La bataille d’Essling | Du 20 au 22 mai 1809

naigleLa bataille d’Essling

 (Du 20 au 22 mai 1809)

 

« Le sot a un avantage sur l’homme d’esprit : il est toujours content de lui-même ».

Napoléon Bonaparte

 

la bataille d’Essling par Fernand Cormon

la bataille d’Essling par Fernand Cormon


Campagne d’Allemagne et d’Autriche

 

Bataille de la cinquième coalition

Situation

La bataille d’Essling, appelée aussi bataille d’Aspern ou Aspern-Essling, s’est déroulée du 20 au 22 mai 1809, au nord de la Lobau, dans une région marécageuse près de Vienne (Autriche).


Forces en présence

Le combat oppose les forces armées de l’Empire français à celles de l’Empire autrichien.

Pour les Français : 60 000 hommes, sous les ordres de l’Empereur Napoléon 1er et du maréchal Jean Lannes, qui sera blessé au combat le 22 et mourra des suites de ses blessures le 31 mai.

Pour les Autrichiens : 100 000 hommes commandés par l’archiduc Charles Louis d’Autriche, duc de Teschen.

Jean Lannes

Jean Lannes


Contexte

L’Autriche, encouragée par l’Angleterre, veut profiter du revers désastreux des armées françaises, empêtrées en Espagne, où elles n’arrivent pas à vaincre. Napoléon a rassemblé en Allemagne une puissante armée coalisée avec ses alliés de la toute nouvelle Confédération du Rhin. Il bat les Autrichiens, successivement le 19 avril à Teugen-Hausen (appelée aussi Tengen), le 20 avril à Abensberg, le 21 à Landshut, et le 22 à Eckmühl ; il oblige ainsi l’archiduc Charles à refranchir le Danube à Ratisbonne.

12 mai : prise de Vienne. Napoléon prend ses quartiers au palais de Schönbrunn.

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Palais Shönbrunn Vienne

13 mai : Vienne capitule.

Bien que chassée au-delà du fleuve, l’Autriche, qui dispose encore d’une force armée puissante, refuse de faire la paix et veut continuer à en découdre avec l’Empereur des Français.

Napoléon sait que le temps lui est compté. Il doit faire vite et empêcher l’archiduc Jean (Jean-Baptiste Joseph Fabien Sébastien d’Autriche), qui a été refoulé d’Italie par le prince Eugène de Beauharnais, et Macdonald (Étienne Jacques Joseph Alexandre Macdonald), de faire la jonction avec son frère, l’archiduc Charles Louis d’Autriche.


Déroulement

 

Erzherzog_Johann

L’archiduc Jean

Pour cela, l’Empereur des Français se doit d’obtenir une victoire nette et décisive. Il entreprend de traverser le Danube et d’attaquer l’armée autrichienne, qui se trouve installée en bon ordre à Bisamberg, une hauteur sur la rive gauche du fleuve près de Vienne. Les ponts ayant tous été détruits par l’archiduc Charles Louis d’Autriche, son choix va se porter sur Lobau, une des nombreuses îles qui scindent le grand fleuve en une multitude de cours d’eau secondaires. C’est un endroit judicieux et les dimensions de l’île sont assez importantes pour y cacher toute une armée.

Le temps presse, et l’armée se lance dans la hâte dans la construction des ponts. L’objectif est de prendre de vitesse l’ennemi. Cette nécessité va pousser Napoléon à prendre de gros risques, jusqu’à ignorer volontairement la puissance du grand fleuve. Dans la nuit du 19 au 20 mai, deux ponts de bateaux sont jetés sur le plus important bras du Danube. En même temps, les troupes du maréchal André Masséna (4ème corps) et la cavalerie de Jean-Baptiste Bessières traversent et prennent pied sur l’île de Lobau. Jean Lannes est, lui, retardé par des avaries causées sur les ponts et ne peut les franchir. Le 21 mai, à l’aube, 40 000 hommes se sont rassemblés sur la rive gauche du fleuve. Entre les deux villages d’Aspern, tenu par la division Molitor, et d’Essling occupé par la division Boudet, se déploient la cavalerie du maréchal Jean-Baptiste Bessières et celle du général Charles Louis de Lasalle.

Pensant avoir consolidé et stabilisé leur tête de pont, ces derniers n’ont aucune idée de l’importance des troupes ennemies qui leur font face ; le franchissement du fleuve continue. Les ponts, construits dans l’urgence, sont de plus en plus fragilisés par le fort courant du fleuve, par le passage ininterrompu des troupes durant toute la journée et toute la nuit, et par la crue. En outre, en amont, les Autrichiens s’évertuent à jeter dans l’eau un nombre considérable d’objets flottants, dans le but avoué de percuter et de déstabiliser les précaires constructions.

L’archiduc Charles d’Autriche observe attentivement. Il attend le moment où les Français seront en quantité suffisante pour être attaqués, mais trop peu nombreux pour se défendre. Il espère ainsi empêcher le reste de l’armée française, qui n’a pas encore traversé, de venir prêter main forte aux troupes qui seront déjà engagées dans la bataille.


21 mai, Le 1er jour de la bataille

Aspern

A la mi-journée, l’archiduc Charles, à la tête d’une armée de forte de 90 000 hommes, exécute son plan d’attaque. Trois colonnes, sous les ordres de Johann von Hiller, Heinrich-Johann de Bellegarde et Friedrich Franz Xaver von Hohenzollern-Hechingen, s’élancent à l’assaut du village d’Aspern. Les 130 canons  de son artillerie écrasent les positions françaises de la division du général Gabriel Jean Joseph Molitor. Cette dernière, commandée par André Masséna, contient les assauts de l’ennemi et résiste.

Lorsque la nuit tombe, les Autrichiens ne sont pas arrivés à s’emparer de la totalité du village ; celui-ci est toujours tenu par les troupes de Masséna. C’est alors que Napoléon envoie sa cavalerie, qu’il tenait au centre de son dispositif. L’objectif est de charger l’artillerie ennemie qui s’étend en longueur sur la ligne de front, et qui pilonne Aspern.

La charge des cuirassiers parvient à la fois à déloger les servants des canons, déborder les lignes des fantassins de Friedrich Franz Xaver von Hohenzollern-Hechingen, et combattre la cavalerie du Lichtenstein. Très vite, les cavaliers lourds vont se trouver dans une position très délicate et vont devoir rebrousser chemin. Les combats autour du cimetière font l’objet d’une lutte sans merci entre les deux belligérants. Ces actions sont coûteuses en hommes mais permettent de gagner un temps précieux, alors que de nouvelles divisions traversent le fleuve.

Essling

 

Plan de la bataille d’Essling

Plan de la bataille d’Essling

Dans le même temps, comme à Aspern, le village d’Essling est le théâtre d’affrontements tout aussi acharnés. Les charges des cuirassiers français se lancent contre les forces de Rosenberg dans des assauts désespérés. C’est la tombée de la nuit qui mettra fin aux hostilités entre les deux belligérants. Le maréchal Jean Lannes, à la tête d’une division très amoindrie, se trouve en mauvaise posture, mais résiste toujours.


Pendant ce temps

Les troupes doivent passer sur des ponts de plus en plus fragilisés ; le Danube est en crue, et le niveau n’a cessé de monter. En outre, les objets jetés par les Autrichiens dans le fort courant viennent percuter les assises des ouvrages en bois et occasionnent de nombreux dégâts qu’il faut réparer au prix de gros efforts.

Dans la nuit du 21 au 22, c’est le 2ème corps du maréchal Lannes qui traverse, puis la Garde et les cuirassiers de Raymond Gaspard de Bonardi de Saint-Sulpice et d’Étienne Marie Antoine Champion de Nansouty.

22 mai, Le 2ème  jour de la bataille

Les combats reprennent à l’aube du 22 mai. André Masséna assaille le village d’Aspern et refoule les troupes ennemies qui le tenaient. Dans le même temps, c’est Rosenberg qui attaque et se rend maître d’Essling. De son côté, Jean Lannes, qui supporte toujours héroïquement les assauts de l’ennemi, voit la division Saint-Hilaire venir lui prêter main-forte. Cet afflux de renfort lui permet de repousser les unités de Rosenberg. A Aspern, c’est le contraire qui se produit : André Masséna est obligé de plier sous la contre-attaque de Johann von Hiller et d’Heinrich-Johann de Bellegarde. Le village aura changé quatre fois de mains, mais les Français se sont rendus maîtres du cimetière.

C’est le moment que choisit Napoléon pour contre-attaquer, son armée étant désormais assez nombreuse pour se lancer en position de force dans la bataille. Il envoie sur le centre du dispositif ennemi le 2ème corps de Lannes, soutenu par la cavalerie de Jean-Baptiste Bessières. Plus tard, le 3ème corps, sous les ordres de Davout, devra soutenir la percée, aidé par l’artillerie. Le plan de l’Empereur semble, une fois de plus, se dérouler « à la lettre », et la victoire paraît à portée de main.

Louis-Nicolas_Davout

Louis-Nicolas_Davout

Mais un événement prévisible, redouté par les Français, interrompt net l’offensive. Les deux grands ponts qui avaient déjà cédé à maintes reprises et avaient été réparés aussitôt, viennent de se rompre, emportés par la multitude d’objets jetés à l’eau par les Autrichiens. Les barques remplies de pierres, les brûlots et autres radeaux incendiaires ont eu raison des frêles constructions en bois. L’armée de Napoléon se trouve désormais en fâcheuse posture, scindée en deux. Louis Nicolas Davout reste bloqué et ne peut plus franchir le fleuve avec son 3ème corps pour venir soutenir l’attaque. Deux jours de réparations sont nécessaires, et Napoléon comprend qu’il ne peut plus remporter la victoire.

L’ordre de repli est donné. Des combats acharnés, sous le bombardement de l’artillerie autrichienne, vont se poursuivre jusqu’à la tête de pont de la rive gauche. C’est à ce moment que le maréchal Jean Lannes est touché par un boulet qui lui brise la jambe ; il mourra des suites de ses blessures le 31 mai suivant. Sous la férule d’André Masséna la retraite s’effectue en bon ordre. Lorsque la nuit tombe, la plupart des blessés transportables, les chevaux puis le matériel ont refranchi le fleuve et se trouvent à l’abri sur l’île de Lobau. Vers les cinq heures du matin, Masséna est un des derniers à traverser. Un grand nombre de réchappés, rescapés de la bataille, demeureront coincés sur l’île, démunis et isolés.

L’épuisement des deux armées belligérantes met un terme aux combats. L’archiduc Charles se satisfait d’une demi-victoire. Il reste maître du terrain et ne pousse pas son avantage à se lancer à la poursuite de son ennemi, estimant ses troupes trop harassées pour continuer le combat.


Pertes

Pour les Français : environ 6000 morts, dont le maréchal Jean Lannes, trois généraux et 120 officiers ; 18 000 blessés, dont treize généraux et 616 officiers, et 2500 prisonniers dont quatorze officiers.

Pour les Autrichiens : environ 4500 morts, 16 500 blessés et environ un millier de prisonniers.


Conséquences

Que se serait-il passé si les ponts n’avaient pas cédé ? De toute évidence, Napoléon était alors en position de force, et s’apprêtait à remporter un nouveau succès. A l’époque était désignée victorieuse l’armée qui restait maître du terrain.  De nombreux historiens ont vu dans cette bataille la première défaite de l’Empereur Napoléon Bonaparte.

Pourtant, à l’issue de ces deux journées sanglantes, la situation sur le plan militaire n’a guère évolué. L’Autriche va cependant transformer ce demi-échec en victoire et l’annoncer comme étant le premier revers de Napoléon. Les réactions ne vont pas tarder en Europe. Un fort sentiment d’hostilité de la part des ennemis de Napoléon va se fédérer contre le mythe de l’invincibilité de la Grande Armée et de son Empereur.

Il faudra un mois pour reconstruire les ponts, et les 5 et 6 juillet aura lieu au même endroit la bataille décisive de Wagram, qui aboutira au traité de Schönbrunn et mettra un terme à la Cinquième Coalition.

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1 réponse

  1. 2 septembre 2015

    […] 20 au 22 mai a lieu la malheureuse bataille d’Essling. Napoléon, vaincu, doit céder le terrain à l’archiduc Charles d’Autriche. Les ponts sur le […]

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