodon l’Abbaye »).

Blason de la ville de Crots

 

SECONDE GUERRE MONDIALE

Pendant la seconde guerre mondiale, le hameau et la forêt ont été un haut lieu de résistance. Un maquis voit le jour avec de jeunes gens qui refusent le STO (service du travail obligatoire en Allemagne).

LE HAMEAU AU XXème SIÈCLE

Une fois la guerre terminée, le hameau retrouve son aspect d’avant-guerre, celui de tous les villages isolés de montagne. Nombre de familles ruinées par la guerre sont pauvres et les conditions de vie très difficiles. Certains résistent et choisissent de rester dans le village, alors que d’autres préfèrent partir et tenter de trouver une vie meilleure autre part. En 1952, l’école ferme ; les élèves ne sont plus assez nombreux.

LA RECONSTRUCTION

PÉRIODE DOMINICAINE

En 1965, une poignée de prêtres du diocèse sollicite une aide pour Boscodon : il n’existe plus rien pour le recueillement et la méditation dans les Hautes-Alpes.

En février 1971, l’église de Chalais est restaurée en sept semaines. Les moines de Chalais se rendent à Boscodon afin d’examiner si éventuellement on peut y faire les mêmes travaux.

En 1971, l’évêque de Gap, les prêtres du département et le curé de Savines, poussent les religieux de Chalais à reprendre le site pour donner au département des Hautes-Alpes un lieu de ressourcement.

En 1972, la communauté de Chalais acquiert le site. Le hameau de Boscodon ne comptait alors plus que quatre habitants.

L’association des amis de l’abbaye est créée, afin de redonner à l’abbaye sa vocation originelle. Le site voit aussi l’installation d’une communauté de religieuses dominicaines.

Actuellement, dans le cadre de la Communauté Saint-Dominique, l’abbaye est habitée par des religieux catholiques (ce ne sont pas des moines). Constituée d’hommes et de femmes, elle assure le gardiennage et l’animation du site, et offre des offices et des messes dans l’église abbatiale. Cette communauté, créée dans les années 1990, est attestée par l’évêque de Gap.

Le site est alors récupéré par sœur Jeanne-Marie, aussi bien sur le plan spirituel que pour son réaménagement. Elle est assistée par l’illustre missionnaire des campagnes Isidore Dalla Nora et bien sûr par tous les bénévoles des « Amis de l’Association de Boscodon » : s’ensuivent 40 ans de rénovation et de reconstruction.

En 1974, l’abbaye de Boscodon est classée à l’inventaire des Monuments Historiques (le site avait été inscrit à l’inventaire quelques années auparavant).

De 1985 à 1994 : reconstruction de l’aile des officiers, qui sera inaugurée en 1995.

1996 : réorganisation du circuit de visite.

1997 : restauration des toitures.

2001 : réédification du clocher du beffroi (il avait été démonté en 1880) et réinstallation de sa cloche.

2004 : fin des réaménagements de la partie Sud de l’aile des Moines et de la Chapelle Saint-Marcellin.

2010 : inauguration du cloître, reconstruit suivant les plans d’origine.

Blason de la ville de Crots

BOSCODON

LES FAÇADES

L’ÉGLISE

L’ENTRÉE

LA NEF

LE MOBILIER & LES DÉCORATIONS

LE CLOÎTRE

LE JARDIN

LES FAÇADES INTÉRIEURES DU CLOÎTRE

LE LAVABO

LES GALERIES

LES COLONNES & CHAPITEAUX

L’ANCIEN RÉFECTOIRE – MUSÉE DE L’ŒUVRE

L’ARMARIUM

Dans l’architecture cistercienne ancienne, l’armarium est une pièce de petite dimension se situant entre l’église abbatiale et la salle capitulaire, et débouchant directement dans le cloître. Elle abritait les manuscrits et les livres d’usages liturgique, usuellement utilisés par les moines. L’armarium possédait souvent un placard extérieur de rangement, à proximité de la porte d’entrée de l’abbatiale.

 LA SALLE DU CHAPITRE OU SALLE CAPITULAIRE

C’est la salle où se réunit chaque jour la communauté religieuse du monastère. Autour de son abbé, chacun écoute un chapitre de la règle de Saint-Benoît ; celle-ci en compte soixante-treize. C’est le seul endroit où il est autorisé de parler. C’est dans ce lieu que les moines prennent des décisions concernant la communauté. C’est ici aussi que se font les prises d’habits, les professions monacales et l’élection du Père Abbé. Les religieux prennent place sur des gradins, le Père Abbé au centre de la pièce. Les lieux sont propices à l’écoute, car l’acoustique y est excellente grâce aux nervures de pierre de la voûte d’arête. On peut ainsi y parler sans effort…

 LA SALLE DU CHAUFFOIR ET ANCIENNE CUISINE

C’est la seule pièce chauffée du monastère, excepté la cuisine. Cette salle, où les moines se rendaient pour travailler, servait de « scriptorium », lieu où s’effectuaient la copie de manuscrits et les travaux de couture. L’hiver, on y déposait les encriers afin que l’encre ne gèle pas. Le cellier était souvent situé sous le chauffoir et servait de lieu de réserve et de stockage pour les provisions.

Sources : cet article repose en grande partie sur les détails et les explications affichés à l’intérieur de la salle du chauffoir et de l’ancienne cuisine de l’abbaye de Boscodon, à l’intention du public.

Blason de la ville de Crots

Donnez votre avis sur l'article

commentaire(s)

Ecrit par le .

Vous aimerez aussi...

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

CommentLuv badge